Chapitre 41
Une femme s'approcha plus près que les autres et se dirigea vers l'homme.
Elle devait avoir environ trente cinq ans. Ses cheveux bruns très sombres lui retombaient sur ses épaules osseuses. Elle portait un simple t-shirt noir un peu trop large pour elle, ce qui rajoutait du charme à son charisme envoûtant et naturel.
Les adolescents, qui il y a encore quelques secondes, voulaient se rebeller contre leurs agresseurs, s'étaient tus dès que la femme s'était avancée.
Leur premier réflexe fut de tendre l'oreille pour écouter ce qu'il se disait mais ils n'en eurent même pas besoin. La femme ne cacha pas ce qu'elle souhaitait dire et déclara simplement à l'homme:
- Notre fils s'est réveillé.
L'homme hocha la tête mais son regard se durcit aussitôt lorsque Théo ricana.
Willa tourna la tête vers son ami qui se trouvait dans la boîte après Abby avec des yeux exorbités. Il ne se retenait même pas de rire. Qu'est ce qu'il cherchait ? À les faire tuer ?
L'homme s'approcha de Théo et celui-ci ne cessa pas. Au contraire, il regarda l'homme dans les yeux en lui expliquant le pourquoi de sa moquerie.
- C'est juste que... Regardez les faits ! Vous êtes en train de nous - accessoirement, quatre adolescents sans défense - séquestrer dans des boîtes magiques. Vous nous faites flipper avec l'apparition de plein de vos petits esclaves - que vous avez dû super bien répétée d'ailleurs, c'était très bien réussi ! - et là, on ne sait pas d'où elle sort, mais une femme vient vous dire que votre fils s'est réveillé !
L'homme plissa les yeux, ne saisissant apparemment pas l'hilarité de la situation. Willa recula sur sa chaise, ne comprenant pas elle non plus le comportement provocateur de Théo.
- Vous, le gros dur ! Vous êtes papa ! C'est trop mignon... fit Théo en laissant traîner sa dernière syllabe comme s'il parlait à un enfant de quatre ans.
L'homme s'approcha d'avantage de Théo, tandis que Yohann laissa à son tour échapper un ricanement. L'homme lui lança un regard à vous glacer sur place alors que le sorcier plaçait déjà ses mains au dessus de sa tête d'un air innocent en reprenant son sérieux.
L'homme ne se laissa pas déstabiliser et fit un dernier pas pour se retrouver à la limite des barres de fer qui encadraient la chaise de Théo.
- Et ça te fait rire ?
Théo haussa les épaules avec insistance.
- Au premier coup d'oeil, on vous imagine pas trop papa-poule !
Willa plaqua sa paume contre son front dans un petit bruit sourd. Pourquoi il le provoquait comme ça ? Il cherchait vraiment la bagarre ou quoi ?
- J'ai un coeur, vous savez ? Les méchants des histoires de petites filles ont aussi une vie où ils sont plus gentils qu'ils n'y paraissent, déclara-t-il sans s'énerver.
Théo pouffa à nouveau en lui rétorquant:
- Vous essayez de vous en convaincre, sinon, pourquoi vous nous le diriez ?
L'homme évita tout simplement la question en continuant sa tirade:
- Mais comme tout bon vampire, je suis maître de mes émotions. Je peux laisser tomber cette carapace bienveillante pour vous montrer une personne que vous n'avez vraiment pas envie de voir.
- Apparemment, vous avez très envie de nous la montrer, répliqua Théo, qui décidément voulait tous les faire exécuter.
L'homme plissa les yeux, jusqu'à ce qu'ils ne deviennent que deux petites fentes d'où ne pourrait sortir qu'un éclair à coup sûr létal.
- As-tu peur de la mort, petit ?
Théo haussa les épaules en se levant. Il mit ses mains dans ses poches et s'approcha de l'homme.
- Précisez "peur".
L'homme se tourna et fit signe à une des ombres - qui n'avaient, d'ailleurs, toujours pas bougées - de s'approcher, ce qu'elle fit d'un pas lent. Pourquoi tout le monde se déplaçait lentement ici ?
- Je te laisse le champs libre sur celui là.
L'ombre, qui s'avéra être une femme d'une vingtaine de printemps, se dirigea vers Théo. Celui-ci fanfaronnait toujours et il s'adressa directement à la femme:
- Ravi de vous rencontrer ! Vous êtes...
- Sous des ordres, répondit elle simplement.
Elle effectua un tour de la cabine de Théo avant de retourner à sa place initiale. Elle fit plusieurs gestes précis de ses mains, le même genre de gestes qu'Abby pourrait faire, et une petite rafale souffla autour de Théo.
Ses cheveux se mirent à tournoyer autour de sa tête qui commença à afficher un air de regret. Il lança un regard interrogateur à Abby, sorcière du vent. Elle secoua la tête comme pour signifier que ce n'était pas elle.
La simple rafale se transforma soudain en vent violent qui fit reculer Théo sur sa chaise. Il trébucha dessus et au lieu de retomber assis, il s'étala par terre de ton son long. La femme continua ainsi et les trois autres adolescents se regardèrent d'un air effaré.
- Qu'est ce que vous lui faites ? questionna Abby, les deux mains posées dans le vide de sa vitre.
L'homme se frotta les mains d'un air satisfait et tourna son regard vers la sorcière.
- Je lui fais prendre l'air. Il est bien la Terre, non ?
Question inutile puisqu'il connaissait la réponse, sinon, pourquoi aurait-il fait souffler le vent précisément autour de Théo ?
Le sorcier commença à tousser, offrant simplement plus de place au vent pour rentrer dans son organisme. Il posa une main faible sur le sol pour se soutenir lui-même.
Yohann, Abby et Willa se regardèrent à peine quelques instants avant de reporter leur attention vers l'homme.
- Nous allons procéder dans l'ordre. Je me présente: je suis Marcus - pas besoin de connaître mon nom, je vous assure - et vous, vous êtes mon moyen de devenir plus puissant.
Yohann se releva et s'appuya contre sa "vitre".
- Vous ne voulez pas nous tuer ?
- Bien sûr que si ! rétorqua Marcus, des rires dans la voix. Ne sois pas si naïf !
Le nez de Yohann se retroussa à cause du ton et il recula jusqu'à se trouver à nouveau assis à sa chaise.
- On va simplement devoir opérer quelques sortilèges et autres maléfices pour que vos pouvoirs... me reviennent !
- Nos pouvoirs ?
Les adolescents étaient dans un brouillard total. Théo, Yohann et Abby avait été élevés dans l'optique qu'un jour, quelqu'un essaierait de les tuer pour empêcher la réalisation de la prophétie, et Willa avait vécu les trois derniers mois avec un rabâchement quotidien de la même vérité.
- Votre amie, Sacha, avait en sa possession quelques informations intéressantes qui pourront nous aider dans la réalisation de mon... Enfin, "notre" projet.
- Où est-elle ? s'écria aussitôt Abby.
- J'ai encore besoin d'elle.
- Ça ne répond pas à la question, rétorqua rudement Yohann.
Marcus souffla en regardant la femme avec qui il avait eu un fils.
- Les jeunes d'aujourd'hui... Beaucoup trop curieux à mon goût...
Cependant, l'homme se calma et répondit à Yohann:
- Elle est en vie, dans une salle pas très loin. Ça vous va ?
Yohann se leva en hochant la tête avant de continuer:
- Et où sont Alison et Jade ? Et Jean ? Et nos professeurs ?
Le visage de Marcus vira aussitôt au rouge lorsqu'il s'approcha rapidement de Yohann.
- Les deux filles sont rentrées. Je n'ai qu'une parole, contrairement à vous !
- On ne vous a jamais parlé ! Comment voudriez vous avoir notre parole sur quoique se soit ? s'écria Yohann.
- La lettre...
Marcus se déplaça aussi rapidement jusqu'à se retrouver juste en face de Willa. La sorcière eut un mouvement de recul qui fallit faire basculer la chaise sur laquelle est était assise.
- Je suis heureux qu'elle vous soit parvenu, d'ailleurs. La petite Lola va bien ?
Lola... Sa petite main en sang... Ses toussotements maladifs... Sa voix fragile... Sa tête fragile balotant sur le côté...
S'en était trop pour Willa, qui se leva de sa chaise pour affronter l'homme de face.
- Elle va aussi bien qu'elle le pourrait vu l'état dans lequel vous l'avez mise !
Marcus plaça innocemment ses deux mains au dessus de ses épaules.
- Son sort était bien entre vos mains ! Il fallait juste respecter les accords de la lettre ! Ce que vous n'avez pas totalement fait... Mais je vous voulais vous, et je ne suis pas pour autant adepte à la mort de dizaines de petits anges tels que ceux que vous enterrez dans votre cachette souterraine.
Un poids se déchargea du coeur de Willa, tandis qu'un autre le remplissait, plus lourd, principalement composé d'une haine insidieuse. Cet individu abject venait-il vraiment oser de dire que ça ne lui plaisait pas de rendre malade tous les enfants du LOG ? Alors que certains semblaient morts quand les cinq adolescents avaient quittés les sous-sols ?
- Nous avons respecté tout ce que vous nous avez dicté ! Et à ce que je sache, les enfants sont toujours mourants !
L'homme sourit largement.
- Justement Willa, vous ne savez pas tout. Et ils ne devraient plus tarder à se rétablir. Je ne suis pas un monstre à ce point là !
- Mais vous en êtes un quand même... marmonna presque pour elle Willa.
Le sourire de Marcus se figea sur son visage grossier pendant quelques secondes avant qu'il ne se relâche comme si de rien n'était.
- Je vous avais dit que vous pouviez prévenir la première fille Petrone...
- Encore heureuse ! Il était directement question de sa petite soeur ! l'interrompit la sorcière du feu.
- Mais vous l'avez prise avec vous, ce qui n'était clairement pas demandé, finit Marcus sans prendre conscience de l'interruption de l'adolescente.
Il s'éloigna de quelques pas tout en continuant à parler. Il se retrouva devant la "boîte" de Théo, qui était toujours au sol mais dont l'état n'empirait plus. À part quelques difficultés à se redresser, il semblait s'être habitué aux violentes rafales qui sévissaient tout autour de lui.
- Entre nous, je ne vous blâme pas de l'avoir emmené avec vous... Ça aurait été problématique de renvoyer la petite chasseuse seule...
Yohann, qui s'était finalement décidé à rester debout, et qui tournait sans but autour de sa chaise, s'adressa directement à Marcus pour lui demander, d'un ton plein d'espoir.
- Alison et Jade sont réellement déjà réparties ?
L'homme hocha la tête dans sa direction et l'adolescent poussa un profond soupir de soulagement.
- Mais revenons à nos affaires, déclara Marcus en tapotant dans ses mains. Il semblerait que, pour que vos pouvoirs soient au maximum de leurs capacités, il faudrait les éveiller grâce à vos opposés. L'élément qui vous est vulnérable est aussi ce qui vous rend plus fort.
Trois ombres se détachèrent à nouveau de la masse indistincte de corps que formaient tous les adultes réunis dans l'obscurité des coins de l'entrepôt.
- Madame Amadée ?! s'écria Abby en observant la femme qui se dirigeait face à elle.
Elle devait avoir la trentaine. De courtes boucles brunes lui couraient autour de la tête et sa stature droite et légèrement sévère témoignait d'une formation artistique quelconque.
- Qu'est ce que vous faites là ?! demanda Yohann, inquiet pour sa soeur plus que pour lui même.
- Je suis enfin là où j'aurais dû être ses dernières années.
Sa voix mélodieuse fit l'effet d'un coup apparent pour Yohann et Abby. Même Théo, qui pourtant n'était déjà pas au top, semblait encore plus abattu.
Willa ne comprenait pas vraiment la situation. Pourtant, ce nom lui disait quelque chose... "Madame Amadée" ? Mais oui ! C'était la professeur de musique disparue suite à l'attaque de l'Ombre Noire !
Soudain, sans qu'elle ne puisse plus faire un geste, Willa se retrouva aspergée par une eau gelée venant littéralement de nul part. Elle lança un regard paniqué autour d'elle et vit un homme se trouvant face à elle, concentré, les yeux fermés, en train de faire le même genre de gestes ordonnés que la femme opérait depuis le début devant Théo.
Madame Amadée et l'homme qui se trouvait face à Yohann immitaient les deux autres.
Alors que des vagues entières balayaient le visage de Willa à rythme irrégulier, lui laissant à peine le temps de respirer entre deux, des sortes de lianes articulées s'enroulaient lentement autour des jambes et des bras de Yohann, le paralysant totalement.
Abby subissait quant à elle des assauts enflammés. Les parois de sa cage, tantôt invisibles, ne l'étaient plus, tant la température qu'elle subissait faisait noircir la surface inconnue.
Une nouvelle vague vint cogner Willa sur la tempe, l'assomant à moitié. Elle s'écroula sur le sol bétonné qui s'étendait sous elle avant de lever un regard implorant à l'homme qui continuait son travail face à elle. Sa vision glissa lentement jusqu'à Marcus. L'homme s'était reculé de quelques pas, jusqu'à se retrouver à la hauteur de la mère de son fils.
Les nombreuses ombres qui les entouraient quelques instants plus tôt se retiraient enfin, laissant les quatres adolescents, accompagnés de leur tortionnaire, à la merci totale de Marcus.
- Vous êtes toxiques les uns pour les autres, et pourtant, tellement complémentaires... chuchota l'homme en regardant le spectacle qui s'offrait à ses yeux.
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