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Je m'éloigne presque automatiquement alors qu'Amaury appose l'étrange boite blanche sur son emplacement. L'objet s'enfonce jusqu'à se faire avaler entièrement et une lumière vive émane subitement du pilier. Aveuglée par cet éclat éblouissant, je détourne le regard tandis que la silhouette du garçon se fait engloutir.
Quand la luminosité de la pièce revient à la normale, deux secondes plus tard, Amaury est toujours là. Il n'a pas bougé mais le cube, lui, a disparu.
— Amor !
Inquiète, j'accours dans sa direction mais freine immédiatement quand il se tourne vers moi.
Le sourire qu'il affiche est radieux et les traits de son visage semblent confiants et apaisés. Sa chevelure aux reflets mielleux virevolte légèrement au-dessus de ses épaules, l'air plus soyeuse que jamais. Les quelques bleus et griffures qui parsemaient sa peau ont disparus.
— Ça va ? je demande intriguée.
— En pleine forme ! s'exclame-t-il avec une joie non dissimulée.
C'est peut-être moi qui hallucine mais j'ai l'impression que ses muscles ont un peu gonflé. Pas qu'il n'en avait pas avant ou que cela me déplaise. Mais, au vu de sa nature svelte, ça se voit tout de suite quand il prend en volume et c'est tout de même un peu étrange.
Malheureusement, je n'ai pas le temps de lui poser plus de questions. Un bruit de mécanisme se met à vrombir juste en face d'Amaury et nous reculons d'un même pas.
Au centre de la pièce, la structure qui a avalé le cube se met à vibrer avant de s'ouvrir tel un vulgaire placard. Son contenu est cependant bien plus intéressant.
Pain, bananes, clémentines, chocolat, barres de céréales mais aussi désinfectant, bandages, pansements : un véritable kit de survie s'étend devant nos yeux. Je n'arrive pas à y croire. Notre kidnappeur sadique aurait-il des états d'âme ?
— Dieu merci, s'exclame Amaury. Je crève de faim !
Maintenant qu'il le dit, je ne dirais pas non à un petit casse-croûte. Mes yeux s'écarquillent déjà d'émerveillement à la pensée d'une tablette de chocolat dans ma bouche. J'entends presque la voix de Prunelle en réclamer aussi. Malheureusement, ma sœur ne viendra plus jamais se disputer pour avoir le dernier morceau de chocolat ou la dernière part du gâteau de papa.
Encore une fois, Claudia la rabat-joie s'interpose.
— Qui nous dit que cette nourriture n'est pas empoisonnée ?
J'observe les mets avec intérêt. C'est vrai que, jusqu'à présent, chaque pièce comportait un piège ou une épreuve. Pourquoi celle-ci dérogerait à la règle ?
— Je suis prêt à prendre le risque, déclare mon petit ami en s'emparant d'une baguette de pain.
D'un geste décidé, il en arrache un morceau et l'engloutit avec appétit. Pendant l'espace d'un instant, tous les yeux sont figés sur lui. Le rouquin avale l'aliment puis retient sa respiration.
Tout à coup, je vois avec horreur sa main se porter à son cou et sa bouche commencer à happer l'air dans un geste désespéré. Je me précipite vers lui mais, aussitôt que j'arrive à sa hauteur, Amaury s'effondre subitement dans mes bras.
— Je vous l'avais dit ! s'écrit Clauporte d'une voix tremblante. Je l'avais dit !
Contre moi, le corps de mon petit ami se met à vibrer alors que des spasmes le parcourt. J'observe quelques secondes le phénomène avant de comprendre.
Je me relève d'une traite en rouspétant, le laissant s'écraser au sol.
— Putain Amor, c'est pas marrant !
N'arrivant plus à retenir ses gloussements, le garçon éclate de rire. Il se roule parterre, plié en deux, et je lui administre un petit coup de pied dans les côtes pour le calmer.
— Désolé, pouffe-t-il, mais c'était trop tentant. T'aurais vu ta tête !
— Notre situation n'a rien de drôle, rétorque Clauporte d'un ton sec. Dois-je te rappeler que nous avons perdu la sœur de Constance et qu'on ne sait toujours pas où on est ni pourquoi on est là et encore moins comment en sortir ?
— Et qu'est-ce que tu veux qu'on y fasse, hormis tenter de continuer à avancer en espérant que la sortie soit au bout ? Fais comme tu veux mais si jamais tu crèves de faim ici, ce ne sera pas de ma faute.
La face encore rouge de colère, Amaury toise une dernière fois l'asiatique avant de venir se servir dans le pilier de nourriture. Je décide de l'imiter tandis que la jeune fille cherche du réconfort auprès de Tomichou.
— Tu devrais manger un peu, lui conseille-t-il. Qui sait dans combien de temps nous trouverons la sortie ou aurons l'occasion de tomber sur de la nourriture à nouveau ?
Nous finissons par séparer les différents mets de manière équitable. La moindre saveur familière emplie ma poitrine d'un vent léger. Cela fait tellement de bien !
Je ne peux cependant m'empêcher de jeter des regards furtifs aux alentours. C'est étrange tout de même. Pas de décompte ni de piège mortel. Quelque chose va forcément se déclencher quand on s'y attendra le moins.
— Ça fait mal ?
Je me tourne vers Clauporte qui observe avec appréhension la blessure du délégué alors que celui-ci agrandit le trou dans son pantalon pour mieux observer les dégâts.
— Ça devrait aller, conclut-il. Tu peux me passer le désinfectant ?
Elle obéit et le garçon se met à nettoyer sa plaie avant de la recouvrir d'un bandage. Dès qu'il a terminé son repas, Amaury s'empare à son tour du kit de soin et se tourne vers moi.
— Fais voir tes blessures.
D'habitude, j'aurais préféré m'en occuper moi-même mais la situation exceptionnelle me rend étrangement ouverte à ce geste d'attention. Après tout ce que je viens de traverser, une touche d'affection n'est pas si malvenue.
Je n'arrive toujours pas à croire ce qu'il nous arrive. Est-ce bien réel ? Prunelle...
Alors que j'observe le sol d'un air absent, la main d'Amaury vient me caresser la joue. En relevant la tête, j'aperçois le regard perçant de Tomichou qui me dévisage comme pour m'analyser. Mon petit ami, lui, me sourit tendrement.
— Ça va, bébé ?
Je hoche doucement la tête, plongeant mes yeux avec défiance dans ceux du délégué qui baisse aussitôt la tête. Serait-ce des rougeurs de gêne que je vois apparaître sur ses joues ?
Je souris légèrement, me délectant un instant de ce spectacle avant de me tourner vers Amaury. Je prends le temps d'admirer son beau visage tacheté quand ma vision me parait soudain floue.
Je n'arrive pas à articuler quoi que ce soit tellement mes lèvres me semblent lourdes. J'ai si sommeil...
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Je me réveille avec un mal de crâne terrible et une étrange sensation de déjà-vu. Autour de moi, encore et toujours des dalles lumineuses, blanches à en perdre la vue. Sauf que cette fois mon espace est bien plus réduit qu'à mon premier réveil et aucune trace de présence humaine. Je suis seule dans un espace confiné de pas plus de deux mètres carrés. Heureusement que je suis pas claustro !
— Il y a quelqu'un ?
— Constance ? me parvient la voix de Tomichou quelque part sur la droite. Tu es enfermée aussi ?
— Je suis là ! Aidez-moi ! s'écrit Clauporte sur ma gauche.
— Putain de mur de merde ! grogne Amaury entre plusieurs bruits de coups.
Il semblerait que nous soyons enfermés de la même façon à seulement quelques pas d'écart. Mais qui nous a placé là et comment ?
— Il y avait du somnifère dans la nourriture ?
— Je crois bien, oui, soupire le délégué.
— Je savais qu'on aurait pas dû toucher à cette nourriture ! clame Clauporte.
— Oh mais la ferme toi ! s'énerve Amaury. Ce qui est fait est fait !
— Non, c'est toi qui la ferme ! hausse-t-elle le ton. Sans toi, on n'en serait pas arrivé là !
Évidemment, Amaury réplique encore plus fort. Irritée, je décide de mettre un terme à la joute verbale mais suis devancée par Tomichou.
— Ça suffit ! crie-t-il. À moins que vous n'ayez une idée pour nous extirper de notre situation actuelle, je vous suggère de rester concentré et de garder vos bouches fermées.
J'aurais préféré un bon « fermez bien vos gueules » mais le résultat est là : le silence retombe dans la pièce.
Nous nous mettons alors d'accord pour inspecter nos box un peu plus en détails. Il y a forcément un indice quelque part pour nous aider à sortir. Et alors que je commence à désespérer, mes doigts effleurent un minuscule bouton caché dans un joint entre deux dalles.
Aussitôt que je presse dessus, un écran s'allume sur un des murs de ma cellule. Mes yeux s'écarquillent de surprise quand je lis les mots inscrits devant mes yeux.
CHOISISSEZ UNE PERSONNE À ÉLIMINER :
AMAURY / CLAUDIA / CONSTANCE / TOM
C'est quoi cette farce ? Une personne à éliminer ?
— Quelqu'un a fait une découverte ? demande Clauporte, visiblement anxieuse.
— Je ne trouve rien du tout ! déclare Amaury.
Mes yeux se déposent sur le haut de l'écran où un chrono défile depuis au moins une minute déjà. En bas de l'écran, sous nos prénoms, une phrase clignote en gras :
VOTES COMPTABILISÉS : 1
— Vous êtes sûrs que personne n'a rien trouvé ?
— Rien de mon côté non plus, répond Tomichou. Pourquoi ?
Parce que cela veut dire que quelqu'un ment. L'un d'eux a trouvé le bouton secret et, sans rien dire, a voté. Donc si personne d'autre ne trouve le bouton et ne vote d'ici la fin du temps, son vote sera le seul enregistré et la personne choisie sera... éliminée ?
Qu'est-ce que ça veut dire vraiment ? Et puis d'abord, qui a voté ? Et pour qui ? Dois-je avertir tout le monde ou non ? Et si ça se retournait contre moi ? Je n'ai aucun moyen de prouver que ce n'est pas moi qui aie voté. Peut-être devrais-je en profiter pour voter sans que personne ne le sache...
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Des votes, des votes et encore des votes...
À vous de choisir...
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[Avertir tout le monde]
Direction le 100.
OU
[Ne rien dire]
On se retrouve en 101.
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