Olivia avait disparu tout juste après la réunion avec les autres, il avait eu beau la chercher sur le camp, ça avait été impossible de remettre la main sur elle.

Il aurait voulu en savoir plus sur ce qui lui était arrivé, et il savait que tôt ou tard, il aurait dû passer à la casserole et lui raconter la venue de Maxence.

Il avait réussi à piquer une bouteille de rhum dans les réserves de Kitus. Elias avait préféré se réfugier dans un coin, plutôt que de prendre part aux festivités autour de lui. L'équipage de l'Hippogriffe s'en donnait à cœur joie autour du feu de camp, accompagné de plusieurs membres du clan de Kitus. Même si la plupart d'entre eux étaient déjà allés se coucher.

Le clan de Kitus avait bien plus de sérieux que la bande de pirates qui l'entourait depuis plusieurs années. Il connaissait Kitus de réputation, mais comme tout le monde, jamais il n'avait réussi à croiser sa route depuis longtemps. Il se demandait comment Olivia le connaissait d'ailleurs.

Il s'adossa contre un arbre, et attendit patiemment que le sommeil le prenne tout en buvant sa bouteille.

Il avait déjà à nouveau trop bu et il n'était pas sûr de lui lorsque l'ombre d'une femme s'avança vers lui. Il finit par reconnaître son visage lorsqu'elle s'agenouilla devant lui.

- Amélia, dit-il en se concentrant. La mystérieuse femme du mystérieux Kitus.

Elle le regardait de ses grands yeux noirs, ses cheveux noirs étaient tressés de millions de petites nattes sur sa tête. Tout d'elle était noir, ses cheveux, ses yeux, sa peau, même ses ongles avaient une teinte noire. Si elle n'avait pas été aussi belle, elle aurait pu être terrifiante. Mais étrangement, ce n'était que le calme et la bienveillance qui ressortaient d'Amélia. Et ce, malgré le fait qu'elle faisait partie de ces personnes qu'on appelait Sorcière.

Elias n'en connaissait pas beaucoup, Palimoa était d'ailleurs la seule qu'il avait déjà rencontrée. Palimoa était bien différente d'Amélia, elle inspirait plus la méfiance. Elias ne l'avait rencontré que deux ou trois fois dans sa vie, il préférait garder ces distances avec elle. Quelque chose lui disait que Palimoa jouait sur plusieurs tableaux, et bien qu'elle avait aidé Édouard et Maria à trouver les pièces, en leur donnant des indices, il n'arrivait pas à lui faire confiance.

Tandis qu'Amélia ne lui inspirait aucune crainte.

« Peut-être un de ses tours de sorcière ... »

- Vous ne devriez pas boire autant, Capitaine...

« Même sa voix, inspire la confiance... Il y a forcément quelque chose de louche... »

- Qu'est-ce que ça peut bien vous faire ? Lâcha-t-il dans un soupir. Olivia s'occupe déjà de me faire la morale...

- Mais vous ne l'écoutez pas pourtant...

- Pourquoi faire ? Répondit-il de manière arrogante.

- Peut-être parce qu'il s'agit de la seule personne qui ne vous a pas encore tourné le dos...

- Pas encore, mais ça ne saurait tarder, vous verrez.

- Vous avez une bien trop piètre estime de vous Capitaine.

- Je ne suis plus Capitaine, je n'ai plus de navires, plus d'équipages, plus rien.

- Vous avez encore Olivia...

- Vous n'avez pas entendu ce que j'ai dit? Olivia finira bien elle aussi par se détourner de moi aussi. Et c'est légitime.

- Vous vous laissez ronger par le passé, auquel vous êtes encore bien trop accroché, Capitaine.

- Qu'en savez-vous ?

Amélia ne répondit rien, elle lui adressa un sourire en coin, les yeux brillants.

« Elle sait... Comment sait-elle? »

- Pourquoi ai-je la mauvaise impression que vous en savez bien plus sur moi que moi sur vous ?

- Parce que c'est le cas, rit-elle gentiment.

Elias grogna, il se doutait qu'elle ne lui dirait pas plus que ça. C'était toujours le problème avec les sorcières, elles parlaient en énigme, et ne disaient jamais grand-chose, sauf des phrases qui n'avaient du sens que pour elles.

- Ne mettez pas Olivia de côté, elle aura besoin de vous avant la fin, dit Amelia en se levant.

- Comment ça ? Dit Elias, alors qu'elle commençait à s'en aller. De quelle fin ? Hé ! Répondez-moi !

Mais c'était trop tard. Amélia était déjà partie loin, laissant Elias et ses questions sans réponse.

Il maugréa contre son arbre, maudissant les sorcières et leur langage.

Après tout, ça n'avait rien d'étonnant. Elles étaient des créatures des Enfers. Rien chez elles n'était normalement fait pour aider les humains comme eux. Mais il se serait attendu à plus de réponses venant d'Amelia, elle qui était devenue la femme d'un pirate.

Il laissa son regard observer le ciel étoilé. La clairière au milieu de la jungle commençait à trouver le calme de la nuit, ne laissant que quelques pirates enivrés autour du feu.

Petit à petit, le sommeil s'empara de lui.