17 : Prisonniers (3/3)

C'est lui qui l'a, j'en suis sûre à quatre-vingt quinze pour cent...

Mylène était devant son bureau, le lendemain de l'attaque qu'avait subit Manuel. C'était l'un des deux petits bureaux qui occupaient cette pièce aux murs blancs, recouverts de schémas logiques et de plans. Les bureaux étaient des modèles d'angles et formaient un T. Sur le sien, un ordinateur finissait de compiler des données, une photo de la petite famille, et une figurine d'AMC qui lui servait de presse-papier. Il y avait une porte et quelques fenêtres qui donnaient sur l'extérieur. Elle avait recoupé toutes les données qu'elle avait, et en avait déduit que seul son frère pouvait avoir le vecteur de propagation dans sa machine. Son objectif actuel était de récupérer le système cent quatre et d'empêcher la propagation.

Ma parole ! Je le vois ! Je l'engueule ! Avec cette manie de récupérer des trucs à droite et à gauche... voilà ce qui se passe !

Une personne frappa à la porte.

« - Entrez ! » dit-elle d'une voix entre l'énervée et l'énergique.

Le professeur Ferreira entra. À son visage, elle comprit qu'il s'était passé quelque chose de grave. Il avait les yeux rouges et sa bouche tremblait légèrement. Elle n'osa poser la question, mais son père y répondit quand même :

« - Manuel est porté disparu. Ses chances de survies sont... »

Il ne pu finir sa phrase. Les propos rendus inintelligibles avec les sanglots.

Mylène prit la nouvelle comme un coup de poing. Elle en fut sonnée, elle eut le tournis. Elle attrapa la table du bureau pour éviter de tomber par terre. Une larme coula sur sa joue...

Le professeur renifla avant de poursuivre :

« - Je ne sais pas comment l'annoncer à ta mère.

- Il y a bien quelque chose à faire...

- Je ne sais pas... je ne crois pas. »

La jeune femme s'écroula sur son bureau et pleura dans ses bras croisés. Le professeur parti en fermant la porte, laissant sa fille seule avec son chagrin.

Elle pleura longtemps, vers midi, elle n'avait plus que des sanglots, elle ne pouvait plus pleurer : les glandes lacrymales étaient vides.

Elle avait les yeux rivées sur la photos de la petite famille réunie et heureuse.

Que faire ? Que ferais-tu frangin ? Est-ce que tu es toujours vivant ? Que puis-je faire pour toi ? Comment puis-je t'aider ?

Elle prit la photo et la rapprocha d'elle tout en hoquetant après avoir tant pleuré. Deux bips sonores provenant de l'ordinateur l'interpellèrent, signalant que la compilation était terminée. Elle regarda la petite fenêtre sur l'écran comme hypnotisée. Puis son regard alla de la figurine à son écran plusieurs fois.

Et si... ?

Avec violence, elle ouvrit un tiroir et en sorti un disque dur. Le tiroir ne s'était pas encore fermé qu'elle sortait de son bureau le matériel à la main.

*

* *

*

« - Félicitation Capitan.

- Qui vous a permit d'en... toutes mes excuses gouverneur. »

Arsear posa un genou à terre. Et prit la même posture que celle qu'il avait prise dans la salle du trône de la gouverneur. Ils étaient dans son bureau, dans l'un des navires volant. La gouverneure état entrée sans se faire remarquer, et elle avait surpris Arsear en plein travail.

« - Je tenais à vous féliciter personnellement de ce que vous avez accompli. C'était une manœuvre savamment préparée.

- Merci Gouverneur.

- Combien de prisonniers avez-vous pu faire ?

- Environ cent quarante. Une vingtaine a dû être éliminé pour nous assurer le contrôle du reste du groupe.

- Parfait, veuillez les transférer au laboratoire dans les plus brefs délais.

- A ce sujet... j'ai une idée à soumettre.

- Laquelle ?

- Il y a une bonne moitié de combattants dans le groupe que nous avons capturés. Sans compter la princesse et ses deux gardes du corps. Je me demandais s'il ne serait pas judicieux de les envoyer dans une arène.

- Pardon ?

- Sur les différents fronts, les esclaves nous opposent une forte résistance. Ils sont motivés et leur moral est plutôt élevé. Si nous pouvions leur faire voir ce qui se passe dans une arène, et que ce sont des membres de leur espèce qui tombent sous nos coups sans pouvoir répliquer...

- Entamer leur moral ? Voilà qui n'est pas pour me déplaire.

- De plus, cela à l'avantage de nous montrer comment ils combattent.

- Je vais y réfléchir : Quitte à ce qu'ils se battent, autant que cela nous divertisse également non ? Faites-moi parvenir tout ceux qui ne peuvent pas se battre d'ici deux jours. Pour les autres, qu'ils réparent leur matériels, ils s'en serviront incessamment sous peu. »

*

* *

*

Tous les soldats étaient regroupés dans un cachot. Soit environ cinquante personnes sur une surface équivalente en mètres carrés. Le sol, le plafond et les murs étaient grossièrement taillés dans une pierre grise. Des renforts mécano-soudés, de la taille de grosses poutres, pas toujours droites, rouillaient dans différents endroits de la pièce. L'un des murs était manquant, laissant la place à des barreaux derrière lesquels cheminait un couloir. Le seul éclairage était celui des quelques pierres de couleur blanche qui luisaient faiblement. Le sol de pierre était sale et recouvert d'un mélange de paille et de sable. La température était très élevée. Dix personnes étaient déjà mortes, de déshydratation ou des suites des blessures de la dernière bataille. Manuel ne savait pas combien de temps il avait déjà passé là-dedans. Redcross était passé le voir, lui et sa blessure. Mais, comme il avait pu s'en douter, ce n'était pas très grave comparé à ce que certains avait reçu. Il y avait du y avoir un arc électrique dans sa machine et il avait eu la chair brûlée sur un diamètre de cinq centimètres au-dessus des fesses et légèrement sur la gauche. Mais, en dehors de changer son bandage régulièrement et de passer une crème hydratante et désinfectante il n'y avait rien à faire. Il lui avait également demandé deux choses, s'il avait vu Marilyn, et d'où venaient tout ces soldats. Pour les soldats, l'infirmier lui dit que c'était une partie des troupes amphibies des chinois. Ils avaient voulu intervenir et forcer la sortie du cargo. Mais ce fut un échec, leur capture ne fut qu'une question de temps. Quand à Marilyn, il avait espéré que Manuel puisse lui dire où elle était.

De son coté, Fernand avait été profondément affecté par le destin de Véronique. Mais Manuel avait vu la haine dans ses yeux. La haine des Silridriss. Nombreux étaient les soldats qui portaient un tel regard. Mais tous se gardaient de le montrer à un de leur geôlier lorsqu'ils passaient. Pour d'autres, les prémices de la folie se faisaient sentir : un des chinois chantonnait toujours le même air depuis des heures. Un autre se griffait jusqu'au sang et un dernier ne cessait de répéter le nom d'une femme.

Mais que faire ?...

Son ventre criait famine. Comme tout ceux ici présent. Ils n'avaient pas mangé depuis un petit moment maintenant.

Des bruits de pas. Ils étaient nombreux.

Les Silridriss apparurent. Au nombre de quatre, ils portaient toujours ces mêmes armures jaune sable.

« - Esclave Doux-dingue ! Avance ! »

Manuel s'avança doucement, sous les regards des autres prisonniers silencieux et inquiets pour lui.

« - C'est moi, murmura-t-il, que...

- Silence ! Sort ! »

La porte de l'immense cage s'ouvrit, et le jeune homme apeuré en sorti.

*

* *

*

Dans la maison familiale des Ferreira, Mylène travaillait tard dans la nuit.

Fait chier ! J'ai trop d'inconnues ! Comment programmer un truc stable quand les données d'entrées ne le sont pas !

« - Tu n'es pas encore couchée ? La question, sortant de l'ordinateur la fit sursauter.

- Non mon lapin.

- Hummm.... J'aime quand tu m'appelles comme ça. La voix était masculine et rocailleuse, on pouvait deviner un fumeur de longue date.

- C'est surtout en relation à ton pseudo.

- Tu nous prépares quelque chose hein..., reprit la voix

- Qu'est-ce qui te fais dire ça ?

- Ça fait cinq jours que ton ordi n'est pas éteint...

- ''Crazy Rabbit'' ? Dois-je te rappeler ce qu'il s'est passé la dernière fois que tu t'es mêlé de mes affaires ? » Coupa la jeune femme.

Un silence se fit entendre dans les enceintes de l'ordinateur. Seules les touches que la jeune femme tapait créaient un cliquetis presque stressant.

« - C'est aussi grave que ça ?

- Oui. Et j'aimerais que tu laisses bosser s'il te plaît.

- Des problèmes ?

- Oui, des gros, j'ai besoin de fortes capacités de calcul et je ne les ai pas. Alors je bosse la nuit et le PC mets plusieurs heures à tout vérifier. Et je n'ai toujours pas fait une seule simulation... Je passe mon temps à attendre les fins de vérifs et à corriger les bugs Alors oui, j'ai des problèmes et les galères qui vont avec.

- Je peux t'aider ?

- Non. Je ne veux pas que tu ais d'emmerdes. T'en a suffisamment comme ça.

- Je repasse plus tard. »

La jeune femme repensa encore à ce ''Crazy Rabbit'' qu'elle n'avait jamais connu autrement qu'en vie informatique avant de repenser à l'état de sa famille. Son père était devenu un zombie, il allait au travail, et en revenait sans prononcer un seul mot. Sa mère n'arrivait pas à sortir du lit pour travailler dans la boulangerie.

Elle se retourna et brancha une petite carte dans un ordinateur portable posé sur le lit. Elle cliqua sur un bouton de l'écran et un pourcentage commença à s'incrémenter.

« - Tu es toujours là ?

- Qu'est-ce que tu veux ? Je t'ai dit que ce n'étais pas le moment !

- Va sur l'Undernet que je vais te donner.

- Écoute, c'est pas le moment ! J'ai pas le temps de m'amuser !

- Qui parle de s'amuser ? J'ai bien compris que c'était important. Et vu comment tu bosses, ça doit être un sacré coup ! Fais-ce que je te dis s'il te plaît. Je te garanti que tu ne le regretteras pas. »

Mylène hésita un instant à insulter l'homme qui lui parlait si gentiment.

« - Ma parole Rabbit, si jamais c'est une perte de temps, où que tu soit dans le monde, je te jure que je te trouve, et que je transforme en... ci... vet... La jeune femme ne croyait pas ce qu'elle voyait

- Félicitation. Maintenant tu as également accès au réseau Noral.

- C'est une plaisanterie ? Noral est...

- Une légende, je sais. En fait c'est un système qui a été bousillé quand les chimères sont arrivées. Mais avec un ami on l'a réactivé par curiosité. Ça n'a pas été une mince affaire, pour être franc, ça a été une vraie galère... Mais cela devrait augmenter considérablement les capacités de calcul de ta machine... »

Noral... Le système de ''cloud computing'' le plus puissant jamais mis en œuvre dans l'histoire...

« ... Bon, ne t'attends pas non plus à des miracles : j'estime qu'il a perdu environ vingt pour cent de ses capacités réelles. En attendant c'est...

- Que veux-tu en échange ? Coupa-t-elle.

- Fais-moi participer... Alors ? Je suis bon pour finir en terrine ? »

Si je veux y arriver, je n'ai pas le choix...

« - Fais très attention, je vais te dire ce que tu vas faire... »

*

* *

*

Lorsque le jeune humain pénétra dans son bureau, Arsear releva à peine la tête. Il était apeuré, il regardait de tous les cotés. Le capitan s'interrogeait : comment un être aussi frêle et aussi faible pouvait avoir de telles capacités de combat. Il sentait cette peur qui animait le jeune homme. Il aimait sentir cet état de puissance, et de pouvoir absolu, mais il se contenta de continuer à écrire sur un morceau de parchemin. Le Silridriss voulait savoir combien de temps le jeune homme allait mettre avant de lui adresser la parole. Mais les fréquents coups d'œil qu'il lui jetait discrètement n'arrivait pas à le renseigner.

Soudain, il comprit. Il tapa violemment le bureau du plat de la main. Mais la colère fut vite dissipée pour laisser place à de la surprise intéressée. Le jeune homme, bien que terrifié, regardait et analysait tout ce qui se trouvait dans cette pièce. Le choc sur la table avait recentré son attention sur lui.

« - J'ai une proposition à te faire.

- Laquelle Capitan ?

- Tu sais te battre dans une armure je crois.

- Oui Capitan.

- Bien, voilà la proposition : Toi et les tiens vous allez réparer vos machines et vous battre dans une de nos arènes. Les survivants seront renvoyés chez eux. »

Le jeune homme ne répondit rien.

« - Alors ?

- Je suis peut-être un bon combattant Capitan. Je ne sais pas. Mais je ne suis pas celui qui est en mesure de vous répondre. Je ne suis pas la personne la plus gradé parmi les miens, Capitan. Alors ce n'est pas à moi de répondre. Capitan.

- Alors je vais me débarrasser de toutes les personnes qui te sont supérieures.

- Il ne restera plus grand monde pour se battre Capitan.

- Ce n'est pas mon problème. C'est le tiens... »

Le Silridriss sourit d'une manière sadique.

« - Je commencerais par la princesse... et ses deux gardes. Bien entendu, je lui dirais avant de la tuer que tu as refusé de l'aider... »

Manuel releva un peu le visage.

« ... oh ? Aurais-je omis de le signaler ? Elle sera avec vous dans l'arène. Alors ? Toujours décidé à me tenir tête ? »

Manuel avait beau tourner et retourner le problème dans tout les sens. Il n'avait pas de solution. Ce ''Capitan'' avait décidé quelque chose et n'en démordrait pas.

« - Bien Capitan. Nous réparerons nos machines et nous combattrons... »Fit Manuel d'une voix sans entrain, résigné.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top