Chapitre 19
Chapitre 19.
Au petit matin, lorsque Legolas s'éveilla, les draps à ses côtés étaient encore tièdes, mais personne ne se trouvait à ses côtés. Son instinct lui disait que quelque chose n'allait pas. Un autre jour, il n'aurait pas été inquiet de ne pas trouver Aragorn à son réveil, mais il avait la sensation que quelque chose était arrivé. Il se leva et, sourcils froncés, se dépêcha de s'habiller. Ses yeux bleus laissaient transparaître son inquiétude si bien que, en chemin, il croisa Gimli qui lui bloqua la route en pressentant un problème.
— Qu'y a-t-il, Legolas ? Quelque chose ne va pas ?
— C'est Aragorn, dit-il, je ne le trouve plus.
— Aragorn ? Je viens de le voir passé. Il avait l'air pressé. Ce bougre ne m'a même pas salué !
— Dans quelle direction est-il allé ?
Gimli lui désigna le bout du couloir.
— Legolas ! Que se passe-t-il ? Dis-moi quelque chose !
Comme Legolas courait déjà, Gimli se mit à trotter à sa suite.
— Mais arrête, bon sang ! Je n'ai pas d'aussi longues jambes !
Ils traversèrent tout le château à la course. Essoufflé, Gimli retrouva Legolas au bord de l'eau. L'elfe s'était arrêté brutalement.
— Aragorn ! hurlait-il, les mains en porte-voix, la voix déchirée.
En plissant les yeux, Gimli vit qu'une barque s'éloignait au loin. En suivant les eaux du fleuves, Aragorn parviendrait aux Havres gris à l'embouchure du fleuve Lhûn qui le conduiraient sur les eaux troubles du Belegaer jusqu'aux îles du Valinor.
— Il est parti..., murmura Gimli, peinant à y croire. Mais pourquoi ? Il aurait dû nous prévenir avant de partir comme ça sans même dire aurevoir !
Legolas tremblait.
— Il est parti rejoindre les cavernes de Mandos, dit-il, frappé de stupeur face à la réalisation même de ce projet. Il est devenu fou. Il n'en reviendra pas vivant.
— Et il ne nous a même pas laissé l'accompagner ! Pour quelles raisons se rend-t-il là-bas ?
— C'est à cause de moi...
Au même moment, Thranduil apparut derrière eux, alerté par le raffut dont les gardes l'avaient prévenu. Sentant sa présence, Legolas se tourna vers lui.
— C'est de votre faute ! s'exclama-t-il. Je suis persuadé que c'est vous qui lui avez suggéré cette folle idée ! Vous savez qu'il n'en reviendra pas. C'était ce que vous vouliez !
Le souverain elfique plissa les yeux pour observer la barque qui s'éloignait sur les eaux. Aragorn avait encore un long chemin à parcourir avant d'atterrir aux Havres Gris. Il lui faudrait longer les côtes pendant de nombreux jours, mais rien ne serait plus en mesurer de l'arrêter. Les eaux le portaient.
— Le roi Elessar est souverain de ses propres décisions, se contenta-t-il de répliquer d'un calme olympien, je n'ai fait que lui offrir une alternative, mais il est lui-même maître de ses choix. Désormais, je ne peux plus rien pour lui. Vous non plus. Son destin est entre les mains des Valar.
Thranduil riva son regard à l'horizon.
— Priez les dieux, rajouta-t-il sur un ton solennel, c'est tout ce que vous pouvez faire.
Puis, l'homme s'éloigna, sa longue robe traînant derrière lui.
— Que voulait-il dire ? interrogea Gimli. Quelle décision Aragorn a-t-il prise ? Il est temps que vous arrêtiez de me cacher des choses, lui et toi. Ne sommes-nous donc pas amis ?
— Je suis désolé, Gimli..., murmura Legolas, je vais tout te dire ce que t'a caché mon cœur.
Il lui raconta alors les visions qui l'avaient frappé dans les dernières semaines et les discussions qu'il avait eues avec Elrond, puis avec Thranduil. Il lui parla des sentiments qui habitaient son être, des rapprochements avec Aragorn, du collier qu'il lui avait offert la veille, puis il lui raconta les légendes associées aux Valar, la dernière résidence des elfes, et en quoi cela concernait leur ami.
— Alors... tu crois qu'Aragorn a pris la direction de Valinor sans nous prévenir dans l'espoir d'acquérir la vie éternelle ?
— Même si mon cœur ne veut pas le croire, c'est ce que me dit mon esprit. Ici, nul n'ignore qu'Aragorn descend de la lignée des Peredhil et que certains de ses ancêtres étaient des Peredhel, des semi-elfes. Cette ascendance devrait lui permettre de choisir tout comme Elrond, Elros, son frère, Arwen, Elladan et Elrohir l'ont fait avant lui. Aragorn est de la lignée d'Elros qui a choisi la mortalité des Hommes. Si Aragorn supplie les Valar, il y a une chance faible qu'ils lui accordent le même choix qu'Elros et Elrond, mais ils n'accordent pas ce privilège à la légère... Or, Aragorn est de descendance noble et il a accompli de grandes choses. Nous pouvons toujours espérer, mon ami, et prier les dieux pour lui, mais il ne nous faut pas oublier que les Hommes ne reviennent habituellement jamais des cavernes de Mandos... C'est le lieu des morts.
Gimli frissonna. Le récit que venait de lui faire Legolas avait de quoi donner la chaire de poule. Il avait peur de ne plus jamais revoir Aragorn. Il s'accrochait à l'espoir que lui avait donné son ami. Aragorn était un roi, il avait combattu bravement, avait de nombreux faits d'armes à son actif et il avait réunifié les territoires du Gondor et de l'Arnor. Il avait toutes les chances d'obtenir la grâce des Valar... non ?
— Je prierai, chuchota-t-il, j'espère que nous le reverrons en un seul morceau...
Il n'était pas dans la nature des nains d'adresser leurs prières aux dieux elfiques, mais il ferait une exception. À vrai dire, en Terres du milieu, le culte des dieux était en chute libre. Il n'y avait plus que les elfes qui continuaient de prier les Valar. Et l'Âge des elfes touchait à sa fin, tandis que celui des Hommes, mené par l'ascension au trône d'Aragorn, commençait.
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