6 : Réparations (2/3)
Il fit le tour des bâtiments militaires avant d'aller derrière le centre de recherche. Il savait, par l'intermédiaire de son père, que ce centre testait toutes sortes de nouveaux matériels et matériaux. Lorsque le test était terminé, le matériel était envoyé dans une zone de stockage où il attendait le recyclage. Très souvent, des éléments annexes communs étaient rajoutés pour que les essais se passent bien. Secrètement, il espérait trouver la pièce manquante, qui le dépannerait le temps que la pièce de rechange arrive.
La zone était entourée d'un haut grillage et était protégée par un gardien dans sa guérite. Il s'y présenta, et expliqua son souci. Le soldat ne vit aucun inconvénient à ce qu'il se serve : de toute façon ce matériel allait être détruit et refondu. La seule condition fut qu'il eusse quitté la zone avant la fin de son service.
Manuel pénétra dans la zone grillagée. C'était une sorte de casse en moins bien rangé. Après une bonne demi-heure de recherche il trouva un élément intéressant : une partie haute du torse d'une AMC. Les bras en avait été arraché et la tête était manquante. Mais Manuel reconnu quand même le modèle : une « Joker » américaine. Bizarrement, l'intérieur de l'armure était recouvert d'une épaisse couche de graisse chromée. Il chercha entre les omoplates, si un régulateur était présent, il serait là.
Il y en avait un, pas du même modèle que le l'ancien mais il ferait l'affaire avec quelques réglages. Il le démonta en écartant la graisse brillante. Puis il l'essuya. En dehors de la bande de couleur mauve faite à la bombe qui l'ornait, le régulateur semblait neuf.
Il sortit en remerciant le gardien pour sa gentillesse, puis repartit vers sa machine. En chemin, il regarda sa montre, il approchait cinq heures. Il désirait terminer ses réparations avant de rentrer chez lui, et le travail n'allait pas manquer...
Au hangar de maintenance, deux nouvelles armures avaient été rajoutées sur les supports, celle de Fernand et d'Oneshot. Les deux personnages en étaient à vérifier les différents niveaux. Ils étaient vêtus de bleus de travail comme lui. Le jeune homme sourit en les voyants. Et il n'était pas le seul : les techniciens du hangar les regardaient s'affairer tout les deux. Ils étaient limite à en rire, l'heure de la fin de journée allait bientôt sonner et aucun ne voulait vraiment travailler. Du petit préfabriqué au fond qui servait de bureau sorti une jeune femme. Elle regarda un moment Oneshot et Fernand avant de discuter avec ''Papy'' puis d'aller vers Oneshot. Manuel n'entendit pas ce qu'ils se dirent, mais elle commença à démonter la protection de la tête de l'armure du sniper. Un des techniciens la héla avant de lui faire une remarque. Elle répondit par un doigt d'honneur avant de reprendre son travail.
Elle était blonde avec une tenue de travail bleue. Ses yeux verts regardaient le monde avec cette lueur indomptable qui agitait souvent les femmes qui exerçait un métier entouré d'hommes. Apparemment elle semblait compétente.
Manuel retourna à son armure tout en se demandant où il allait bien pouvoir placer son nouvel élément. Il s'accroupit puis, il décida de la placer là ou l'avait trouvé : entre les omoplates.
« - Qu'est-ce qui se passe ? »
Manuel se releva et vit Fernand sur le caillebotis. Oneshot et la jeune femme se rapprochaient.
« - Bof, rien de très grave : juste une visite de routine et de la maintenance... Et toi ?
- La brochette de couillons que tu vois là-haut, ont réparé mon armure comme des sagouins. Résultat, j'ai le calculateur en carafe dès que je trébuche.
- Symptômes ? Demanda Manuel. Fernand comprit immédiatement où il voulait en venir.
Entre temps Oneshot et la jeune femme arrivèrent.
- A chaque choc, le calculateur reboot et je perds la vidéo. Hors-service pendant deux minutes. »
Manuel et la jeune femme répondirent ensemble la même phrase : « - Vérifie le câblage d'arrivée d'énergie du calculateur. » Cette simultanéité les surprit tous les deux. Manuel tendit sa main :
« - Doux-dingue. Se présenta-il
- Andréa. Répondit la jeune femme en lui serrant la main. Ainsi c'est vous le taré qui, le premier, a discuté avec une chimère. Je vous imaginais plus vieux...
- Oui, moi aussi, je suis enchanté de vous rencontrer. Oneshot ?
- Même chose que Twister pour l'origine de la panne, mais moi c'est la mire qui est mal calibrée. Andréa s'est proposée de m'aider. Et j'aurais aussi besoin de tes services.
- Précise.
- Les Silridriss n'ont pas mis longtemps pour me trouver. Pour un sniper ça fout mal...
- Je vais y réfléchir... A moins qu'Andrea n'ait une idée. »
La jeune femme sursauta de surprise. Apparemment c'était la première fois qu'on lui demandait son avis.
- Je... je ne sais pas... on ne m'a jamais demandé de modifier une armure auparavant. Seulement de les réparer. Et est-ce bien raisonnable de modifier une machine sans demander l'aval au constructeur ? »
Manuel retourna sa pièce et entreprit de la monter. Fernand parti démonter son armure pour vérifier la connexion. Manuel, lui, plaça une vis dans un trou avec le régulateur, amorça le filetage, puis sortit une clé à cliquet.
« - Combien de temps avant que le constructeur ne réponde ? demanda Oneshot
- Probablement plusieurs semaines, répondit Andréa.
- S'ils sont rapides... Si les Silridriss déboulent tu risques d'en mourir.
- Mourir me serait très déplaisant, répondit le concerné. Qu'est-ce que tu proposes comme solution alternative ? »
Manuel ne répondit pas de suite. Il avait placé la deuxième vis et il s'occupait de raccorder le système de sécurité au système principal. Il s'arrêta à la question d'Oneshot.
« - Je ne sais pas..., répondit-il, pour l'instant : rien, je vais essayer d'avoir des infos sur les Sarbacks, demain, au centre de recherche. Je te dirais ce que j'en pense après.
- Les quoi ? demanda Andrea.
- AMC Silridriss. » Expliqua Oneshot en partant. Manuel ne compris pas la suite de ce qui se disait entre eux. Mais il était question de la mire.
Il mit environ trois heures à changer tout ce qui avait besoin de réparation. Le remontage fut plus rapide que le démontage : Fernand ayant réglé son souci de calculateur lui fournit de l'aide. L'armure finie, ils allèrent aider le sniper.
Son problème semblait bien plus complexe qu'il n'y paraissait. En effet : le décalage de la mire ne venait pas de d'un réglage de la caméra, mais du châssis de l'armure. Le technicien ne l'avait pas redressé correctement et cela occasionnait un défaut de visée. Le temps que Manuel ne répare sa machine, Andréa avait identifié le défaut et avait démonté tout les éléments sensibles de la tête et du cou. Maintenant, elle s'approchait avec une énorme masse de la machine. Elle ne mit que deux coups, mais cela suffit à ramener la carcasse dans une configuration correcte. Elle remontait les équipements lorsque le garde entra.
Il pénétra dans l'atelier comme une tornade. Il se dirigea droit vers eux. Son uniforme était couvert de sang.
« - Est-ce qu'il y a des gens de l'escadron Rock ici ? Hurla-t-il en courant.
- Ouais ! Nous ! Qu'est-ce qui se passe ? répondit Oneshot.
- On sait pas, mais il y a une chimère blessée qui vous attend dans la cour ! »
Les trois pilotes sortirent en courant du hangar à la poursuite du garde. Andréa leur cria qu'elle allait terminer les réparations de la machine seule. Dehors, le temps s'était rafraîchit et la nuit était tombée. La base était éclairée par différents lampadaires et autres projecteurs. Ceux-ci projetaient une lumière orange ou blanche. Dans la cour, on voyait la chimère en question allongée au sol. Manuel reconnu Kouiros. Autour de lui, à la lumière des projecteurs, des éléments du service de secours s'affairaient encadré par des membres de la police militaire.
Ils coururent de plus belle pour rejoindre l'énorme bouquetin roux couché. Du sang s'était répandu un peu partout sur le sol en terre battue. Kouiros était couché sur le flanc et le personnel de soin présent tentait d'arrêter ce flot continu qui sortait de deux plaies.
« - Kouiros ! Merde ! Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » Hurla Fernand.
Les trois soldats entourèrent la tête de la chimère et s'accroupirent.
« - Allez-y doucement ! Déclara un médecin derrière eux, on lui a donné une dose de morphine capable d'assommer un éléphant.
- Ça devrait aller doc... c'est bien comme ça que l'on vous nomme... vous ... les soigneurs humains... » La voix de Kouiros aurait paru normale si elle n'avait pas été saccadée. Ses yeux s'ouvraient et se fermaient difficilement.
« - Oui, répondit Oneshot avec une voix rassurante, on les appelle tous doc chez nous... Que s'est-il passé ?
- ... on a parlé avec Redcross... perdu un fils ... au conflit... dans la zone dévastée... La princesse ... a voulu voir... la zone détruite... Redcross... mise en garde ... dangereux ...têtue... attaqués...
- Où est la princesse ? demanda Manuel
- Cachée dans les ruines... mémoire... renforts arrivent...
- Où dans les ruines ?
- Un vieux bâtiment noir en ... face d'une place... au sous sol...
- L'ancienne préfecture ? demanda Fernand.
- Probablement, répondit Manuel.
- OK., Doux dingue, tu équipes les armures en armes et munitions dis également à Andréa de se dépêcher, files-lui un coup de main si nécessaire. Twister tu préviens le major, elle devrait être revenue, attendez-moi au hangar je reviens tout de suite. C'est parti ! »
Manuel courut jusqu'au hangar de maintenance. Andréa était en train de boire un café devant son travail, satisfaite : l'armure d'Oneshot était réparée. Elle lui demanda ce qui se passait, Manuel l'ignora. Il fit le tour des trois armures pour identifier si elles avaient encore du matériel de combat : rien.
Il se précipita au téléphone de l'atelier et appela l'armurerie. Andréa insista et Manuel répondit : « Plus tard : ce n'est pas le moment. »
Au téléphone, il réfléchit quelques secondes sur ce qu'il allait choisir. Pour Fernand ou pour lui, il savait quoi prendre, mais il lui manquait des informations sur les armes de sniper. Lorsque le téléphone décrocha, Manuel commanda les armes et les munitions. Pour Oneshot, il choisit le fusil de sniper de base.
Dérangé au milieu de la nuit, le garde de l'armurerie ne voulait pas comprendre l'urgence de la situation, il signalait seulement que le matériel serait prêt demain en fin de matinée. Manuel répliqua qu'il avait une demi-heure, et que si le matériel n'était pas disponible, ils iraient se servir avant de raccrocher aussi sec.
« - Monsieur Doux-dingue ? Demanda une voix féminine.
- Oui, quoi ? » Demanda Manuel, stressé, en se retournant. Il tomba face à face avec une énorme patte noire, levant les yeux, il constata que cette patte appartenait à une chimère. Elle était noire et rouge. Sa morphologie était celle d'un varan avec des poils, caparaçonnée comme un cheval de bataille moyenâgeux, avec une tête de cauchemar ambulant, effilé comme celle d'un requin casqué dont les pupilles rougeoyaient dans la nuit.
« - Je vous dérange peut-être ? » Demanda poliment la créature, surprise par la réaction un peu excessive du jeune homme. Ce faisant, le jeune homme vit que du requin, elle en avait également la dentition.
Manuel se demandait comment elle avait pu pénétrer dans le hangar sans qu'il ne l'entende.
« - Un peu oui, on s'apprête à monter une expédition de sauvetage pour votre princesse. C'était pour quoi ?
- Je vais faire bref alors : mon nom est Tégos je suis une ... amie de Kouiros et une des gardes du roi Shershen. Ce dernier m'a demandé de guider nos soigneurs jusqu'à Kouiros, et de vous contacter pour savoir ce qui s'était passé. Entre-autre pourquoi ils avaient été attaqués...
- OK., je vais faire court aussi, commença-t-il en reconnaissant la chimère qui l'avait dévisagé lors de l'opération précédente. De ce que j'ai compris, Redcross a dit à la princesse de ne pas aller dans la zone dévastée mais elle y est partie quand même. Maintenant elle y est coincée. Marquez dans la mémoire que vous ne devez pas intervenir : si vous y allez ce sera un bain de sang et rien ne dit que la princesse s'en sortira vivante. Nous, on aura plus de chances. Au fait, elle va bien ? Il y a quelqu'un avec elle ? »
La chimère parut de nouveau surprise, mais de la sollicitude de Manuel cette fois.
« - Elle est en bonne santé, mais elle est inquiète Il y a deux gardes avec elle, vous allez la chercher ? Personnellement ?
- Oui, avec deux ou trois autres pilotes. Dites-lui de ne pas paniquer, de ne pas bouger et de nous attendre : elle risque la mort là-bas. La capture ne fait pas partie des possibilités.
- Bien, c'est fait. Déclara la chimère en clignant des yeux.
- Doux-dingue ! Cria Oneshot en courant du fond du hangar. Tiens ! Tu pourrais en avoir besoin. »
Oneshot tendit un pistolet et un chargeur à Manuel. Celui-ci eut du mal à se convaincre de prendre l'arme.
« - Il y a déjà un chargeur dedans, mais pas de balle dans le canon. Planque-le et ne le dit pas à notre major préféré... théoriquement vous n'avez pas été formé au maniement de ces trucs, mais bon : c'est la même manip que les modèles d'armures. Tu me le rendras lorsqu'elle aura le dos tourné. »
En cachant l'arme dans un recoin de son AMC, Manuel exposa à Oneshot la mauvaise volonté de l'armurerie.
« - OK, je m'en occupe. » répondit-il en se dirigeant vers l'appareil téléphonique.
Fernand entra en trombe dans le bâtiment de maintenance. Oneshot, le combiné sur l'oreille, lui fit signe de s'approcher.
« - Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais vous accompagner. » Déclara la chimère.
L'affirmation stoppa net les trois pilotes présents dans leurs mouvements.
« - Très mauvaise idée si vous voulez mon avis... ha oui ! Allo ?... » Commença Oneshot au téléphone tout en fournissant son arme à Fernand.
« - Il n'a pas tort... C'est déjà dangereux pour nous. Mais si vous, vous vous y pointez, vous finirez en pâté en croûte en à peine cinq cent mètres... expliqua Fernand
- Pardon ? Demanda la chimère.
- Ce que Twister veux dire, c'est que de toutes façon vous ne serez pas bien accueillie là-bas. Quoi qu'il arrive, quoi qu'il advienne ils tireront avant de discuter avec vous. Nous, on a une chance de pouvoir parlementer avec eux. Pas très grande, mais elle est là. »
La chimère s'assit.
« - Expliquez-moi.
- On n'a pas vraiment le temps là. Twister ! Où est leader Rock ?
- Elle a dit qu'elle nous attendra à l'armurerie, répondit l'intéressé en se sanglant dans sa machine. Va te changer !
- Pas le temps !
- La version courte alors ? »Insista la chimère.
Voyant que la créature ne bougerait pas avant d'avoir ses raisons Manuel donna des explications tout en se sanglant dans sa machine. Oneshot couru jusqu'à la sienne en passant derrière l'énorme monstre.
« - En gros, dans certaines villes du monde, après la guerre, des gens sont resté habiter dans les ruines. Ils ont développés leurs propres systèmes de société communautaires, indépendamment de l'architecture centrale à laquelle on appartient, qui s'est mise en place un peu plus tard. C'est une zone de non-droits où seules leurs lois ont cours. Tant qu'ils nous laissent en paix, on ne les ennuie pas et c'est réciproque. Ils vouent une haine viscérale vis-à-vis de tout ce qui s'approche de près ou de loin à vous. Croyez moi, malgré tous les pouvoir que vous possédez, ils sont experts dans l'art d'abattre les vôtres. On va devoir la jouer finement si on veut sortir la princesse de là.
- Ils nous haïssent à ce point ? Et ils ne vous apprécient pas ? Surprenant...
- La plupart sont les uniques survivants de familles entières qui ont été massacrées. Ça c'est la raison de leur haine. Pour nous, ils nous accueilleront plutôt avec suspicion : ils ont perdu confiance dans l'organisation centrale, qu'ils accusent de ne pas les avoir protégés durant le conflit. Alors ils s'attendront plutôt à un coup fourré. Excusez-moi... »
Manuel venait de finir de se verrouiller à son poste de pilotage et avait démarré son armure. La machine, le carter encore ouvert, se leva d'un coup sec pour se sortir de son emplacement de maintenance. Manuel devait maintenant sortir, mais la chimère gênait.
Celle-ci ne bougea pas.
« - Peu m'importe les risques... je viens. »
Voyant qu'elle était décidée, Manuel changea de tactique.
« - Ce n'est pas à moi de vous dire de venir ou non, je vous préviens simplement de ce qui risque de se passer et des dangers présents pour vous comme pour la princesse. Si vous voulez une autorisation, faudra voir ça avec le major... Qui nous attend à l'armurerie.
- Je vous suis. » Conclu la chimère en s'écartant du passage.
* * * * *
Reboot : redémarrage d'un ordinateur.
Amorcer un filetage : tourner à la main une vis dans son filetage afin de bien la placer, puis, la serrer avec une clef.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top