2 : Secrets (2/3)

Berik frappa à la porte du bureau d'Arsear, mais il n'entendit aucune réponse. Il se décida à entrer, pour trouver le bureau vide. Son supérieur n'était pas là. Il ressortit et commença à le chercher à travers les coursives du navire. Un esclave lui signala qu'il l'avait vu monter sur le pont supérieur extérieur durant la nuit. Berik s'y dirigea, se promettant de découper cet esclave en fines rondelles si le Capitan n'y était plus.

Mais il trouva Arsear là où l'esclave lui avait dit. Il était là, debout, à regarder le soleil se lever, un livre fermé à la main gauche. Une étrange sensation l'envahit.

« - Capitan ? »

Sans un mot, Arsear se retourna. Durant un infime instant, Berik vit que quelque chose s'était produit. Son supérieur avait perdu... ou gagné, quelque chose qui l'avait profondément changé. C'était comme s'il était à des kilomètres de lui, alors qu'il était juste devant ses yeux. Il semblait totalement intouchable, une grandeur quasi-royale l'entourait, comme un écrin de protection invisible.

« - Qu'y-a-t-il ? »

Ces quelques mots sortirent l'intendant de son mirage pour lui présenter le Capitan normalement. Dans un habit propre, ce qu'il n'avait pas vu depuis plusieurs jours. Quelque soit la raison pour laquelle il s'était enfermé dans son bureau, c'était terminé. Et cela soulageait en parti l'intendant. Mais cet étrange regard, lui, était resté, et il ne savait trop comment l'interpréter.

« - Nous arrivons en vue des forges, nous avons mis plus de temps que prévu car...

- Je sais, coupa Arsear en regardant en direction du soleil couchant, j'en avais donné l'ordre.

- Quels sont les ordres suivants ?

- Posez-vous, libérez les troupes jusqu'à nouvel ordre. Quartiers libres. Que les esclaves nettoient mon bureau ainsi que l'ensemble du vaisseau durant notre séjour dans les forges. »

Au loin, d'énormes installation s'étendaient à perte de vue. Des fumées noires s'échappaient vers le ciel, comme autant de brasiers.

« - Bien, autre chose,... La gouverneur a essayé de vous contacter. J'ai demandé sur quel sujet et si je pouvais prendre un message. Mais elle m'a dit que c'était au sujet d'un livre très important. Elle a demandé à ce que vous la recontactiez le plus rapidement possible.

- Bien. »

Les yeux de Berik se posèrent sur le livre dans la main de son supérieur tandis que ce dernier levait la tête pour voir les hautes colonnes de fumées noircir le ciel pourpre comme de l'encre tombe dans l'eau.

« - Non, ce n'est pas ce livre, que cherche la gouverneur. Je ne sais même pas de quoi elle parle. » rajouta le guerrier Saurien devinant les interrogations de son intendant.

« - Bien, je vais diriger les manœuvres Capitaine. » Dit Berik en disparaissant, mal à l'aise, dans les profondeur du navire.

Arsear ne répondit rien, il se contenta de regarder le ciel violet sali par les fumées crasseuses avec un air triste.

*

* *

*

Les deux soldats avaient repris des entraînements avec les gardes du corps. Ils enseignaient avec beaucoup de pédagogie les bases qui leur manquait. Mais lorsque le médecin imposait le repos, ils étaient quatre à s'ennuyer dans la petite chambre.

« - T'as une lettre Manuel, fit le garde roux, en entrant dans la pièce.

- Merci Max. » répondit le jeune homme en prenant le courrier.

La lettre venait de Bordeaux, Quand il le vit, l'enveloppe fut rapidement transformée en confettis pour en obtenir le contenu. Ses yeux se couchèrent à peine sur le papier que des larmes coulèrent sur ses joues.

« - Qu'est-ce qui se passe ? » Demanda Fernand, inquiet.

Manuel replia le courrier avant de le lui tendre. Puis il s'allongea sur le lit, cachant ses larmes aux personnes présentes dans la salle avec lui.

Dés les premiers mots, Fernand comprit qu'il s'agissait d'une lettre de rupture de Marilyn. Et que rien ne pourrait le consoler, il fallait lui changer les idées.

« - Frantz, si tu as la possibilité de contacter les chimères, dit leurs que je voudrais voir Kouiros ou Ernach s'il te plaît.

- Les chimères ? T'es sûr ?

- Oui, on leur doit des explications. »

Manuel doit absolument se changer les idées...

Fernand vit son ami de dos, et, il se disait que Marilyn, au moins, était vivante. Que lui, ne reverrait plus jamais Véronique. Discrètement le Capitaine Aquil quitta la pièce après un regard entendu avec son collègue.

*

* *

*

« - Mais vous êtes complètement con ou quoi ?! Hurla le professeur Belamour en tailleur bleu dans le bureau de Higas. Elle avait les mains posées sur son bureau et exprimait une colère non masquée.

- Au moins, il est sous contrôle total. Il ne pensera plus qu'à sa mission désormais.

- Qu'est-ce que c'est que cette psychologie de comptoir ? Avez-vous lu son dossier bordel ? Jamais de mensonges ! C'est écrit noir sur blanc ! Ne lui dites pas la vérité, mais pas de mensonge non plus ! Comment réagira-t-il quand il se rendra compte que ...

- Je ne vous ai pas demandé votre avis, coupa-t-il sur un ton tranchant.

- Non, vous m'avez demandé de réussir. Ce qui reviens au même ! Ne vous mêlez pas de mes expériences si vous voulez des résultats !

- Occupez-vous de ce que vous avez à faire. Ne vous occupez pas de mes décision. Je suis le commandant ici, et si ça vous plaît pas, je vous emmerde. »

En disant cela, il s'était levé, avait lui aussi posé ses mains sur le bureau, et son visage s'était rapproché de celui de la scientifique.

Il y eut alors un petit silence. Puis un sourire enfantin éclaira le visage du professeur Belamour.

Avec une vitesse extraordinaire la main gauche du professeur plaqua celle de droite du commandant tandis que la main droite alla chercher un stylo dans un pot sur le bureau. Le commandant Higas hurla de douleur lorsqu'elle lui planta la pièce de plastique au travers de la main.

Elle sortit en claquant la porte par laquelle son secrétaire était entré, alerté par les cris, avec un dernier « connard ! ».

*

* *

*

« - T'es sûr d'être en état ? »

Manuel hocha la tête. Ils marchaient, guidés par le professeur Belamour, dans les profondeurs du centre de recherche. Derrière eux, leurs deux gardes du corps, alertes, avaient l'air plutôt inquiets. Ils arrivèrent finalement à une salle de contrôle où travaillaient une grande quantité de personnes en blouses blanches. Sur les deux écrans de la salle, deux AMC, celles-là même qui avaient fait un carnage sur le monde Silridriss.

« - Qui commence ?

- Je vais y aller en premier, fit simplement Fernand avant que Manuel n'eut pu dire quoi que ce soit.

- Manuel, assis-toi là pendant qu'on s'occupe de Fernand. » Dit la professeur en montrant une chaise dans un coin. Le jeune homme, dénué de toute volonté s'installa là où on lui disait.

« - Fernand, viens avec moi. »

En sortant de la salle, le professeur se retourna vers Manuel, quelque chose dans ce regard vide de toute émotion, d'envie, l'inquiétait.

Le jeune pilote, perdu dans ses pensées, ne suivit pas ce qu'il se passa avec Fernand. Seul son hurlement le ramena à la réalité. Sur un des écrans, il vit son ami sortir avec force et vitesse du poste de pilotage de sa machine rouge. Puis, se retourner, le regard empli de terreur.

« - Berserker deux, que ce passe-t-il ? Répondez ! fit une voix dans les hauts parleurs de la salle.

- Y'a un truc monstrueux là-dedans. Je sais pas ce que c'est, mais c'est clairement pas net ! Moi je tiens à ma peau !

- Retournez-y.

- Vous rigolez ? C'est mort, je remet pas les pieds là-dedans, c'est trop malsain comme sensation.

- Berserker deux, c'est un ordre.

- Non, je suis courageux, pas suicidaire. »

Dans la salle le capitaine Aquil fronça les sourcils.

« - Abandon de la procédure pour le Berserker deux, préparez Berserker un. »

C'est moi... pensa Manuel.

Une main large et épaisse se posa sur son épaule. Le pilote tourna la tête pour trouver le visage souriant du capitaine Aquil.

« - Je vais t'aider, lui-dit-il, écoute ma voix, et tout se passera bien.

- Mais, si Fernand n'arrive pas à...

- Personne ne sait ce que ces choses sont capables de faire, ni même comment les contrôler. Là-dessus, ton ami et toi êtes des pionniers. Je ne sais pas ce qui t'attends là-bas, mais je te fournirai tout les conseils possibles pour que tout se passe bien. D'accord ?

- D'accord. » Répondit Manuel avec un sourire triste.

Le professeur Belamour qui avait suivi le petit échange verbal tendit un casque au capitaine avant de guider Manuel jusqu'au vestiaires, où on lui fournit un étrange attirail. On lui expliqua que c'était là-dedans qu'il avait été récupéré. Un fois revêtue, l'ensemble était fait d'une espèce de combinaison noire moulante, d'une paire de bottes semblables à des bottes de ski alpin, et d'un plastron. Les gants approchaient plus le matériel médiéval que la haute technologie. Le casque était le modèle classique de l'armée à quelque modifications près. Là où les anciens se fermaient par le haut, celui-ci avait trois éléments de fermeture : deux de chaque coté de la bouche, le troisième était une visière pour les yeux. Il croisa son ami dans le sas, ils portaient à peu de choses près la même combinaison. Celle de Fernand, de couleur orangée, semblait plus massive, et possédait plus de pièces.

« - Fait gaffe mon pote, y'a un truc là-dedans, qui ne te veux pas que du bien.

- Merci.

- J'déconne pas Manu. Sois prudent. »

Dans la pièce où il pénétra, l'armure blanche, argentée et noire l'attendait.

Dans son casque, le professeur Belamour, lui demanda de monter à bord. L'ordre fut contredit par Aquil, il lui dit de monter quand il se sentirait prêt. Le reste fut une grosse dispute vite coupée par l'opérateur.

Lentement, Manuel s'approcha de la machine. Elle était impressionnante, aucune trace de vérins, de capteurs, de vis ou de trappes. On aurait dit une statue de métal, la plaque pectorale du ventre ouverte, un technicien l'attendant juste à coté pour l'aider à s'installer. Manuel l'ignora et commença par contourner l'immense machine. Une AMC provoque généralement un sentiment de puissance à son pilote, et génère la terreur à celui qu'il affronte. Là, les deux sentiments se mélangeaient en Manuel. Primo, il allait devoir la piloter, secondo, il ne voulait pas se battre. Encore moins avec ce genre de chose. Il s'approcha par la droite l'étrange machine et posa sa main sur la cuisse poilue. Une vague comme une holà de supporter de football parcouru les poils.

C'est vivant...Impossible : c'est métallique...

Il continua son tour, observant les plumes des ailes repliées, le grand tube dans le dos, les pièces d'armure recouvertes de traces de Bismuth. Cela ne ressemblait en rien de ce qu'il connaissait jusqu'à présent. Machinalement, il monta la petite estrade pour atteindre le poste de pilotage. Ce faisant, il observa les yeux de la machine. Tout les deux noirs, éteints, sans vie.

« - Est-ce que tu es prêt ? » Demanda Aquil dans son casque.

Le regard de Manuel se dirigea sans aucune émotion vers le technicien qui attendait, accroupi à coté de l'entrée, attendant qu'il se décide à entrer. Puis, ils allèrent dans la pénombre inquiétante du cockpit. C'était un simple siège avec des accoudoirs fait de métal et complètement intégré dans la structure. Pas de harnais, pas de manettes de commandes, pas de gants de contrôles. Aucun écran ni de câbles ou de boîtier de branchement. Rien de tout cela. L'image qui lui vint en tête fut celle d'un sarcophage mortel. Telle une vierge de fer qui ne dit pas son nom, l'équipement attendait sa présence pour démarrer une torture longue et douloureuse. Très lentement, sans dire un mot, il s'installa, ses mains sur les accoudoirs. Sa respiration s'accéléra en repensant à ce son ami lui avait dit. D'autant qu'une fois à l'intérieur, la sensation de s'être installé au fond de son propre cercueil s'était amplifiée.

« - Installe-toi au fond du siège et ferme les yeux, reprit Maximilien. Oublie tout ce qui t'entoure. Oublie où tu es. Ne pense à rien, Fait le vide complet dans ton esprit. La peur et l'appréhension disparaîtront vont diminuer. Prends les choses comme elles viennent. Oublie l'univers qui t'entoure. Plus rien n'a d'importance. »

Tandis que les directives d'Aquil frappaient ses tympans, Manuel sentit le technicien lui retirer ses lunettes.

Soudain, il n'entendit plus la voix de son garde du corps. Un vent glacial lui soufflait doucement sur le visage. Mais rien n'avait d'importance. Il resta ainsi un moment avant de demander :

« - Qu'est-ce que je fais maintenant ? »

Mais il n'y eut pas de réponses. Il releva la tête et ouvrit les yeux, avant de pester sur sa situation.

« - Mais qu'est-ce que c'est que ce bordel ? »

Il était debout, sur une plateforme circulaire en pierre de cinq mètres environ. Au-dessus de lui, un ciel d'un bleu pur limpide, loin en dessous de lui, une immense mer de nuages qui roulaient comme les vagues de l'océan. Pas de soleil, mais une lumière éclairait tout, aucune d'ombre en ces lieux. Il s'accroupit pour regarder la petite plateforme de plus près. Les pierres étaient grossièrement taillées et des herbes poussaient dans leurs interstices. Une couche de gel recouvrait les pierres, à peine quelques millimètres. Mais pas les végétaux.

Il commença à tourner pour chercher un point de repère. Et ses yeux se posèrent sur un immense et massif château fort. Ce dernier avait l'air d'avoir été la cible d'une attaque il y a très longtemps. Les tours avaient subi à la fois des attaques brutales et les ravages du temps. Le gel et la végétation le recouvraient dans sa majorité. Une passerelle permettait d'accéder à l'entrée de la bâtisse. Et Manuel emprunta le passage avec beaucoup de précautions. Le pont-levis était absent, et le jeune homme s'approcha de l'immense porte de bois et de fer avec beaucoup de prudence. Fernand l'avait mis en garde, il y avait quelque chose ici de dangereux, et il le sentait, ce n'était pas loin. Mais il n'avait aucun moyen pour faire demi-tour. Sa seule option consistait à visiter le château.

Il poussa à peine le battant droit, et celui-ci s'ouvrit sans difficultés et sans bruits. L'intérieur contrastait fortement avec l'extérieur. Du marbre blanc recouvrait les pièces du sol au plafond. La pièce était immense et des colonnes soutenaient le plafond à intervalles réguliers. Pas de décoration, pas de statue, pas de gravure, aucune information n'était donnée pour expliquer sa situation. En différents endroits des portes donnaient accès aux autres lieux de la bâtisse. Une porte de bois blanc, avec des ferronneries noires, entourée de deux escaliers en demi-cercles attira sa curiosité. Mais il se décida finalement pour aller sur la droite, l'étage supérieur et les pièces principales attendraient : c'était là où il avait le plus de chances de tomber sur la créature qui l'attendait. Avant cela, il voulait avoir une vision claire des lieux et des possibilités de fuite si le besoin s'en faisait sentir.

Il entra dans une pièce dont l'un des murs était manquant, derrière, la mer de nuages continuait son perpétuel mouvement. Un arbre avait poussé sur le sol de givre, près du trou. Le reste de la pièce était vide.

Il trébucha sur quelque chose.

Blanc sur blanc, parfaitement nettoyé et sans ombre, il aurait difficilement pu voir le squelette au sol. Il se baissa, pour l'observer plus précisément. Le crâne entre les mains. La forme lui rappelait vaguement quelque chose. Le jeune homme avait une seule certitude : l'os n'était pas humain.

Soudain, il remarqua qu'il y avait deux squelettes. Un frisson le parcouru quand il comprit qu'il s'agissait de Silridriss.

Qu'est-ce que c'est que ce cirque ?

Il reposa le crâne et continua son avance dans le large couloir devant lui. Des arches givrées recouvertes de lierres à sa droite montraient l'extérieur et la mer de nuages. Il avança, jusqu'à une porte, qui comme la première était faite d'un bois blanc avec des ferronneries de métal noir.

Avec de grandes précautions, il poussa la porte. Pour découvrir une immense bibliothèque. Des rayonnages sur une hauteur de trois où quatre étages. Et des livres à perte de vue. Un petit livret voleta comme un colibri autour de son visage tout en battant de la couverture comme avec des ailes. Aussi vite il arriva, aussi vite il partit.

Dans les hauteurs d'autres livres, plus gros, battaient mollement de leurs couvertures, et avançaient plus lentement également. Il aurait voulu pouvoir donner une dimension à cette bibliothèque, mais les murs partaient en arc de cercle de chaque coté.

Le jeune pilote se glissa entre deux rayonnages et avança. Ce faisant, il chercha à en lire les titres sur les couvertures. Mais il n'y avait rien d'écrit.

Soudain, il le vit, là, juste après le rayonnage. Un loup ailé blanc comme la neige avec des marques tribales noires, sa queue, semblable à celle d'un oiseau lyre ondulait lentement au-dessus du sol. Assis, il était aussi grand que Manuel, et il lisait un livre sur un pupitre de bois au centre de la bibliothèque. Pour le moment la créature lui tournait le dos. L'une de ses queues tourna d'ailleurs une page de l'ouvrage tandis que l'étrange animal continuait son étude.

Quelque chose, derrière cet étrange lecteur attira l'attention de Manuel. Cela ressemblait à une énorme colonne d'eau brillante. Il se dit qu'il devrait aller voir, de la manière la plus discrète possible. Il fit donc demi-tour dans le rayonnage pour longer le mur et atteindre ce qu'il voulait voir. Le loup blanc releva la tête de son livre et tourna imperceptiblement la tête vers le jeune homme. Un sourire se traçant sur ses babines.

Le jeune homme se rendit compte que la bibliothèque était une immense pièce circulaire ouverte. Il en sortit aussi discrètement que possible, cherchant du regard l'étrange lecteur qui avait disparu de derrière son pupitre.

Jamais il n'aurais pu imaginer ce qu'il allait découvrir dans la pièce suivante : Salida. L'énorme tigresse ailée était coincée, inerte dans une immense colonne d'eau au-dessus d'un étang. Les nénuphars et les lotus couraient sur la colonne comme ils l'auraient fait sur la surface d'un véritable étang. Elle était plus petite, a peine plus grande qu'un vrai tigre. Elle était ainsi en suspension dans le liquide, comme si un crochet invisible la retenait par le ventre.

Comment la sortir de là ?

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