Chapitre 36
Pour la première fois, entrer dans l'hôpital de Portsmouth était comme prendre une grande bouffée d'air.
Derrière Louis, Lana et Gigi discutaient du dernier devoir que Lana avait eu à faire, et devant, Liam et Zayn de quelque chose qu'il n'avait pas vraiment saisi. Leurs visages étaient aussi éclairés que celui de Louis, bien plus que la première fois qu'ils étaient entrés dans ce bâtiment. Leurs cœurs battaient aussi vite, mais pas pour la même raison.
Louis ne se souvenait pas vraiment de cette nuit, pour être honnête. C'était comme si son cerveau avait effacé ces images. De toute façon, elles étaient bien trop embrouillées, et si Louis s'en était souvenu, il n'aurait pas pu en tirer grand chose. Il se souvenait de la façon dont la lourdeur du monde s'était abattue sur ses épaules, dans la chambre de Harry, quand il avait reçu l'appel de Gigi. A quel point ses jambes le brûlaient quand il était arrivé dans le hall. Le façon dont tout était trop, dont il avait envie de pleurer et de hurler en même temps, mais qu'il ne ressentait rien pour autant.
Cette nuit, qui datait de presque deux mois maintenant, n'avait plus lieux d'exister. Cette nuit où Niall était tombé dans le coma, suite à une fusillade a l'épicerie dans laquelle il était allé faire les courses, avec Gigi. Les tireurs avaient été abattus par la police. Et aujourd'hui, Niall sortait de l'hôpital.
Alors oui, cette nuit n'existerait plus jamais.
Alors qu'ils montaient les escaliers dans un léger brouhaha, Louis sourit doucement en mettant ses mains dans ses poches. Décembre avait débuté depuis quelques jours, et il se souvenait de son souhait pour la fin de l'année. Que tout rentre dans l'ordre. Qu'il puisse commencer la prochaine année sereinement.
A présent, il lui semblait que ça commençait à se réaliser. Niall sortait de ce bâtiment qui était littéralement l'enfer sur terre aux yeux de Louis, même si, il devait bien l'admettre, c'était aussi l'endroit où Niall avait été sauvé. Harry avait gagné le premier procès, et commençait à vraiment aller mieux grâce à ses rendez-vous chez son psychologue. Ses petites sœurs terminaient bien l'année, avec de bonnes notes, et même si elles ne passeraient pas Noël avec lui, mais avec des amies, comme elles le lui avaient dit, Louis était heureux pour elle. Tout le monde semblait être en bonne voie pour les examens de fin de trimestre. Louis était en bonne voie, même si cela voulait dire qu'il passait ses soirées à réviser.
Harry et lui commençaient à regarder les coûts d'une chambre double. Gigi et Zayn avaient économisé assez pour s'offrir des vacances en Ecosse pour Noël. Liam avait décroché un petit contrat chez un journal peu connu, mais qui était quand même un journal. Lana et Niall rentreraient à Dublin pour Noël.
Tout allait bien. Enfin, putain. Louis n'attendait que ça.
Il ne sentit la boule qui naissait au creux de son ventre que lorsqu'il posa le pied à l'étage de la chambre de Niall. Louis fronça les sourcils alors que Lana glissait son bras autour de ses épaules, mais sourit en se rendant que c'était parce qu'il était bien trop excité. Bien trop impatient que Niall sorte de ce foutu hôpital, revienne foutre le bordel dans la chambre à côté de la sienne pour pouvoir enfin clore ce chapitre.
Quand ils arrivèrent devant la chambre de Niall, les parents du garçon étaient là. Louis savait que c'était eux parce que Niall lui avait déjà montré des photos, mais il ne les avait jamais croisé à l'hôpital, ce qui était surprenant, parce qu'il avait passé beaucoup de temps là-bas, et les parents de Niall sûrement encore plus.
La porte de la chambre était ouverte, et il s'en échappaient des rires, venant de Niall, et sûrement de son frère, qui devait être avec lui. Louis sourit doucement, s'imaginant à quel point Niall devait être heureux et impatient de quitter cet endroit, lui-aussi. Louis avait passé son temps, alors que Niall était dans le coma, à le regarder et à se dire qu'il était tout le contraire même de l'ambiance et l'humeur qui régnait dans les hôpitaux. Que les murs blancs ne lui allaient pas, que les draps bleus dénudés de plis n'étaient pas les siens. Que le soleil filtré par le rideau ne l'éclairait pas assez, pas comme il le devrait.
Niall le ressentait, ça aussi. Il l'avait dit à Louis. A quel point, même s'il était infiniment reconnaissant envers les chirurgiens et infirmiers qui l'avaient sauvé, il ne supportait que très peu cette ambiance de mort qui régnait dans les couloirs. Il détestait voir les enfants réapprendre à marcher avec un prothèse alors qu'il était chez le kiné, il détestait voir les vieilles personnes pleurer dans les couloirs alors qu'il allait aux toilettes.
Et au dessus de ça, il y avait autre chose : Niall détestait avoir besoin d'aide. Louis avait découvert ça récemment. En se rendant compte que Niall voulait rattraper la tonne de devoirs et de cours qu'il avait loupé seul. Qu'il ne voulait pas que Louis lui amène des sandwiches de la supérette du campus, parce que les repas de l'hôpital étaient ignobles. Qu'il détestait comment son kiné lui parlait, comme s'il était idiot, comme s'il ne savait marcher. Qu'il ne supportait pas savoir qu'il avait besoin de voir son psychologue. Qu'il ne supportait pas le fait qu'on lui ait proposé de louer un fauteuil roulant pour sortir de l'hôpital, même s'il avait fini par accepter, parce que ses amis l'avaient convaincu qu'il ne pourrait définitivement pas marcher dans l'état où il était.
Parce qu'il était toujours très fatigué, même après autant de temps. Il n'avait plus aucun autre soucis, du moins, aucun souci qui ne justifiait une présence nécessaire à l'hôpital. Il serait en fauteuil roulant le temps qu'il reprenne des forces et puisse à nouveau marcher sans boiter à cause de son genou. Louis avait vérifié auprès des profs et des secrétaires que tout les amphithéâtres étaient équipés d'accès aux fauteuils roulants, et avait récupéré les clefs de l'ascenseur pour Niall. Autant dire que la veille, lui et Liam avaient passé la soirée à monter et descendre dans l'ascenseur comme des enfants surexcités.
Louis laissa ses amis partir devant, entrer dans la chambre, et il resta dans le couloir. Il regarda un instant les parents de Niall, qui, il en avait le sentiment, n'avaient jamais été plus heureux. Ils avaient dû avoir la peur de leur vie, Louis n'osait même pas imaginer à quel point ç'avait dû être horrible. Leur premier fils passait à deux doigts de la mort dans un accident de la route, puis le deuxième faisait la même chose à cause d'une fusillade. Louis avait failli arrêter de respirer pendant que Niall était dans le coma, alors à leur place, son cœur aurait arrêté de battre.
- Tu es Louis, n'est-ce pas ?
Louis sursauta presque, et releva la tête vers la mère de Niall, qui venait de prononcer cette phrase. Il rencontra son regard, ainsi que celui de son mari, puis sourit en s'approchant d'eux, les mains dans les poches. Il confirma en leur serrant la main, et le père de Niall commenta :
- Niall nous a beaucoup parlé de toi.
- C'est vrai ? demanda Louis avec un léger sourire.
Parce qu'en vérité, il n'en n'avait jamais vraiment parlé avec Niall. De ce qu'ils étaient l'un pour l'autre. Louis le considérait sincèrement comme son meilleur ami. C'était la personne avec qui il pouvait parler d'un sujet sérieux pendant des heures, mais aussi plaisanter sur un sujet idiot pendant une soirée entière. Il pouvait lui demander de l'aide, et Niall passerait tout le temps qu'il faudrait pour lui expliquer un cours, même s'il avait un million de choses à faire. S'il avait un problème, il pouvait sonner chez lui au milieu de la nuit, et Niall lui ouvrirait, même si c'était très tard - il l'avait déjà fait. Et s'il avait un problème et qu'il ne venait pas le voir, Niall irait le chercher dans sa chambre pour lui remonter le moral - ça aussi, il l'avait beaucoup fait.
Tous les amis de Louis étaient génials, vraiment. Il les adorait tous, chacun d'entre eux. Mais il y avait un truc à propos de Niall. Ce truc qui faisait que quand un prof écorchait un mot, c'était tellement hilarant qu'ils n'arrivaient plus à respirer. Ce truc qui faisait que quand Louis faisait une présentation orale, il ne devait surtout pas croiser son regard s'il ne voulait exploser de rire. Ce truc qui faisait qu'il pourrait regarder n'importe quel film si Niall l'aimait, parce qu'il savait qu'il allait l'aimer aussi. Ce qui faisait qu'il avait de ricaner pendant des heures en regardant les élèves dans l'amphi, à parler des rumeurs qui circulaient à leur propos et la façon dont ils étaient habillés. Ce truc qui faisait qu'il avait l'impression d'être en sécurité.
Pas le genre de sécurité dans laquelle il avait envie de se blottir, comme celle que lui apportait Harry, non. Le genre qu'il n'avait jamais voulu, mais qu'il ne voulait plus lâcher. Le genre qui lui donnait l'impression que rien n'était grave, qu'il pouvait bien rater un contrôle, faire tomber son plateau dans la cafétéria, éclater en larmes devant tout le monde et tomber et se faire une cheville que ça ne serait pas grave, parce que Niall serait toujours là pour faire des blagues comme si ce n'était rien, comme si la vie ne s'arrêtait pas.
Louis ne savait pas qui il était pour Niall. Peut-être qu'il faudrait qu'ils en parlent. Histoire qu'il sache s'il était le seul. Si Niall connaissait un mec bien plus cool que Louis sur Dublin et qu'il passait des soirées au téléphone avec lui pour lui raconter toute sa vie et écouter la sienne.
Mais ce que la mère de Louis avait dit, ça le faisait sourire. Vraiment. Parce qu'il n'était pas le seul con qui avait constamment envie de voir Niall pour faire une blague sur un truc stupide.
- Tu es allé le voir ? demanda doucement le père de Niall en désignant la porte du menton.
Louis suivit son regard en répondant :
- Pas encore. Mais je vais le voir tout le temps, alors ça va, pouffa-t-il. Et vous ? Quand est-ce que vous repartez à Dublin ?
- Demain, répondit la mère de Niall. On ne peut plus louper le boulot. Maintenant que Niall réveillé et plus ou moins en forme, on est obligés d'y retourner. On n'a plus de congés.
Louis hocha la tête, jouant nerveusement avec ses doigts. Parce qu'il y avait toujours cette idée dans sa tête, et même s'il essayait de ne pas trop y penser, il savait qu'elle était là. Il y pensait des fois, avant de s'endormir, alors que Harry ronflait doucement contre son bras.
- Je... commença-t-il d'une voix rocailleuse. Je suis désolé, pour ce qui est arrivé à Niall. Ça aurait dû être moi.
- Ce n'est pas vrai, Louis, répondit immédiatement le père de Niall.
Louis se mordit la joue, refusant de laisser les larmes tremper ses yeux. Niall avait dû en parler à ses parents. De à quel point Louis s'en voulait, même s'il faisait comme si tout allait bien. Comme s'il ne se réveillait pas, quelques fois, la nuit, en voyant des images de la fusillade. Comme s'il ne passait pas toutes ses journées à imaginer ce qui se serait passé si Niall avait reçu une balle dans la tête dans le supermarché. Comme s'il n'avait pas peur que, tout d'un coup, Niall lui en veuille. Louis aurait compris, si en sortant de son coma, Niall n'aurait plus voulu entendre parler de lui. Mais le garçon ne lui en avait jamais voulu. Jamais il ne lui avait craché que c'était de sa faute.
- Tu sais très bien que ça n'aurait rien arrangé, que ce soit toi qui ait passé un mois et demi dans le coma plutôt que Niall.
Louis haussa les épaules.
- J'étais celui qui était censé aller faire les courses, et j'ai envoyé Niall parce que je n'avais pas envie de sortir. C'est de ma faute.
- Je pense que, intervint la mère de Niall avec une voix douce et un regard réconfortant, ça ne sert plus à rien d'y penser. Tu te fais du mal tout seul, Louis. Niall va bien. Niall sort de l'hôpital aujourd'hui, et il va bien. Peut-être pas complètement, et peut-être que ça prendra du temps à guérir toutes les blessures que ça a pu causer, mais il ira bien, je le sais.
- Et les seuls coupables sont les trois gars qui sont rentrés dans ce supermarché avec des armes, répondit le père de Niall. C'est tout. Ce n'est personne d'autre.
Louis pinça les lèvres et hocha la tête, les doigts serrés entre eux. Peut-être qu'ils avaient raison. Que pour l'instant, ça faisait encore un peu mal, même si Niall sortait enfin de l'hôpital. Parce que le temps prend du temps pour guérir ce genre de choses, et que ça s'estompera peu à peu avec le temps. Louis aimait penser ça, que tout rentrerait dans l'ordre. Qu'un jour, dans cinquante ans, Niall serait en train de boire de la bière dans son canapé en riant bien trop fort, et que tout ça serait oublié.
Il s'apprêtait à dire autre chose aux parents de Niall, sûrement les remercier, mais son téléphone sonna dans sa poche. Il le sortit avec la ferme intention de raccrocher, mais en voyant le prénom de Harry, il fronça les sourcils, et annonça en se reculant :
- Désolé, je dois répondre.
Les parents de Niall hochèrent la tête avec le même sourire rassurant, et Louis s'adossa contre le mur de l'autre côté du couloir, à quelques pas d'eux, et décrocha. Harry avait un rendez-vous chez son psychologue dans l'après-midi, et venait sûrement de sortir. C'était sûrement pour prendre des nouvelles de Niall, pour savoir quand est-ce qu'ils rentreraient. Mais Louis avait développé cette peur au fond de sa poitrine, et il ne pouvait pas empêcher son cœur de battre un peu plus fort dans sa poitrine quand Harry l'appelait. Il avait peur qu'il y ait un problème, qu'il n'aille pas bien, qu'il soit en larmes dans sa chambre.
Louis repensa aux paroles de la mère de Niall. Qu'il faudra du temps pour que les blessures guérissent, et peut-être que celles-ci en faisaient parti. Peut-être qu'un jour, Harry arrêterait de regarder dans le vide, les yeux larmoyants, même s'il le faisait de moins en moins. Peut-être qu'un jour, Louis arrêterait de s'inquiéter quand il l'appellerait, de peur que quelque chose n'aille pas.
- Oui ? Harry ?
- Euh, salut. Ça va ?
Louis fronça les sourcils, légèrement amusé. La voix de Harry avait l'air légère, mais un peu embrassée, et il n'agissait pas comme ça, d'habitude, au téléphone. Il n'aimait pas les coups de fil, et généralement, il allait tout le temps droit au but, le plus souvent sans même saluer Louis. Surtout quand ils s'étaient vu quelques heures auparavant.
- Qu'est-ce qu'il y a ? Tu es bien rentré de ton rendez-vous.
- Ouais.
Il y eu quelques secondes de silence, jusqu'à ce que Harry se racle la gorge et commence :
- Hum... Il se pourrait qu'il y avait les flics devant la FAC quand je suis arrivé.
- Quoi ? s'écria Louis.
Harry avait ce truc auquel il faisait attention, et pour lequel Louis lui serait éternellement reconnaissant. Il savait comment poser sa voix, quelles intonations il fallait lui donner pour retranscrire son humeur. C'est pour ça que en entendant la phrase qu'il venait de prononcer, un sourire dans la voix, Louis ne s'inquiétait pas le moins du monde. Il était même amusé, persuadé que Harry avait encore fait n'importe quoi.
- Qu'est-ce que tu as encore fait ? soupira-t-il en riant à moitié.
- C'est pas faute ! répliqua Harry d'une voix aiguë.
- Mmh mh, j'imagine que c'est pourquoi tu es avec les flics. Parce qu'ils voulaient te dire bonjour.
- Exactement.
Louis leva les yeux au ciel en souriant, secouant la tête. A l'autre bout du fil, Harry gloussa doucement. En même temps, les yeux de Louis glissèrent sur la porte de la chambre pour en voir sortir Niall, dans un fauteuil roulant, accompagné de son frère, Lana, Gigi, Zayn et Liam. Louis lui fit un sourire, et Niall le lui rendit avant de froncer les sourcils en désignant le téléphone de Louis du menton. Louis leva les yeux en mimant Harry avec ses lèvres, et Niall leva les yeux au ciel en riant, sachant à quel point Harry était un sketch, encore plus au téléphone.
- En fait, reprit Harry, j'ai discuté un peu plus longtemps avec mon psy à la sortie du rendez-vous. Donc je suis rentré sur le campus 32 minutes après la fin du rendez-vous. Je suis autorisé à rentré 30 minutes après. Autant te dire que les flics étaient limite déjà là.
- Tu m'exaspères, soupira Louis en levant les yeux au ciel, absolument pas surpris.
- C'était pas ma faute, couina une fois de plus Harry.
Louis ricana tandis que Harry protestait, et reprit :
- Et donc ?
- Et donc en fait, c'est exactement comme une garde à vue. C'est genre, vraiment une garde à vue. Alors il se pourrait bien que je sois au poste de gendarmerie. Mais mon avocat a déjà payé le bail ! se précipita de dire Harry avant que Louis ne râle. Il faudra juste que tu viennes me chercher et signe le bail, termina-t-il d'une petite voix.
Louis ne répondit pas tout de suite, hésitant entre râler et éclater de rire. C'était tellement Harry. Se retrouver en garde à vue parce qu'il était rentré dans son périmètre deux minutes trop tard. Il aurait pu le deviner. Louis s'entendait bien avec le gendarme qui s'occupait du dossier de Harry, et il avait bien compris que ce gars là, ce n'était pas du tout un criminel. Qu'il ne ferait pas de mal à une mouche, parce qu'il était incapable de se souvenir qu'il avait un bracelet électronique et devait rentrer vite après ses rendez-vous chez le psychologue.
- Louis ? demanda Harry d'une petite voix.
- Je suis sûr que tu es en train de taxer tout le café de la gendarmerie, répondit Louis.
Il savait que Tony, le gendarme, ne l'avait pas mis dans la cellule des gardes à vue, puisqu'Harry avait son téléphone. Il l'avait juste gardé dans la gendarmerie, histoire de dire qu'il respectait la procédure, parce que ça lui ferait bien trop de la peine de mettre ce gamin avec un sourire de travers dans une pièce sombre et froide.
- J'ai fais exprès de me retrouver là pour avoir du café gratuit.
- Je t'ai déjà dit que tu m'exaspérais, Styles ?
- Mmh. Au moins une fois tous les jours depuis deux mois.
Louis pouffa, et répondit qu'il partait de l'hôpital tout de suite, pour qu'ils arrivent en même temps que Niall et les autres. Harry le remercia, amusé, et Louis raccrocha alors que tout les yeux étaient sur lui. Il rangea son téléphone, alors que Liam annonçait :
- Je donne dix balles à celui qui devine ce qu'il a encore foutu.
- Il a fait cramé sa chambre, suggéra Zayn.
- Il a déchiré tes devoirs, enchaina Lana.
- Il s'est perdu dans les couloirs de la FAC ? demanda Niall.
- Il a cassé ton miroir de grand-mère ! s'exclama Gigi.
Louis secoua la tête, les lèvres pincées pour ne pas rire, et lâcha :
- Il est au commissariat. Il est rentré deux minutes trop tard de son rendez-vous chez le psy.
- Ça c'est du talent, commenta Liam.
Louis haussa les sourcils en riant, et demanda à Niall :
- Ça te dérange que j'aille signer pour qu'il sorte pendant que vous vous occupez des papiers ?
- Tant que tu nous ramènes de la pizza, c'est bon.
Louis pouffa, et fit un signe de la main à ses amis et aux parents de Niall avant de tourner les talons. Il dévala les escaliers et sortit sur le trottoir, appelant la pizzeria à côté du commissariat pour commander, parce qu'il savait très bien que Niall était sérieux. Il en prit trois, promettant qu'il viendrait les chercher dans la prochaine demi-heure, puis marcha tranquillement jusqu'au commissariat.
Ça faisait pas mal de temps qu'il n'y était pas retourné, et il en était heureux. Il n'avait pas vraiment les meilleurs souvenirs, ici. Les interrogatoires, les longues heures à attendre dans la salle d'attente froide, les crises de panique de Harry, la fois il l'avait vu derrière une vitre, les mains menottées, et quand le gendarme lui avait dit qu'il était coupable du meurtre de Jessica, le laissant dans un cercle vicieux de questions pendant plusieurs jours.
Maintenant, son cœur ne battait plus aussi vite qu'avant, alors qu'il se dirigeait vers le bâtiment. A présent, ce n'était pas grand chose d'autre qu'une gendarmerie comme les autres, même s'il n'aimait toujours pas s'y rendre. Peut-être que ça deviendrait un endroit où il aurait de bons souvenirs, aussi. Parce que c'était ici qu'ils allaient enlever le bracelet électronique à Harry, s'il échappait à la prison.
Mais c'était quasiment sûr qu'il allait y échapper, alors Louis ne se faisait pas trop de soucis pour ça.
Louis entra dans la gendarmerie, les mains dans les poches, et Tony était au comptoir, discutant distraitement avec Harry, qui regardait les papiers posés sur le bureau. Louis sourit, amusé par le garçon, et se racla la gorge en s'approchant, leur faisant relever la tête à tout les deux. Tony soupira presque quand il le vit, comme s'il était épuisé de voir Harry, alors que le garçon s'exclama :
- Louis !
Louis pouffa, levant les yeux au ciel, alors que Tony cherchait un papier dans un tiroir pour le poser devant Louis. Il lui montra où signer alors que Harry faisait couler deux cafés à la machine sans rien demander à personne, puis contournait le comptoir pour le tendre à Louis. Celui-ci le prit en secouant la tête, puis récupéra le stylo pour remplir les informations demandées et signer.
- C'est la première et la dernière fois, Harry, d'accord ? demanda Tony d'une voix sérieuse. Je sais que tu n'as pas fait exprès, mais fais attention à l'avenir. Les gardes-à-vues sont notées dans ton dossier judiciaire, peu importe à quel point je suis sympa, peu importe si tu restes derrière le comptoir ou dans la cellule.
Louis ne vit pas Harry, penché sur la feuille, mais il l'imagina déglutir, et il répondit :
- Oui. Désolé. Je ferai gaffe.
Louis se releva et tendit la feuille à Tony, qui vérifia rapidement si tout était bon. Il prit une gorgé de son café, puis le gendarme hocha la tête en disant :
- C'est tout bon, merci. Maintenant, cassez-vous, je ne veux pas vous voir là. C'est samedi soir, allez vous bourrez la gueule avec vos potes. En restant dans les limites du périmètre, évidemment.
Harry fit un grand sourire, et Louis négocia pour qu'il puisse aller chercher les pizzas avec lui, puisque ce n'était pas exactement sur la route entre le commissariat et la FAC. Tony l'écouta, et sans rien dire, il tourna l'écran de son ordinateur vers Louis, et tapa un code permettant de désactiver le bracelet de Harry pendant un demi-heure. Il mit un doigt sur sa bouche comme pour lui dire de ne pas en parler, et Louis lui sourit en attrapant la main de Harry avant de partir.
Ce n'était vraiment, vraiment pas du tout professionnel. Mais Tony avait beau se la jouer dur avec son crâne rasé et ses gros bras, il avait un grand cœur. Il connaissait le dossier de Harry. Et comme tout le monde, il savait qu'il n'avait rien à faire dans un commissariat alors qu'il avait dix-neuf et était le plus gentil de tous les garçons. Alors il faisait tout son possible pour aider Harry.
- La prochaine fois, j'espère qu'il te met dans la cellule pendant 24 heures, fit Louis quand ils sortirent. Parce que je ne viendrai pas te chercher.
Harry lui donna un coup de coude dans les côtes qui le fit glousser. Louis enroula son bras autour de ses hanches pour le rapprocher de lui, et ils allèrent récupérer les trois pizzas avant de se dépêcher de rentrer à la FAC, parce que si le bracelet électronique de Harry se remettait en marche alors qu'ils n'étaient pas dans le périmètre, Tony allait certainement les enterrer vivants dans le jardin de la gendarmerie.
Avant d'entrer dans la FAC et rejoindre la chambre de Niall, Louis vola un baiser à Harry, qui sourit. Avec un peu de chances, dans deux semaines, ce bordel serait enfin réglé. Et Harry n'aurait plus jamais à porter un bracelet électronique, ni à foutre les pieds dans un commissariat.
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Au final, la soirée ne s'était pas tant prolongée comme ça, parce que Niall avait vite été épuisé. Après avoir mangé dans une chambre et dit au revoir à ses parents et son frère, il avait regardé un film sur l'ordinateur de Niall, tous entassés sur son lit. La moitié s'était endormie avant la fin du film, et Louis et Niall avaient pris grand plaisir à les réveiller en criant.
A présent, Louis était en train de remettre ses chaussures, assis sur le lit de Niall avec le garçon tandis que tout le monde bavardait en mettant son manteau, ne faisait pas attention à eux. Louis faisait ses lacets quand il vit la façon dont Niall tapait nerveusement du pied. Il fronça les sourcils et se releva, lança un regard à Niall, qui fit comme s'il n'avait rien remarqué et tourna la tête. Louis soupira, presque amusé par l'attitude du garçon, et demanda :
- Quoi ?
- Quoi quoi ? répondit Niall sans pour autant le regarder.
- Pourquoi est-ce que tu tapes du pied tellement fort que le bâtiment pourrait s'effondrer ?
Niall lui lança un regard noir, et Louis lui adressa un grand sourire. Il ne répondit rien, cependant, incitant Niall à répondre. Il le fit après quelques secondes à fixer ses doigts.
- Tu ne te moques pas de moi, hein ?
- Bien sûr que non.
- Je... Tu peux rester ici, cette nuit ? J'ai peur de dormir tout seul.
Et, oh, Louis ne s'attendait pas à ça. Niall ne lui en avait jamais parlé, parce qu'il n'aimait pas recevoir de l'aide. Mais c'était évident. Il s'était fait tiré dessus lors d'une fusillade. Bien sûr que un mois et demi à voir un psychologue ne guérissait pas. Bien sûr qu'il avait peur de dormir tout seul.
- Pas de soucis, répondit Louis avec un sourire qu'il voulait réconfortant.
C'était à ça, qu'il pensait, un peu plus tôt. Il pouvait tout dire, demander à Niall, et ça marchait pareil dans l'autre sens. Bien sûr qu'il pouvait rester pour la nuit, si ça l'aidait à s'endormir. Il pourrait rester jusqu'à la fin de l'année, si Niall en avait besoin.
- Merci, répondit timidement Niall, ce qui ne lui ressemblait pas.
- Laisse-moi juste récupérer des fringues et dire à Harry qu'il n'aurait pas le plaisir d'essayer de m'étouffer avec la couette cette nuit.
Niall pouffa en levant les yeux au ciel, et Louis gloussa en se levant. Harry l'attendant, son ridicule manteau bleu sur les épaules, les cheveux remontés en un chignon. Louis attrapa son bras en souriant, et ils saluèrent leurs amis en sortant la pièce. Ils descendirent à l'étage d'en dessous en silence, et Louis se racla la gorge alors que Harry déverrouillait la porte pour dire :
- Je dors avec Niall, ce soir.
Harry tourna la tête vers lui, les sourcils haussée, les yeux pleins d'inquiétude. Et ouais, s'il y avait un truc chez les gens qui plaisait vraiment beaucoup à lui, c'était à quel point ils pouvaient s'inquiéter pour ses amis.
- Il a peur ?
- J'imagine. Il s'est un peu fait tiré dessus, en fait.
- Ah, vraiment ?
Louis leva les yeux au ciel, amusé, et donna un coup à Harry pour qu'il entre dans sa chambre en riant. Louis le suivit et ferma la porte avec son pied. Il entreprit d'enlever chaque vêtement qui était posé sur la chaise de bureau de Harry, jusqu'à trouver son jogging parmi ses t-shirts et les jeans de Harry. Alors qu'il se mettait en quête de son t-shirt blanc qu'il mettait pour dormir, il se fit la promesse de ranger au moins une fois par mois, quand ils auraient la chambre double, parce qu'ils allaient rapidement se noyer sous le bordel.
Ses vêtements et son chargeur sous le bras, Louis se retourna vers Harry, et l'observait, adossé dans l'encadrement de la salle de bain, les bras croisés, concentré dans sa contemplation. Quand il se rendit compte que Louis l'avait surpris, il sourit et s'avançant vers lui, glissant ses bras autour de sa taille pour le rapprocher de lui. Louis sourit doucement alors que Harry picorait et parsemait ses lèvres de légers baisers en marmonnant :
- Je suis sûr que Niall veut juste te voler.
Louis pouffa, et glissa sa main libre dans la nuque de Harry pour vraiment l'embrasser. Le garçon répondit à son baiser, ouvrant sa bouche contre la sienne en le serrant encore plus contre lui. Et alors que son odeur enveloppait Louis, ce dernier se rendit compte à quel point ce à quoi il pensait depuis quelques mois était cliché et horriblement niais. Mais c'était aussi très vrai. Il ne saurait pas ce qu'il aurait fait sans Harry. Parce qu'il se rendait compte maintenant que tout allait bien, il avait quand même besoin de lui. Que même si Niall n'était plus dans le coma, si les révisions pour les examens de fin de trimestre se passaient bien et que le procès s'annonçait favorable envers Harry, il avait quand même besoin de lui.
Simplement pour décompresser en fin de journée. Simplement pour enfouir son visage dans son cou, sentir son odeur pour se dire que la journée était enfin terminée. Simplement l'embrasser pour se dire qu'il n'avait pas tant de devoirs que ça, au final. Simplement le serrer contre lui dans son lit pour se reposer. Il savait que Harry faisait tout ça, aussi. Que quand les cours devenaient trop, il posait sa tête sur les cuisses de Louis alors qu'il lisait, et le laissait jouer avec ses cheveux le temps de décompresser.
Ils avaient réussi. Ils avaient évité ce qu'ils voulaient éviter. Louis n'avait pas sauvé Harry. Le bonheur du garçon ne reposait pas entièrement sur ses épaules, et le bonheur de Louis ne reposait pas non plus sur celles de Harry. Et bien sûr, Louis était plus heureux quand il était avec Harry, parce qu'il était amoureux de lui. Mais il n'avait pas à être avec lui pour sourire, pour s'amuser comme un taré. Il n'hésitait pas une seconde avant d'accepter une soirée dans un bar avec Lana et Liam. Parce qu'il était heureux aussi, quand il était avec ses amis. C'était comme si son bonheur était partagé, et si la moitié était grâce à Harry, il était aussi présent grâce à ses amis, à ses cours, à tous les livres et vinyles qu'il achetait le dimanche matin et les croissants de la supérette du campus.
En vérité, s'il y avait pensé trois ans auparavant, Louis aurait trouvé ça chiant. La façon dont il aimait Harry. Parce qu'il avait cette idée ancrée dans sa tête, celle où quand on était amoureux de quelqu'un, on ne pouvait pas se passer de lui. On écrivait des poèmes sur lui, on passait toutes ses soirées avec lui et on pleurait quand il n'était pas avec nous. C'était la définition de l'amour qu'il se faisait.
Mais celle qu'il avait, maintenant, elle était bien mieux. Il était amoureux de Harry. Il n'avait jamais aimé quelqu'un aussi fort qu'il aimait Harry. Et imaginer le scénario où Harry partait à l'autre bout du pays, ou même du continent, était insupportable. Mais si ça arrivait, il savait qu'ils iraient bien. C'était ça, l'amour qu'il voulait. Pas celui qui le faisait pleurer toutes les larmes de son corps et qui le rendait pleinement heureux. Il voulait cette amour sain qu'il avait avec Harry. Se dire que, oui, s'il l'attendait à la fin des cours, c'était génial, mais que s'il n'était pas là, Louis passerait une moins bonne soirée, mais l'apprécierait quand même.
- Dépêche-toi, murmura Harry contre ses lèvres, Niall va te tuer. Encore à cause de moi. C'est toujours à cause de moi que tu es en retard.
Louis pouffa et laissa ses talons retomber contre le sol en se détachant de Harry. Il remit une mèche de cheveux derrière son oreille, et fit :
- Je reviens t'embêter demain matin, ne te fais pas de soucis.
Le garçon leva les yeux au ciel, et poussa presque Louis en disant :
- Maintenant, laisse-moi profiter de ma nuit tout seul. Je vais pouvoir dormir en étoile sans que tu ne prennes toute la place.
Louis lui tira la langue, et Harry lui lança un grand sourire alors que Louis ouvrait la porte. Il la referma derrière lui, le sourire aux lèvres, et grimpa les marches jusqu'à l'étage du dessus. Il entra dans la chambre de Niall sans même toquer, et retrouva se dernier en jogging sur son lit, la tête baissée sur son téléphone. Il partit dans la salle de bain pour se changer, et quand il revint, il souleva la couverture pour s'allonger. Il donna un coup de pied dans la cuisse de Niall pour qu'il se pousse, et le garçon râla puis donna un coup de poing dans l'épaule de Louis pour se venger.
Il finit par reposer son téléphone et poser sa tête sur l'oreiller, mais il n'éteint cependant pas la lampe de chevet. A la place, il soupira en regardant le plafond et lâcha :
- T'es pas obligé de rester, hein. Désolé si tu voulais dormir avec Harry.
- Ne t'inquiète pas. Il parle quand il dort, ça commence à être épuisant.
Niall tourna la tête vers lui et ouvrit la bouche, choqué, et répondit :
- Ça sera transformé, amplifié et répété.
Louis gloussa, et après ça, Niall sembla plus tranquille. Il enroulait distraitement un fil qui dépassait de sa couette autour de son doigt alors que Louis demandait :
- Comment ça va ?
Niall releva le regard vers lui, et réfléchit à ses mots quelques instants avant de hausser les épaules en répondant :
- Je sais pas trop. Généralement, quand je suis entouré, ça va. Mais quand je suis tout seul, pas vraiment. Je rêve encore de ce qu'il s'est passé dans le supermarché. J'entends encore le bruit des tirs dans le silence, donc je mets de la musique quand je suis tout seul.
Louis hocha la tête alors que Niall ajoutait :
- Désolé. C'est sûrement stupide.
- Ça ne l'est pas. Tu t'es fait tiré dessus Niall. C'est normal que tu sois traumatisé par ça. C'est pour ça que tu vas voir un psychologue.
- Tu crois que ça va marcher ?
- Généralement, ça marche. C'est, genre, un peu leur boulot, fit Louis, faisant glousser Niall. Mais ça va prendre du temps, c'est tout. Des fois, tu vas avoir l'impression que ça ne sert à rien, que tu perds ton temps, mais c'est faux. Ça va aller mieux.
Il regarda Niall, qui l'écoutait en hochant la tête, le regard perdu le vide. Il resta un instant comme ça, puis tourna la tête vers Louis pour demander :
- Pourquoi est-ce que tu es si fort pour consoler et rassurer les gens?
- Mec, j'ai deux sœurs de treize ans, et je sors avec Harry Styles. C'est plus formatif que des études de psychologie.
Niall éclata de rire, et ça sonna comme de la musique aux oreilles de Louis. Il savait que Niall n'était plus vraiment la même personne qu'avant la fusillade, et peut-être qu'il ne la redeviendrait même jamais. Ça faisait un peu flipper Louis. Mais tout ce qui l'importait, c'était qu'il retrouve le sourire. Ce genre de sourire qu'il ne perdait jamais et qui était contagieux, beaucoup trop contagieux.
- Merci d'être là, en tout cas, reprit Niall en se calmant.
- Pas de soucis. C'est ce que les meilleurs amis font.
Niall haussa les sourcils et afficha son plus grand sourire moqueur en demandant :
- Parce qu'on est meilleurs amis ?
Louis leva les yeux au ciel, parce qu'il était sûr que Niall allait réagir comme ça. Il ne répondit pas, alors Niall fit :
- J'accepte seulement si tu me donnes une bague.
Ils éclatèrent de rire tout les deux, et Louis mit des coups de pied à Niall toute la nuit parce qu'il prenait toute la place.
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