𝟣𝟣. 𝒞𝒶𝓃𝒶𝓂𝒶


Les quatre jours qui nous séparaient de Canama se sont déroulés sans réel accroc. Nous avons majoritairement traversé de grandes plaines désertes, égayées çà et là par quelques fermes dont nous ne nous approchions pas. Il est toujours perturbant de parcourir ce genre de paysages qui pourraient presque laisser croire que la vie à Na'voah n'a pas changé au cours de ces derniers siècles.

Certes, les champs sont moins fertiles, la faune sauvage plus discrète et les villages plus épars, mais les routes ne sont pas jonchées de cadavres en tout genre comme elles le sont à Kema par exemple. Plus le temps passe et plus ce voyage me fait réaliser à quel point le vice a épargné l'île de Lem'ha. A part la bulle de compression qui a détruit la ville de Klan quelques années plus tôt, le royaume n'a pas subi de destruction massive ni d'épidémie mortelle. Je comprends qu'il est facile pour les élites de Ma'la de se pavoiser et de se complaire dans cette abondance qu'on ne leur a jamais retiré.

Si les rois des îles voisines sont au courant de leur richesse – et ils le sont sûrement –, il leur est sans doute difficile de ravaler cette jalousie qui doit pernicieusement les ronger. Combien d'entre eux rêvent de renverser le souverain de Lem'ha ? La mission dont est chargé L'Oméga est-elle d'enjeu géopolitique ? Lem'ha a beau être l'île la plus épargnée par le Vice, ses terres ne regorgent pas de toutes les ressources vitales à sa population et l'arrêt du commerce avec des royaumes comme celui de Beana'h sonnerait le glas de son existence. Si tel est l'enjeu de notre voyage, je ne donne pas cher de la peau de notre commanditaire lorsqu'il posera les pieds à De'moa !

— Groseilles ?

La voix de Naya manque de me faire sursauter et j'attrape avec plaisir la bourse remplie de petits fruits rouges qu'elle me tend. J'en enfourne une poignée dans ma bouche et savoure le jus acide qui dévale le long de ma gorge.

Assis sur les ruines d'une ancienne bergerie qui surplombe la plaine de Canama, nous observons cette dernière en silence, conscients que sa traversée va nous être difficile.

— Je peux m'y rendre seul, annonce soudainement L'Oméga en se tournant vers Ronh qui aiguise nerveusement sa hache.

— Ne dîtes pas de sottises, répond Naya en faisant fi de sa révérence habituelle, nous allons vous accompagner.

— N'est-ce pas trop dangereux pour vous ?

— Hassan et Kahn vous accompagnerons, élude mon amie en secouant sa chevelure brune. Lâa et moi serions trop vite repérées ; aucune femme ne s'approche de notre physique. Vous trois pourrez passer pour des mercenaires de Kema. L'essentiel, c'est que vous gardiez bien vos capes et que vous ne passiez pas par le centre-ville. Lâa, Ronh et moi vous attendrons à la lisière de l'Entre-Forêt et nous pourrons ensuite tracer jusqu'à Sten. Inutile d'être plus nombreux à nous aventurer dans les faubourgs.

L'Oméga ne proteste pas davantage et se contente de reporter son attention sur la ville qui s'étend sous nos pieds. Ces quatre jours en sa compagnie ne l'ont pas déridé : il reste froid et taciturne, refusant de se mêler plus que nécessaire aux activités quotidiennes de la horde. S'il est dur au mal et ne se plaint jamais, il est insensible à nos traits d'humour et semble constamment sur ses gardes. J'ignore si c'est de nous dont il se méfie ou des potentiels dangers qui rôdent autour du groupe, mais cette austérité permanente n'en fait pas un compagnon de route agréable.

— Il nous faut du blé, des légumes secs et un peu de vin, énumère Naya en se relevant. Du moins, si vous trouvez une âme assez charitable pour vous en vendre. Et soyons fou, pourquoi ne pas acheter de l'huile !

Des ricanements désabusés s'élèvent à la fin de sa phrase et Naya elle-même grimace, consciente du ridicule de ses mots.

— Est-ce une bonne idée que L'Oméga nous accompagne ? je m'enquiers, soupçonneux. Ne risque-t-on pas de le reconnaître ? De plus, ce masque est bien trop voyant pour ne pas attirer l'attention dans les faubourgs.

— D'où la cape, me coupe le concerné d'un ton intransigeant. Il est hors de question que je ne participe pas à ce ravitaillement, il s'agit tout de même d'une ville sous le commandement du roi et je veux voir de mes propres yeux l'état de son peuple. D'autant plus que si un malheur survient, vous serez ravis que je puisse venir vous secourir.

Peu convaincu, je fronce ostensiblement le nez et pince mes lèvres en une moue sceptique. Je n'ai cependant pas le temps d'exprimer mon mécontentement que L'Oméga se lève et déplie la longue cape qu'il avait sanglée sur les flancs de notre cheval.

— Nous y allons ?


***


Canama est une ville étroite, aux ruelles tortueuses et aux murs étonnamment hauts. Déjà dans les faubourgs règne une ambiance électrique, accentuée par la frénésie de la foule, les cris des enfants et les va-et-vient incessants des carrioles de marchands qui bloquent les carrefours et encombrent les rues.

Au milieu de ce capharnaüm s'élèvent les odeurs entêtantes provenant des tanneries et des boucheries dont les propriétaires ne sont pas acceptés dans le centre-ville à cause du malheur que procurerait le fait de manipuler des animaux morts. Devant certaines boutiques, les pavés sont maculés de sang et une affreuse odeur de viande crue empeste l'atmosphère. Quelques gamins décharnés s'accroupissent devant les flaques rougeâtres et les lapent en compagnie de chiens errants avant d'être chassés à coups de bâton par des employés furibonds. J'observe sans rien dire ces petites silhouettes difformes courir aussi vite que leurs maigres jambes le leur permettent, sachant déjà que la majorité d'entre elles n'atteindront pas la fin de l'année.

Enveloppé dans sa longue cape en laine noire, L'Oméga suit également du regard ces ombres des rues, et je ne peux m'empêcher de me demander ce qu'il ressent. Est-il conscient de la misère qui subsiste au sein de son royaume en dépit de l'abondance qui règne à Ma'la ? Se sent-il concerné par le sort de ces gamins faméliques ou ces derniers l'indiffèrent-ils complètement ? La façon dont le masque noir se rive sur certaines silhouettes ne me permet pas d'établir si c'est par simple curiosité ou profonde affliction.

Hassan ouvre la voie, drapé de sa cape en toile écrue. Son immense silhouette tranche avec les corps chétifs des habitants des faubourgs, mais sa prestance et la force sereine qui se dégage de lui le font passer pour un Chasseur de Viciés. Grâce ou à cause de cela, personne n'ose réellement s'attaquer à nous et la plupart des gens se contentent de nous suivre du regard, l'air méfiant.

Nous ne sommes pas souvent venus à Canama. Comme toutes les villes de Lem'ha, la présence d'élites fortunées rend compliquée l'intégration des groupes marginaux et je ne souhaite pas spécialement me faire battre à mort parce que j'aurais eu le malheur de croiser le regard d'un prince.

D'ailleurs, s'il y a bien un élément qui me conforte dans mon aversion pour ce lieu, c'est la présence omniprésente de temples et de statues à l'effigie de Yulah, divinité de l'ordre et de l'harmonie des genres. Si son existence n'est pas originellement censée impacter ma vie outre mesure, cela fait près de deux siècles que les bêtas ont repris son image pour justifier l'esclavagisme des alphas. L'argument avancé est le suivant : ces derniers étant à l'origine du chaos qui détruit Na'voah, leur mise en servitude n'est qu'une réponse logique pour tenter de rétablir l'harmonie du monde. Désormais, les rôles des alphas et des bêtas sont précisément définis et il est difficile pour les plus opprimés d'aspirer à autre chose qu'une vie de violence et de misère. De façon générale, évoluer dans une ville qui célèbre aveuglément Yulah est donc de très mauvais augure pour un alpha.

Une chance dans mon malheur, Hassan s'est rendu plusieurs fois à Canama en tant que Chasseur et il se repère donc facilement à travers les ruelles sinueuses, évitant consciencieusement les endroits qui pourraient nous mettre en danger. Souvent, il nous faut enjamber le corps d'un clébard en décomposition ou les jambes d'un mendiant agonisant pour pouvoir avancer. Je me méfie toujours de ces hommes tapis dans l'ombre qui semblent tenir compagnie à la mort ; il s'agit souvent d'une ruse pour endormir la méfiance des passants et pouvoir ensuite leur sauter dessus pour les dépouiller de tout ce qu'ils ont.

Je n'ai d'ailleurs que le temps de formuler cette pensée qu'une main jaillit de l'obscurité et s'agrippe à la cape de L'Oméga. Aussitôt, un corps squelettique apparaît devant nous et s'enroule autour de ses épaules. La lueur d'un poignard mal aiguisé se répercute sur le mur en face de moi et je ne peux retenir un soupir de lassitude.

Le mendiant se tourne pour nous faire face et sa gueule édentée me fait penser aux cratères qui jalonnaient les versants des montagnes de Ho'na.

— Vot' bourse ou l'plante 'ci et là !

En dépit de la lame plaquée contre sa gorge, L'Oméga ne bronche pas, comme s'il savait que ses jours n'étaient pas en danger. Les yeux fous de son agresseur roulent dans leurs orbites et passent frénétiquement de Hassan à moi.

— C'pas des gausses, peux lui trancher l'goulot bien vite ! menace-t-il en gesticulant dans tous les sens.

— Tu ferais mieux de reculer si tu tiens à ta misérable vie, rétorqué-je d'un air las.

— Vais l'planter ! Vais ouvrir es jaret en un jeu ! Vous pas...

Le mendiant n'a pas le temps de finir son charabia que la dague de Hassan fait sauter son vieux poignard et se plaque contre sa gorge. L'homme écarquille les yeux et se met à haleter tel un chien agonisant. Son cou décharné se creuse davantage sous sa respiration erratique et ses longues mèches grasses se collent à son visage comme autant de balafres disgracieuses.

— Je t'avais prévenu, lancé-je avec flegme.

Le mendiant s'agite et tente de s'échapper de la poigne de Hassan.

— 'Ttendez donc, 'ttendez donc, este cas n'voulait pas, n'allait pas vraiment l'couper l'goulot ! 'Llons donc missigneurs, n'êtes point des pedzouilles, laissez l'bon Félo !

Hassan et moi échangeons un regard perdu, incapables de comprendre un traître mot de ce jargon des rues.

— Épargne nous tes simagrées, grimacé-je. Ou je demande à mon ami de te couper la langue.

L'homme pâlit et rentre ses lèvres à l'intérieur de sa bouche comme s'il cherchait à les avaler. Alors que je m'apprête à faire signe à mon ami d'assommer le pauvre hère et de reprendre notre route, L'Oméga se rapproche de son agresseur et me coupe l'herbe sous le pied.

— Tu t'appelles Félo ? s'enquit-il calmement, comme s'il prenait des nouvelles d'un ancien ami.

— Si donc missigneur ! L'bon Félo qu'sa flûte plus très bonne donc es traîné où qui peut. Est qui doit manger este Félo, si donc ?

— Bien sûr, je comprends, répond L'Oméga sous nos regards interloqués. Mais fais attention à qui tu t'en prends. Tiens, voici pour ta peine.

A ces mots, il sort la broche en saphir qui retenait originellement sa cape mais qu'il a retirée ce matin pour ne pas attirer les regards sur nous, et la donne au mendiant. Ce dernier la fixe avec un tel ébahissement que ses iris se voilent de peur et de méfiance. Ses lèvres craquelées se tordent dans tous les sens et il secoue la tête de gauche à droite en signe de désapprobation.

— Non, non, pas bon, este tuf malheur, cte Félo s'tirera pas dans l'merdon encore une fois !

— Il n'en est pas question. Je veux simplement te donner cette pierre en échange d'un service.

— Vous êtes sûr ? interviens-je, sceptique. On ne peut pas faire confiance à ce genre de saleté, si vous lui tendez la main, il va vous la bouffer.

Le mendiant grommelle une litanie de mots incompréhensibles mais hoche étonnamment la tête pour approuver mes dires.

— Je sais ce que je fais, je vous remercie, me répond la voix impérieuse de L'Oméga.

Ce dernier reporte son attention sur les haillons qui s'agitent sous ses yeux.

— Si tu connais un meunier prêt à vendre du grain à des voyageurs, le saphir est à toi. Et tu seras libre de t'en aller.

Les yeux fous s'écarquillent davantage – si cela est seulement possible – et cette fois, ceux de Hassan et moi l'imitent. Cet idiot n'est pas réellement sérieux en disant cela, pas vrai ? Quel imbécile irait donner une pierre aussi précieuse à un homme qui était prêt à l'assassiner quelques minutes plus tôt ?

Le mendiant ne s'encombre pas de toutes ces élucubrations et hoche violemment la tête en signe d'assentiment. L'Oméga fait alors signe à Hassan de le relâcher et la charogne se précipite sans attendre vers le bout de la rue.

Ebahi par cette scène que je ne parviens pas à croire réelle, je le suis, incapable de déterminer si je n'aurais pas tout simplement dû lui foutre un coup de masse dans la gueule.

Pendant une dizaine de minutes, nous serpentons à travers des ruelles sombres dont le sol visqueux accroche les semelles et exhale des senteurs putrides qui se collent à mes parois nasales. Nous bifurquons sur une place minuscule, encombrée en grande partie par une forge noirâtre de laquelle s'échappent des étincelles orangées. Quelques badauds attendent devant et l'un d'eux tient un cheval au bout d'une longe. L'animal attire tous les regards, des plus curieux aux moins avenants, certains ne dissimulant même pas leur hostilité. Sûrement agacé par toutes ces attentions, le canasson piaffe et frappe régulièrement ses sabots contre les pavés. A la fois fier et inquiet, son propriétaire balaie la foule des yeux en bombant le torse, l'air de mettre au défi quiconque souhaiterait s'en prendre à sa bête.

Nous ne nous attardons pas et empruntons un passage derrière la forge, si étroit que je dois me mettre de profil pour pouvoir passer. Ma masse racle contre le mur tandis que je m'efforce de ne pas ralentir l'allure. Finalement, nous débouchons dans une arrière-cour où sont entassées des montagnes de sacs en jute et au milieu desquelles une colonie de rats a élu domicile. Ces derniers s'empressent de venir renifler nos bottes et je me fais un malin plaisir de leur balancer des coups de pied dans la gueule. Je garde un très mauvais souvenir de ces rongeurs qui grouillaient dans les rues de Coma'hl et ne rataient pas un moment pour planter leurs dents dans ma peau. Je les exècre.

— Este painier si donc va vous l'porter, l'est t'jours entendu pour porter à des mouvants ! Mais este Félo peut point v'nir, pas bien porté 'ci et là !

— Tu peux t'en aller, acquiesce L'Oméga en lui tendant le saphir rutilant. Merci pour ton aide.

Le mendiant ne se fait pas prier et attrape son cadeau d'un coup sec avant de disparaître derrière un renfoncement de mur. Hassan et moi le suivons du regard, sidérés, et je ne peux contenir plus longtemps ma colère.

— Vous êtes complètement fou, éructé-je en pointant un doigt accusateur vers la poitrine de L'Oméga. Qu'est-ce qui vous a pris de donner une telle pierre à une ordure pareille ? N'avez-vous pas songé au fait qu'elle aurait pu nous sauver si nous venons à manquer d'or ? Bordel, vous êtes soit idéaliste, soit complètement idiot.

— Je vous prierai de garder vos remarques pour vous, articule lentement le concerné d'une voix menaçante. Cet homme est un sujet de mon royaume et je ne permettrai pas qu'il vive dans une telle misère.

— Parce que vous croyez qu'il va profiter de votre pierre ? m'esclaffé-je méchamment. Il va se faire poignarder dès que les autres rats dans son genre auront remarqué qu'il a déniché un bon filon. On va lui trancher la gorge avant même qu'il n'ait eu le temps de bien voir votre saphir. Et si ce n'est pas le cas ? Vous pensez qu'il va l'utiliser pour investir dans un logement ? Il va se précipiter dans la première auberge du coin, se bourrer la gueule et hurler sur tous les toits qu'il possède une pierre précieuse. Et au mieux, on la lui volera en le malmenant un peu, au pire on le tuera pour ça. Bravo, votre générosité n'a d'égale que votre stupidité !

J'ai à peine le temps de finir ma phrase que mon cœur loupe un battement et un affreux frisson dévale la pente de mon dos. En une seconde, la certitude d'être en danger de mort met tous mes sens en alerte et comprime ma poitrine au point de me couper la respiration. Mes membres se mettent à trembler de façon incontrôlable et une vague d'angoisse retourne mon estomac. Terrifié, je porte une main à mon cœur et fais un pas en arrière tandis que mes genoux menacent de céder sous mon poids.

Alors que ma vision se trouble et que mes oreilles se mettent à siffler, je distingue l'imposante obsidienne noire s'approcher de moi et se stopper à seulement quelques centimètres de mon visage. Soudainement pris d'une colère sans nom, je tente d'agripper le manche de ma masse, mais le simple fait de soulever mon bras est une épreuve insurmontable.

— J'vais vous tuer, haleté-je en luttant contre cette force qui tente de m'écraser au sol. Bordel... j'vais vous tuer, vous et vos putains de phéromones ! Arrêtez ça de suite ou je vous jure que vous... le regretterez !

L'Oméga ne bronche pas et se contente de se rapprocher davantage, observant avec une délectation certaine mes genoux s'effondrer sur le sol. Ma respiration devient sifflante et j'ai le réflexe stupide de m'accrocher à sa jambe, tirant sur le pantalon en cuir rêche qui la recouvre.

L'Oméga se dégage d'un geste vif et laisse mes mains plonger dans l'une de ces flaques noirâtres qui parsèment le sol.

— Je crois vous avoir déjà dit de ne pas me manquer de respect, gronde-t-il d'une voix terrifiante. Ceci est mon dernier avertissement : si vous vous comportez encore une fois de la sorte, vous ne verrez jamais l'ombre de votre or.

Lourdement penché en avant et les ongles griffant furieusement la boue nauséabonde qui macule le fond de la flaque, je peine à relever le visage pour lui cracher ma réponse.

— Allez vous faire foutre.



NDA : Fiouu j'ai cru que je réussirais jamais à vous sortir ce chapitre ! Désolée, je suis pas mal occupée en ce moment donc j'ai pas trop de temps pour écrire et corriger.

Je vous laisse tout de même avec ce chapitre pour les fêtes, en espérant qu'il vous plaira.

Je continuerai à poster pendant les vacances, mais après Noël, histoire que j'aie le temps de digérer les montagnes de chocolats que je compte bien engloutir !

Bonnes fêtes à toustes en avance, profitez de vos familles, et pour celleux qui ne fêtent pas Noël, je vous envoie aussi tout mon amour. Prenez bien soin de vous ♥

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