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Sans réfléchir plus longtemps, je m'élance en avant et saisis fermement le poignet du délégué. Je vois la surprise submerger son regard océan. Qui a dit que je ne pouvais pas sauver et la boite et le garçon ?
Tomichou saisit mon bras de son autre main et j'entreprends de le hisser sur la plateforme. Amaury se joint à moi et je m'arrête dans un sursaut quand un pic manque de transpercer l'épaule du garçon. Ce dernier vient s'écraser violemment contre la paroi du mur et ses lunettes glissent sur son nez avant de tomber en contrebas, hors de vue.
D'un même geste, Amaury et moi soulevons de nouveau le délégué qui atterrit sur la plateforme juste à temps pour éviter un nouveau pic assassin.
— Merci, dit-il d'une voix tremblante, la main droite toujours fermement serrée sur l'étrange cube.
Le pauvre n'a pas le temps de reprendre sa respiration que le Clauporte se jette sur lui.
— Tom ! Tu vas bien ? Tu es blessé ?
Mes yeux se posent alors sur la cuisse du garçon où une longue coupure apparaît sous la déchirure de son pantalon. Malgré le filet de sang qui s'en échappe, l'entaille ne semble pas être trop profonde. À quelques centimètres près, le délégué aurait pu finir en brochette.
— Ça va aller, répond Tomichou en réprimant un grognement de douleur. Mais je ne serais pas contre sortir de cette pièce.
— AAAAAAH !
Mon sang ne fait qu'un tour en reconnaissant la voix de Prunelle. Le cœur battant à toute allure, je me penche à nouveau au-dessus du mur d'escalade et aperçois ma petite sœur tomber en arrière. Je n'ai pas le temps de réagir ou dire quoi que ce soit que son corps heurte le sol de plein fouet. Ce n'est qu'alors que je me rends compte que les pics qui jonchaient le sol ont disparu. Et ceux sur le mur se rétractent également un à un, emportant avec eux les prises permettant d'escalader.
La bonne nouvelle c'est que Prunelle ne finira pas en brochette. La mauvaise nouvelle c'est qu'elle a l'air inconsciente et le mur de dix mètres qui nous sépare est désormais aussi lisse qu'une peau de bébé. Impossible de descendre la chercher.
— Prunelle ! Tu m'entends ?
Pas de réponse. Elle ne peut pas être morte, pas vrai ?
— Merde, souffle Amaury entre ses dents à côté de moi. Comment on fait ?
Mon cerveau tourne à plein régime tandis que je tente de trouver une solution. Peut-être que si nous parvenons à créer une sorte de corde avec nos habits pour descendre récupérer Prunelle...
— C'est trop dangereux, s'oppose Amaury. Il suffit qu'un tissu ne soit pas assez solide et c'est la fin. En plus, il n'y a rien à quoi se raccrocher ici, tout est lisse et glissant. Impossible de s'accrocher pour tenir la corde.
— Je n'ai qu'à me laisser glisser le long du mur dans ce cas !
— Tu es folle ? Ces pics peuvent réapparaitre à tout moment et même si tu arrives jusqu'en bas, comment allez-vous remonter ? Hors de question que je te perde aussi !
— Mais on peut enco-
L'extinction soudaine de la lumière dans la pièce me surprend et je sens deux bras m'encercler fermement.
— Je suis désolé, Stance. On trouvera un moyen de la récupérer, c'est promis. Mais il faut d'abord qu'on avance pour sortir d'ici. Ok ?
La seule issue disponible est un passage sombre de la taille d'une bouche d'égout, s'enfonçant dans le sol et ressemblant fortement à l'un de ces toboggans pour enfants. Sauf que là, impossible de savoir sur quoi il débouche. Je n'ai même pas la force de faire une blague sur l'étrangeté de la chose tant mes pensées sont lourdes de culpabilité. J'aurais dû sauver Prunelle. J'aurais dû faire quelque chose...
La silhouette d'Amaury s'avance avec sérieux vers l'ouverture légèrement lumineuse. Il propose de faire descendre Tom juste après lui pour qu'il puisse le récupérer et lui éviter une chute sur sa jambe blessée. Personne ne bronche et il disparait en premier.
Alors que Clauporte et moi aidons le délégué à s'introduire dans la bouche du toboggan, la voix calme du garçon me parvient à l'oreille.
— Tu as suivi ton instinct de survie. Ce n'est pas ta faute.
Quand c'est finalement à mon tour, je lance un dernier regard en arrière dans la salle terriblement obscure et silencieuse. Je suis désolée...
Dès que je m'engouffre dans le curieux toboggan, mon corps chute à toute vitesse le long du tube aux parois de plus en plus claires. Puis la trajectoire se redresse. Je ralentis et aperçois la lumière éclairer mes pieds juste avant que ceux-ci n'atteignent le bout du parcours. Mes talons rencontrent un sol plat et je me tortille pour m'extirper du petit tunnel. Devant moi, Amaury m'adresse un regard inquisiteur. J'acquiesce légèrement pour lui faire comprendre que je vais bien puis mon attention se tourne vers notre nouvel environnement.
La pièce est la même que les autres. Carrée, blanche, fermée, à une exception près : un demi pilier se dresse en plein milieu de la salle.
— Là, regardez ! s'exclame soudain Amaury en pointant le dessus du pilier.
Je m'approche et mes yeux suivent son doigt. Une petite encoche carrée ressort clairement sur la surface lisse. La taille correspond parfaitement à celle du petit cube trouvé dans la salle de Prunelle.
— Qu'est-ce qu'on fait ?
Ma question est suivie d'un long silence. Chacun semble réfléchir intensément à la marche à suivre. Tomichou est le premier à intervenir.
— Claudia a parlé d'activateur. Je suppose que poser le cube sur l'emplacement va certainement activer quelque chose. Mais quoi ?
En effet, rien n'affirme que ce cube va nous aider. Et si, à l'inverse, il activait un piège. Ou pire, une autodestruction.
— Il n'y a qu'une seule façon de le découvrir, répond Amaury en haussant les épaules. A moins que tu aies d'autres révélations à nous faire Cheng ?
— N-non, je..., se met à bégayer Clauporte devant l'air menaçant de mon petit ami.
— Tu ne te souviens de rien d'autre ? la questionne Tomichou.
Encore une fois, l'asiatique secoue la tête avec véhémence mais son visage est déformé par le doute.
— Peut-être... Enfin, je crois... Il n'y a pas longtemps, mes parents devaient signer un partenariat pour un projet. J'ai certainement dû surprendre une conversation sans y faire attention mais... je ne sais pas trop. Ils ne parlent pas vraiment de leur travail avec moi et l'accès au laboratoire est restreint.
J'ai déjà entendu parler des parents de l'asiatique. La famille est connue pour être à la tête d'une grande entreprise pharmaceutique. Venant moi-même d'une famille modeste, je ne peux qu'imaginer à quoi ressemble la vie d'un foyer aussi riche et puissant.
— Un partenariat avec qui ?
Alors que Clauporte continue d'être questionnée, l'image du hall au sol marbré de la villa des Cheng me vient en tête. Son aspect vaste et glacial est loin d'être accueillant. Attendez, comment je peux avoir cette vision ? Je ne me rappelle pas avoir déjà été chez Clauporte pourtant...
— Il ne faut pas le répéter mais... c'est avec la société A.I.Tech.
Je tique soudain à l'entente de ce nom. Il me dit quelque chose...
— C'est pas l'entreprise qui a créé les tests machin-chose avec les énigmes virtuelles ?
Clauporte acquiesce avant de nous réaffirmer qu'elle n'en sait pas plus sur ce possible partenariat. Elle n'est même pas certaine qu'il ait réellement vu le jour. Tout ce qu'elle sait, c'est que A.I.Tech ne s'est pas privé pour envoyer à sa famille de nombreux cadeaux pour les amadouer.
— Vous pensez que nous sommes dans une simulation alors ?
— Impossible. J'ai testé les simulations d'A.I.Tech, y compris leur fameux test U.L.T.I.M.E. Je dois avouer que c'est bluffant. On s'y croirait presque ! Mais pas à ce point.
Le silence tombe. J'hésite un moment avant de poser la question qui me taraude.
— Cheng ? Est-ce que... je suis déjà venue chez toi ?
— Pardon ?
— Euh, Constance, tu es sûre que ça va ?
— Ton hall, il est comment ? Grand, sol marbré, deux grosses colonnes de chaque côté... ?
Mais l'asiatique reste muette. Bouche-bée, elle m'observe avec de grands yeux étonnés. J'ai raison alors ?
— Je m'en souviens aussi, avoue alors Tomichou. Du marbre clair avec une rosace au centre.
— Mais comment ? bégaye Clauporte.
Au fur et à mesure que l'intérieur de la maison des Cheng se fait plus clair dans mon esprit, d'autres souvenirs liés me reviennent. Mais bien sûr !
— Le projet ! Le projet d'SVT !
J'ai raté un cours et le prof m'a alors assigné à un groupe déjà formé. Et, avec ma chance légendaire, je suis tombée avec les deux intellos. On devait justement se voir tous les trois pour bosser. Evidemment, j'avais complètement zappé et avais été très surprise de voir le chauffeur personnel de Madame sonner à ma porte.
— Exact, acquiesce Tomichou avec sérieux. J'étais déjà dans la voiture quand tu es montée. Prunelle était avec toi. Le trajet n'était pas très long il me semble et je me rappelle de l'entrée de la maison également. Mais après ? Qu'est-ce qu'il s'est passé après ?
Clauporte secoue la tête. Je n'en ai aucun souvenir non plus.
— Et Amaury ? Il n'était pas avec nous alors pourquoi est-il ici ?
Quand les yeux se tournent vers le grand rouquin, celui-ci baisse le regard, gêné. Amaury et moi nous étions disputés la veille et ce jour-là il m'a envoyé de nombreux message. Il voulait me voir, me parler, s'excuser. J'étais bien trop en rogne pour lui répondre. C'est toujours comme ça : on se fritte, il s'excuse, je boude, puis il débarque chez moi pour parlementer et on finit par se rabibocher.
Sauf que je n'étais pas chez moi cette fois. Et il n'avait aucun moyen de le savoir. Nous ne sommes pas dans la même classe et ce n'est pas mon genre de parler devoirs avec lui.
— Prunelle t'a dit où j'étais, pas vrai ?
Amaury se frotte la tempe, les sourcils froncés par la confusion, avant de me répondre.
— Je crois bien, oui...
— Donc, conclut Tomichou, nous étions tous chez Claudia avant de perdre la mémoire. Mais cela ne nous avance pas vraiment sur l'utilité de ce cube.
L'attention se pose à nouveau sur la boite cubique et l'encoche qui semble l'attendre au centre de la pièce.
— Bon, vous savez quoi ? Moi je vote pour qu'on place ce foutu cube sur son emplacement. Au mieux, ça nous ouvre la sortie. Au pire, on crève tous et c'est fini !
Tomichou doit en venir à la même conclusion car il s'avance d'un pas chancelant et tend l'objet. Nous échangeons tous un regard avant qu'Amaury ne s'empare finalement du cube. Personne n'objecte et il l'insère dans son emplacement.
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Pauvre Prunelle, abandonnée par sa propre sœur...
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[Continuer l'aventure]
Rendez-vous en 99.
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