Chapitre 3

Kalia

Après peut-être dix minutes de marche, j'atteins enfin le portail principal de la ville. Une arche haute de sept mètre semble m'accueillir telle la bouche d'un monstre colossal qui a hâte de se repaître de ma chair. Les débris de sa lourde porte qui devait scellé son entrée et empêcher les intrusions gisent sur le sol, et de la façon qu'ils sont éparpillés, je vois bien que ce qui l'a ravagée a tenté d'entrer et non pas de sortir. Je ne peux pas m'empêcher de frissonner en me demandant si ce qui a eu raison d'une aussi robuste protection est encore dans les parages. J'espère qu'elle a soit quitté la ville, soit décidé de s'installer de l'autre côté de celle-ci.

Alors que je n'arrive pas à entièrement chasser mes craintes de mon esprit, je continue de m'avancer en observant la vaste cité. Le contraste est édifiant pour une fille née et élevée dans un petit village en pleine foret. Adieux les cabanes en bois, et bonjour les édifices colossaux en pierre qui me donne l'impression d'être minuscule.

Je fais mes premiers pas dans une large place encombrée de tant de choses qu'en faire la liste entière me prendrait des heures. Je préfère ne pas m'attarder sur les corps en partie dévorés, certains humanoïdes, d'autres monstrueux. Entre les bagages éventrés, les charrettes abandonnées et les pièces d'armures et les armes, des débris de bâtiments qui ont été ravagés jonchent cette entrée à la cité qui devait déborder de vie par le passé. Maintenant, cette place est un véritable cimetière qui me fait penser à ce qui est devenu au reste du monde avant de sombrer éternellement. Et d'ici peu, même ce trsite souvenir d'une époque plus glorieuse va disparaître...

Je secoue la tête et me force à passer à autre chose, n'oubliant pas les mises en garde de mon instructeur. Quand on s'aventure dans un nouvel endroit, il est important de rester aux aguets, surtout si on sait que le danger rode. Perdre mon temps à admirer le paysage pourrait me coûter la vie si je ne le fais pas avec minutie. Plutôt que de scruter les fresques murales et l'architecture qui m'est si étrangère, je devrais plutôt surveiller les fenêtres et les encadrements de porte. La lueur qui brille du château ne suffit pas à dissiper ces ombres qui pourraient masquer mille et un périls, n'importe quoi pourrait se cacher dans ces pénombres et s'en prendre à moi sans pitié.

Même si je sais que c'est risqué, je lève le regard, laissant une ouverture si grande dans ma garde que mon instructeur m'aurait hurlé dessus pendant des heures s'il me voyait. Mais comme s'il m'hypnotisait, le château qui trône au centre de la cité attire mon regard. Si grand qu'il dépasse de loin les bâtiments pourtant si immenses de la ville, le château m'écrase de sa présence, comme un rappel de la difficulté de la tâche qui m'attends. Je m'apprête à traverser des rues qui sont devenues le refuge de tant de menaces, et tout ça pour atteindre une personne qui n'est peut-être même plus...

Non, je ne peux pas penser comme ça... Il doit être là ! Sinon, pourquoi est-ce que je suis allée aussi loin ? Pour quelle raison est-ce que je me serais forcée à continuer alors que tout ce qui comptait à mes yeux a disparu ? Au final, qu'ils soit là ou pas n'est pas le plus important, je dois surtout m'assurer de ce qu'il lui ait arrivé. Si je découvre qu'il n'est plus, tant mieux. Dans le cas contraire...

Un grognement me ramène au moment présent. Mes mains se posent sur la garde de mes deux armes sur mes hanches et je scrute la direction de ce son qui n'augure rien de bon. D'une des rues, un loup me défit du regard, et je sais que je suis dans une mauvaise position. Tout en gardant ce premier animal dans mon champs de vision, je cherche la présence du reste de sa meute, car leur espèces ne se risqueraient pas à attaquer seul. D'ordinaire, ils ne devraient d'ailleurs pas attaquer les humanoïdes, surtout pas une demi-louve qui leur est si similaire, mais j'imagine qu'ils n'ont pas du manger à leur faim depuis un moment, alors la nature de leur proie doit bien peu leur importer.

Lentement, plus de loups apparaissent, sortant de maisons abandonnées et de rues pour me couper les issues. Je risque un regard vers la sortie de la ville et je ne suis pas étonnée d'en voir me bloquer ce passage aussi. Ce n'est pas bien grave vu qu'il n'y a pas nul part où m'échapper dans cette direction, mais ça prouve qu'ils veulent limiter mes options.

Et c'est bien pour ça que je sais que je ne dois en aucun cas m'engouffrer dans une ruelle qui semble désertée de créatures. Avec une telle organisation, laisser une unique solution pour m'enfuir est plus que suspect, le piège est grossier. Je ne sais pas si d'autres loups m'y attendent plus loin ou si la voie est condamnée, soit par un mur soit par des débris, mais il ne fait aucun doute que leur plan est de me pousser à passer par là. Pour survivre dans ce monde cruel, il ne faut jamais jouer le jeu de ses ennemis et les forcer à participer au sien.

Je repère une option à laquelle j'espère que mes adversaires n'ont pas pensé et je me rue vers un chariot renversé sur le côté. En me voyant passer à l'acte, les loups se précipitent sur moi, formant un filet en train de se resserrer sur moi, mais il y a une faille de taille dans leur plan, et je ne parle pas du large espace dans leur formation qui m'invite toujours à foncer vers une rue à l'apparence sûre.

Je saute sur le chariot qui grince de façon inquiétante et je bondit en soufflant du feu juste sous mes pieds pour me pousser plus loin dans les airs. Je ne prends pas le temps de vérifier les réactions de mes prédateurs qui doivent être surpris et j'attrape le rebord d'une fenêtre au premier étage. Je m hisse à l'intérieur et me redresse rapidement pour reprendre ma course. Je doute que mes poursuivants vont abandonner juste parce que j'ai eu l'intelligence de prendre de la hauteur, surtout quand de simples escaliers leur permettraient de me rejoindre.

Alors que j'entends des hurlement depuis l'entrée de fortune que j'ai empruntée, je me dépêche de parcourir la chambre délabrée où je me trouve et me précipite vers sa porte que j'enfonce d'un coup d'épaule. Je regarde autours de moi, apercevant les escaliers montant et descendant, des bruis de pas précipités et des grognements résonnant déjà depuis le second accès. Je m'empresse d'atteindre les marches avant que la voie me soit bloquer et je commence à monter. Je grimpe les étages sans ralentir ou vérifier ce qui se passe derrière moi, préférant vérifier où je mets les pieds pour ne pas me prendre un obstacle qui pourrait me faire tomber. Je ne sais pas de combien de mètres je distance mes prédateurs et je ne veux pas leur donner une chance de fermer la distance.

Je finis enfin par atteindre une porte entrouverte qui signe la fin de l'escalier et je la traverse sans hésitation. Je me retrouve dans un grenier surchargé de mobilier usé et d'objets divers, mais je n'ai pas le luxe de faire l'inventaire. Je ne perds même pas le temps d'essayer de barricader la porte parce que je vois ce que je cherchais. Je vois une fenêtre droit devant moi, éclairant légèrement la pièce de la lueur du château. Je m'y rue, apercevant à travers elle la façade d'un autre bâtiment plus grand encore. Je presse le pas et bondit à travers la fenêtre en générant une volute de flammes dans mon dos pour me propulser aussi loin que possible.

Je constate que la rue que je survole doit faire plus de quatre mètres de large, trop loin pour atteindre l a fenêtre en face de moi, mais mon élan suffit pour que j'atteigne de justesse celle en dessous, mes doigts s'agrippant de justesse au rebord de cette dernière. J'entends un hurlement vite suivi par le son d'un choc sourd accompagné d'os qui se brisent. J'imagine qu'un des loups a tenté de me rattraper sans réaliser ce que je m'apprêtait à faire...

Pour la seconde fois en moins de cinq minutes, je me hisse à travers une fenêtre et cette fois, je prends le temps de souffler, affalée sur le sol. À moins qu'ils apprennent à voler, les loups qui me poursuivent vont être obligés de redescendre les escaliers que nous venons d'emprunter pour ensuite trouver une entrée à ce bâtiment et un moyen de le monter. J'estime qu'il leur faudra au moins trois foi plus de temps que ce dont j'ai besoin pour me remettre de ce qui vient de se passer et repartir.

Décidément, passer par les rues est trop dangereux, je ferais mieux de passer par les toits. Non seulement ça m'évitera de me perdre en bas sans savoir par où aller, mais si je repère un quartier avec plus de ruelles que de rues, je pourrait franchir les espaces qui sépare les toits sans avoir à utiliser ma magie. Je préfère l'économiser pour des situations plus drastiques.

J'écarquille les yeux quand je sens une ombre planer sur moi, accompagnée du son de quelque chose qui se pose sur le borde de la fenêtre. Je lève vivement la tête pour voir le corps mince d'une harpie, ses deux longues ailes recroquevillées pour lui permettre de passer par l'étroite fenêtre. Ses yeux noirs globuleux au centre d'un visage fripé et hideux me fixent alors qu'elle ouvre la bouche pour dévoiler des dents acérées.

Je fais une roulade sur le côté quand elle tente de me tomber dessus et j'empoigne une de mes armes. Avec un mouvement que j'ai répété pendant des années, je dégaine ma lame dans un ample mouvement latéral, tranchant en deux la harpie avant qu'elle n'a le temps de se redresser. Des cris stridents attirent mon regard vers la fenêtre où je vois ses congénères voler et me fixer avec rage.

Bon, finalement, je vais éviter les toits, parce que je n'y trouverais aucun moyen de me cacher. Je suis bien limitée dans mes choix là...

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