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Dès que mes pieds passent le seuil de la porte, l'alarme s'arrête nette. Je me retourne juste à temps pour apercevoir le message qui s'affiche sur le mur intérieur du cube.
DEMANDE DE RÉINITIALISATION ANNULÉE.
FÉLICITA...
Puis la porte se ferme sous mon nez. Pendant un moment, nous restons silencieux, tentant de capter le moindre indice sur ce qu'il peut bien se passer à l'intérieur. Mais rien. Pas le moindre son. J'appose ma main sur la surface lisse, en vain. J'ai beau cogner, tirer et pousser de toutes mes forces, la porte reste close. À bout de force et d'esprit, je me laisse glisser au sol.
— Génial ! Et maintenant ?
Amaury ne tarde pas à me rejoindre tandis que mes yeux se perdent dans l'immensité blanche de la pièce. C'est rare de voir mon petit ami aussi silencieux, lui qui arrive pourtant toujours à blaguer dans la pire des situations. Sans doute est-il aussi perdu et démuni que moi en cet instant, devant cette immensité blanche. Du blanc. Rien que du blanc. À perte de vue. À en perdre la vue. Ce blanc incolore. Ce néant.
Je sens les larmes me monter en même temps que le garçon me sert contre lui. Mon visage s'enfouit sans hésitation dans le tissu de son t-shirt, laissant les grandes eaux couler. Bientôt, seuls les battements réguliers de son cœur contre mon oreille se font entendre. Je sens son souffle chaud me chatouiller le cou. Notre dernière dispute me semble si lointaine à présent.
— On devrait en profiter pour se reposer, propose Amaury en se massant l'épaule.
— Je suppose qu'on n'a rien de mieux à faire pour l'instant.
Amaury propose de monter la garde mais j'insiste pour tenir ce rôle en premier. Trop fatigué pour rechigner, il finit par s'endormir rapidement, la tête confortablement installée sur mes genoux. Tom s'assoit un peu plus loin en silence.
— On dirait bien qu'on est coincé ensemble, constate-t-il avec un petit rire nerveux quand nos regards se croisent. Pas de chance, hein ?
— Ouais, la cancre, le rebelle et le délégué, qui l'eut cru ? Ça ferait un bon film ça, non ? Des ennemis de toujours, coincés ensemble, réussiront-ils à s'entendre et à survivre ?
À mon grand étonnement, ma blague ne fait pas rire l'hispanique. Au contraire, il arbore une expression très sérieuse alors que ses yeux se posent sur moi.
— C'est vrai qu'on est très différents tous les deux mais je ne t'ai jamais vue comme une ennemie.
Intriguée, je me tourne vers lui pour lui demander comment il me perçoit. Il hésite un instant, comme s'il cherchait ses mots, puis du rouge commence à se répandre sur ses joues. J'ai déjà vu des garçons se comporter ainsi devant moi. Serait-il possible que...
Un grésillement attire soudain mon attention. Un compte à rebours vient de s'afficher au-dessus de la porte close. Le bruit réveille en sursaut Amaury alors que Tom et moi échangeons un regard impuissant. Quand il remarque à son tour le temps qui défile, il se redresse pour m'enlacer.
— Je sais que tu n'aimes pas quand je le dis mais je t'aime, murmure-t-il.
Un petit sourire triste s'étire sur mes lèvres et j'acquiesce timidement. Tom nous observe sans un mot et je me sens soudain gênée par l'élan d'affection de mon petit ami. Je le repousse en rigolant, tentant de détendre l'atmosphère.
— Pourquoi si dramatique ? On va s'en sortir, n'est-ce pas ?
Amaury acquiesce vivement. Dans un geste rassurant, ses doigts font des allers et retours sur mon dos et je lève un regard triste vers lui. La vérité est que j'ai peur. Terriblement peur. Et si c'était la fin ? Et s'il n'y avait plus rien ?
— Oui, ça va aller, répète-t-il comme pour se convaincre lui-même.
Je tourne mon attention vers Tom qui se recroqueville sur lui-même, l'air triste mais étrangement serein.
— Tom ?
Lentement, il se tourne vers moi et sourit douloureusement.
— Qu'est-ce qu'il va se passer à la fin du décompte à votre avis ? nous demande-t-il.
Amaury hausse les épaules, évoquant la possibilité qu'une porte de sortie s'ouvre enfin. Après tout, c'était le plan. Laisser une personne sortir pour sauver les autres.
— Et ensuite ? Vous croyez vraiment que les personnes qui nous ont enfermés ici nous laisserons gentiment partir et retourner à nos petites vies tranquilles ? Tout ceci est forcément l'œuvre de plusieurs personnes et leurs intentions sont plus que douteuses. Et quand bien même ça se finirait bien pour nous, vivre avec la conscience de tout ce qui s'est passé ici est quelque chose que je ne vous souhaite pas.
Je pense alors à l'incident qui a failli lui coûter la vie il y a un an. Ce terrible évènement qui l'a rendu si célèbre dans tout le lycée. Il est déjà passé si près de la mort. Est-ce pour cela qu'il est si calme ?
— C'est quoi ton problème ? s'énerve Amaury. Après tout ce qu'on vient de surmonter, ce n'est pas le moment de baisser les bras ! On va se battre jusqu'au bout !
Mon petit ami se tourne vers moi en quête de soutien et je sens également Tom me dévisager avec curiosité. Aucun des deux n'a réellement tort mais toute cette incertitude commence à me donner le tournis. Le corps tremblant, je glisse ma main dans celle d'Amaury et marche jusqu'à Tom.
— On ne sait pas qui ils sont ni ce qu'ils attendent de nous. Mais je ne les laisserai pas nous briser. Ils contrôlent peut-être tout ce qui se passe ici mais ils ne nous contrôlent pas nous.
Je tends mon autre main à Tom. Il hésite un instant mais finit par accepter et je le hisse à notre hauteur. Je resserre mon étreinte sur les mains des deux garçons et plante mon regard dans le leur tour à tour.
— Quoi qu'il arrive, promettez-moi qu'on restera ensemble ?
Nous échangeons un dernier sourire avant que le compte n'atteigne zéro. C'est alors que tout s'arrête. Incapable de bouger, je ne peux qu'observer devant moi Amaury et Tom paralysés, comme un arrêt sur image. Quelque chose dans leurs yeux s'éteint, ne laissant face à moi que des mannequins sans vie qui me sourient.
Avant même que j'ai me temps d'assimiler la bizarrerie de la chose, ma conscience me quitte et tout devient noir.
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Les rayons du soleil qui percent à travers la persienne finissent par me réveiller. Presque aussitôt, un mal de crâne astronomique s'abat sur mes tempes.
— Ghhh, pourquoi monde cruel ?
Puis la réalisation me tombe dessus avec force. Je suis dans mon lit ?
Je me redresse bien trop vite pour mon état et me retrouve rapidement pliée en deux, la tête dans les mains. J'ai comme la nausée tout à coup. Que s'est-il passé ? Le fruit d'une soirée trop arrosée ? Je n'arrive même pas à me souvenir de ma journée d'hier.
Ma main se tend d'un geste automatique vers ma table de chevet. Mon portable n'est pas là. Me décidant à sortir du lit, je me rends compte que je suis déjà habillée. Ce devait être une soirée sacrément arrosée pour que je me sois couchée ainsi. Je remarque d'ailleurs que mon portable se trouve dans ma poche. La date sur l'écran m'indique que nous sommes mercredi matin. Je hoche sensiblement la tête avant de me rendre compte du plus important : il est bientôt 9h. Je vais être en retard au lycée !
Je bondis sur place, imaginant déjà la complainte de ma mère si jamais je devais lui ramener un énième mot de retard à signer. Je saisis mon sac de cours et dévale les escaliers pour débarquer dans le salon. Je m'apprête à sortir quand une intuition me pousser à m'arrêter. Quelque chose cloche. Pourquoi diable aurais-je fait une soirée un mardi soir ? Qui fait ça ? Surtout que j'ai cours le lendemain matin et, en plus, le mercredi je dois aussi... amener Prunelle au collège ! Merde ! J'avais complètement zappé ce détail ! Où est-elle ?
D'habitude, à cette heure-ci, elle devrait être scotchée devant la télé en attendant que je sois prête à partir. Pourtant, le salon est désert et la maison semble silencieuse. Elle ne s'est pas réveillée ?
— Prunelle ? Prunelle !
Mon regard se dépose sur la télécommande de la télévision que je m'empresse d'allumer. Je tombe direct sur les informations du matin. Si ça, ça ne lui donne pas envie de se réveiller, je ne connais pas ma petite sœur.
« La société A.I.Tech vient d'annoncer la sortie imminente d'une nouvelle expérience inédite. Grâce à leurs nombreuses années de recherches sur le développement d'une intelligence artificielle plus vraie que nature, la société propose aux testeurs d'établir un portrait physique et... »
— Écoute Prunelle, c'est ton moment préféré...
Je remonte les escaliers à contrecœur pour toquer à la chambre de ma sœur.
— Allez Prunelle, on va être en retard !
Quand elle ne répond toujours pas, je n'ai d'autre choix que d'entrer. Évidemment, la petite peste roupille toujours.
Bien décidée à la réveiller, je m'avance à grands pas et retire ses draps d'un coup. Mon cœur se fige aussitôt. Pourquoi dort-elle habillée ? Et pourquoi son teint est-il si... violet ?
Je pose une main sur sa joue et la retire aussitôt. Froide. Complètement froide et rigide. Mes doigts se mettent à trembler de façon incontrôlable alors que mon esprit assimile petit à petit la scène qui se trouve sous mes yeux. Ma petite sœur, morte. Ce n'est pas possible. Sûrement, je suis en train de rêver, n'est-ce pas ?
Je commence à me pincer et à observer ce qui m'entoure. Tout ça est faux. C'est faux. Je le sais. Je le sais parce que ma petite sœur ne peut pas être morte. Prunelle ne peut pas...
Mes réflexions sont coupées court par la sonnerie de mon portable. Encore sous le choc, je décroche et la voix d'Amaury me parvient.
— Constance ! Écoute, je... Tu vas trouver ça bizarre mais je ne me souviens plus très bien de ma soirée d'hier. Je sais qu'on était en froid et je crois que je suis sorti pour te voir. Est-ce que je suis venu chez toi ?
Je me souviens effectivement que je faisais la tête à mon petit ami. Depuis qu'il s'est fait de nouveaux amis skateurs, il ne m'accorde presque plus de temps. Mais est-il venu me voir hier ? S'est-on disputés ? Rabibochés ? A-t-on bu au point de ne se souvenir de rien ?
— Constance ?
Tellement de questions m'assaillent et j'ai si peu de réponses. J'ai encore du mal à réaliser ce qu'il m'arrive. Tout ce que je sais, c'est que je ne veux pas affronter cette réalité seule.
— Tu es loin ?
Il ne faut que quelques minutes à Amaury pour arriver. Il devait être en chemin pour le lycée. Et c'est avec hâte que je quitte la chambre de Prunelle et cours au rez-de-chaussée pour me retrouver contre le corps si chaud et familier de mon petit ami.
— Qu'est-ce qu'il se passe ? s'empresse-t-il de me demander. Au téléphone, tu avais l'air...
Ma vision se brouille de larmes alors que je me sens de plus en plus désemparée.
— Amor, dis-moi que c'est un cauchemar...
Noyée dans le chagrin, je n'entends même pas la notification qui fait vibrer mon portable. Ce n'est que bien plus tard, en déverrouillant mon téléphone pour appeler mes parents et la police, que je remarque les messages de Tomichou.
« Salut Constance, Mme Duroc me demande de te rappeler que la présence à son cours n'est pas optionnelle. C'est vrai que c'est dommage de ne pas te voir en cours... Si tu as des soucis ou des difficultés, n'hésite pas à en parler. Je suis là si besoin. »
« Tu n'es pas obligée de m'en parler, bien entendu ! Je dis juste que je serai ravi de pouvoir t'aider, en tant que délégué. »
« Et j'oubliai : Claudia va apparemment changer d'établissement. Malheureusement, je n'arrive pas à la joindre. On va devoir se passer de ses notes et finir le projet de SVT à deux. Vendredi après-midi, ça te conviendrait ? »
Je me surprends à rire. Même dans cet horrible cauchemar, Monsieur le délégué ne peut pas s'empêcher de me faire la leçon. S'il savait à quel point le cours de Madame Duroc ou notre projet de science est le cadet de mes soucis. S'il savait ce que je suis en train de vivre actuellement...
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Bravo ! Vous avez atteint la fin du Cube !
Enfin, une fin... Et je parie qu'elle ne vous convient pas tout à fait...
Ça tombe bien parce que cette aventure possède de nombreux chemins inexplorés. Peut-être qu'en faisant des choix différents vous obtiendrez une fin plus agréable ?
Alors, prêt à retenter ?
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[Finir votre aventure]
Direction le chapitre Conclusion !
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