Chapitre 38
Je me lève, le dos en compote et la tête embrumée. Dire que j'ai mal dormi serait un euphémisme. C'était horrible : tant mes pensées que la sensation du canapé qui me broie le dos. J'ai réfléchi, retourné le problème dans tous les sens. Mais je n'arrive pas à y faire face.
Je me suis retenue de tout envoyer valser : je me suis dit qu'on devait s'expliquer, peut être que ce n'était qu'une blague. Honnêtement, j'en doute mais l'espoir fait vivre.
Je me recroqueville sur moi-même. Impossible de lui parler à son réveil. Hier, il ne savait même plus le code d'entrée de son immeuble, il va avoir une sacré gueule de bois. Le mieux est que je disparaisse aujourd'hui et qu'on se reparle ce soir. Alors je m'enfuis en me promettant de revenir.
***
C'était dur de retourner dans son appartement. J'ai encore passé ma journée à recaser sa phrase, il suffirait que j'ai mal entendu.
Lorsque je passe la porte d'entrée, je le vois immédiatement, avachi contre le plan de travail torse nu, couteau à la main. Il a l'air surpris de me voir. Je me permets de l'observer sans bouger une minute et il en fait de même, sourcils levés.
-T'étais passé où ?, dit-il en se retournant pour laver la planche à découper.
Mais je ne réponds pas, ce qui le fait me regarder.
-Je t'ai envoyé des messages et t'as pas laissé de mots..., tente-t-il de m'expliquer.
-Il faut qu'on discute.
-Je voulais pas te fliquer hein, je te fais confiance.
Il contourne la cuisine et vient à les côtes. Je me déchausse, agacée qu'il ne comprenne pas. J'enlève également mon manteau puis pars sur le canapé, lui derrière moi.
Je ne sais pas comment commencer.
-J'ai fait quelque chose hier ?
-Est-ce que tu as été adopté ?
Ma question semble le surprendre. Et son visage m'indique clairement que oui et qu'il n'avait aucune intention de m'en parler. Je souffle et me tournant vers le mur pour ne plus avoir à le regarder.
-Oui, je l'ai découvert peu de temps après que tu sois partie.
-J'espérais que ce ne soit qu'une mauvaise blague.
Il fronce les sourcils et je l'entends me répondre « moi aussi » mais je suis trop furieuse pour interpréter ces mots.
Je me lève, hors de moi et commence à faire les cents pas, tentant de rassembler mes idées.
-Tu sais ce qui fait le plus mal ? Juste avant que tu avoues ça, je me disais à quel point j'avais de la chance de construire une relation basée sur la confiance, que finalement peut être qu'il y avait des gens honnêtes qui pourraient réellement m'aimer.
Je marque une pause, emportée.
-Et regarde ce que t'en fais toi de l'amour, de la confiance !
Je le regarde mais il ne répond rien.
-Je suis tellement bête !
Cette fois les larmes coulent.
-Trop naïve pour croire les choses qu'on essaye de nous inculquer ! On était pas prêt pour cette relation. On était tous les deux beaucoup trop mal. C'était une erreur.
Ça lui fait mal que je lui dise ça mais c'est la stricte vérité. Je suis complètement instable et visiblement, il n'est pas mieux.
Je le regarde une dernière fois avant de ramasser mes affaires à l'entrée de partir alors qu'il n'a toujours pas ouvert la bouche.
J'en suis malade. J'aurais juré tout connaître de lui. J'aurais espéré.
J'arrive chez Chiara, le visage trempé et dès qu'elle m'aperçoit, l'inquiétude s'installe. Elle regarde mes bras d'abord mais il n'y a rien. Je n'y ai même pas pensé. Une partie de moi aurait envie de sauter au plafond mais mon corps est trop étourdi pour se permettre quoique ce soit.
Elle me pose dans sa chambre puis referme la porte derrière elle et je l'entends parler dans le salon.
-Liam ?
-Qu'est-ce que t'as foutu ?
-Oui, elle est chez moi. Mais qu'est ce qui lui arrive ?
-Ok. Oui, oui okay.
-Bah oui, elle est mal trou duc'.
-Oui oui, je sais, te fatigue pas vieux. Elle va se reposer et on discutera quand elle ira mieux.
Je me pose sur le lit et ferme les yeux sans arriver à arrêter ces larmes.
***
J'ai fini par tout lui raconter. Je ne voulais pas mais elle savait déjà tout de toute façon. Je ne sais pas depuis combien de temps elle et Liam sont en contact mais ce rapprochement me touche un peu trop pour quelqu'un qui doit être en colère.
Depuis, elle est assise en face de moi, seul les plats qu'elle m'a rapporté nous sépare. Et personne ne parle, on n'ose même pas se regarder dans les yeux. A vrai dire, je n'ai rien à lui dire de plus. Je sais qu'elle en a discuté avec Liam et j'espère qu'il ne lui a pas retourné le cerveau.
-Bon. Je te soutiens à 200% Emy. Mais je pense que tu t'es énervée un peu vite. Quand on y réfléchi, et qu'on se met à sa place....
Je souffle ce qui l'a fait s'arrêter pour me faire les gros yeux.
-Je disais, quand on se met à sa place comme il l'a fait pour toi quand tu avais tes problèmes et qu'il a toujours été là pour toi, on se rend compte qu'une discussion entre vous s'impose.
On ne peut pas comparer un viol à une adoption. Mais j'omets de lui dire. Elle n'a pas tord sur un point : il m'a toujours soutenu tête baissée.
-Je ne dis pas qu'il mérite obligatoirement une seconde chance mais je pense qu'il mérite de te donner une explication que ce soit pour lui ou pour toi.
-Tu ne peux pas comprendre.
-Si on t'écoute personne ne comprend jamais rien. En tout cas, si, je comprends. Mais je le comprends plus lui car j'ai été à sa place. J'ai été celle qui cachait des choses par honte, par tristesse, ou pour n'importe quelle raison. Et j'ai aimé qu'on me donne une chance de m'expliquer. Parce qu'il y a toujours une explication et que sous ses airs de rocher, il doit obligatoirement ressentir quelque chose face à cette adoption.
Je prends note mentalement même si pour l'instant, c'est trop tôt. Mais elle n'a pas tord alors je vais laisser passer peut être un mois et ensuite j'aviserai.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top