Chapitre 11

Au passage, le lexique est mis à jour avec les nouvelles expressions au fur et à mesure.

Chapitre 11.

Puisque les elfes ne dormaient que quelques fois durant leur longue vie, ils avaient besoin de récupérer énormément d'énergie. Legolas n'avait pas fermé l'œil une seule fois depuis la bataille de Minas Tirith et leurs assauts contre le Mordor. C'était déjà depuis plusieurs mois – un battement de cils pour un elfe –.

Ainsi, Legolas demeura plongé dans un lourd sommeil une semaine durant. Puisque cet état léthargique durait aussi longtemps, Aragorn et Gimli comprirent mieux pourquoi les elfes ne dormaient que peu : il serait dangereux de dormir aussi longtemps tout en étant vulnérable en temps incertains ou en périodes de guerres. Cela confortait aussi Aragorn au sens où, de tous les endroits où trouver le sommeil, l'elfe avait choisi sa chambre : Legolas lui faisait assez confiance pour lui confier sa vie et Aragorn savait pouvoir lui confier la sienne. Ce ne serait pas une première fois.

Le roi du Gondor prit la responsabilité de son ami durant cette semaine. Il vint régulièrement dans la chambre pour changer les draps et les vêtements de Legolas. L'elfe était pudique de nature et, pour cette raison, Aragorn décida de s'en charger seul. Il essaya d'être le plus respectueux possible même si, parfois, son regard se baladait et glissait bien contre son gré. Comme tous les elfes, Legolas avait un beau corps. Sa peau était galbée et sa silhouette athlétique et svelte.

Après avoir rempli son devoir, toujours hanté par les paroles d'Elrond, Aragorn s'assoyait, le dos appuyé contre la tête de lit, et il lisait un livre. Il pouvait parfois s'agir de récit de voyages et d'épopées, de livres militaires ou encore de légendes et de mythes peuplant la Terre du milieu. Ces derniers jours, il chercha beaucoup à lire sur Beren et Lúthien et Idril et Tuor, les deux premières unions entre humains et elfes qui avaient donné naissance à la lignée des Peredhil dont il était un lointain descendant. Il apprit que c'était à la suite de l'intercession d'Eärendil auprès des Valar que Elrond, Elros et leurs descendants avaient obtenus le droit légitime de choisir entre la race des elfes et celle des humains.

Au bout du septième jour, les battements de cœur de Legolas s'accélérèrent et sa respiration prit un rythme plus soutenu. Tranquillement, il sortait de son « hibernation ». Aragorn demeura à son chevet jusqu'à ce qu'il ouvre les yeux. Il voulait être le premier que son ami verrait, même si Gimli les rejoindrait sans doute bien vite. Le nain avait passé la dernière semaine à se plaindre. Il ne comprenait pas la raison de leur venue à Fendeval et, maintenant que Legolas était endormi, encore moins. Cette citée elfique était bien loin des royaumes souterrains des nains. Gimli ne s'y sentirait probablement jamais vraiment à sa place.

— Legolas ? appela Aragorn en voyant les paupières de son ami tressauter.

L'elfe inspira longuement, puis il ouvrit les yeux, aveuglé par la lumière vive du soleil.

— Aragorn ? Je suis content que tu sois là. Combien de temps ai-je dormi ?

— Une semaine.

L'elfe releva la tête vers la fenêtre, puis il se massa les tempes.

— J'avais dormi moins la dernière fois. Ces dernières années ont vraiment dû être épuisantes.

— Je n'en doute pas. Nous avons affronté bien des dangers en si peu de temps. À quand remontait ton dernier sommeil ?

— À peut-être un siècle... ou deux.

— As-tu rêvé ?

— J'ai vu beaucoup de choses. Je dois absolument m'entretenir avec Elrond.

— Je vais lui faire parvenir que tu t'es réveillé.

— Inutile, il le sait déjà.

Au même moment, Gimli entra dans la chambre.

— Notre Belle au Bois Dormant s'est enfin réveillé ! s'exclama-t-il, moqueur. Enfin ! J'espérais que tu te réveillerais que l'on puisse quitter Fendeval au plus vite !

Legolas se tourna vers son vieil ami et lui sourit.

— Il nous reste encore des choses à accomplir et je dois parler à Elrond d'abord.

— Dans ce cas, fais vite ! bougonna Gimli qui n'en pouvait plus que d'être perché dans les hauteurs de Fendeval.

***

L'entretien entre Elrond et Legolas eut lieu un peu plus tard dans la journée après un copieux repas. En plusieurs points, il fut grandement similaire à celui qu'avait eu l'elfe à la chevelure noire avec Aragorn quelques jours auparavant.

— Thranduil n'appréciera pas, lui dit Elrond au moment même où il posa un pied dans la pièce.

— Il y a peu de choses que mon père apprécie.

— Ce n'est pas vrai... Thranduil aime son peuple, il aimait ta mère d'un amour profond et il t'aime, toi, mais il a vu disparaître beaucoup des choses qu'il aimait au fil des siècles... On lui a arraché ta mère, puis nombreux des siens – des nôtres – ont été décimés durant la Bataille des Cinq armées – tu y étais, tu as vu la désolation –, puis tu es parti. Alors ne sois pas si dur avec lui. Il a fait son devoir.

— Peut-être bien.

À l'époque, il n'avait pas été d'accord avec les décisions de son père, mais en regardant derrière... il percevait que si Thranduil avait décidé de rappeler ses troupes, c'était seulement pour protéger son peuple et limiter les morts.

— C'est lui qui t'a fait venir jusqu'à moi... jusqu'à Aragorn.

Il était vrai. Legolas s'en souvenait. Au moment de partir, son père lui avait dit d'aller vers le Nord, que là-bas, il rencontrerait un jeune homme promis à un grand destin. Quand il lui avait demandé son nom, Thranduil lui avait répondu que ce serait à lui de le découvrir. Aragorn avait porté tellement de noms... Estel, Aragorn, puis Elessar... Son père l'avait mené à Aragorn. S'imaginait-il déjà, alors, jusqu'où cela les mènerait ? Que penserait son père des visions qui hantaient à présent son esprit ?

— Savait-il tout ce que je m'apprête à vous raconter ?

— Je ne saurais dire... peut-être le pressentait-il seulement. Aragorn avait besoin de toi pour regagner son trône. Quant au reste...

— Mes yeux ont du mal à se détacher de lui. J'ignore ce qui m'arrive... Il me vient d'étranges considérations. Et je ressens des choses... des questions que je ne me suis jamais posé auparavant. Cela me trouble.

— C'est ainsi que devait être mes pensées avant que je n'épouse Celebrían. Et c'est aussi le genre de sentiments qui devaient habiter Thranduil lorsqu'il a rencontré Elerrian, ta mère.

Legolas prit une profonde inspiration.

— Vous croyez que...

Il avait lui-même du mal à formuler son idée tant celle-ci lui paraissait invraisemblable.

— Il est difficile, n'est-ce pas, que de concevoir ce qu'est que l'amour sans jamais l'avoir ressenti auparavant ? Même après des milliers d'années, les elfes sont démunis face à ces sentiments dévastateurs. Pourtant, il y a bien des signes avant-coureurs, mais nous semblons aveugles à ceux-ci jusqu'à ce que l'évidence nous frappe les yeux.

» J'ai dit à Aragorn que je ne pouvais pas le soutenir dans cette quête, mais que je ne voyais aucune raison de m'y opposer. J'ai été son tuteur, je l'ai élevé comme un de mes fils, lui apportant le même genre de considérations que pour Arwen, Elladan et Elrohir, mais je ne suis pas son père. Il est le roi du Gondor à présent et il est libre de choisir à qui il s'unira. Cependant, rien n'ira plus loin sans la bénédiction de Thranduil. Tu connais nos traditions. Si je ne vois aucune raison valable de me dresser contre cette union – puisqu'elle ne me concerne pas –, il en sera peut-être différent pour lui. Il ne vous reste plus qu'à chevaucher jusqu'en Lothlórien.

Après la fin de la guerre, Thranduil y avait repris ses droits suite au départ de Dame Galadriel pour l'Ouest, rejoindre le Valinor sur les terres d'Aman.

Legolas pinça les lèvres. Son père avait, autrefois, refusé une union entre lui et Tauriel, jugeant la jeune elfe d'une classe trop inférieure pour épouser son fils. Depuis, Thranduil avait changé – et il considérait Tauriel avec respect désormais – mais Legolas prédisait qu'Aragorn, un Edain (même de grande et légendaire ascendance) et un homme, ne serait pas à son goût... Ses relations avec son père avaient toujours été troubles...

Même Legolas était hésitant. Il n'était sûr de rien. La parole d'Elrond était sans appel et d'une grande logique, mais son esprit se refusait à percevoir ce que son aïeul voyait. Il ne voulait pas admettre qu'il ait pu faire naître de quelconques sentiments pour Aragorn, son vieil ami. Que dirait le roi du Gondor en apprenant une telle chose ? C'était insensée...

Il secoua la tête, puis sans mot dire, sous le regard bienveillant d'Elrond, il sortit de la pièce d'un pas rapide, encore plus troublé et confus qu'à son arrivée. À l'extérieur, disputant une partie de cartes, il trouva Gimli et Aragorn qui l'attendaient.

— Alors, qu'a dit notre grand Seigneur aux oreilles pointues et aux cheveux de corbeau ? se moqua Gimli avant de se faire écraser le pied par la botte du souverain qui souriait l'air de rien. Outch !

Legolas ne répondit pas tout de suite. Une tonne d'émotions inconnues s'entrechoquait en lui. Puis, son regard se posa sur Aragorn. Il soupira et durcit les traits de son visage, s'avouant vaincu.

— Nous partons pour la Lothlórien.

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