Tout s'était enchaîné rapidement, le camp avait été levé en un rien de temps. Maxence et son équipage avaient rejoint l'Hippogriffe, tandis qu'ils avaient dû marcher pour atteindre la côte nord et retrouver les deux navires de Kitus.
L'Hippogriffe les avait rejoint sur la même côte, mais restait en mer pour garder un visuel sur la côte Ouest, afin de voir lorsque le Souffleur arriverait. D'après les marins, il n'était pas possible d'accéder à l'île par le nord, ceux que la plupart ignorait et que Kitus avait découvert, c'est que cela dépendait de certains marées.

Devant l'absence de commandement de la part de Kitus, c'est Maxence qui avait pris en main les choses. Les Corsaires et Nathan avaient dû rester sous bonne garde dans la jungle, mais Olivia n'était pas tranquille de le laisser avec les pirates de Maxence. Elle n'avait pas le choix pourtant.

Elle s'était empêchée de le voir et de lui parler depuis qu'ils étaient revenus, et même si c'était dur de rester loin de lui, elle savait qu'elle devait garder ses distances.

Ils n'eurent pas à attendre longtemps avant que le bâtiment du Capitaine Rog apparaisse. Olivia n'était pas sereine, mais elle se sentait un peu à l'abri sur la plage.

- Est-ce que tu vois quelque chose ? Demanda Olivia à Elias qui regardait par sa longue-vue.

- Je crois que Maria y va seule, en tout cas je ne vois qu'elle dans la chaloupe..

Olivia n'arrivait pas à rester en place. Elle avait mis Théopold en danger en mentant sur la pièce. C'était normalement et logiquement encore le petit garçon qui détenait la dernière pièce. Elle avait préféré garder cette information pour elle, et laissé le choix à Théopold d'en faire ce qu'il voulait. Il avait une solution de replis si jamais les négociations de Maria ne fonctionnaient pas correctement.

Plus elle réfléchissait à ce qu'elle avait fait, et plus elle se disait que c'était une bêtise. Théopold n'était qu'un enfant, certes très intelligent et débrouillard, mais quand même, simplement un enfant. Ça n'avait pas été son idée la plus brillante, elle devait l'avouer. Mais elle avait été prise un peu au dépourvu, et avait balancé la première chose qu'elle avait trouvée.

- Une chaloupe part du Souffleur, la prévint Elias.

- Déjà ? S'étonna la jeune femme.

- Oui, mais ce n'est pas Maria dedans ...

Olivia attrapa la longue-vue des mains d'Elias malgré ses protestations.

C'était Théopold qui était dedans ! Elle sentit un poids s'enlever de ses épaules. Il ne lui restait qu'à espérer que tout irait bien pour Maria désormais.

Ils aidèrent le jeune garçon à arriver sur la plage, ce dernier était un peu perdu, mais son visage s'illumina lorsqu'il vit Olivia. Il lui sauta dans les bras.

- Je savais que tu t'en sortirais ! Dit le petit garçon.

Elle l'entoura de ses bras et une partie de la pression accumulée ses derniers jours s'envola en même temps qu'elle pleurait.

- Je suis tellement contente de te voir... Que s'est-il passé ? Tu as pu voir ta mère ?

- Oui, elle lui a dit qu'elle ne lui dirait pas où est la dernière pièce tant qu'elle ne m'aurait pas vu. Il a accepté... Il n'était pas content quand elle lui a dit qu'ils ne pouvaient pas la récupérer car elle était toujours sur le Luméria... Le bateau des Corsaires qu'il avait attaqués ... Mais il a accepté de me laisser partir quand même ...

Il jeta un regard entendu à Olivia mettant une main dans sa poche. Elle pouvait le voir jouer avec quelque chose à l'intérieur, et elle devina que le jeune garçon avait gardé la pièce.

Elle le vit faire un geste, comme s'il voulait la sortir, elle le retint et lui glissa discrètement :

- Garde-la précieusement, personne ne pourra jamais se douter que c'est toi qui l'as si tu gardes le secret...

Il hocha la tête d'un air entendu.

Elias les prévint que Maria avait elle aussi quitté le navire du Capitaine Rog, et avait pris la direction de la plage.

Théopold lui couru dans les bras, et ils restèrent un moment à genou dans le sable.

- Comment ça s'est passé ? Dit Olivia en regardant Maria.

- Il m'a cru, heureusement... Il a finalement accepté de relâcher Théopold. Il n'a pas coulé le navire, il l'a fait mettre ailleurs, il va le fouiller pour la trouver.

- Je suis étonnée qu'il ait été aussi indulgent, dit Elias. Ce n'est pas dans sa réputation...

- Je n'ai pas cherché plus Elias. Mon fils est là, c'est tout ce qui compte. Viens, allons rejoindre ton père sur l'Hippogriffe.

Theopold adressa à Olivia un triste signe de la main, sa mère l'entraînait déjà vers l'une des chaloupes, sans lui laisser le temps de dire au revoir.

L'instant de soulagement ne dura pas longtemps, des bruits de canon arrivèrent à leurs oreilles, et au vu de la tête d'Elias, Olivia n'était pas rassurée.

Mais elle n'avait pas besoin de voir à travers une longue-vue, elle voyait parfaitement le navire qui s'approchait de la côte. Un navire avec des voiles rouges et blanches. Des Corsaires.

Sous le choc, elle se laissa tirer par Elias qui lui criait de se dépêcher. L'effet de surprise passée, elle l'arrêta dans sa course.

- Olivia on doit partir maintenant !

- Non, non, je ... Je ne peux pas...

Elle pensait à Nathan, resté dans la jungle, elle ne voulait pas partir sans lui, et le laisser ici.

- Ne sois pas stupide, cria Lydia en arrivant près d'elle. On doit y aller !

Elle regarda son amie, en espérant qu'elle comprenne où elle voulait en venir, mais Lydia continua de la tirer.

- Si tu restes ici, ils vont te tuer ou pire encore, déclara Elias. Et ton Corsaire sera plus en sécurité avec les siens qu'avec nous.

Elle fixa Elias, il avait compris. Il savait pour Nathan.

- Vous n'êtes pas en sécurité ensemble Olivia, continua de l'implorer Lydia. Si tu tiens à la vie, viens avec nous.

Mais Olivia était incapable de l'abandonner. Elle se fichait de sa propre vie. Il y avait encore des pirates avec eux, et ceux-là ne laisseraient aucune chance aux Corsaires de partir en vie.

- Olivia, continua Lydia. C'est la mort assurée pour tous les deux si n'importe qui apprend ça. C'est ce que tu veux ? Si tu vas le chercher, et qu'il monte avec nous, il ne faudra pas longtemps pour qu'il soit jeté par-dessus bord. Si tu ne tiens pas à ta vie, pense à la sienne. Tu es un danger pour lui.

- Sa vie est déjà en danger, ils ne sont pas seuls là-bas ! Cria Olivia.

Elias renchérit tout en continuant de serrer Olivia :

- Ceux qui sont restés prendront la fuite dès qu'ils verront le reste des Corsaires débarqués, ils ne perdront pas de temps avec les captifs, je peux te l'assurer.

- Je t'en supplie Olivia, ne sois pas stupide. Vous n'avez aucun avenir ensemble. Sauf la mort.

Olivia rendit les armes, ils avaient raison.

Elle les laissa la traîner sur la plage pour rejoindre le navire de Kitus, et n'osa pas se retourner.

Elle venait de l'abandonner à son propre sort. Elle n'était pas sûr qu'il comprendrait. Ni qu'il lui pardonnerait un jour.