7 : Tragédies (1/3)

Lorsque Salida se leva le lendemain matin, Tégos était déjà debout et habillée. Elle avait troqué la robe asiatique pour un jogging et un sweat-shirt. La guerrière s'était assise sur une chaise et regardait par la fenêtre qui se trouvait entre leurs deux lits, la rue extérieure. La population se déplaçait comme un ensemble chaotique. Chacun se dirigeait vers son lieu d'emploi sans faire attention à l'étrange créature qui les surveillait par la fenêtre. Les projecteurs holographiques présentaient au plafond une fausse impression d'infini dans des couleurs qui allaient du blanc au bleu nuit avec quelques images d'étoiles encore présentes.

« - Quel étrange accoutrement, fit remarquer Salida en se tordant dans les draps.

- J'ai demandé à Hicham quelque chose de plus ample et de plus facile à utiliser. J'ai les cartilages qui frottent lorsque je suis dans l'espèce de sac super serré. Il m'a donné ça, et cela me convient. Vous voulez quelque chose de plus confortable vous aussi ?

- Non, je ne trouve pas cela très beau. »

A ces paroles la guerrière leva les yeux au ciel en soupirant :

« - Nous sommes des chimères, à la base, nous ne portions rien, et nous ne porterons rien non plus lorsque nous reprendrons nos formes d'origine. Ne l'oubliez pas.

- Rien ne nous empêche de profiter de notre situation non plus. »

Là-dessus, la garde du corps ne répondit pas, elle se contenta d'éluder en déclarant :

« - Habillez-vous, nous devons descendre pour manger. »

Lorsqu'elles furent dans la partie restaurant, elles ne trouvèrent qu'Hicham, un bol de thé vert dans les mains, qui lisait un journal sur une table dans la grande salle. La table était recouverte des produits du petit déjeuner, du pain, du beurre, de la confiture, des fruits, une bouilloire d'eau chaude et un thermos de café. Le bol de thé faillit lui échapper lorsque les chimères s'installèrent à sa table, une de chaque cotés.

« - Tout va bien Hicham, ce n'est que nous, fit Tégos en le voyant franchement mal à l'aise.

- Est-ce que tu pourrais nous montrer comment se mange ce qu'il y a sur la table. »

Le jeune homme hocha la tête et commença à préparer un morceau de pain et de beurre. Il prit une confiture et entreprit de l'étaler sur le morceau de pain lorsque Tégos demanda :

« - Où sont Manuel et Fernand ?

- Partis travailler sur la ventilation du dôme douze. Ils reviendront pour manger ce midi à ce qu'ils ont dit.

- En quoi consiste leur travail au juste ?

- Ils doivent assurer la maintenance des systèmes d'aération des dômes.

- Ça a l'air plus intéressant que ce que l'on fait ici.

- Non, c'est bien plus difficile, c'est salissant, froid, il y a du vent et du bruit. C'est un travail extrêmement dur et dangereux. C'est pour cela qu'il est difficile de trouver des gens motivés pour s'en occuper.

- Mais je croyais que c'était un poste qu'ils avaient déjà tenus, non ? Demanda Salida.

- Oui, quand ils étaient jeunes. A l'époque, ils avaient besoin d'argent, surtout Manuel. Voilà, la tartine est prête.

- Bon, je vais essayer, fit la garde du corps en prenant du pain.

- C'est pour des crédit monétaire, c'est cela ? Qu'en faisait-il ?

- Je n'en sais rien, répondit Hicham, une grimace sur le visage en voyant Tégos couper le pain de manière anarchique. Mais il a travaillé dur jusqu'à l'incident.

- Quel incident ? Demanda Tégos se figeant immédiatement.

- Je ne sais pas trop, je n'ai pas eu toutes les informations, mais il y a eu des morts. Manuel a failli mourir ce jour-là, Monsieur Weng, ma tante, et même des membres du conseil se sont retrouvés impliqués.

- Ne parle pas de cela Hicham s'il te plaît : tu ne sais pas ce qui s'est passé, déclara Rachida du haut de l'escalier en le descendant difficilement.

- Je dis juste ce que je sais.

- Et tu ne sais pas grand chose. Mes chéries, il est des passés qu'il ne faut pas remuer. Car la vision du présent s'en retrouve changée. Laissez donc le passé à ce qu'il est.

- Mais... commença à objecter Salida.

- Manuel a failli mourir ce jour-là. Il n'a dû sa survie qu'à la chance, une mère et un ami. C'est tout ce qu'il y a à savoir. Oubliez le reste : il importe peu. »

La tenancière du restaurant finit de descendre les marches et se dirigea vers la table, elle jeta un regard qui imposa son choix à Salida qui allait encore poser des questions sur le sujet.

« - Bien, maintenant, Hicham, quand tu iras chercher le pain chez Rubrun, prends aussi l'un de ses fraisier.

- Génial, murmura le neveu, une lueur de gourmandise au fond des yeux.

- Emmène une des filles avec toi. Ça lui fera voir un petit peu la ville. »

*

* *

*

Après avoir rejoint leur équipe près de l'un des centre de traitement d'air, Manuel et Fernand enfilèrent des tenues blanches. Avec le chef d'équipe, ils étaient six. Ils étaient tous équipés avec des harnais, des casques anti-bruits, des écharpes capable de masquer le visage et des lunettes de sécurité semblables à celles utilisées en ski. Ils entrèrent par la porte du centre, puis pénétrèrent dans la bruyante machinerie pour arriver à une porte derrière laquelle un énorme bruit de sifflement se faisait entendre.

« - Allez, c'est l'heure de rentrer dans l'arène, fit le chef d'équipe un sourire au lèvres.

- Si tu pouvais éviter ce genre de référence, ça nous arrangerait. » Répliqua Fernand en plaçant le cache-nez sur son visage rouge.

Lorsque la porte s'ouvrit, la petite pièce fut immédiatement prise dans un vent violent. Le bruit était infernal. Les habits de la petite équipe claquaient sous les actions de l'air pulsé.

Les uns après les autres, ils accrochèrent leur harnais à un tube métallique qui se trouvait à l'entrée de l'accès de l'immense canalisation. En entrant, à leur droite se trouvait un immense ventilateur de cinq de mètres de diamètre, à leur gauche, un mur troué qui menait les canalisations aux différents endroits du dôme ventilé. Il leur était impossible de s'entendre dans le bruit ambiant, et, après avoir communiqué avec des signes, ils prirent des tuyaux d'aspirateurs intégrés dans la paroi et commencèrent leur travail. Les mouvements d'air généraient fréquemment de l'électricité statique. La poussière, se collait alors aux parois du système de ventilation, il était donc nécessaire de le nettoyer fréquemment pour éviter la panne. A l'aide d'un système de pression et dépression, des tuyaux avaient été intégrés, et aspiraient la poussière collante. Ce travail était accompagné de deux risques majeurs : le premier, était de passer dans les pales du ventilateur, mais il était contré par des élingues et des harnais. Le second, c'était l'électrocution, dues aux forte charges générées par le ventilateur, que ce soit au niveau de son moteur ou au niveau de l'électricité statique. Ce second risque était contré par les combinaisons blanches isolantes et antistatiques qu'ils portaient. Mais, aucune de ces deux précautions n'empêchaient les accidents.

Ils se séparèrent en plusieurs équipes de deux personnes. Les plus expérimentés étaient chargés de nettoyer le plafond. L'un des deux grimpait le long du mur circulaire jusqu'à atteindre le plafond, et son équipier était chargé de l'assurer en bas. Pour ceux qui travaillaient en bas comme Manuel et Fernand, le premier était chargé de maintenir le tuyau qui se secouait sous l'actions du vent violent, tandis que l'autre dirigeait l'orifice vers les poussières. Dans deux heures, les membres des binômes échangeraient leurs places. La mousse noire était aspirée et emmenée dans un compacteur. Elle servirait à autre chose. Dans la cité dévastée, tout était réutilisé. Au bout des deux heures de travail harassant, la canalisation était à moitié finie. Mais sous les ordres du responsable, le petit groupe sorti jusqu'à arriver à l'intérieur du dôme. La plupart laissèrent échapper des soupirs de soulagement en retirant les équipement de protection et en ouvrant leurs combinaisons. Ils étaient majoritairement en sueur, et échangèrent des bouteilles d'eau en plaisantant.

Une voiture verte s'arrêta en dérapant sur le sol de terre et de glaise. Yin en descendit et chercha les deux amis du regard.

« - Fernand, Manuel, montez ! Vite ! »

Après s'être regardés, surpris, les deux jeunes se dirigèrent vers le véhicule. Yin salua le chef d'équipe d'un levé de main, qui lui fut rendu.

Dés qu'ils furent montés, l'engin repartit de plus belle. Les deux jeunes s'étaient installé à l'arrière. Yin était sur le siège passager avant. Un conducteur maîtrisant son véhicule à grande vitesse se dirigeait vers un lieu connu de lui seul. Rapidement, le siège passager de Yin tourna pour leur faire face. Dans les mains du chinois, un pistolet noir mat était rapidement contrôlé.

« - Salida a disparu. Elle a été agressée avec Hicham selon Tégos. On a retrouvé Hicham, mais pas elle... »

Yin tendit l'arme à Fernand qui la prit après une petite hésitation. Manuel ouvrit sa combinaison et en sortit un lui aussi. Il fit rapidement les même contrôles que Yin.

« ... Grâce à la mémoire, Tégos à pu nous dire où elle est. Je suis passé vous chercher dés que j'ai su.

- Que s'est-il passé Yin ? Elles étaient sensées être en sécurité, vous en étiez garant, demanda Fernand

- Je sais. Mais visiblement, certains ne nous respectent pas assez pour nous écouter. La journée sera triste aujourd'hui... »

Alors que la voiture filait dans le dôme, le téléphone du chinois sonna. Les deux jeunes en profitèrent pour retirer les combinaisons blanches et les harnais. Chacun d'eux savait ce que les derniers mots du chinois voulaient dire : des gens allaient mourir. Avec surprise, ils constatèrent que la discussion téléphonique en chinois leur était facilement compréhensible. Ce point de détail devint vite futile lorsque Yin prononça un ''Mon Dieu'' inquiétant. Il regarda ensuite les deux amis l'air atterré, ils comprirent immédiatement que c'était grave.

« - On sait où ils sont grâce à Tégos, mais... ils la torturent. »

Une colère sourde s'empara des deux amis tandis que Yin donnait des directives au conducteur. Le véhicule accéléra de plus belle.

« J'ai déjà des hommes là-bas, ils sont en train de se mettre en position. Nous, on entre par la grande porte. Prenez la chimère, je m'occupe du reste. »

Manuel hocha la tête, perdu dans ses pensées.

Le véhicule arriva devant une usine désaffectée. A l'entrée, plusieurs hommes armés discutaient, certains en fumant une cigarette. Tégos était là elle aussi, fulminante. Visiblement, ils avaient attrapés le garde et l'avait mis a genoux, les mains sur la tête, face au mur d'enceinte de l'usine. Ce dernier était terrifié.

Yin échangea quelques mots avec ses hommes en sortant de la voiture avant que Tégos ne s'en mêle :

« - C'est vous le responsable de ...

- Tégos ! » Coupa vivement Manuel.

Elle avait les yeux blancs, prête à déchaîner son pouvoir sur toute personne en travers de sa route. Quelques larmes avaient coulés sur son visage et la douleur était aisément visible dans ses grimaces. Par la mémoire, elle souffrait autant que Salida. Et elle le fit comprendre à Manuel, de ne pas se mêler de cette conversation en un seul regard. Néanmoins, Le jeune homme, lui murmura simplement : ''pas maintenant, ce n'est pas la priorité'' qui eut pour effet de la faire réfléchir un court instant. Cela permit à Yin finir sa petite discussion avec ses hommes.

« - On y va, dit-il aux deux jeunes et à la chimère, avant de poursuivre à l'adresse de Tégos : pas d'action précipitée, il faut la récupérer vivante. Essayez de tenir le coup encore quelques instants. »

Ils avancèrent dans l'usine vide, avec deux gardes, les autres disparurent dés leur entrée dans l'enceinte de l'usine. La zone, vide, immense, procurait un lieu discret pour les activités illégales ou peu recommandables. Seuls les murs étaient encore debout. Les armatures en acier, les fenêtres, les systèmes d'alimentation en eau et en électricité avaient été arrachés pour recyclage. Même au sol, ne restait que le béton nu, parsemé de flaques d'eau de qualité douteuses, de détritus et d'objets abandonnés. L'endroit mettais mal à l'aise quiconque y pénétrait, comme un sixième sens qui alertait sur sa capacité à sortir de là en un seul morceau. Les cris, dans le lointains, résonnaient sur les murs vides comme un fantôme malade et n'aidaient pas à rassurer les plus inquiets. Guidé par l'asiatique, ils se dirigèrent rapidement vers la source, les anciens bureaux. Cela devint des hurlements au fur et à mesure de leur approche. Manuel savait que les hommes pouvaient être pire que des bêtes quand ils le voulaient. Mais découvrir cet endroit fut un véritable choc.

Salida était accrochée par les bras à dix centimètres au dessus du sol, nue. Elle était humide, et ils avaient branchés des électrodes, une sur la queue, l'autre sur la nuque. Son dos était sanguinolent, et malgré sa fourrure blanche, des hématomes étaient visibles. Elle avait un œil tuméfié, et la gueule en sang. Autour d'elle, une dizaine de personnes, hommes et femmes, certains avec des bâtons ou des barres à mines, d'autres avec des armes plus perfectionnées. Ils lui hurlaient leur haine et leur volonté de vengeance avant que la personne à coté du générateur n'envoie une décharge.

Elle hurla.

Personne n'avait remarqué l'entrée du petit groupe mené par Yin, jusqu'à ce que celui-ci abatte l'homme qui venait d'envoyer l'impulsion électrique. La stupeur d'être pris la main dans le sac les figea immédiatement dans le silence.

« - Je ne me souviens pas que mon père ou moi-même n'ayons autorisé ce genre d'actions. Avez-vous une explication à cela ? »

Personne ne répondit, Tégos voulu avancer pour détacher Salida. Mais un des garde du corps la retint par le bras en secouant la tête.

« - Et bien, j'attends, continua Yin. Manuel, aurais-tu l'obligeance de mener Salida en sécurité chez Rachida ? Kevin, conduis la voiture, puis reviens me chercher. »

Manuel se dirigea vers la chimère qui le regarda sans émotions avec ses yeux difficilement ouverts. Il la détacha avec des mots rassurants. La détonation qui se fit entendre ensuite les fit sursauter tout les deux. Yin venait de tirer une seconde fois sur l'une des personnes responsable de cette situation. Manuel constata alors une colère difficilement masquée sur le visage du chinois. Et, derrière lui, Tégos, toujours frustrée de ne pouvoir agir à sa guise.

« - J'ai posé une question et j'attends une réponse valable.

- Yin ? »

Manuel fit alors un signe de tête au chef de la petite équipe pour lui désigner la chimère noire. Lentement, le jeune mafieux releva son arme et commença à réfléchir. De son coté, Manuel enroula Salida d'un imperméable que lui donna l'un des garde du corps. Elle-même enserra les bords pour s'emmitoufler un peu plus. Lentement, des larmes et des sanglots commencèrent à faire hoqueter son corps endolori.

« - Comment peux-tu aider ce monstre ? » Déclara un des tortionnaires sous le coup de la colère tandis que le jeune homme soulevait la chimère dans ses bras. Salida se recroquevilla, laissant aller son museau dans le cou de l'ancien soldat, s'appuyant contre son épaule. Elle cherchait une sécurité qui n'était pas présente dans la pièce tant l'ambiance était lourde.

Yin mit immédiatement en joue celui qui venait de parler, mais il n'appuya pas sur la détente en entendant la réponse de Manuel :

« - J'ai longuement discuté avec elle. Je me suis même battu pour elle. Je pense en savoir assez sur cette chimère pour vous dire qu'elle est bien plus humaine que vous tous. Je lui dois également la vie, déclara calmement Manuel en serrant la chimère dans ses bras.

- Ne lui cherche pas de fausses excuses ! » Reprit son interlocuteur en faisant un pas.

Yin arma le marteau du pistolet avec un cliquetis métallique.

« - Vous venez de prouver à toutes les personnes ici présentes que des Hommes au cœur de monstres existaient. Alors, pourquoi pas des monstres aux cœurs d'Hommes ? Vous vous êtes trompés de cible... Le reste ne me regarde pas. »

Tandis que les mots sortaient de sa bouche, Manuel comprit immédiatement que c'était Ego qui lui soufflait ces paroles si fortes. Mais, il était d'accord avec lui : ceux qui avaient fait cela n'avaient plus rien d'Humain.

Yin, laissa revenir son arme le long de sa jambe en constatant que les mots de Manuel glissaient sur la conscience de ces bourreaux, qui, de toutes évidence, voulaient en découdre. Son pouce ramena le chien lentement à sa position de sécurité sans tirer. Il marcha et se positionna face à Tégos, légèrement décalé pour laisser les agresseurs de la princesse dans le champs de vision de la chimère.

« - Sais-tu te battre ? Murmura-t-il

- Oui ,grogna-t-elle, le regard figé, vitreux, sur ceux qui avaient touché celle qu'elle était sensée protéger, tandis que Manuel, suivi par un de hommes de Yin, sortait de la pièce. La princesse sanglotant entre ses bras.

- Voulez-vous vous battre ?

- Oui.

- Seule ?

- Oui.

- Je ne peux pas vous laisser seule : mes ordres et mon autorité ont été bafoués. Me permettrez-vous de vous assister dans cet exercice ? »

De surprise, Tégos le regarda, les yeux redevenus normaux. Lentement, elle comprenait la raison pour laquelle le mafioso ou Manuel l'avaient empêché de s'en mêler. Maintenant, on lui donnait l'occasion de procéder de manière ''légale''. Ils avaient tout les deux une raison de s'occuper des agresseurs de Salida. Elle prit rapidement sa décision :

« - D'accord.

- Faites-les descendre, il y a de la place en bas. » Déclara-t-il à l'un de ses hommes.

D'un geste de son arme le garde montra aux fautifs l'escalier. Ils descendirent jusque dans les immenses salles vides. Là, le rejoignirent les autres hommes de Yin, ils formèrent un cercle dépareillé autour du groupe qui avait enlevé Salida. Yin enjoignit Tégos de le suivre dans le cercle. Là, il retira sa veste, sa cravate, et ouvrit son col de chemise après avoir confié son arme à l'un de ses hommes.

« - Bon, vous vouliez vous battre contre une chimère ? Vous en avez une en face de vous qui a quelques comptes à régler. Et, comme j'en ai également, je vais me battre a ses cotés. Si l'un de vous fait mine de s'en aller, il sera abattu. La chimère a un pouvoir, vous avez droit aux armes blanches... »

*

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