-14 : DAS GEHT AB, Die Atzen

14 mois plus tôt

Niklas est perdu au milieu de la piste de danse alors qu'il saute en rythme sur Das geht ab du groupe Die Atzen depuis quelques minutes. Les lumières l'éblouissent. L'alcool lui fait bien trop tourner la tête. Son regard traine sur la foule à la recherche de ses coéquipiers. Il en aperçoit un dans un coin. Ses lèvres sont plaquées contre celles d'une grande brune. Il la détaille quelques instants. Il est bien forcé d'admettre qu'elle était magnifique. Sa tenue portée près de son corps mettait parfaitement en valeur ses formes.

Lorsqu'elle s'éloigne il l'observe encore un peu avant de finir par détourner le regard. Il n'a pas envie d'être pris sur le fait par son ami. Son maquillage est fort voyant, tout comme ses lèvres parfaitement rougies. Il grimace à cette vue. Il déteste le rouge à lèvres, encore plus quand il est aussi visible. Parce que même si ce n'est pas forcément le cas, il a alors toujours l'impression que la personne est surfaite.

Ici, on sait qui ils sont. Ils sont les joueurs de la ville, ceux qui gagnent bien plus que ce dont ils ont réellement besoin. Alors il doute. Il ne peut pas s'empêcher de disséquer chaque personne qui l'approche. Il s'est déjà fait avoir une fois et il compte bien ne plus jamais revivre l'amère expérience de se faire plaquer avec unique raison qu'on a trouvé mieux que lui. Il a ouvert son cœur et sa vie et il s'est fait broyé par celle qu'il a pourtant longtemps pensé à l'époque être la bonne. 

Il se reconcentre sur le rythme régulier des basses dans la chanson passant trop souvent à son goût en soirée et tranchant avec celles qui étaient diffusées quelques minutes plus tôt. Un de ses coéquipiers le rejoint l'entrainant dans sa danse peu glorieuse. Soudain, un liquide glacé se répand dans son dos, le figeant sur place.

— Oh merde.

La voix résonne derrière lui et il se retourne pour tomber face à une petite rousse qui l'observe avec effroi.

— Je suis tellement dés... Je me suis faite pousser et... Ohlala, mon jus de tomate sur un T-shirt blanc... C'est si difficile à... Ohlala... Qu'est-ce que je peux...

Devant lui, la jeune femme panique, baisse les yeux et entrecoupe ses phrases n'en terminant pas une seule.

— C'est qu'un T-shirt.

Il lui adresse un léger sourire, dans l'espoir de la calmer et elle lui rend. 

Ah Hannah t'es là, ça fait des minutes qu'on te cherche, on va rentrer.

Et elle disparait suite à ces mots, suivant les membres de son groupe venus la récupérer pour quitter les lieux. Le vêtement trempé, Niklas la regarde quitter le KDR avant qu'un bras posé sur son épaule le reconcentre sur ses propres amis et la nouvelle chanson en train d'être diffusée. Une qu'il ne connait pas mais qui parait réjouir les plus âgés présents à la vue des sourires venant se peindre sur leurs lèvres et à la façon qu'on celles-ci d'en reprendre doucement le texte.

14 jours plus tôt

— Va lui parler Grischa, ça fait des soirées entières que tu la bouffes du regard.

Le blond tourne ses yeux bleutés vers le défenseur qui lui parle. Il lui adresse un léger sourire désolé alors que dans le fond, l'air caractéristique d'une chanson du groupe internationalement connu Scorpions commence à s'élever et que les paroles de Still loving you faisant suite à celles de Wind of change, résonnant quelques secondes plus tôt, sont reprises en cœur par tous les présents dans le lieu. 

— Je sais pas ce que je pourrais lui dire.

— Qu'elle te plait, ce serait déjà un bon début.

— C'est pas comme ça qu'on entame ce genre de conversation.

— Et pourquoi pas ? Elle te plait, tu devrais lui dire.

— Mais je peux pas commencer comme ça. Je lui ai jamais parlé pour autre chose que commander un verre.

— Tu vois, ce sera pas la première fois que tu lui parleras !

Un rire éclate tandis qu'il fait rouler ostensiblement ses yeux clairs. Il finit par les relever vers la jolie blonde qui lui plait bien trop. C'est le moment précis qu'elle choisit pour tourner la tête dans leur direction.

Ses yeux bleutés croisent ceux vairons de la serveuse et ils s'y perdent pendant ce qu'il croit être de longues secondes. Il sent un sourire niais naitre sur son visage sans qu'il ne puisse le contenir. Elle lui adresse un sourire et un instant, il oublie que sourire à la clientèle fait partie de son métier et que c'est parce qu'elle est lumineuse et sourit perpétuellement qu'elle lui plait tant. À côté de lui, il peut entendre le rire que son ami n'arrive pas à retenir et il le déteste immédiatement.

Un client l'interpelle, elle détourne le regard et le charme s'évapore. Il cligne plusieurs des paupières, comme pour être certain que ce n'était pas un rêve. Mais non, leurs iris s'étaient bel et bien croisés.

— Foudroyé le type.

Il repousse son coéquipier dont le rire s'élève encore un peu plus. Au fond de lui, il sait qu'il a raison, cette fille lui plaisait bien trop pour qu'il ne tente pas sa chance même si elle était certainement vouée à l'échec.

14 h plus tôt

Janina se laisse tomber dans la salle réservée aux institutrices. Elle n'a commencé à travailler que depuis trois heures mais elle n'en peut déjà plus. Une épidémie de gastro semble avoir pris possession de sa classe de CE2 et elle n'a jamais dû faire face à une situation aussi chaotique que celle qu'elle vit depuis le matin. Cinq enfants sont déjà en attente de leurs parents et elle a l'impression que ça ne s'arrête pas un seul instant.

Alors en cette minute, elle est particulièrement contente de pouvoir juste boire un café au chaud et de ne pas être de surveillance de récréation. Normalement, elle n'avait pas de soucis à tenir la cour de récré, elle aimait même ça. Mais il fait particulièrement froid ce jour-là et elle est déjà épuisée par son début de journée. Elle ne rêve donc que de la boisson chaude qu'elle est en train de déguster.

Elle profite de cet instant de calme loin des enfants pour jeter un coup d'œil à son téléphone portable. Un sms d'un vieil ami attire immédiatement son attention au milieu des messages de publicité et des dizaines de notifications qu'elle voudrait toujours supprimer sans jamais prendre le temps de le faire et qui polluent son téléphone.

Salut Janina. J'espère que tu vas bien. Le KDR ferme ses portes ce soir. Je me disais qu'on pourrait y retourner une dernière fois, en souvenir de l'ancien temps. Benedikt et Paola ont déjà dit oui. Tiens-moi au courant, il y aura de quoi grignoter donc on pourrait manger là-bas et ensuite soirée. À ce soir j'espère ! Roman.

Son cœur se serre une seconde. Le Klub der Republik c'était son premier bar. Celui de ses premiers verres d'alcool à un âge où ils n'avaient pas encore le droit d'en boire. C'était aussi celui où qui elle avait refait le monde à quelques années de la chute du mur. C'était là que la révolte grondait, qu'elle devenait de plus en plus bruyante au fur et à mesure que les jours défilaient. C'était aussi là qu'elle était sortie après. C'était également là qu'elle avait finalement accepté la demande de Lukas de l'accompagner au cinéma.

Le début d'une brève et belle histoire d'amour. Sa première histoire d'amour. Lukas avait fini par partir à l'Ouest. Il voulait découvrir ce qui ressemblait à un Eldorado. On lui offrait une place dans une des meilleures universités d'Allemagne, une qui ouvrait la route aux postes dont il rêvait. Il était parti. Elle était restée à l'Est. Elle avait vu nombre de ses amis prendre la même route que Lukas. Certains étaient revenus par la suite. Mais pas tous.

Elle ne savait pas si elle regrettait son choix. Mais elle ne regrettait pas celui d'enseigner à de jeunes enfants.

Salut Roman. Je vais très bien et toi ? Tu peux compter sur moi pour la der. À ce soir. Janina.

Son cœur se serre quand elle se dit qu'un vestige de Berlin Est, un de plus, va disparaitre ce soir. Petit à petit, son pays avait disparu. Les équipes sportives dans lesquelles elle avait joué avaient perdu leurs noms et leurs couleurs. Celles qu'elle avait supportées avaient perdu leurs noms et leurs couleurs. La nourriture, les entreprises, les bâtiments. Objet par objet. Brique par brique. Pierre par pierre. Tout était démantelé pour que le passé fasse place à un futur plus glorieux. Tout était déchiqueté pour que les erreurs soient cachées dans des beaux bâtiments et marques modernes. Comme si un coup de peinture sur une façade pouvait suffire à effacer les horreurs. Comme si un nouveau nom pouvait faire oublier les instants de bonheur.

Dans la salle de pause, Verdammt ich liebe dich de Matthias Reim résonne. Une énième chanson d'une époque et d'un pays qu'elle n'a pas connu mais a pris le dessus sur le sien. Car alors que les chanteurs de l'Ouest continuent de passer à la radio, ce n'est pas le cas des groupes qui ont réchauffé ses soirées d'adolescence. Peut-être que les sujets traités ne sont pas suffisamment joyeux, qu'ils rappellent trop une époque révolue, une dont on ne voulait alors plus. Mais quand elle traine dans sa campagne, la même que celle où elle habitait jadis chez ses parents, Janina ne peut pas s'empêcher de se faire la même réflexion en boucle. Malgré tout le mal qu'il lui avait fait, son pays, celui de son adolescence, lui manque.

et voilà pour le contexte de base :) et les chansons du chap (la principale est en tête de chap si vous voulez l'écouter).

https://youtu.be/7pOr3dBFAeY

https://youtu.be/n4RjJKxsamQ

c'est pas le bon moment pour rappeler que scorpions est un groupe allemand et que wind of change fait complétement référence à la chute du mur de berlin et still loving you au mur ? si clairement. (wind of change a été élue chanson du siècle en allemagne et a été la plus vendue de tous les temps là-bas). « Love, only love can break down the wall someday. I will be there, I will be there/L'amour, seulement l'amour peut abattre le mur un jour. Je serai là, Je serai là. »

https://youtu.be/x6q0ciiqyG0

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