9 : Sarbacks (1/3)

Manuel et Mylène suivirent leur père à travers le centre de recherche. Ils utilisèrent un ascenseur pour aller profondément sous terre puis empruntèrent de nouveau un dédale de couloirs. Ils arrivèrent devant une porte blindée équipée d'un sas. Dans un carton qui traînait à coté, le professeur prit une paire de sur-chaussures et des gants vinyles. Il en tendit les boites à chacun de ses deux enfants avant de pénétrer plus avant.

« - Pour commencer, Mylène, je vais te présenter à la personne avec qui tu vas travailler. »

La porte du sas se ferma, et l'autre s'ouvrit. A peine s'était-elle entrebaîllée que les cris d'une dispute se firent entendre.

C'était une salle d'essai suffisamment grande pour contenir quatre ou cinq AMC. Les murs étaient en béton renforcés peint en jaune clair. Et le sol était recouvert d'époxy, comme dans les parkings souterrains. Il y avait deux autres portes à la salle, une d'un autre sas, et l'autre était une épaisse porte d'acier pour AMC.

La pièce était dans un état lamentable Les murs avaient prit des coups extrêmement violents, les gravats et la poussière parsemaient le sol. Les murs et le plafond avaient été entamés sur parfois un mètre de profondeur. Même la porte d'accès des AMC avait été pliée alors qu'elle faisait plus de quinze centimètre d'épaisseur. Quelque soit ce qui avait été présent dans cette pièce, ça avait été d'une extrême violence et ça avait essayé de s'échapper.

Le professeur Ferreira entra sans prêter attention au décor et se dirigea vers les deux protagonistes. Avant de remarquer qu'il n'était pas suivi. Les deux jeunes avançaient lentement, visiblement perplexes sur ce qui s'était déroulé ici.

« - Les murs font combien d'épaisseur ? Demanda Manuel.

- La longueur du sas que nous avons traversé, environ deux mètres. Rassures-toi, ici, tout est sous contrôle.

- Vous faites dans l'élevage de T-Rex ou quoi ? demanda Mylène visiblement impressionnée.

- Désolé, je n'ai rien le droit de dire, mais ne t'inquiète pas, ce qui a été présent ici ne s'est pas échappé. Allez, venez. »

Les deux protagonistes étaient une femme dans le même type de blouse blanche que le professeur Ferreira et un jeune homme en tenue bleue. Visiblement, la dispute était terminée car la jeune femme ne cessait de répéter : « Tires-toi tu me gonfles » et l'homme prenait ses distances avant de quitter la pièce, penaud, par l'autre sas.

Elle se retourna et Manuel put la voir complètement. Elle était blonde avec une coupe au carré. Elle avait également une paire de lunettes carrées bleues, derrière, un regard émeraude plutôt dur et compétent qui analysait tout ce qui l'entourait.

« - Bonjour José, dis donc, elle n'est vraiment pas simple ton affaire. Ça fait le troisième essai et aucune piste sérieuse de stabilisation n'a été trouvée. Je commence à ... Ce sont tes enfants ?

- Oui, je te présente Mylène et Manuel. Les enfants, je vous présente le professeur Daniela Wolkeazurblau. Mylène, tu serviras d'assistante à Daniela.

- Euh, écoute papa, ne le prend pas mal, mais mon truc c'est la programmation et les armures, accessoirement la construction, pas le secrétariat.

- Justement, j'ai pas mal de sujets de travaux sur lesquels je veux que tu travailles, répondit Daniela avant que Ferreira-père ne puisse répondre. Et, si tu es aussi douée qu'il le prétend, tu travailleras sur des sujet de plus en plus intéressants. Dans le cas contraire, je te renvoie chez ton père. Je suis gentille mais je ne fais pas garderie.

La femme sortit un paquet de cigarette et entreprit d'en allumer une mais fut stoppée par le professeur Ferreira.

« - Aucune source d'énergie ici.

- Exact, répondit-elle après l'instant où leurs yeux se croisèrent, mais c'est à cause de l'autre couillon, là. Je suis complètement déboussolée.

- Qui ? Franck ? Le technicien de tout à l'heure ?

- Oui, Il y a vraisemblablement eu une erreur dans le protocole de gestion des matériels dangereux... Comment dire ça sans qu'ils comprennent ... murmura-t-elle en regardant Mylène et Manuel. Un cent-quatre s'est retrouvé dehors. T'imagines les risques ? »

Un « cent-quatre »... qu'est-ce que c'est ?... pensa Manuel.

- Au soleil ? y-a-il eu propagation ?

- Non, on a eu du pot, il était à l'ombre et il n'y a pas eu de propagation. Il a été récupéré avant.

- Combien de temps dehors ?

- Assieds-toi : deux semaines. »

Le professeur Ferreira souffla un long soupir :

« - Oui, on a eu de la chance. Et Franck ?

- Viré. C'est le genre d'erreur qui n'est pas pardonnée.

- Je comprends, bon, je vais retourner sur mon sujet de recherche, je te laisse ma fille. Prends en soin.

- Tant qu'elle bosse... »

*

* *

*

Pendant qu'il suivait son père, Manuel essayait de comprendre ce que pouvait bien être un ''cent-quatre''. Mais il dû bientôt reconnaître qu'il n'avait pas toutes les informations. Cependant une chose était sûre : c'était extrêmement dangereux.

Ils pénétrèrent bientôt dans une salle ressemblant à un atelier dans lequel quatre personnes en blouse blanches travaillaient. Une chimère les regardait faire, intéressée par leurs actions. Elle était orange et verte avec des plumes, un mélange entre un ours et un oiseau sans ailes. Au milieu de la pièce, quatre Sarbacks en plus ou moins bon état, en cours de démontage.

« - Papa, murmura Manuel en retenant son père par la manche. Devant la chimère je ne suis plus ton fils. Je suis Doux-dingue... »

Le professeur Ferreira interrogea son fils du regard avant de reporter son attention sur la créature. Elle regardait ce qu'un des chercheurs faisait sur un des bras de tirs avec la plus grande application.

« - Ha ?... Bien, on verra le pourquoi plus tard. Viens ! »

Il mena son fils près de la seconde machine, et se dirigea vers l'arrière.

« - Pour commencer je te dirais d'oublier tout ce que tu sais au sujet de la mécanique. Cet engin n'a aucun élément de piston ou de puissance motrice. Il n'a même pas de moteur à proprement parler.

- Comment ce truc peut-il se mouvoir sans moteur ? Demanda Manuel

- Avec de l'Erapha. » Répondit une grosse voix derrière lui.

Manuel se retourna, voyant la chimère le regarder de près. Elle avait les pupilles jaunes or sur un fond noir. Avec le mélange de plumes vertes et oranges, l'image semblait irréelle tant elle était belle. Elle tentait également de le renifler par curiosité, mais de loin.

« - Bonjour Arson, je te présente ...

- Monsieur Doux-dingue, coupa la chimère, je suis honoré de vous rencontrer.

- Doux-dingue, je te présente Arson, il nous fournit de précieuses informations sur le fonctionnement des machines Silridriss.

- Bonjour monsieur Arson, Vous savez comment ça se meut ?

- Non, mais nous les avons vu en utilisation, et vous aussi. Nous pouvons donner les informations de ce que chacun d'entre nous a vu...

- La mémoire... murmura Manuel en regardant l'épave noire.

- Oui, appelez-moi Arson simplement s'il vous plaît.

- OK, mais tu me tutoie en retour. Bon, Professeur, je vous écoute.

- Bien, comme vient de te te faire remarquer Arson, cette machine est mue par Erapha. Le poste de pilotage se trouve à l'extrémité arrière, dans cette espèce d'abdomen... »

Manuel posa ses yeux sur le poste de pilotage en morceau.

« ... Comme tu peux le constater, c'est un biplace. Nous pensons que le siège le plus en avant est celui du pilote et que derrière lui est une sorte d'artilleur... »

Le jeune homme vit que le poste de pilotage n'avait rien à voir avec celui des AMC. Le siège n'avait pas de harnais ou de ceinture et ne paraissait pas très confortable, mais il était relativement spacieux comparés aux AMC où le pilote restait coincé dans tout les sens du terme. Sur un piédestal, qui devait passer entre les jambes du pilote trônait une sphère en verre brisée, avec, un peu plus bas, deux pédales. Au fond, sur un pupitre, là où aurait dû se trouver un écran, ou quelque chose d'assimilé luisaient faiblement cinq petites pierres, quatre rouges et une bleue. Les pierres étaient placées en pentagone, chacune au centre d'un symbole complexe que Manuel ne comprenait pas. Chaque signe était lui-même entouré d'un cercle et d'une ligne gravée qui disparaissait derrière le pupitre. Les lignes et les cercles renvoyaient des reflets de toutes les couleurs.

« ... nous n'avons trouvé aucun système de commande en dehors de ces pédales. En revanche, nous savons à quoi servent les pierres au fond.

- Ce sont des éléments de stockage d'énergie magique, commença la chimère de sa grosse voix. Les Silridriss les utilisent fréquemment. Les rouges sont des accumulateurs, elles délivrent un Erapha constant jusqu'à leur disparition et les bleues sont des canalisateurs, elles récupèrent l'Erapha ambiant pour la réutiliser. L'énergie des pierres bleues est inférieure à celle des rouges. Leur fabrication est un secret que les Silridriss conservent jalousement...

- Comment avez-vous eu ces informations ? Demanda Manuel en inspectant les parties intérieures de la machine.

- La mémoire, là encore, l'un d'entre nous s'était lié d'amitié avec le technicien de la porte qui nous a permis de nous enfuir. Il lui a confié certaines informations comme celles-ci.

- On va passer à la coque Doux-dingue, repris le professeur Ferreira, chaque pièce fait quelques centimètres d'épaisseurs, sauf en dessous ou elle ne fait que quelques millimètres. C'est un acier bas de gamme à forte teneur en carbone. C'est l'équivalent d'un acier moyenâgeux. La micrographie nous signale que le procédé de fabrication est la forge, pour un peu, on jurerait que ça a été fabriqué à la main.

- C'est quoi ces reflets colorés un peu partout ?

- On ne sait pas, on suppose que c'est un moyen d'amener l'énergie magique aux différentes pièces d'armure. Un peu comme sur un circuit imprimé.

- Et c'est en quoi ?

- Bismuth. Cristal de bismuth pour être précis. Et, les lignes que tu vois sont aussi épaisses que des feuilles de papier.

- Du bismuth ? redemanda le jeune homme.

- Un élément classé dans les métaux lourds. Température de fusion basse et peu de résistances mécanique. Un peu plus lourd que le plomb. On ne l'utilise plus aujourd'hui. »

Manuel commença à regarder les pattes du Sarback avant qu'Arson ne prenne la parole :

« - Doux-dingue, il est nécessaire que tu saches autre chose, toutes les machines de guerre Silridriss sont équipées de boucliers.

- Comment ça ?

- Lorsque les Silridriss nous ont chassé de notre monde, chacune de nos attaques était stoppée par une sphère jaune qui enveloppait la machine. Nous ne voyons la sphère que lorsqu'une attaque le frappe... »

Manuel se remémora les affrontements avec les Silridriss près de Pau.

« - Je n'ai rien vu de tel.

- Oui, nous pensons que votre monde est trop pauvre en Erapha. La pierre bleue de cette machine alimentait probablement le bouclier. Donc, pas d'Erapha... pas de bouclier. Même nos pouvoirs sont très limités en puissance et dans le temps à cause de cela ... »

Leurs pouvoirs sont limités ! Merde... alors, durant le conflit, ils n'étaient pas à pleine puissance...et les boucliers Silridriss les stoppaient !?!

« ... L'autre possibilité, c'est que vos armes n'utilisent pas l'Erapha, et que le bouclier n'ait pas été conçu pour ça. Par conséquent, il est inutile.

- Vous... êtes... limité ? Interrogea Manuel, n'y croyant vraiment pas.

- Oui, repris la chimère verte-orange, bien que, d'après certaines théories de chez nous, votre monde ne devrait pas exister. »

Manuel arrêta son examen des pattes de la machine pour regarder Arson de manière interrogative. Celui-ci se senti obligé de donner une explication.

« - D'après ces théories, la quantité de vie d'un monde est proportionnelle à sa quantité d'Erapha. Or, ton monde déborde de vie, mais sa puissance magique est quasi-nulle... ce qui est paradoxal. Des études sont en cours pour tenter d'élucider ce mystère et nous avons quelques pistes qui...

- On s'éloigne du sujet Arson... » Intervint le professeur Ferreira.

La chimère hocha la tête en signe d'acquiescement. Manuel reprit son examen des pattes.

« .... Il y a huit pattes sur les Sarbacks, continua le professeur et celles-ci se terminent par des crochets. On pense que c'est pour pouvoir grimper aux parois et aux murs le cas échéant. Mais, rien n'est moins sûr. Pour ce les armements, on patauge concernant les armes de tirs... quand aux ... épées, appelons ça comme ça, elles sont fixées aux bras et on n'a rien trouvé d'intéressant dessus.

- Ils se repèrent comment ? La pierre verte sur l'abdomen ? Demanda Manuel.

- Oui, mais les modes de vision disponibles, et comment cela est affiché dans le cockpit, nous n'en avons aucune idée, répondit son père.

- Ce qui m'intéresse c'est que Oneshot s'est fait repéré rapidement près de Pau, alors... si tu avais une info sur comment ils ont pu repérer rapidement une unité furtive...

- Non, je suis désolé, je n'ai rien. Peut-être un camouflage optique serait-il efficace... Mais là, il faudra adapter le système à une AMC de moyenne gamme... et vu la puissance motrice de la machine et les options furtives, il devra oublier le corps à corps.

- Un camouflage optique sur une AMC ? A voir. Quels sont tes conclusions et tes sentiments sur cette machine ? »

Le professeur Ferreira inspira un bon coup avant de parler :

« - Ce truc est exclusivement basé sur l'assaut. Il n'est fait que pour ça : l'attaque. Et, sa conception fait que même sévèrement endommagé, il pourra continuer le combat. La seule solution pour le mettre hors d'état de nuire... c'est de tuer l'équipage. Et là encore ce n'est pas simple : de face, c'est quasi-impossible sauf en touchant à la base du torse...

Manuel se souvint de son tir sur le Sarback et en imagina les effets.

A l'origine, je visais le milieu du torse. C'est le recul de la première cartouche qui a fait que j'ai été imprécis sur le deuxième tir... par chance, j'ai touché un point sensible... mais l'endroit est à se rappeler.

« ... La protection interne n'est pas suffisante pour protéger l'équipage en cas d'impact. J'espère qu'ils ne modifieront pas la configuration de cette partie. Sinon, les seuls autres points faibles sont l'arrière et en dessous.

Une dernière chose, les Silridriss n'ont pas d'infanterie à proprement parlé : les Sarbacks sont leur infanterie. »

Après cette dernière affirmation un autre homme vint voir le professeur et lui dit quelque chose. Il regarda sa montre avant de demander :

« Doux-dingue, nous allons au self, tu te joins à nous ? »

*

* *

*

« - Pauvre con ! C'est hors de question ! »

Manuel s'écarta juste à temps pour éviter que Véronique, en pleurs, ne le bouscule. Il avait cherché un endroit au calme pour réfléchir à tout ce qu'il avait appris le matin même et avait opté pour la salle de repos de l'école. Mais en arrivant, il avait entendu deux personnes se crier mutuellement dessus. En ouvrant la porte, Véronique failli lui rentrer dedans. Après un coup d'œil au fond de la salle, il vit Fernand, une joue rouge, passablement ennuyé. Il se dirigea vers son ami, ramassa la chaise que Véronique avait dû faire tomber en partant et s'assit en face de lui.

« - Discussion difficile ? demanda-t-il

- Et finition abrupte, répondit-il en se massant la joue.

- Le sujet ? Si ce n'est pas indiscret.

- Toi tu as le Major, moi, c'est Véro. Je lui ai demandé de ne plus suivre l'escadron. Ça va devenir d'une dangerosité extrême vu que l'on va jouer les gardes du corps... En hiver en plus. Et sur une cible Silridriss prioritaire par-dessus le marché... Je tiens à elle. Vraiment. Je ne veux pas la voir avoir des ennuis ou pire...

Toi, tu vas me dire de la laisser libre de choisir, de la laisser libre de ses choix...

- Non, pas sur ce coup là vieux, l'arrêta Manuel. Et si Marilyn n'était pas mon supérieur j'aurais fait pareil. Quitte à me prendre une baffe moi aussi. »

Fernand connaissait suffisamment Manuel pour savoir qu'il n'aurait jamais dit ça sans raisons.

« - T'es passé au centre de recherche ? »

Manuel acquiesça avant de tout lui raconter sur les Sarbacks, ces terrifiantes machines de guerre. Mais, loin de s'arrêter, il raconta également ce que Arson lui avait décrit : Des navires volants, des machines de guerre hautes comme des immeubles, des engins volants très rapides... il lui raconta tout ce dont il se souvenait, et du problème du bouclier.

« - Ouais, bah ce conflit n'est pas gagné... Commenta Fernand. Au fait, tu as annoncé a ta mère notre prochaine mission ? »

Manuel secoua la tête.

« - Moi non plus

- Je ne sais pas trop comment lui annoncer ça... poursuivi Manuel. D'autant qu'elle était présente quand on a reçu les ordres de mobilisation.

- Ouille... Commenta Fernand en faisant la moue.

- Au fait, tu as des nouvelles de ton oncle ?

- Ouais, depuis qu'il n'y plus d'aide à la zone dévastée, la vie est devenue plus dure.... Mais, pour lui, abandonner l'autonomie de cet endroit est tout bonnement inacceptable. Ils sont en train de s'adapter et de faire avec. Ils sont également en train de se préparer à recevoir les Silridriss. A ce sujet, il m'a demandé si tu ne voulais pas les rejoindre pour fabriquer des armes et des véhicules de combat...

- Nan, je déteste ces trucs.

- Je sais, et c'est ce que je lui ai répondu, en lui disant également que tu te battais par fatalité, pas par choix. Mais, je lui ai promis de t'en parler. C'est fait.

- On dirait que tu lui en veux.

- Oui, j'ai un peu de mal à digérer le coup de pute qu'il nous a fait. Il m'a fait des excuses bidons, plus pour la forme et par intérêt que par réelle envie de le faire. Et je les ai acceptées de la même manière. On verra quand il sera réellement sincère.

- Et qu'a dit ta mère suite à ce qui s'est passé là-bas ?

- ''Petit con''. Après m'avoir mis un coup de poing et m'avoir enlacé.

- Et, juste pour savoir, pourquoi tu as dormi à la base après être rentré de Pau ? A cause d'elle aussi ?

- Comment tu sais ça toi ?

- J'y suis passé ce soir là. J'ai raccompagné Marilyn. Alors ? comment elle a réagi ?

- Bah, mal, je me suis barré quand je l'ai vu prendre le fusil et y mettre des cartouches de gros sel. Je me suis dit que j'allais attendre à la base qu'elle se calme. » Répondit Fernand avec nonchalance.

Manuel sourit. Si sa mère avait toujours été attentionnée et protectrice, celle de Fernand l'avait élevé à la dure. Il en avait hérité une forme d'indifférence vis-à-vis du danger, une force morale proportionnelle à sa carrure, et une sacrée résistance à la douleur. Mais ce n'était pas pour autant qu'il irait se mettre volontairement en danger. Courageux, résistant, mais pas masochiste ni suicidaire.

Un petit moment de silence passa, chacun perdu dans de sombres pensées. Avant que Fernand ne demande :

« - Dis, tu crois que l'on reviendra à l'école ?

- Aucune idée.

- Je n'aurais jamais cru devoir dire ça mais... je crois que ça va me manquer de ne plus aller en cours.

- A moi aussi.

- C'est sûr, tu ne pourras plus dormir le matin...

- Enfoiré, répondit Manuel en riant. Non, je pense que ce qui va le plus me manquer, c'est la bonne odeur des croissants de ma mère le matin. Se réveiller avec cette odeur, un vrai plaisir... »

L'un et l'autre commencèrent à faire la liste des choses qu'ils allaient laisser derrière eux. Celles qu'ils affectionnaient et celles qu'ils seraient content de ne plus revoir. Ils savaient tout les deux que leur prochaine mission allait être plus dure, et certainement plus longue.

Ils se quittèrent en se disant qu'ils devaient, l'un et l'autre, dire ce qui allait se passer à leurs parent respectifs.

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