Chapitre 28

Mon train a du retard. Beaucoup beaucoup trop. J'avais prévu d'arriver quinze minutes à l'avance justement pour ne pas que quelqu'un me reconnaisse à la gare mais c'était sans comptait cet amas d'embûches sur mon chemin.

En plus de ça, Léonie a décidé de m'appeler car, je cite « elle a trop hâte de retrouver son binôme ». Elle est si excitée pour quelqu'un qui vient de se réveiller.

-Qu'est ce que t'as mangé ce matin ?

-J'ai pas mangé, justement. Je t'appelle tôt pour savoir si ça t'intéresserait de venir petit déjeuner avec moi. Ta mère nous a déjà briefé : on sait que tu n'as pas le droit d'être seule mais si je passe te chercher chez toi et te raccompagne, ça peut le faire ?

Sauf que je suis pas chez moi.

-J'entends quoi derrière ? T'es où ?

Elle commence à s'inquiéter. Une excuse vite. Je suis sortie promener le chien ?

-Émilie ! T'es à la gare !

Foutue voix de la sncf qui annonce, qui plus est, le retard de mon train.

-C'est fort probable, réponds-je d'une petite voix.

-Que comptes-tu faire ?

-Prendre des congés.

-Seule ? Sans prévenir ? Tu me prends pour qui ?

Bah visiblement pour plus bête que ce qu'elle est.

-Je ne suis pas ta mère...

-...mais...

-...mais abandonner tout ce que tu as construit ne va pas aider. Je ne sais pas ce qu'ils t'ont appris dans ce truc mais ce n'est pas la bonne solution. Il y a tous tes amis ici, ta famille et Liam.

Toujours là lui.

-Justement, je n'en peux plus. J'ai juste envie d'en finir avec tous ses souvenirs qui me pourrissent l'existence.

-Et tu penses que tu les oublieras plus facilement à des kilomètres d'ici ?

-Ça à marché une fois.

-Sans tes amis ou quiconque pour t'accompagner dans cette épreuve. Excuse moi de dire ça, mais qui viendra te chercher quand tu feras une nouvelle crise ? Car, sincèrement, je ne pense pas que t'incarner dans un asile serve à grand chose.

Je ne réponds rien. Je n'ai pas la réponse. A vrai dire je n'ai pas vraiment penser à une fois arrivée là-bas.

-On a fait tellement pour toi, tu ne peux pas juste tout abandonner comme ça. Ce serait injuste. Et au delà de ce que nous on pense, je te connais et je sais qu'il te sera impossible de tout oublier par un simple coup de baguette magique.

Et par « tout » j'imagine qu'elle fait référence à Liam.

-Mais je ne peux pas vivre chez moi. C'est trop difficile.

-Alors tu viendras chez moi, chez Chiara,... on trouvera une solution. On pourra même acheter un baby phone s'il le faut, ironise-t-elle avant de reprendre son sérieux. Tu comptes beaucoup pour moi, pour tous les autres. Je t'en prie, réfléchis y. Tu sais que je n'irais jamais te chercher là-bas car, si tu penses que c'est le mieux pour toi, fait le.

Je ne sais pas quoi faire. Depuis un mois je voyais ma nouvelle vie : une femme heureuse.

-Bon à plus ma belle. Tu m'envoies un message.

J'opine du chef même si elle ne peut pas le voir. Puis elle raccroche me laissant chambouler. Et alors que mon cerveau essaye de faire le tri parmi toutes ces infos, je repense à la proposition de Liam et décide de l'accepter.

Moi :
C'est d'accord. Dans une heure au café.

Je dépose mon portable dans une de mes poches puis je vais chercher un taxi. Rebelote dans l'autre sens.

-Chiara ?

-Hum... Je suis contente de t'entendre Émy, vraiment mais pourquoi si tôt ?

-Tu peux m'héberger ?

-Ouais. Bien sûr. Mais ta mère voulait pas.

-Justement, lui dit rien. Ne dis rien à personne en fait.

-Ok, t'as encore les clés ?

-Oui. Merci.

-A plus poulette.

***

Le revoir une fois avait suffi à augmenter ma libido mais la deuxième fois est plus éprouvante. Je ne fixe que ses lèvres avec une envie de lui les mordiller. Lorsqu'il a enlevé son manteau pour révéler son T-shirt blanc et écriteau « Like your smile » j'en avais eu des frissons.

Personne ne parle, attendant sagement nos commandes. Je plonge mes yeux dans les siens une demi-seconde me demandant ce qu'il se serait passé si nous ne nous étions pas séparés. Serions nous marié ? Mais m'imaginer emprisonnée chez moi avec des gosses comme une mère au foyer démunie de tout plaisir personnel n'est pas l'image que je me fais de l'avenir.

-Tu n'étais pas au travail ?, commencé-je pour m'empêcher de sombrer dans de terribles pensées.

-Si, mais c'est plutôt calme ce matin. Rien qu'ils ne peuvent gérer sans moi.

Je hoche la tête en regardant où en sont nos boissons. Personne n'a l'air de comprendre l'urgence de la situation.

-Je suis si désolé Em', lâche-t-il après avoir pris une grande respiration.

Je le regarde fixement sans me laisser démonter malgré la surprise d'une telle déclaration. Je retrouve tous les signes de la déception et du pardon sur son visage. Alors qu'il est pourtant si fermé normalement.

-Je voulais parler avec toi de tout ça. J'avais prévu de le faire après ce dîner.

-Je ne t'aurais jamais écoutée.

Il sourit. Il sait.

-Mais tes parents m'ont appelé pour me dire que tu devenais folle. Et en voyant cela, je n'ai pas su comment réagir. J'ai vu leur peur, leur inquiétude.

Je doute qu'ils aient ressenti tout ça pour moi. Peut être de l'inquiétude pour les rumeurs qui pourraient se répandre, des bruits qu'entendraient potentiellement les voisins et qu'ils pourraient transmettre aux autres comme viande fraiche qu'on donne aux lions affamés.

-Ils ne m'ont pas écouté. Ils pensaient que tu étais accro à la drogue et que tu faisais une crise parce que tu n'en avais pas pris. Je leur ai dit tout le contraire. Mais ils avaient peur alors ils ont précipité les choses et t'ont emmené. Je ne voulais pas que ça se passe comme ça, eux non plus j'en suis certain.

En clair, ils voulaient se débarrasser de moi, la folle, pour marier mon frère calmement. Pour tout le monde c'est le frère innocent. Je cligne des yeux trois fois pour m'enlever ses mains sur mon corps, ses gémissements et ses je t'aime.

-Mais ils ont fait ça car ils t'aiment.

-J'en doute.

-Une place dans un hôpital psychiatrique est extrêmement compliquée à avoir, encore plus en si peu de temps. J'aurais aimé dire que tu as eu de la chance malheureusement ce n'était pas la meilleure solution.

Il remonte ses yeux vers moi. Je peux y lire ses excuses. Mais le serveur ne me laisse pas déchiffrer plus d'indices et pose nonchalamment notre commande sur la table. Je me ressaisie comme lui et décide de changer de sujet.

-Alors, tu deviens quoi ?

Je bois une gorgée, attendant ma réponse. Il secoue violemment sa tête comme s'il se battait pour ne pas exploser.

-Tu ne vas pas esquiver la question longtemps. Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?

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