-13 : EISERN UNION, Nina Hagen
13 mois plus tôt
L'heure de la reprise va bientôt sonner et Niklas profite d'une de ses dernières soirées avant de retourner à l'entrainement. Comme toujours, il a quelques jours au moment des fêtes avant de partir en camp d'entrainement pour préparer la seconde partie de saison. Autant dire qu'ils en avaient bien besoin de leur bas de classement. La relégation leur pendait au bout du nez après plusieurs années à flirter avec.
Il s'est laissé convaincre par un coéquipier de se rendre au KDR. Ce bar n'est pas son préféré, mais dire qu'aucun ne l'est serait plus véridique. S'il n'y avait que lui, le défenseur passerait la soirée chez lui, installé confortablement dans un canapé à parler de la pluie, du beau temps et de comment ils ont passé leurs fêtes de fin d'année et vacances. Mais ses amis sont des fêtards et il ne peut donc pas couper à ce lieu. Il reste malgré tout heureux, au KDR, on peut normalement discuter à certains moments, la musique n'étant pas toujours trop forte en fonction des lieux. Et puis, l'ambiance y reste particulière.
Quand il est assis à une table, il ne peut s'empêcher de laisser son regard trainer sur les divers bibelots, objets, affiches et photos posés ou accrochés à différents endroits du lieu. Tous sont des vestiges d'une époque qu'il n'a pas connue et qui est pourtant importante dans l'histoire de son pays. Parfois, il tente de s'imaginer le goût que devaient avoir certains aliments qui ne paraissent pas grandioses. Les plus grands sportifs de l'ex-République Démocratique d'Allemagne sont placardés partout à l'arrière du comptoir, leurs signatures parfois plaquées sur les photos ou maillots.
Mais ce n'est pas l'unique raison pour laquelle il se sent mieux dans ce lieu que dans d'autres bars. Ici, la musique est toujours diffusée, une partie du lieu étant un dancefloor où se mélangent des personnes de plusieurs générations et où résonnent des musiques plus ou moins récentes. Mais bien loin des boites de nuit où il n'accompagne jamais ses coéquipiers ou amis, ici, le fait qu'il s'agisse d'un bar dansant rend l'atmosphère complétement différente, les gens s'y rendant pour y montrer parfois leur talent. Il se souvient avoir une fois participé à une soirée sur le thème du rock. Il s'était alors contenté d'observer les danseurs au niveau incroyable. Il regrette encore de ne pas avoir été présent pour celle sur le thème de l'Amérique du Sud. Le jour où pendant une heure des valses avaient été diffusées, il s'était laissé tenter, avec peu de succès.
Il finit par aller chercher une tournée tandis que ses amis se dirigent vers le flipper dans un coin du lieu. Quand Eisern Union de Nina Hagen retentit dans les enceintes, il pousse un soupir légèrement énervé. L'hymne du club adverse est repris en cœur par les présents dans les lieux et le joueur du Hertha Berlin ne se sent soudainement pas à sa place. Un rire résonne à sa droite. Lorsqu'il tourne la tête, un joueur du club rival l'observe, un sourire légèrement moqueur plaqué sur les lèvres. Il arque un sourcil et le visage s'adoucit.
— Faut pas venir ici si tu veux pas être embêter par l'hymne de l'Union, c'est le bar officiel.
Sa bouche s'entrouvre de surprise devant l'information qui vient de lui être donnée. À côté de lui, Grischa Prömel a un sourire malicieux et parait être dans son élément. Il reprend d'ailleurs en cœur les paroles qu'il connait parfaitement à les entendre à chaque match lui étirant la bouche de façon amusée. Mais le milieu de terrain ne s'éternise pas à son plus grand regret. Il se détourne de lui une fois sa boisson récupérée et disparait pour rejoindre une table où Niklas reconnait plusieurs joueurs du club monté en Bundesliga quelques années plus tôt après des décennies dans les catégories inférieures.
« Wer lässt sich nicht vom Westen kaufen? Eisern Union, Eisern Union ! »
Ses prunelles scannent la foule et il est déçu quand il se rend compte que chacun est bien en train d'hurler sur ce passage précis, avant de reprendre en cœur les paroles de la chanson écrite pour les rouges et blancs de Berlin. Ce qui ne l'avait jamais attiré le fait désormais. Les écharpes épinglées aux murs sont toutes aux couleurs du club de l'ancienne Allemagne de l'Est. Des photos de diverses époques mettent des footballeurs en avant et sur leurs maillots l'écarlate d'un beau rouge et une parfaite blancheur se mêlent. Les dernières sont celles des célébrations de la montée en Bundesliga fêtée par une marée humaine sur le terrain du Stadion an die alte Fösterei. S'il ne jouait pas pour ce club, il avait été heureux de le voir monter. La capitale allemande méritait son derby.
Il finit par rejoindre ses amis et leur tend leurs boissons alors que la chanson de l'icone du punk allemand n'en finit pas.
— Merci Nick.
Il prend plusieurs gorgées de sa bière avant de prendre place pour une partie de flipper à son tour. Contrairement à Lukas qui vient de jouer, il n'est pas très doué dans cette discipline. Il appartient à la catégorie de personnes plus douées avec leurs pieds qu'avec le reste de leurs corps.
— Ah, j'adore cette chanson !!! On y va !
Il se retrouve trainé sur le dancefloor sans avoir rien pu faire alors que Leb! de DJ Ötzi, le hit du moment s'élève dans le lieu à l'ambiance tamisée. Il se laisse prendre au jeu alors que ses amis sont excités et sautent partout. Il les rejoint bientôt. Pourtant, alors qu'il fait un mouvement vers l'arrière, son mollet heurte quelque chose. Il comprend qu'il doit s'agir d'un pied ou tibia d'un autre danseur. Avant qu'il ne puisse faire la moindre action, il se retrouve les fesses plaquées sur le sol. Il grogne alors qu'il ressent une douleur remonter le long de sa colonne vertébrale.
Des rires résonnent et il reconnait ceux des personnes qui l'accompagnent. Il les fusille du regard.
— Ça va ? Je suis vraiment désolée, je crois qu'on s'est emmêlé les pieds...
Un visage apparait devant lui alors qu'une jeune femme se penche dans sa direction. Elle lui parait familière. Il lui faut quelques secondes pour remettre la jeune femme ayant renversé son verre sur lui plusieurs semaines plus tôt. Ses lèvres recouvertes d'un très léger rouge à lèvres s'étirent lorsque leurs regards se croisent. Ses prunelles se mettent à pétiller d'une lueur amusée qu'il ne comprend pas sur le moment.
— Encore vous ?!
Un sourire gêné s'installe sur son visage. Avant qu'elle n'ouvre la bouche pour se confondre en excuses, il tend la main qui est saisie. Une tension se crée et bientôt il est debout devant la petite rouquine qui l'observe d'un air désolé.
— Je suis un peu maladroite... Je peux t'offrir un verre pour me faire pardonner ?
Il secoue la tête en se mettant à rire.
— Non c'est bon, j'ai mon verre qui est plein à notre table. Et je crois que c'est moi qui n'aie pas eu une trajectoire très claire ce soir.
Le rire qui s'élève en réponse est cristallin et il voit le visage se détendre. Alors qu'il la détaille, il se met à sourire en voyant ses bras et ses pieds qui ont des petits mouvements. Il a l'impression que ses membres sont animés par le rythme des basses qui continuent de résonner, mais qu'elle tente de les contrôler.
— Mais si tu veux, tu peux me proposer une danse.
Les prunelles verdâtres se mettent à briller à cette idée. Et quelques secondes plus tard, il partage un rock plus ou moins réussi avec la femme au sourire aussi éblouissant que ses cheveux sont flamboyants même si la musique ne s'y prête nullement.
en média, vous trouverez l'hymne de l'union berlin « Eisern Union » qui a été écrit par Nina Hagen. On reviendra sur cette personne plus tard dans l'histoire. l'union berlin est un club qui était situé à Berlin Est pendant la guerre froide & l'hymne y fait plusieurs fois référence. La phrase citée de leur hymne (écrit après la chute du mur) qui se traduit par "qui ne se laisse pas acheter par l'ouest ? eisern union..." est une des phrases clés de l'hymne et représente la situation que vivent les anciens habitants. Si vous allez à 3min de la vidéo, vous avez un enchainement de 4 questions auxquelles les supporters répondent toujours par 'eisern union' à l'exception de la dernière d'entre elles où ils posent la question, il s'agit de cette phrase.
à date, l'union berlin est l'unique club issu d'ancienne allemagne de l'est à évoluer en bundesliga. c'est le cas depuis la fin de saison 2018-2019 (et ils ont été très performants les 1ères années). (ils ne sont que 2/36 clubs à venir d'ex-ddr dans les 2 premières divisions - avec magdeburg en d2).
https://youtu.be/YGV-GJSi9tU
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