Chapitre 18 : de Nans et d'Elhra

Hamilton se retrouvait à nouveau en face de la voleuse dans la salle d'interrogatoire. Les services de police étaient arrivés et avaient ramené Chasseur, Flamme et Wiskers jusqu'aux cellules. Comme la fois précédente, le Chat Noir l'avait suivi sans même qu'il ne le lui demande. C'est ainsi qu'il se retrouva une fois de plus en tête à tête avec la jeune femme réputée cruelle.

-Et bien, commença-t-il. Si j'ai bien compris, tu t'appelles Féline, c'est ça ?

-Oui.

-Et Wiskers est... ton père ?

-Oui. Je suis Féline Wiskers. Et c'est la première raison pour laquelle je vole. Et d'ailleurs, il n'y en a pas d'autre.

-C'est à dire ?

-C'est à dire que c'est à cause de mon père que je suis une voleuse.

-C'est intéressant... Tu pourrais me raconter ton histoire ?

-Oui, je peux.

Jacques ne s'attendait pas à une réponse si brève et, surtout, à une réponse positive.

La jeune femme lui dévoila alors son passé, avec autant de détails que si elle écrivait un roman. Elle commença son récit même avant sa naissance, comme si l'histoire de sa famille était son passé, avec une telle précision qu'on aurait cru qu'elle avait vu tout ça.

Nans Pachov Wiskers était un voleur renommé. Il était le numéro un mondial, à l'époque. Il avait formé une armée. Une armée de petits voleurs, d'espions, qui travaillaient à son compte. Il avait une grande demeure, un château, une forteresse, une base en Antarctique. Tout allait très bien pour lui. Il s'enrichissait de jours en jours. Il avait eu une enfance paisible et vivait pleinement sa vie de rêve.

Elhra Pikloh était une jeune femme, une jeune étudiante séduisante qui vivait une vie sérieuse et banale. Elle rencontra Nans lors d'un voyage en Amérique du Nord, où celui-ci organisait un important vol. Nans tomba follement amoureux d'Elhra, qui l'aimait bien, mais qui n'approuvait pas sa profession. Il l'emmena dans sa base, où ils vécurent ensembles pendant quelques années. Quand il eut trente ans et elle vingt-sept, il la mit enceinte.

C'est donc le quatre décembre 1996 que fut née la dénommée Féline Wiskers, fille d'Elhra Pikloh et de Nans Pachov Wiskers.

Elle fut élevée dans cette base, elle ne connut rien d'autre. Elhra, très savante, qui avait une culture générale immense, lui enseignait le monde, lui apprenait les mathématiques, le français, les sciences et toutes les matières théoriques. Son père lui apprenait le sport, les réflexes. Ainsi, la jeune Féline savait ses réflexes à cinq ans. Ces réflexes qui lui permettaient d'éviter toutes les baffes, tous les coups. Ils étaient encore à perfectionner, mais ils étaient suffisants pour une petite enfant de cinq ans. Ses réflexes défensifs étaient presque au point. Elle continuait de s'entraîner malgré le fait que son père ne lui ordonnât plus. Elhra était mécontente des talents de sa fille pour la guerre. Elle lui apprit le français, la poésie, le théâtre, l'art de trouver les mots, de les manipuler. Elle lui apprit que les mots étaient tout aussi forts que l'épée, mais moins dangereux. À six ans, Nans décida de lui apprendre « l'art » de la guerre. Elhra ne pouvant s'y opposer, craignant les colères de son mari, lui apprit de plus belle les « vrais » arts. C'est ainsi que Féline apprit le maniement des armes, le tir à l'arc, les arts martiaux, le théâtre, la poésie, la littérature, le dessin, la peinture, la musique. À huit ans, Féline savait tirer à l'arc, éviter tous les coups, manier l'épée, et se battre rien qu'avec un bâton, ou même sans aucune arme. Son père ne se doutait pas qu'elle pourrait un jour s'améliorer, tant les capacités de sa fille dépassaient les siennes.

Quand elle eut dix ans, son père décida de l'emmener dans ses brigades de vol. Mais Elhra s'y opposa fermement.

-Ce n'est qu'une enfant ! Disait-elle.

-Mais regardes toutes ses capacités ! Nous serions les maîtres du monde avec elle ! La contredisait-il.

-Mais je ne veux pas que mon enfant devienne un bandit, un monstre, comme toi !

C'est cette phrase qui changea tout. Elhra ne voulait pas voir sa fille devenir comme son mari, elle ne la vit pas. Nans, en ayant assez d'être contredit par sa femme, décida de s'en débarrasser. Féline arriva juste à temps pour voir Nans jeter Elhra dehors.

-Maman ! Cria la jeune fille.

-Ta « Maman » ne doit pas rester ici, c'est mauvais pour toi, c'est mauvais pour ta carrière, c'est mauvais pour nous tous ! Lui répondit-il en criant.

-Féline, je t'aime, ma chérie.

Ce furent les derniers mots d'Elhra pour sa fille. Nans la jeta dehors et ferma la porte pour ne pas qu'elle rentre. Féline pleurait de tout son corps. Elle pleurait de tout son cœur, de toutes ses larmes, rivalisant avec les torrents qui dévastaient des villages entiers à des centaines de milliers de kilomètres de là.

-Pourquoi tu as fait ça ! Hurla-t-elle. Pourquoi !

-Ta mère avait des idées mauvaises.

-C'est toi qui a des idées mauvaises ! Mauvaises pour tout le monde !

Elle s'enfuit dans la maison, en courant, ne laissant pas le temps à son père de répondre, ne pouvant sortir rejoindre sa mère.

Le lendemain, Féline sortit. Elle sortit en cachette par la sortie de derrière. Elle n'y trouva pas sa mère. Une larme coula sur sa joue, et elle partit. Elle était seule, au milieu de l'Antarctique, sa terre natale. Elle s'assit dans la neige et se mit à pleurer. Elle sentit soudain un souffle chaud dans son cou. Elle se retourna et vit un grand loup blanc. Elle eut peur, mais ne voulut pas réagir.

-Que fais-tu là, demanda le loup.

-Je pleure. Mon père a tué ma mère. Alors je suis partie.

-Comment t'appelles-tu ?

-Féline.

-Ah, tu es la petite des Wiskers ?

-Oui.

-Je suis Koffy. Viens avec moi.

Et Koffy emmena la petite fille dans la grotte des loups. Beaucoup n'approuvèrent pas, mais Koffy et Zaaly s'en occupèrent comme d'une fille. Elle resta un moment là-bas, apprenant à connaître les loups géants. Elle reprit ensuite son chemin, et vit tout ce que sa mère lui avait appris. Elle se dirigea vers la Forêt. La forêt Amazonienne, la plus grande. Elle erra longtemps, puis trouva une petite cabane. Elle toqua et fut étonnée de trouver un vieux, qui habitait là. C'était Hitsück. Elle avait toujours dix ans. Elle passa quelques semaines ici, et se trouva une troisième famille. Ses trois familles, c'était Elhra, Koffy et Hitsück. Tout ceux qui comptaient vraiment dans son cœur.

Elle finit par revenir à la Base. Elle apprit en secret à maîtriser la neige, la glace, l'eau. Elle évitait de le montrer à qui que ce soit, elle le gardait en secret au cas où elle serait en danger de mort et qu'elle ne pourrait faire autrement. Elle se battait quotidiennement avec ses armes classiques, ses épées, son arc, sa dague secrète enfouie dans sa botte. Même son père n'en était pas au courant. Mais elle n'avait pas besoin de tels pouvoirs pour le dépasser et battre tout le monde.

Nans fut très fâché mais il ne s'énerva pas plus, craignant qu'elle fugue à nouveau. Il la fit rentrer dans ses voleurs, qui travaillaient à son compte. Féline dû voler pour son père et cela ne lui plut pas. Elle était la plus jeune de son unité, à onze ans. Elle était la plus douée de son unité. Mais Nans fit l'erreur de ne même pas la remercier, de ne pas la mettre en valeur. La petite Féline qui avait à peine onze ans était devenue un puits sans fond de haine et de colère, de désir de vengeance. Elle faisait ce qu'on lui demandait de faire, offrant un regard noir à son père à chaque fois qu'elle le voyait.

Un jour qu'ils avaient fait le vol d'une fortune, Nans organisa un banquet. Tout lui revenait. Il payait un peu ses voleurs et leur offrait nourriture, chambre et protection. Cela leur suffisait. Nans fit un beau discours. Un beau discours acclamant tous ses voleurs.

Évidemment, Féline avait fait une grande partie du travail. Les voleurs de son unité étaient très peu discrets. Elle les avait avertis, du haut de ses treize ans, qu'ils devraient faire attention, marcher sur la pointe des pieds, et que s'ils en étaient incapables, ils feraient mieux de l'attendre à l'entrée. Aucun ne tint compte de ce qu'elle dit, ils ne se souciaient pas d'une enfant qui n'avait même pas le tiers de leur âge. Ils entrèrent, la dépassèrent et ne se soucièrent pas du bruit. Féline avait, avant cela, étudié les plans du bâtiments. Elle s'était renseignée. Elle savait que des gardes veillaient nuits et jours un peu partout dans le bâtiment. Les hommes prirent le sac d'or, sans se soucier de quoi que ce soit, et une alarme retentit. Des hommes arrivèrent de partout. Ils les illuminèrent et découvrirent la dizaine de voleurs. Beaucoup essayèrent de lutter, mais, effrayés, beaucoup s'enfuirent. Féline dû se battre contre tous ces hommes, et les mis tous à terre. Elle ne voulait pas que cela arrive, elle servait juste son père. Elle tenait alors à lui dire qu'elle voulait changer d'unité, ou qu'elle soit nommée chef d'unité, car si tous l'avaient écoutée, les gardes ne seraient pas venus.

Mais aucun des hommes de son unité ne dirent quoi que ce soit au sujet des gardes et de l'alarme. Nans fit un beau discours et félicita tous ses hommes. Tous ses « braves » hommes qui avaient « parfaitement » volé le sac d'or. Il ne dit même pas un mot à sa fille. Ce fut la goutte de trop. Celle qui fait déborder le vase, inondant la table, les journaux, les papiers et tout, précieux ou non, ce qui s'y trouve. Féline sortit, plus énervée que jamais. Elle alla dans sa chambre, et regarda la photo de sa mère. Elle la mit dans son sac, ainsi que quelques babioles et un masque qu'elle avait elle-même cousu, et partit. Ce fut la fin. La fin de sa coopération avec son père. Mais en réalité, ce fut le début du plus grand bandit que le monde ait jamais connu.


Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top