Chapitre 3
Willa attendit donc que Mme Petrone se présente à elle. Elle se mordillait convulsivement la lèvre, de peur d'être rejetée... Elle ne se sentait pas de faire le chemin du retour, maintenant que la lumière réconfortante du jour avait laissé la place à une terrifiante obscurité.
Elle entendit enfin des bruits de pas à l'intérieur de la maison. Puis elle distingua une silhouette surgir, du coin de l'entrée, si vite qu'elle ne vit pas tout de suite qui elle était.
La personne en question vint se jeter dans ses bras. Willa étouffa un cri de surprise et reconnue enfin les cheveux blonds qui s'étendaient devant ses yeux. C'était Alison ! Tous ses doutes disparurent d'un coup et, en déposant Jade par terre, elle ensserra sa meilleure amie encore plus fort. Les deux adolescentes fondirent en larmes, tant elles attendaient avec impatience leurs retrouvailles.
Willa se rendit compte que le fait d'avoir ignoré Alison depuis deux semaines lui avait fait bien plus de mal que de bien.
Elles restèrent ainsi, dans les bras l'une de l'autre, sans parler, le temps de quelques secondes. Elles avaient un nombre incalculables de câlins à rattraper !
Puis Alison attrapa son amie par les épaules et se détacha d'elle. Elle souriait. Mais pas un sourire heureux... Plutôt un sourire triste, mélancolique, antipathique... et qui en disait long sur ce que pensait la jeune fille. C'est à dire à peu près la même chose que ce que pensaient la plupart des personnes qu'elle avait croisées depuis deux semaines : "Je suis désolé..."
Les yeux pleins de larmes d'Alison s'accordaient à merveille avec la mine affligée qu'elle affichait. Mais Willa, sentant que sa meilleure amie allait prononcer ces mots, la devança.
- Non, s'il te plaît Alison, ne le dit pas...
- D'accord... comme tu voudras...
Elle avait employé un ton plus qu'attristé. Soudain, son visage changea du tout au tout. Un petit sourire complice fit se remonter ses lèvres et une lueur malicieuse s'invita dans ses yeux. Elle reprit d'un ton plus enjoué.
- D'accord, comme tu voudras... mais laisse moi au moins t'engueuler ! Qu'est ce qui t'as pris de me laisser sans nouvelle depuis deux semaines !?
Elle ponctua sa question par un petit coup de poing sur l'épaule de Willa. C'était un petit geste qu'elles avaient l'habitude de faire pour faire comprendre à l'autre que ce qu'elles disaient était à prendre au second degrés. Willa sourit, contente de savoir que son amie ne lui en tenait pas rigueur.
- Pourquoi vous pleurez... c'est triste...
Une petite voix aigüe c'était élevée à côté des jeunes adolescentes.
Jade, toujours debout à côté d'elles, pleurait à chaudes larmes. Son visage était ruisselant de gouttes salées.
Les pleurs sont contagieux. Au moins autant que les rires. Surtout à 5 ans.
Alison prit donc sa petite sœur dans ses bras et lui essuya les joues d'une main d'experte.
- Mais non ma chérie... on ne pleurt pas parce qu'on est triste, on pleurt parce qu'on est très contente de se revoir. Tu comprends ?
Elle affichait un sourire qui aurait réconforté un mort-vivant. La petite fille sourit à son tour, renifla un bon coup et répondit à sa sœur :
- Non... ça à l'air compliqué...
- Mais non pas du tout ! Tu verras plus tard, tu vas pleurer pour pleins d'autres raisons que la tristesse... mais ne t'inquiète pas, tu as tout le temps pour comprendre !
Et Alison embrassa Jade sur le front, pour clore la discussion.
Les filles rentrèrent finalement chez Alison. Sa mère n'était toujours pas venue accueillir Willa... étrange... sauf si c'était pour leur laisser le temps pour leurs retrouvailles.
Mais bon, ce n'était pas important. Sans demander d'explications à sa meilleure amie, elle ferma la porte après l'avoir invitée à rentrer. Elle monta les escaliers qui menaient à l'étage pour coucher sa petite sœur qui, après sa crise de larmes, était plus fatiguée que jamais... il n'était pas très tard mais, à cet âge là, quand on veut dormir, on dort.
Willa était restée dans l'entrée, attendant patiemment l'arrivée d'une quelconque forme d'autorité parentale. Mais personne ne se présenta. Alors elle attendit Alison en se déchaussant. Elle déposa son sac près de ses chaussures et vérifia son téléphone : aucun apppel manqué, aucun message de son père...
Alison vint enfin la rejoindre et c'est côtes à côtes qu'elles arrivèrent dans la cuisine.
Elles y découvrirent une Mme Petrone allongée sur le sol, un couteau posé près de son corps.
Les deux jeunes filles eurent d'abord la réaction que tout humain digne de ce nom devait avoir : courir.
Puis après un temps de paralysie, elles se décidèrent à peu près en même temps à aller voir la mère d'Alison.
L'adolescente avait les yeux rivés sur sa mère et avançait à petits pas, redoutant le pire. Willa la soutenait du mieux qu'elle le pouvait, sans pour autant pouvoir avancer plus vite que son amie.
Une fois que l'hôte se rendit compte que la poitrine de sa mère se soulevait à un rythme presque régulier, elle courut vers elle et la prit dans ses bras.
Aucune trace de sang, rien de suspect ne s'étalait à côté de Mme Petrone.
Willa s'approcha alors d'avantage et tapota doucement les joues de la femme, pour essayer de la réveiller. Ses yeux s'entrouvrir alors et soudain, se rendant compte de la situation dans laquelle elle se trouvait, la mère se redressa d'un coup.
- Que... que m'est-il arrivée ?
Sa voix hésitante témoigait de son état : elle paraissait perdue.
- Je crois que tu t'es évanouie maman...
- Évanouie ? Moi ? Mais n'importe quoi !
Doucement, elle essaya de se remettre sur pieds.
- Heu... je ne pense pas que se soit très judicieux de se relever maintenant madame...
Mais la femme ne l'écouta pas et se redressa entièrement. Elle se glissa une main sur le visage.
- Pourquoi serais tu tombée si tu ne t'étais pas évanouie ?
- Bon d'accord, peut être... mais je ne m'en souviens pas... c'est étrange...
- Ho attendez ! Je crois que vous vous êtes coupée le doigt en laissant tomber le couteau...
En effet, un petit filet de sang s'étendait tout le long du pouce de la femme, jusqu'à son poignet. Willa, qui avait remarquée la coupure, attrapa la main de la mère de sa meilleure amie pour examiner la blessure de plus près. Bien que superficielle, elle saignait beaucoup... fait étrange puisqu'elle ne semblait pas très profonde... le sang qui s'échappait des veines coulait à une vitesse anormalement élevée, comme s'il avait été drainé... Elle détacha les yeux de la main de Mme Petrone et la regarda. La femme la fixa à son tour et son visage trahit son étonnement.
- Willa ? Mais qu'est ce que tu fais là ? Quand es-tu arrivée ?
Willa, surprise par la question, fronça les sourcils. C'était pourtant bien sa voix qu'elle avait entendue lui dire de ne pas bouger de l'entrée...
- Vous ne vous en souvenez pas ? Vous m'avez pourtant dit d'attendre dans l'entrée que vous arriviez... Puis Alison m'a sauté dans les bras et... peu importe. Ça doit être le choc.
Puis, s'adressant à son amie :
- Reste avec ta mère et va l'assoir. Je vais chercher des pansements. Ils sont toujours dans le placard au dessus des toilettes ?
- Heu oui sûrement...
Son visage déboussolé trahissait l'inquiétude qu'elle éprouvait pour sa mère.
Willa partit à la recherche de désinfectant et d'anticoagulant, qu'elle trouva finalement dans la salle de bain. Puis, elle attrapa des pansements et retourna au près de la blessée. La plaie ne s'était toujours pas arrêtée de saigner et malgré le nombre de feuille de sopalin que la femme pressait sur son pouce enquilosé, elle s'était tachée le pantalon.
Il y avait quelque chose d'anormal dans cet accident et Willa ne savait pas encore quoi. Mais en croisant le regard de son amie, elle comprit qu'elles avaient une fois de plus la même idée dans la tête : découvrir ce qui s'était passé ce soir chez Alison.
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