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𝓢ohane











Aimé a organisé un dîner en mon honneur. Il a pris la parole au sein du conseil pour annoncer qu'il ne leur laissait pas le choix, que mon retour doit être reconnu avant le duel. Et ça me prend la tête. Ce n'est pas que je ne veux pas de ce dîner, c'est juste que je sais d'avance ce que ça va être. Je vais me tenir à une table entourée de nobles que je ne connais pas. Certains de leurs visages me rappelleront quelque chose, car ils auront passé les dernières années à me critiquer lors des mêmes évènements. Et je vais me taire pendant trois heures consécutives, jusqu'à ce qu'on m'autorise à quitter les lieux.

            Quand Aimé a quitté ma chambre hier, Casey est parti faire un tour et depuis, j'erre comme une âme en peine entre mon lit et le balcon. Je n'ai pas réussi à dormir ; il faut croire que je n'ose pas approcher mon lit depuis qu'il s'est assis dessus. Pourtant, ce n'est pas comme si je ne manquais pas de sommeil.

            Le dîner de ce soir approche et je ne trouve aucune raison de m'en réjouir. Je suis juste... agacé.

La lame de mon épée cisaille le seul meuble qui longe le mur de ma chambre. Je lance mon arme dans le bois depuis une heure, comme s'il s'agissait d'une lance assez aiguisée pour s'y enfoncer. Une fois de plus, je me satisfais d'entendre la pointe perforer le tiroir, avant d'aller la récupérer pour recommencer.

La vie au palais est toujours la même.

Les intendants font leur travail.

Les soldats s'entraînent.

Le roi exerce son pouvoir.

Mon père impose ses idées impertinentes.

Et ça me tue.

Ça me détruit.

Mon absence n'a rien changé, et mon retour n'est pas plus important. J'ai passé deux ans à crever de solitude dans les décombres d'une cellule située plus bas que Terre, pour qu'il suffise d'un jour au royaume pour s'en remettre et élire un nouveau roi. J'ai tellement la rage que mon épée ne suffit plus. Lorsque je m'apprête à l'extraire du meuble pour la centième fois, l'envie me prend de laisser mes doigts longer la lame.

Je ferme les yeux, coupable.

Cela faisait une éternité que je n'avais pas laissé mes émotions me pousser à me blesser. Mais il s'agit d'une pulsion si spontanée, que j'ai à peine le temps de me dire que c'est malsain, avant de comprimer la lame entre mes doigts.

Je serre les dents, la mâchoire contractée et la paume en sang.

« Tu y as peut-être été préparé toute ta vie, en attendant tu ne l'es toujours pas »

« Votre nom n'a plus d'importance, il ne signifie plus rien »

Un râle de rancœur m'échappe à l'instant où mes phalanges se détruisent contre le meuble. Je l'assène de coups, encore et encore, jusqu'à ce que la douleur physique équivaille à la haine.

« Je suis roi et tu n'es pas mort, et tu m'adresses la parole comme si de rien n'était, et j'ai l'impression qu'on m'arrache le cœur une deuxième fois »

Ma mère est morte pour que la sienne soit libre. Mon frère est mort pour qu'il accède au pouvoir. Mes soldats sont morts pour qu'il survive. Mon amour-propre est mort pour qu'il assouvisse sa soif de gloire.

Je suis mort pour lui.

Peu m'importe qu'il ait souffert de mon absence, sa présence ne fait qu'entacher la mienne depuis qu'il est venu au monde.

Je le déteste.

Je le déteste tellement, pourquoi faut-il que mon cœur l'aime autant ?

À bout de force, je plaque mon dos contre le meuble et m'effondre au sol. Mon cœur bat à tout rompre, je sens chaque battement pulser sous mes poignets, sous mon cou, jusqu'à mes tempes. Rien n'y fait, je suis toujours sur les nerfs.

Le bras à la bouche, je mords mon biceps jusqu'à ce que du sang afflue sous ma langue, étouffant un cri de rage. Si ma mère était là, elle me dirait de reprendre ma respiration et de penser à un endroit qui m'apaise. Elle me dirait de prendre le temps de m'écouter, de répondre aux besoins de mon corps, du moment qu'ils ne sont pas un danger pour lui-même.

Sauf que ma mère n'est pas là, et l'endroit qui m'apaise, ou du moins la personne, n'existe plus. Du revers de la main, j'essuie le sang qui macule mes lèvres, à peine capable de me relever sans tituber. Dès lors que je recouvre un semblant de mes esprits, quelqu'un frappe à la porte. Je l'entrouvre, conscient qu'il ne peut s'agir que d'Aimé, parce que Casey ne prendrait pas la peine d'annoncer sa venue.

À travers les quelques centimètres que je lui accorde, il glisse un œil curieux et m'adresse :

— Tu as du temps pour qu'on discute ?

— Non. 

— Pour autre chose, peut-être ?

— Toujours pas.

Il appuie sa paume sur la porte et l'ouvre davantage, un sourire timide aux coins des lèvres.

— Même pas pour un combat ?

— Bien que l'idée soit exquise, moins de temps je t'accorde, mieux je me porte.

— T'as toujours eu tendance à dire des choses qui vont à l'encontre de ce que tu penses.

— Je savais que tu étais narcissique, mais au point d'avoir le culot de penser que je me porte mieux en ta présence, c'en est presque affligeant.

— Presque, souligne-t-il, souriant.

— Ça l'est.

Il appuie son épaule contre le chambranle de la porte et croise les bras d'un air suffisant. Je n'ai pas le réflexe de reculer et son buste se retrouve si près de mon visage que son parfum enivre mes narines. Je serre les dents avant de reculer, déstabilisé.

— Je voulais juste savoir si tu comptais venir au dîner de ce soir ?

— C'est en mon honneur, non ? À moins que tu veuilles ma place à table, supposé-je. Le trône ne te suffit peut-être pas ?

— Crois-moi, j'ai des ambitions plus grandes que de passer la soirée entre ton père et le mien.

— Donc, on célèbre mon retour en me coinçant entre mon pire cauchemar et le tiens ? Merveilleux.

            Un léger rire s'échappe de ses lèvres.

— Heureux de savoir que ton père est toujours en tête de ta liste noire, ajoute-t-il.

— Chéri, ton nom a remplacé le sien depuis longtemps, asséné-je. Je ne pensais pas avoir besoin de le préciser.

Ses lèvres se figent quelques secondes, aussi bien que ses paupières. Puis il cligne des yeux à répétition et murmure :

— Au moins, tu penses à moi.

— Tes fameuses ambitions se résument donc à te contenter d'être ma plus grande source de tourment ?

— En tout cas, elles se résument à toi. 

Je ravale la boule qui encombre ma gorge, prêt à vomir à tout instant.

— J'en conclus quoi ? susurré-je d'une voix tremblante.

Chéri, m'imite-t-il. T'es l'homme le plus malin que je connaisse, je suis sûr que tu n'as pas besoin de dessin.

Je pince l'arête de mon nez entre mes doigts, le cœur haletant.

— Sohane ?

Ma gorge se serre. J'ai l'impression de me prendre un pieu en pleine poitrine lorsqu'il prononce mon nom.

C'est. Étouffant.

Ça l'est d'autant plus quand ses doigts encerclent mon poignet et le rapprochent de son visage. Je m'arrache à son emprise par réflexe. Même s'il n'est pas offensif, même s'il n'éveille toujours pas chez moi l'impression constante d'être en danger, mes vieilles habitudes sont de retour.

Il faut croire qu'il n'y fait plus exception.

— Excuse-moi, lance-t-il en s'écartant de la porte. Je ne voulais pas t'effrayer.

— Si un jour j'ai peur de toi, autant me trancher la gorge moi-même.

— Fais-moi penser à te le rappeler quand le moment viendra.

Il appuie son épaule contre le chambranle de la porte et incline la tête sur le côté, comme s'il espérait une réponse.

— Pour quelqu'un qui prétend me vouloir mort, tu m'avais l'air bien heureux de me retrouver, remarqué-je.

Un léger rictus se dessine sur son visage.

— Ah, tu n'imagines pas l'extase que c'est de savoir que le bouc émissaire de Rufus est de retour et que je n'aurai plus à l'entendre brailler.

— T'es vraiment...

— Beau ? Intelligent ? Tu sais que je suis mauvais en énigme.

— Je vois ça.

Il gratte l'arrière de sa nuque, les pommettes rougies. Ses yeux gris arpentent le sol et j'en profite pour admirer les ondulations brunes qui lui cachent presque la vue. Son physique n'a rien à voir avec celui que j'ai connu. Je ne sais pas si j'ai rétréci ou s'il a grandi, mais je connaissais l'angle exact pour le regarder dans les yeux et maintenant, ma nuque me fait mal tant je dois lever la tête.

Je suis sûr que les intendants conçoivent des vêtements sur-mesure pour lui. Sa mâchoire est plus ferme, plus acérée, les cernes qui soulignent ses yeux lui donnent un air dur et il a perdu le sourire béat qui ornait constamment ses lèvres.

Pour autant, de ses répliques à sa posture, il demeure le même.

Aimé reste Aimé et je m'oblige à reculer à mon tour dans l'obscurité de ma chambre pour qu'il n'aperçoive pas les larmes qui perlent aux coins de mes yeux.

— Peu importe, admet-il. Je ne voulais pas te faire peur, mais tu saignes et je n'ai pas pu m'en empêcher.

— Abstiens-toi la prochaine fois.

Mon ton était plus sec que je ne l'aurais voulu, je ne voulais pas le blesser. En fait, si, c'est exactement ce que je veux. Lui faire mal autant qu'il m'a fait mal, même si le voir souffrir me tiraille le cœur et que je me bats contre moi-même pour ne pas m'excuser et le serrer dans mes bras.

— Qui t'a fait ça ? demande-t-il à voix basse en fixant l'intérieur de mon biceps. Un nom et je l'anéantis, Sohane.

La morsure est invisible, camouflée par l'afflux de sang qui ne fait que couler depuis que j'ai arrêté de compresser la plaie. Il pense qu'il s'agit d'une blessure anodine.

Comment réagirait-il, s'il apprenait que malgré tout le mal qu'il ait pu me faire, je reste celui qui me blesse le plus ?

— Ce n'est rien.

Il s'apprête à ajouter quelque chose, quand son attention s'attarde sur un bruit venant du couloir. Je ne sais pas de quoi il s'agit, je sais juste que c'est loin de ravir Aimé, qui serre les dents à s'en briser la mâchoire.

— J'interromps quelque chose ? interroge une voix familière.

— On commence à s'y habituer, rétorque Aimé d'un ton amer.

— Je sais combien tu t'accroches à la moindre minute qui t'est accordée avec lui, je peux repasser dans trente secondes si tu veux.

— Inutile, ça ne me laisse pas le temps d'aller chercher une arme et de te la planter dans la gueule, marmonne Aimé entre ses dents, même s'il n'y a pas besoin de tendre l'oreille pour l'entendre.

Casey lui passe devant sans y prêter attention. Je me décale pour ne pas me prendre la porte lorsqu'il l'enfonce d'une épaule, les bras pleins de vêtements pliés avec soin.

— Tu prends des cours auprès des lavandières ? s'enquit Aimé. Dieu merci, tu passeras plus de temps au sous-sol, et moins ici.

Casey adresse un regard haineux à Aimé avant de déposer la pile de linge sur mon lit.

— Pas les lavandières non, mais j'ai appris à habiller un noble oui et je m'en chargerai avec plaisir.

Il s'avance vers la porte et signe un au revoir de la main au roi.

— Maintenant, si tu veux bien lui laisser de l'intimité pour me laisser faire mon travail, s'exclame-t-il tout en lui claquant la porte au nez.

Dès lors qu'Aimé n'est plus dans mon champ de vision et que je me retrouve qu'avec Casey, j'affirme :

— Hors de question que tu poses ne serait-ce qu'un doigt sur moi.

— Ça aurait été trop facile.

Il arpente ma chambre d'un regard drastique, comme s'il tentait de mémoriser la distance entre chacun des murs, la position de mon lit, celui de mon meuble... Ses doigts longent les failles que j'ai créées dans le bois. Silencieux, il me tourne le dos et tente de déchiffrer les annotations, les dessins, les ratures qui se sont accumulées sur mon mur lorsque j'habitais ici.

— J'ai croisé un homme qui était chargé de t'apporter ta tenue pour ce soir, je lui ai dit que je te la donnerais à sa place.

— Un homme ?

— Oui, c'était un homme, pourquoi ?

— Je ne savais pas que des hommes pouvaient occuper les rôles de serviteur.

— C'est une loi d'Aimé.

Je profite qu'il ait le dos tourné pour découvrir la tenue qui m'a été attribuée. S'il y a bien quelque chose que j'admire à Mahr, c'est leur dévotion dans le domaine de la couture. Enfin, je l'admire sur les autres. Quand c'est à moi d'être dénudé au possible, j'ai comme une envie de vomir.

Pourtant ma tenue de ce soir ne m'épargne pas.

Il s'agit d'un ensemble noir, dont les manches longues et transparentes suivent les muscles de mes bras, jusqu'à s'enrouler autour des majeurs avec une tige de fleur en métal argenté. Les épaules sont accentuées, ajoutant une structure imposante à la partie supérieure de la tenue, bien que mon estomac soit découvert et me rende vulnérable. Il n'y a que les quelques fleurs froides, brodées aux extrémités du tissu fin, qui me donnent la chair de poule au contact de ma peau, là, juste au-dessus de mon sternum. La tenue est agrémentée de nombreuses chaînes argentées qui pendent depuis les épaules et se rejoignent au centre du dos et des côtes.

Quant au bas, il n'y a pas grand-chose à en dire, si ce n'est qu'il tient d'une marge de cuir autour de ma taille, qui plonge en forme de V vers l'avant, et que les longues fentes qui donnent accès à mes jambes de chaque côté sont entravées d'une multitude de chaînes.

J'ai mal au ventre.

— Ça y est ? demande Casey. T'as fini ?

Après de longues minutes à attendre que je lui réponde, il se retourne et s'apprête à me servir son discours annuel, pourtant aucun son ne sort de sa bouche entrouverte.

— Eh bien, tranche-t-il. Qui aurait cru que tu pourrais être encore plus beau en portant une couleur aussi morbide.

Je lui accorde une œillade ennuyée.

— D'accord, je l'admets la couleur n'a rien à voir là-dedans, souffle-t-il en scrutant mon abdomen dévêtu.

Un soupir m'échappe. Casey n'attend pas que je lui tourne le dos pour enfiler les vêtements propres qu'il a déposés sur mon lit et je couvre mes yeux, mal à l'aise. Il ricane malgré tout, pas le moins du monde importuné par sa nudité. Incapable de le supporter plus longtemps, je m'enfuie de ma propre chambre, avant d'appuyer mon dos contre la porte. La pression me saisit à la gorge, si bien que je n'arrive même pas à m'exprimer. Quand je parviens enfin à reprendre mon souffle, l'ombre d'un homme plus âgé que moi apparaît au fond du couloir.

Je plisse les yeux, mais je ne reconnais son visage que lorsqu'il se trouve à quelques centimètres de mon corps. Si je l'avais reconnu plus tôt, j'aurais pris mes jambes à mon cou.

Les yeux d'Ares croisent les miens et il se pétrifie, s'arrête de respirer. Il n'inspire plus, n'expire plus, ne cligne plus des yeux, il est... vide.

Lui non plus n'est plus le même qu'avant. Ses cheveux et sa barbe sont plus longs qu'il y a deux ans et ça peut sembler ordinaire, mais Ares a taillé ses cheveux chaque jour qui a succédé l'attaque Vylnesienne. Celle qui m'a enlevé ma mère et l'a séparé de sa femme. Il n'a jamais négligé son apparence, pas une seule fois, se disant toujours qu'il pourrait la voir le jour suivant. Même après sa mort, il a continué à le faire. Qu'est-ce qui a bien pu se passer ces deux dernières années pour qu'il soit détruit à ce point ?

— Arès, le salué-je.

Il ne me répond pas.

Ses mains tremblent contre ses hanches, sa respiration est tout sauf fluide et ses yeux s'écarquillent, mais aucun son ne sort de sa bouche.

— Sohane.

Le murmure de mon prénom résonne comme un vieil écho, parcourant les confins du couloir avant de s'échouer à mes pieds. Je le laisse flotter, figé par le ton de sa voix.

— Ça fait un moment, remarqué-je.

— Une éternité.

— Qui, je le rappelle, aurait pu être écourtée si l'un d'entre vous avait suffisamment tenu à moi pour vérifier que le cadavre était bien le mien.

Il baisse les yeux.

— Tout nous poussait à croire que c'était le cas.

— Mon géniteur surtout, non ? supposé-je.

— Il avait ta taille, ta morphologie, et puis les soldats disaient que tu avais été assassiné... Jamais il ne me serait venu à l'esprit que tes propres hommes voient leur prince se faire poignarder et le confondent avec un soldat anodin, poursuit-il, perdu dans ses propres pensées.

— Les spéculations. Les fameuses, hein ? Pourquoi blâmer la fainéantise et l'indifférence de l'homme quand on peut remettre la faute sur des paroles non fondées ? Pas vrai, Arès ?

Il passe sa main dans ses cheveux mi-longs, dépité. Ses narines tremblent à chacune de ses inspirations.

— J'aurais dû mener une recherche, j'aurais dû...

Il s'interrompt par manque de souffle. Remplissant ses poumons, il reprend :

— J'ai perdu trois de mes fils sur un champ de bataille, les uns après les autres, j'étais... persuadé que j'étais condamné à ce que ça continue. Quand je t'ai perdu toi aussi, je me suis laissé mourir. Tu étais celui de trop.

— Tu n'es pas mon père, Ares. Je ne suis pas ton fils.

Mes mots semblent lui ouvrir la gorge.

— Je le sais.

Il le sait.

Ares m'a tenu compagnie quand mon père m'isolait, il m'a appris à compter quand mon père me privait d'éducation. Il a pris ma défense quand le peuple me condamnait, il m'a donné de l'importance quand mon existence était dissimulée derrière celle de mon frère.

Ares a grandi avec ma mère, il l'a vue me porter pendant neuf mois, il s'est réjoui de ma naissance quand mon propre père priait pour que je meure prématurément.

Ares a passé des nuits entières à me raconter des histoires pour que j'arrête de faire des cauchemars. Il a passé des journées entières à m'apprendre à tenir une épée entre les mains pour que mon père soit un jour obligé de m'autoriser l'accès à la garde royale.

J'ai pensé...

Oui, j'ai cru qu'il croirait assez en moi pour partir à ma recherche quand je me suis réveillé en prison.

J'ai cru que même si Aimé me pensait mort, au moins Arès, au moins lui... se démènerait pour moi.

— J'étais persuadé que tu étais mort, Sohane.

— Je te faisais confiance.

— Je ne laisserai jamais plus rien t'arriver, je te le promets.

— Je te faisais confiance, répété-je. Tu penses que je ferai cette erreur deux fois ?

Je lui passe devant et longe le couloir.

— Je te déteste, Arès.

— Je comprends, Sohane.

Sa trachée est comprimée, elle l'empêche de s'exprimer. Je dois déchiffrer ses mots pour comprendre ce qu'il dit.

— Aujourd'hui plus que jamais, tellement que j'en oublie comment j'ai pu t'apprécier un jour.

Je ne sais pas pourquoi je me comporte comme ça. Quand j'ai mal, j'ai besoin de faire mal, même si je me déteste encore plus de le faire.

— Et je vais vivre avec. Tu me détesteras, mais au moins tu seras là.

— Je te déteste plus que je ne le déteste lui, asséné-je. Rufus. Lui il n'a jamais été là pour moi, il m'a isolé, mais au moins il ne m'a jamais laissé penser que j'étais important pour lui. Je n'attendais rien de lui, contrairement à toi. J'attendais tout de toi, et tu m'as fait bien pire que lui.

— Je suis désolé.

— Garde tes excuses et tes belles promesses, parce que le jour où Rufus te rappellera que tu n'es qu'un pion dans son échiquier, qu'il te manipule aussi bien que nous, parce que c'est tout ce qu'il sait faire dans sa vie... Quand il te donnera des ordres et que tu les exécuteras comme le bon petit chien que t'es, alors qu'il a tué ta femme, qu'il a poussé tes fils au suicide, qu'il t'a volé ta vie... Ce jour-là ne compte pas sur moi pour être là. Et ce jour-là, tu me diras qui le sera, parce qu'à part moi, tu n'as personne non plus, Arès. Toi aussi tu es seul au monde, parce que tu n'es qu'un hypocrite qui a laissé tomber le dernier fils qui lui restait au lieu de tourner le dos à l'homme qui a fait de ta vie un enfer. Aimé te hait au moins autant que moi, et j'espère que tu mourras seul.

Je ne sais pas ce qu'il me répond, parce que je m'empresse de rejoindre le bout du couloir avant de l'entendre. L'envie de me trancher la gorge est encore plus oppressante maintenant que j'ai blessé une personne de plus, mais je ne sais faire que ça.

Je suis né pour détruire tous ceux qui essaient de m'approcher.

Je suis né pour être détesté.
















N'hésitez pas à venir sur insta (@__malyana) 😽

D'ailleurs je viens de capter, mais on passe d'environ 8k lecteurs au tome 1, à environ 1k lecteurs au tome 2, je ne sais pas comment vont les gens qui ont arrêté après la mort de Sohane mais je pense à vous 🙏🏽😭

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