Chapitre 3 : Un invité surprise #3
Milly
– Ton ami viendra bientôt ? le questionné-je, ne voulant plus me noyer dans mon passé peu réjouissant.
– Ouais, il viendra dans quelques minutes normalement, répond-il en fouillant dans ses poches arrière de jean. Attends, où j'ai mis mon téléphone ?
Sa recherche de son précieux ne m'atteint pas, je suis trop obnubilée par ma propre angoisse qui monte au centuple sachant que l'invité arrivera sous peu.
– T'es sûr que c'est une bonne idée de l'inviter ici ? On pourrait décaler et le voir dans un café ?
– Mais c'est quoi ton problème à la fin ? claque-t-il d'un ton sec, immobile. T'es tendue depuis hier. Tu penses qu'il n'est pas assez bien pour venir ici ?
– Non, c'est juste que...
– Had a le droit de venir où il veut, quand il veut. Il a gagné ma confiance, c'est un vrai pote, et ce n'est pas toi qui me feras douter ou changer d'avis.
Je ferme ma bouche et regarde ailleurs, incapable d'affronter davantage son regard aiguisé. Je ne voulais pas lui créer une incertitude ou quoique que ce soit de similaire, j'ai juste besoin de temps pour digérer l'information et me faire à l'idée qu'un être interespèce – que l'on m'a appris à craindre – va entrer chez moi.
Ça fait moins de 24 h que je suis au courant, je suis peut-être large d'esprit mais il me faut un temps d'adaptation tout de même !
Mais je ne dis rien. J'avale cette boule dans la gorge, fixe un point invisible sur la moquette et attends que sa mauvaise humeur se dissipe. Après tout, c'est la meilleure solution que j'ai trouvée afin d'éviter une autre série de cris et de larmes. Deux jours se sont passés sans heurt et c'est très bien pour mes nerfs fragiles. À part depuis la nouvelle d'hier soir, mais c'est un autre sujet.
Jo me quitte et s'en va près du bureau.
– T'as tout préparé ? me demande-t-il comme si de rien n'était, tout en déplaçant des affaires posées sur le meuble.
– Oui, tout est prêt, dis-je d'une voix blanche en observant le foutoir qu'il commence à faire et que je venais de tout juste de mettre en ordre.
– T'as tout vérifié ? T'es vraiment sûre ?
Il ne me jette pas un seul regard, trop absorbé par sa recherche.
– Oui, oui, réponds-je avec lassitude.
Ça aurait été plus simple s'il m'avait aidé, surtout que la plupart des affaires qui traînaient étaient les siennes, mais il était trop occupé à se pomponner. Et si c'est pour avoir la tronche toute la journée parce qu'il a osé me porter secours dans les tâches ménagères, non merci.
– Y'a intérêt, il faut que tout soit parfait. Merde, tu n'aurais pas vu mon...
Une sonnerie de téléphone le coupe et provient de la salle de bain. Tout en se maudissant, il retourne à vive allure dans la salle de bain pour en ressortir aussitôt, le portable à la main. Après quelques pas, il se stoppe net, son esprit accaparé par ce qu'il lit sur l'écran et vu son froncement de sourcils marqué, cela ne lui plaît pas du tout.
Je suis préoccupée par son silence et guère rassurée pour la suite.
– Merde, y'a un imprévu, me dit-il enfin, le nez toujours dans son téléphone.
– C'est-à-dire ?
– Had est devant l'immeuble mais y'a son frère avec lui.
– Son frère ? m'exclamé-je, confuse, tout en me levant du fauteuil. Tu ne m'avais jamais dit qu'il avait un frère !
– Je ne savais pas non plus j'te signale, je viens de l'apprendre ! rétorque-t-il sèchement en relevant sa tête pour me fixer.
Sa mâchoire se crispe. Il n'est pas ravi et un tic nerveux parcourt son visage, faisant cligner dangereusement sa paupière gauche. Je remarque enfin que depuis le début, Jo était préoccupé, mais ne me révélait rien afin de garder les apparats que tout se passerait bien. Je ne sais pas s'il a fait ça pour moi ou pour lui-même, mais à cet instant, le masque est tombé et il est inutile de faire des faux-semblants.
Il met son téléphone dans sa poche arrière de jean, puis est sur le point de passer sa main dans les cheveux avant de se raviser. Il ne faut surtout pas bousiller sa coiffure qu'il a eu tant de mal à dompter. À la place, il se frotte les mains tout en regardant différents points aléatoires dans le studio, comme si la solution à ses problèmes se trouve quelque part sous notre nez, tout en répétant fébrilement :
– Merde, merde, merde...
Son comportement ne me calme aucunement et je sens mon cœur s'affoler. J'ai déjà du mal à en accueillir un, alors deux sous mon toit, je pense que je ne vais pas tenir. Je me mordille la lèvre inférieure – mon propre tic nerveux –, tout en observant mon copain pas sûr de lui.
Ce dernier cesse de chercher un miracle, met ses mains dans les poches, ferme les yeux puis souffle un bon coup pour se détendre. Cela semble fonctionner, son visage et ses épaules sont moins crispés. J'aimerais être comme lui et pouvoir me relaxer en une simple respiration. Ses paupières s'ouvrent et ses yeux marron me fixent avec détermination :
– Bon, pas de panique, tout va bien se passer. Qu'il soit seul ou pas ne changera rien.
– Tu crois ? soufflé-je, pas sûre qu'il ait raison sur ce coup-là.
– Mais oui, bien sûr ! s'obstine-t-il, en perdant patience face à mon pessimisme. Qu'est-ce qui pourrait mal se passer ?
– J'ai pas mal de scénarios en tête, mais aucun ne va te plaire...
– Ouais, bah si c'est pour entendre des conneries, je préfère ne rien savoir. Allez, je vais les chercher !
Il se dirige à grande enjambée vers la porte d'entrée, bien décidé à ce que tout se passerait bien coûte que coûte. Il pose sa main sur la poignée, l'ouvre avec entrain et... Alors qu'il semblait vouloir partir aussitôt, il se stoppe net et se tourne vivement vers moi. Je n'ai pas pu m'empêcher de faire un petit soubresaut en rencontrant son regard perçant, dénué d'amour mais empli de fermeté. Il pointe un doigt dans ma direction et dit, en articulant chaque mot :
– Et tout doit être parfait !
Il claque la porte derrière lui, et j'entends ses pas lourds descendre les escaliers.
Sa dernière phrase ne me rassure pas le moins du monde et j'ai une très mauvaise impression que tout repose sur moi désormais.
Mais qu'est-ce que j'ai fait pour être dans une situation pareille ?
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