50. Olivia
Trop affaiblis pour arriver à réfléchir correctement, elle n'essayait même pas de comprendre de quoi la sorcière parlait lorsqu'elle évoquait sa faiblesse.
Tout lui était égal, elles pouvaient lui faire ce qu'elle voulait, Olivia n'avait sûrement pas l'intention de leur dévoiler où était la dernière pièce de Nepta.
La vue brouillée, elle se forçait à garder les yeux ouverts. Son ventre se retournait sur lui-même tant l'odeur du sang et de la décomposition du cadavre de Catherine lui prenaient les tripes.
Ses deux tortionnaires avaient disparu depuis longtemps, ou peut-être pas, elle n'avait plus de notions de temps. Lorsqu'elles réapparurent, elles furent accompagnées du père de Nathan. Elle sentait que son esprit n'était pas aussi solide qu'elle ne le pensait en les imaginant s'en prendre les trois à elle.
- Vous êtes sûre de vous ? Grinça le Commandant Flynn.
- Pas totalement, dit la Sorcière fièrement. Mais je crois qu'il faut essayer. On peut la casser autant que vous le souhaitez, ça ne me dérange pas. Mais nous perdons du temps à mon avis.
- À vous de décider Commandant, lança la Princesse. Nous ne pouvons pas faire ce choix pour vous.
- Si ça vous permet de la faire parler, même si j'en doute, faites ce que bon vous semble.
- Je dois vous prévenir que c'est très douloureux, rajouta la Sorcière. Et qu'il est possible que ce que je fais ne soit pas réversible...
- Ça m'est égal, s'agaça le Commandant. Je veux savoir où est la Pièce, peu importe les conséquences.
Olivia avait suivi leur discussion, elle n'arrivait pas à comprendre exactement où ils voulaient tous en venir. Elle ferma les yeux, et se prépara mentalement à subir à nouveau leur cruauté. La Sorcière paraissait sûre d'elle quant au degré de souffrance qu'elle allait endurer.
Lorsque ses paupières se relevèrent, elle n'était pas sûre de discerner convenablement qui les avait rejoints. Elle s'obligea à regarder plus en détail, elle devait reprendre le dessus. Tout en elle lui criait de se reprendre. Puis, petit à petit, elle finit par le voir.
Ils avaient attaché Nathan à une chaise en face d'elle.
Elle regarda le père de Nathan, qui restait toujours immobile sans un regard pour son fils.
Alors qu'elle sentait monter en elle l'angoisse, elle osa regarder Nathan. Il était parfaitement concentré, la colère lui donnait l'apparence d'être totalement serein, mais elle savait qu'il était totalement hors de lui.
- Bien, s'amusa la Sorcière. Je vous explique, le principe est simple, les impulsions que je donne au corps humain me permettent de soigner et de réparer, mais je peux m'en servir pour faire l'inverse. Tu as déjà une idée ma jolie de la douleur que ça représente, dans l'autre sens, c'est bien pire.
Olivia la regardait sourire, elle prenait tellement de plaisir à ce qu'elle faisait, et elle ne le cachait pas. Elle alla se mettre derrière Nathan, et continua ses explications :
- Le seul petit détail, c'est que lorsque j'agis dans ce sens, je ne peux pas tout contrôler au niveau des dégâts, et il est coutume que ce que je fais ne soit plus réparable... Mais c'est un détail peu important. Alors, si je fais ça, à cet endroit...
Elle avait placé ses mains sur la tête de Nathan, qui fut pris immédiatement d'un spasme dans tout le corps, et lui arracha un cri de douleur.
- Donc, dis-nous où est la Pièce, et je laisse le cerveau du jeune homme tranquille.
Olivia se retint de jurer, si elle leur montrait que cela l'atteignait c'était foutu pour elle. Son père ne la laisserait jamais aller jusqu'au bout de son plan, c'était son père après tout. Elle devait juste tenir plus longtemps que lui.
- Je ne dirais rien, indiqua fermement Olivia.
La sorcière ne démordait pas de son sourire lorsqu'elle reprit la tête de Nathan dans ses mains.
Olivia n'avait pas d'autre choix que de le regarder se tordre de douleur sur la chaise. Elle n'avait pas le droit de détourner le regard. Cette fois, elle était entièrement responsable de ce qui lui arrivait. La seule coupable, c'était elle.
Alors que ses cris lui vrillaient le cœur, les seules pensées qui lui venaient, étaient qu'elle était la pire personne que Nathan aurait pu rencontrer. Si elle donnait l'information concernant la pièce, et qu'ils les récupéraient toutes, ils iraient en Enfer. S'ils y entraient, ils ne quitteraient pas l'endroit sans avoir déniché les trésors et les malédictions des lieux, et elle ne donnait pas cher du monde dans lequel ils vivaient s'ils y parvenaient.
Mais la possibilité que ceci arrive un jour, était-elle plus importante que la vie de Nathan?
Elle se sentait se décomposer sous ses hurlements, voyant la détresse et la douleur sur son visage. Il souffrait, à cause d'elle. Elle avait la possibilité de tout arrêter. Tout ceci à cause d'une pièce. Pouvait-elle vraiment rendre incertain l'avenir du monde pour lui ?
Ils avaient raison. Nathan était sa faiblesse.
Elle n'était pas loin de craquer, elle ne supportait pas de le voir de le voir dans cet état. Mais elle savait qu'elle devait tenir encore. Si elle souffrait de le voir ainsi, elle espérait que son père pense à la même chose.
Mais il restait impassible et imperturbable face à ce que vivait son fils.
La Sorcière lâcha sa tête et s'adressa à nouveau à Olivia :
- Où est la Pièce ?
Incapable de prononcer une parole sous peine de laisser jaillir le flot de larmes qu'elle retenait, elle hocha simplement la tête.
La Sorcière reprit sa besogne.
Nathan était sa faiblesse.
Si elle était encore une meurtrière comme à l'époque, elle aurait tenu. Mais elle n'y arrivait plus.
- Arrêtez ça, lâcha Olivia en laissant les larmes s'écouler.
- Dis-nous ce qu'on veut savoir avant, répliqua la Sorcière en s'arrêtant un instant.
- Ça va aller, Olivia... souffla Nathan. Ne leur dis rien...
Repris par de violentes secousses, ses veines ressortaient sur ses bras et sa tête, et son visage était totalement déformé par le calvaire qu'il vivait.
- Vous allez détruire son cerveau, arrêtez maintenant !
Le père de Nathan l'attrapa au cou et commença à resserrer son emprise sur sa gorge.
- Alors crache le morceau merde !
- C'est votre fils, articula-t-elle difficilement tandis que l'air lui manquait. Comment pouvez-vous rester à le voir ainsi sans rien faire ?
- Et toi ? Comment peux-tu prétendre être mieux que moi ? Son sort ne dépend que de toi, tu as le pouvoir de tout arrêter. Mais tu ne le fais pas. À priori, tu ne tiens pas suffisamment à lui...
Bien sûr qu'elle tenait à lui, elle l'aimait plus que tout ce qui existait dans ce monde. Elle n'avait jamais connu ça avant. Il était parfait, sous tout point de vue. Il était bien meilleur qu'elle ne serait jamais.
Il n'aurait jamais tenu aussi longtemps qu'elle, il n'aurait jamais accepté qu'Olivia souffre à ce point. La jeune femme savait pertinemment qu'elle ne le méritait pas.
Si elle était restée loin de lui, rien de tout ça ne serait arrivé.
S'ils arrivaient à s'en sortir vivants, elle se promit de rester le plus loin possible de lui.
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