7 : Tragédies (3/3)
L'armure de Manuel était allongée par terre, sur le dos. Un pistolet dans chaque main, les bras et les jambes écartés. Les multiples traces au sol signalaient que ce n'était pas la première fois. Il ramena le pistolet de sa main droite devant les yeux de sa machine. C'était un modèle d'entraînement, qui tirait des munitions colorées. Il disposait d'une bonne centaine de cartouches dans chacune des deux armes. Lentement, l'armure tourna la tête pour regarder son équipier orange aider Tégos à se déplacer dans une armure. Ils étaient face à face, la machine de Fernand tenant les mains de la machine de Tégos. Celle-ci avançait, et Fernand reculait.
« - Encore raté hein, murmura Ego. On recommence ? »
Non, j'ai dû oublier un paramètre quelque part. Laisse-moi réfléchir, cette histoire commence à me gonfler...Je n'ai pas le temps d'appuyer sur la détente, que je m'effondre. Ça me fait vraiment chier.
« - J'avais senti. »
Le jeune pilote ne comptait plus les fois où il s'était proprement effondré au sol. Le système d'acquisition multiple lui donnait une immense sensation de vertige et il n'arrivait plus à conserver son équilibre. Il se rappela les images que le professeur Belamour lui avait montré. Théoriquement, sa survie passait sur la maîtrise de trois éléments : les ailes, les queues et le système d'acquisition. Les ailes et les queues avaient presque posés problèmes car, en tant qu'humain, il en était dépourvu. Mais il avait compensé en imaginant les posséder. Cela ne fonctionnait pas trop mal, mais encore fallait il qu'il prenne l'habitude de les utiliser. Pour le système d'acquisition multiple, c'était plus compliqué. Cela agissait sur tout les nerfs de la peau, des oreilles et des yeux. Ego avait eut beau lui expliquer le principe de fonctionnement, cela lui restait impossible à maîtriser.
Quand même Ego, y'avait plus simple que ce système à vibrisses sur tout le corps.
« - Je suis d'accord avec toi, mais, je te rappelle que c'est toi qui a installé celui-là. Sur une machine de moyenne et courte portée comme la tienne, ce système est optimal... D'où la présence de ce dernier. »
Des vibrisses, repensa Manuel, c'est comme les poils et antennes des insectes, ils réagissent au plus petits mouvements d'air. Couplé au radar et à la vision, ils permettent de savoir tout ce qui se passe dans un rayon de cinq-cents mètres.
« - C'est le cas... Étant donné que la caverne fait cinq-cents mètres de diamètre. »
Le problème, c'est que je n'arrive plus àme repérer ,et...
« - Oui ? »
Manuel remit sa machine debout, une idée incongrue générée par les souvenirs de la vidéo de Belamour dans la tête.
« - Rassure-moi, tu ne vas pas oser tout de même ? » Interrogea Ego, la voix oscillant entre le choqué et l'amusé.
Et pourquoi pas ? Tu les as toujours ?
« - Bien sûr. Le berserker ne jette rien.
- Opérateur, Ici Doux-Dingue. Remettez en marche les cibles mécaniques s'il vous plaît. J'essaye encore. »
Trouve-moi quelque chose qui bouge Ego.
« - C'est hallucinant, de subconscient, et copilote d'armure, je deviens disque-jockey. Quelle évolution ! »
Ego...s'il te plaît.
« - Oui, oui... voyons voir. J'ai ce qu'il te faut, c'est quand tu le désires. »
Afin de limiter les informations arrivant à son cerveau. Le pilote ferma mentalement les yeux. De l'extérieur, les yeux de l'armure devinrent noir. Ses oreilles furent alors chatouillées par les début d'une musique inconnue. D'abord, des sons de claviers, doux et harmonieux. Les poils de l'armure s'ébouriffèrent légèrement. Les queues ondulèrent lentement sur le sol sans le toucher. Les cibles se mirent à bouger tandis que les premiers sons de guitare résonnaient dans les oreilles du pilote. Il les entendaient derrière la musique. Elles étaient là, ces cibles qu'il avait tant de mal à repérer.
Soudain, pendant que les cibles mécaniques bougeaient, le système d'acquisition se mit en route. Peu pour commencer, Manuel identifia des mouvements dans les ténèbres qu'il avait provoqué. Ses mains serrèrent un peu plus les deux pistolets et de plus en plus de cibles étaient visualisées. Presque de manière inconsciente, ses bras bougeaient légèrement, comme pour signifier qu'il avait vu l'objectif correspondant. Les mélodies l'enveloppèrent, brisant sa perception habituelle de l'espace autour de lui. Inconsciemment, il monta le son de cette œuvre qui lui plaisait. Les sons de la machinerie du stand de tir ne passaient plus par ses oreilles. Les changements de pression provoqués par les bruits, frappaient les poils sur sa peau, sa toison de loup de métal le renseignant de où, quand et comment. Parfois même pourquoi. La fusion mentale avec la machine atteignit un stade où lui-même n'avait plus conscience de son être de chair. La psyché commandait directement le corps de métal, et celui-ci répondait au moindre de ses ordres.
Ego fut prêt.
Il l'était aussi.
Le soldat qu'il était pointa ses armes tandis que les cibles tournoyaient autour de lui. Nul besoin d'ouvrir les yeux, il les sentaient. Du canon de ses pistolets, il se mit à les suivre.
Puis il appuya sur les queues de détente.
Il ouvrit le feu. De manière simple pour commencer, mais, au fur et à mesure que la musique se déroulait, les cibles devenaient de plus en plus dures à atteindre. Paradoxalement, les repérer virait à l'extrême facilité. Il commençait même à ''voir'' le mécanisme derrière. Tirer en savant que la cible apparaîtrait à l'endroit précis avant même son déploiement pour que la munition la frappe à sa sortie devint une formalité.
Son AMC prit alors des positions incongrues, se déplaçait et roulait sur elle-même pour les atteindre. Telle une danse mortelle dans laquelle un danseur aveugle évoluait comme un maître de guerre. Cela se réalisait dans un rythme dicté par la musique sous le regard béat de l'opérateur de la zone d'entraînement.
Le cycle de cibles se termina avant la fin du morceau. Laissant Manuel accroupit, les bras croisés, un pistolet dans le creux d'un bras, l'autre sur l'épaule.
J'en ai foutu partout ?
« - Tant que tu n'ouvriras pas les yeux, je ne pourrais le dire. Mais, y'a du mieux : ce coup-ci, tu as gardé ton équilibre. Ouvre les yeux, je suis curieux de savoir si le bleu convient la caverne. » Déclara le loup blanc, ironique, tandis que Manuel relevait sa machine.
Il ouvrit mentalement les yeux, et ceux de son AMC redevinrent lumineux et vairons. Dans sa guérite, l'opérateur fit apparaître les cibles. La plus de la moitié marquées de couleurs bleues.
C'était quoi cette musique ? Demandale jeune homme au Loup Blanc.
« - ''One Vision'' du groupe Queen. »
Quoi ? Tu l'as fait exprès ?
« - Euh... un peu, je l'avoue que je ne pensais pas que cela aurait eu cet effet. Il faut croire que le choix était judicieux.
- A partir de moment où tu as appuyé sur la détente la première fois, tu n'en as pas raté une seule. Déclara l'opérateur des cibles mécaniques. J'ai jamais vu une AMC faire ce genre de mouvement ! c'était extraordinaire.
- Tu as même eu droit à des bonus ! » Intervint Fernand, derrière lui, amusé.
Manuel se retourna, et vit que les machines de Tégos et de Fernand avaient elles aussi des marques bleues sur toutes les articulations.
« - J'ai l'impression que ce n'est pas encore au point... » Commenta Ego.
En effet...
*
* *
*
Rig-rid se dirigea vers le bureau du Capitan pour y dormir comme à son habitude. Elle frappa à la porte, mais elle n'entendit personne à l'intérieur lui dire d'entrer. Elle voulait se reposer, le travail qu'elle avait à effectuer était harassant, aussi, avec beaucoup de précautions, elle ouvrit la porte.
Arsear n'était pas là.
Elle entra, ferma derrière elle et se dirigea vers la salle de bain pour faire sa toilette, comme à son habitude. Son esprit avait beau être fatigué, plein de plans et de techniques de fabrication, elle se figea en entendant la porte se fermer une seconde fois derrière elle. En une fraction de seconde, tout ce qui lui encombrait la tête disparu. Arsear lui aurait immédiatement demandé un rapport. Un garde lui aurait immédiatement demandé ce qu'elle faisait ici, avec quelques coups. Mais là, celui qui était derrière elle n'avait rien prononcé. L'inquiétude commença à se faire sentir. Et elle n'osait trop se retourner pour identifier son interlocuteur.
Elle décida de prendre le risque. Lentement, elle tourna sur elle-même, sans tourner la tête.
Le coups de poing qu'elle prit en plein visage fut aussi violent que massif. Elle décolla du sol sous la violence du coup combiné à la surprise pour aller frapper le mur de métal derrière elle. Pourtant, elle eu le temps d'identifier son agresseur : Berik, l'Intendant du Capitan.
« - Monseigneur ? Que faites-vous ? Qu'ai-je... » tenta-t-elle pour essayer de calmer les ardeurs du Silridriss.
Le coup de poing au ventre lui coupa le souffle en même temps qu'il l'assomma à moitié. De l'autre main, il l'attrapa par la gorge et la releva violemment contre le mur. L'impact de sa tête sur la cloison métallique fut extrêmement violent et douloureux.
« - Devine. » Murmura le Silridriss à son oreille, une intonation sadique dans la voix.
Les pensées de la Gnome se remirent en ordre dés l'identification du danger : il allait la violer. C'était la lueur de cet instant, comme une prémonition qu'elle avait vu briller dans ses yeux lorsqu'ils s'étaient croisés la première fois. Immédiatement après, elle tenta de se débattre, de faire lâcher sa prise à cet Homme-lézard taillé comme un catcheur professionnel. Mais la différence de force était trop grande. Plus elle se défendait, plus il en riait, et plus il la violentait. Il la griffait, lacérant sa peau grise et laissant couler un liquide rouge, et elle hurlait de douleur. Il lui mettait aussi des coups de pieds et des coups de poing extrêmement violents. Elle cherchait à se défendre, mais c'était peine perdue, son allonge était bien trop grande.
Berik se stoppa quand elle fut par terre, à la limite de l'inconscience. Sans ménagement, il la souleva et la plaqua contre un mur de métal sans aucun effort. Il rapprocha son visage amusé de celui, abîmé de l'ingénieure Gnome.
« - Et bien ? C'est tout ? Tu veux que je passe à la suite ? »
Rig-rid ne répondit rien, elle le regardait avec des yeux vides, des larmes sur les joues, même si ceux-ci clignaient de temps en temps. Signalant sa conscience. Elle n'avait même plus la force de crier. Voyant son indifférence et son envie d'en finir, l'intentant remonta la robe de bure de l'esclave, révélant une partie de sa nudité.
Le regard à la fois surpris et suppliant de l'esclave qui regardait par dessus son épaule, ainsi qu'une sensation froide sur la gorge figea Berik dans son mouvement.
« - Je ne me souviens pas que tu m'aies demandé une quelconque permission. » Murmura Arsear, derrière Berik, la lame de sa dague sur la gorge de ce dernier.
« - Je ne pensais pas que cela était nécessaire. Qui se soucie d'elle ?
- Moi. »
La réponse du tac au tac, laissa l'Intendant interdit. Le Capitan s'empressa de préciser : « Elle fabrique des machines pour vaincre les Démons d'Alikaross. Si elle venait à mourir, avant de périr sous les coups de Myanate, Favorite de l'Impératrice, je m'empresserais de lui donner ton nom.
- Une Favorite ?
- Oui, il y en a une. Et la Déesse-Impératrice est en colère. La gouverneur et tout les généraux ont été punis. Je suis le seul a avoir survécu. Crois-moi, s'il me faut ta tête pour démontrer mon allégeance, je me ferais une joie de la prendre. Je te le répète : les ordres de la Déesse-Impératrice sont pour moi absolus. Et, de par eux, cette Gnome doit rester en vie pour le moment. »
Berik réfléchit un moment, avant de doucement reposer l'esclave sur le sol. Arsear rangea son arme sans bruits, tel qu'il l'avait sortie une fois discrètement entré dans la pièce.
L'Intendant regarda le Capitan, avec une colère non feinte. Mais, comme la dernière fois, il se heurta à un visage calme et impassible. Il se rendit soudain compte que son supérieur le regardait avec pitié et tristesse. Dans sa manière de se tenir, Berik identifia de nouveau cette impression étrange. Celle qui faisait que son Capitan semblait plus intouchable, et plus majestueux. Il n'avait beau être qu'à quelques pas de lui, et être son subordonné direct, il n'en demeurait pas moins qu'ils étaient à des années lumières de distance.
« - Pourrais-je en disposer quand son travail sera fini ?
- Bien sûr. »
Il ne crois pas à ce qu'il dit... Pensa l'Intendant, totalement décontenancé de la représentation que le Capitan lui offrait.
« - Autre chose ?
- Non, capitan.
- Alors tu peux disposer. »
A ces mots, Berik comprit qu'il était désormais de trop dans la pièce. Il sortit sans un mot, mais il regarda une dernière fois son supérieur, un genou au sol, devant l'esclave malmenée. L'aura qui l'avait entouré avait disparue.
« - Osrak, amène immédiatement une unité d'apothicaires dans mon bureau. » Murmura-t-il en regardant l'esclave.
Berik sortit, encore étonné de ce qu'il voyait. Depuis quand un Silridriss demandait une équipe de soin pour un esclave ? Depuis sa rencontre avec la gouverneur, le Capitan n'était plus lui-même. Il semblait détaché, entrant dans de longues réflexions solitaire. Il ignorait les esclaves, qu'ils fassent des erreurs ou non, il passait des heures entières sur le toit du navire, ou à différents points du navire, à regarder ses congénères. Ses repas étaient devenus légers, et il ne touchait presque plus à la viande de son assiette. Le chef cuisinier avait même demandé à l'Intendant s'il devait se sentir responsable.
Il y a un problème quelque part : il n'a pas pu changer de manière aussi radicale en si peu de temps. Il cache quelque chose...quelque chose que je ne suis pas sûr d'aimer.
Dans le bureau, Arsear se servit un verre d'un liquide ambré en attendant le service de secours. Lorsque ceux-ci arrivèrent, ils entrèrent sans frapper, Osrak à leur tête.
« - Monseigneur ? demanda-t-elle en le regardant en pleine forme, un verre à la main.
- C'est pour elle, répondit-il en lui montrant l'esclave au sol qui respirait difficilement. Et ce n'est pas une proposition, c'est un ordre. Elle n'a pas encore finalisé son travail. » Se cru-t-il nécessaire de préciser en voyant sa subordonnée surprise.
La Silridriss leva une main, et l'équipe de soin s'affaira tout autour du petit corps abîmé sous les yeux encore incrédules d'Osrak.
« - Osrak. »
A son nom, la guerrière tourna le regard vers son supérieur. Ce dernier continua : « J'ai discuté avec une Favorite de la Déesse-Impératrice, Myanate. Elle désire faire un coup d'éclat, histoire de démoraliser un peu nos adversaires. Depuis maintenant quelques mois cette Gnome a travaillé sans relâche à la création d'un nouveau modèle de Sarback, capable d'affronter les démons d'Alikaross. Nous ne savons pas où ils sont. Même l'informateur l'ignore, mais nous connaissons l'emplacement d'une autre cible prioritaire. Et nous allons nous servir de ces engins pour l'atteindre. Comme Berik ne viendra pas, j'aimerais que vous m'accompagniez pour l'assaut. »
Lorsqu'Arsear parla d'une favorite, les yeux de sa subordonnée le regardèrent avec envie. Et, au fur et à mesure qu'il parlait, elle comprenait les raisons de cet aspect protecteur pour un esclave.
« - Pourquoi ne pas prendre Berik ? Il est mon supérieur...
- Berik est responsable de l'état de cet esclave. Et il a faillit la tuer. Je n'ai plus confiance en lui. A toi de me prouver que tu peux prendre sa place.
- Je saurais ne pas vous décevoir, fit Osrak, un rictus mauvais sur le visage.
- Je l'espère.
- Par curiosité, quelle est notre cible ?
- Shershen, le roi des chimères. » Répondit Arsear sans l'engouement qui semblait agiter l'Enseigne.
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* *
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« ...Henry, assis sur le traîneau, vit disparaître son compagnon. Dick avait quitté la piste et tentait de rejoindre le traîneau en décrivant un grand cercle. » [Ndla : le roman dont le texte est ici cité est noté en fin de chapitre]
Salida était assise à coté de Manuel, sur le lit, dans la chambre de ce dernier. La princesse déchue s'était habillé cette fois-ci. Elle lisait tout haut le livre qu'elle avait entre les mains. Tégos, elle, regardait par dessus l'épaule de la princesse, se demandant comment elle arrivait à sortir des mots sur ces suites de symboles.
« - Je dois avouer que c'est assez impressionnant, en moins d'un mois, tu as appris à lire, murmura Manuel.
- Je ne vois pas comment tu peux deviner qu'elle n'invente pas ?
- Parce que je lis aussi son livre, de temps en temps, pour m'assurer qu'elle ne se trompe pas.
- Tu as changé le tien ? Demanda Salida
- Oui, je suis sur un autre, particulièrement ancien celui-là.
- Je ne vois pas ce que cela apporte de savoir lire, commenta Tégos.
- Tu as certainement des commandes sur ton AMC qui ne sont accessibles que si tu sais lire, et écrire. Crois-moi, tu as tout intérêt à t'y intéresser. »
Salida déchira l'ambiance chaleureuse en un cri strident. Elle en laissa tomber son livre. Tégos, fronça les sourcils. Manuel eut un mouvement de recul et d'incompréhension envers les deux créatures. Rapidement, Fernand et Rachida apparurent dans l'encadrement de la porte. Ils virent alors Salida paniquée, et Tégos un sentiment entre l'inquiétude et la colère sur le visage.
« - Papa, va-t-en de là. Va-t-en vite, fuis ! Fuis ! murmurait Salida, tremblante.
- Sortez de là majesté. Ils ne sont pas nombreux, mais ils sont trop puissant pour qui que soit. Sortez de ... Non ! Pas par là ! Que ? Que dites-vous ? »
Alors que la nuit était bien avancée à Clermont-Ferrand, très loin de là, le soleil éclairait la forêt de pins d'une chaude lumière. Il n'y avait pas de nuages dans cette zone sauvage et vallonnée. Soudain une rafale de tirs et d'explosion déchirèrent le silence. Des nuées d'oiseaux s'envolèrent, affolés. D'énormes monstres, certains mécaniques, d'autres de chair et sang saccageaient la vie sylvestre dans de titanesques combats.
Dans la fureur des échanges un énorme dragon vert sortit dans une clairière accompagnés de quatre créatures aussi énorme que lui. Un cheval à six pattes bleu à la crinière d'or, un lynx blanc tacheté de noir tel un dalmatien, une tortue bardée de piques et une étrange créature vaporeuse dont on distinguait mal les contours, hormis les quatre pattes et la tête. Tous avaient les yeux blancs. Rapidement les quatre animaux se placèrent en arc de cercle pour protéger le dragon. Dans la mémoire, le silence se fit tandis que le roi parlait.
Trop sont mort aujourd'hui, je vais étancher leur soif de sang. Cela devrait les calmer un temps. Je ne sais pas ce que sont ces choses, mais elles ne vivent pas, si on les blesse, elle se soignent d'elles-même, les Humains eux-mêmes n'ont pas pu stopper ces horreurs.
Lentement, une mécanique sortit des sous-bois. C'était un bipède, haut comme une AMC, protégé comme un monstre moyenâgeux portant un épais harnois. Il semblait trop musclé et à l'étroit dans l'armure qu'il portait. Dans sa main droite brillait une lame scintillante malgré les tâches de sang, et ses yeux brillaient de deux gemmes vertes, enchâssées profondément dans le casque. Il avança, puis se stoppa, en face des cinq créatures.
Au peuple chimérique, je demande de garder espoir. Les temps sont emplis de ténèbres et d'incertitudes. Mais cela ne durera pas, les temps changent, et je sais qu'un jour, peut-être pas si loin, les Silridriss seront défaits.
Lentement, la chimère vaporeuse disparue. Les trois autres se déplacèrent lentement dans la direction de la machine de guerre Silridriss qui les attendaient de pied ferme.
Ce jour là, nous nous devrons d'être présent. Les humains savent se battre, ils l'ont maintes fois prouvé, et ce, en dépits de leurs handicaps. Certains sont morts en voulant me protéger. Faites leurs honneur, mais conservez toujours votre liberté.
Avec un mouvement sec, l'étrange machine trancha l'air à sa gauche, là où il n'y avait rien. Et une chimère vaporeuse apparue, et s'écroula d'un bloc là où il avait tapé. Le lynx se jeta sur le ventre du monstre de métal avec une férocité, et une vitesse rarement vue tandis que la tortue créait un marais juste sous les pied de l'armure. Cette dernière s'y enfonça jusqu'au genoux, le lynx sur le dos, on aurait pu croire qu'il était en mauvaise position.
Salida, ma chérie, mon enfant, malgré ce que tu as subit, mon sang, et celui de ta mère coule en tes veines. Tu es plus forte que tu ne le penses, tu te devras de te reprendre rapidement, car c'est désormais à toi de guider notre peuple.
De sa main gauche, il attrapa le lynx par la gorge et lui maintint la tête sous l'eau du marais. Le cheval se cabra pour donner des coups de sabots, tenter de libérer le lynx et déséquilibrer son adversaire. Mais, d'un geste ample, la machine l'éventra. Le cheval bleu s'écroula dans son sang, ouvrit plusieurs fois la bouche, cherchant de l'air, avant de ne plus bouger du tout. Les bulles, à la surface du marais, provoquées par le lynx s'arrêtèrent.
Il ne te manque pas grand chose pour devenir la plus grande des reines, prends seulement conscience de tes responsabilités, acceptes tes actes, et agis pour l'avenir. Peu importe ce que pensent les autres, tant que tu restes honnête envers toi-même. Kouiros et Doux-Dingue l'on bien compris. Kouiros, protège ma fille, ne laisse personne te barrer la route. Et si vous m'entendez, Doux-Dingue, acceptez cette dernière requête également.
D'un bond, l'armure sortit du petit marais et atterrit sur la carapace de la tortue. La transperçant de sa lame dans le même mouvement. Il se releva, et les pièces abîmées dans la manœuvre reprirent leurs formes initiales. Des sous-bois sortirent trois autres machines similaires à la première.
Soudain, avec une vitesse surprenante, les quatre machines se jetèrent sur le roi Shershen alors que celui-ci fermait les yeux.
Adieu.
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(voir plus haut) Jack London., « Croc-Blanc »
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