19/12- Margaux

À peine une semaine. Il a fallu moins d'une semaine à nos parents pour nous faire déménager. Un empressement avec lequel on fait habituellement les tâches qui nous répugnent. Ils n'ont toujours pas voulu voir Lyssandre.

- Margaux ?

La porte d'entrée venait de s'ouvrir, Septimus me regardait avec interrogation depuis le seuil de la porte. Cela faisait bien dix minutes que je devais me tenir immobile devant la porte d'entrée, les clefs dans la main gauche. Je ne m'étonnais même plus qu'il sache que j'étais là, à travers les murs.

- Tu ne veux pas entrer ?

- Si, pardon. J'étais dans la lune.

Il y avait encore des cartons partout dans la pièce, mais la majorité étaient vide à présent. Septimus passait le plus clair de son temps à ranger. Ça nous aidait bien tous. Lyssandre poussa la porte de l'appartement quelques minutes plus tard.

- Bonsoir les petits !

Lyssandre avait l'air de prendre plutôt bien le fait que les parents ne veuillent pas le voir. Il les a eut quelques instants au téléphone, juste le temps de lui ordonner de reprendre ses études.

« Ils s'en veulent déjà d'avoir échouer dans leur éducation de leur pur sang de compétition. Alors ils tiennent au moins à ce qu'on reste des purs sang convenables. Hors de question que l'un de nous finissent boulanger. Tu imagines l'horreur. »

Depuis petit, Lyssandre jouait dans le sarcasme. Les mimiques de son visage imitant l'attitude snob de nos parents avaient même fait glousser Septimus. Ce qui ne m'empêchait pas de me jeter à son cou dès qu'il passait le pas de la porte.

- Les médecins de l'élite ne t'ont pas trop harcelé de questions ? Demandais-je avec inquiétude devant ses traits tirés par la fatigue.

Il balaya les craintes d'un revers de main. Une fois par semaine jusqu'en février, il avait une visite de contrôle le matin avant de se rendre à ses cours, prétexte surtout pour savoir si septimus était derrière tout ça.

- Non ne t'inquiète pas. Tout va bien. C'est fou ce que le monde a changé. C'est assez déconcertant. La technologie a évolué tellement vite. Mais ça fait du bien de vivre.

Il rit et me claqua une bise sur le front. Il s'approcha de Septimus toujours aussi peu bavard et l'attrapa par les épaules.

- Dis Sept, ça te gêne si on sort avec Margaux ce soir ? Désolé je sais que tu es déjà resté seul en journée. Mais c'est pour qu'on se retrouve. Il doit y avoir une vieille série sur Flash à la télé ce soir si tu veux regarder.

Septimus hocha la tête, signalant que ça ne lui posait aucun problème. Sans comprendre vraiment ce qu'il se passait, dix minutes plus tard, j'étais dehors avec mon frère, dans le froid.

- Qu'est ce que tu voulais qu'on fasse Lyssandre ?

- Demain c'est l'anniversaire de notre coloc, et passer du temps avec ma petite sœur.

- C'est demain son anniversaire ? Demandais je surprise.

Un sourire affiché en grand sur ses lèvres, les mains dans les poches, son tee shirt flottait autour de lui. Il avait pris soins de ne pas prononcer son prénom dans la foule, même si celui ci n'étant pas vraiment connu du public. Malgré les soins de Septimus, il ne pouvait pas lui faire prendre de poids. Avec son regard, on dirait presque que Lyssandre se moquait de moi, mais une pointe de tristesse nuançait son sourire.

- Le 20 décembre, jour de sa naissance, puis du dieu de la mort et celui de mon long sommeil.

Je pris la main de mon frère pour la sortir de sa poche et la serra dans la mienne. Consciente de mon geste puérile, mais sans y accorder trop d'importance je réfléchissais à la suite. Le plan de Septimus se mettait en place, il était déterminé à renverser l'Élite, il n'en parlait pas, mais normalement il avait du libérer Xavier de ses entraves. Il avait du à présent retrouver ses souvenirs scellés. La voix de mon frère interrompit le cours de mes pensées.

- Ça te dit un cinéma ? J'aimerai bien voir à quoi ressemble les super héros des films aujourd'hui. On achète d'abord des trucs pour demain, on mange et cinéma.

- Avec grand plaisir. Tu sais, ils n'ont pas vraiment changé, ils sont juste mieux faits, il y'en a des nouveaux, mais il n'y a pas grande différence avec avant.

-Tant mieux, on ne peut pas rendre les super-héros meilleurs qu'ils ne le sont déjà. Tu as une idée de ce que tu veux lui acheter ? Il faudrait lui refaire une garde robe, il nage dans mes vêtements.

- Tu nage dans tes propres vêtements Lyssandre.

- Oui mais je compte bien reprendre du poil de la bête. Il est juste plus petit.

Je souriais en réfléchissant à ce que voulais acheter à Septimus pendant que mon frère me trainait dans les magasins. Les éclairages de Noël rendait le monde plus calme, plus simple, comme si à cette période de l'année tout était plus calme. La foule qui se pressait dans les boutiques me contredit facilement. A peine nous entrions, le souffle chaud de chauffage nous brûlaient le visage au seuil, et les clients s'affairaient comme des fourmis. Nous ressortions bien vite. Dans un autre magasin, je tombais sur une écharpe rouge et j'arrêtai mon frère un instant. Mais il me fit signe qu'il revenait. Mes mains se posèrent sur l'étoffe douce rouge. Elle lui irai bien et il pourrait jeter son ancienne écharpe kaki à la poubelle, il avait du mal l'enlever. Mais depuis une petite semaine, il l'avait quittée, portant cependant régulièrement les mains à son cou et à sa nuque.

« Sans je me sens en danger. » m'avait-il dit un jour sans plus d'explication quand je lui avais demandé. Mais il n'était pas bon d'insister, alors je l'avais laissé tranquille à ce sujet.
Lyssandre revint avec quelques habits, et nous passons en caisse. L'écharpe rouge en main, je la serai contre moi avant que mon frère me la passe au cou puisque je refusai de la mettre dans le sac.

- On mange d'abord ou on file direct au cinéma ? Demanda Lyssandre.

Je réfléchissais, interrogeant mon estomac rapidement, impatiente de quitter le froid qui me saisissait les entrailles. C'était comme si un monstre, un serpent se glissait sous ma peau. Au fil du temps, tout semblait m'affecter de plus en plus. Je toussais et Lyssandre me fronça les sourcils.

- Allons au cinéma.

Son ton était froid et il semblait songeur lorsque nous prîmes le chemin de la salle de projection la plus proche. Lyssandre faisait tourner un flocon autour de ses doigts. Alors que nous en poussions les portes et levions nos regards vers les écrans pour choisir notre film, ce n'était pas les tableaux habituels que nous rencontrions.

Un homme en costume blanc occupait l'écran. Il dégageait une beauté froide. Assis sur un fauteuil, les jambes croisées, il nous fixait avec des yeux d'un bleu glacier aussi froid que l'expression de son visage. Ses cheveux blond comme les blés étaient soigneusement coiffés. Un bordereau rouge contrastant avec les couleurs du personnages passa sur l'écran.

« Flash spécial : Le président de l'entreprise Aeger sera en direct à 19:00. »

Je regardais ma montre et dit à Lyssandre :

- C'est dans dix minutes et ça a l'air d'être retransmis partout. On va devoir attendre pour choisir un film.
- Rentrons, on va se regarder quelque chose de tranquille à l'appartement.

Il me prit la main fermement, et m'entraîna d'un pas rapide à l'extérieur. Sa main était gelée dans la mienne, et des cristaux de glace se collaient à sa nuque.

- Lyssandre, tu gèles.

Il ne répondit rien et nous rentrons d'un pas rapide. Il me tirait par le bras, d'un pas raide, le regard insondable. Une église sonna sept heure quelque part dans la nuit. Il pressa le pas, et je dus me forcer pour tenir le rythme. Alors que nous arrivions en bas et après avoir vérifier qu'il n'y avait personne aux alentours, il me dit à l'oreille.

- Sept ne doit surtout pas voir ça. Et s'il a vu le bordereau il doit être en train d'écouter.

Comme un flash, je compris. Ouvrant la porte d'entrée, je me précipitais pour appuyer sur l'ascenseur. Mon cœur battait à tout rompre par mes deux pas de courses. Voyant qu'il n'arrivait pas, je me précipitai sur les escaliers.

- Margaux ! Tu vas te ...

Mais la porte coupe feu rendit muet les paroles de mon frère. Courant dans la volée d'escalier qui nous séparait, il m'arrêta de force au palier du deuxième étage, alors que je n'arrivais plus à reprendre mon souffle. Mon cœur battait trop vite.

- Moi je cours a l'appartement. Toi tu montes une marche après l'autre.

Lyssandre me força à m'assoir, mais des qu'il eut disparu dans le virage des escaliers je repris mon ascension rapidement. Il portait les sacs et il sort juste de son hibernation et pourtant je ne pus ne serait-ce que l'apercevoir monter devant moi. Il était trop rapide ou moi trop lente. Arrivée au pallier du dernier étage, je poussais la lourde porte en cherchant mon souffle.

La porte d'entrée était entrouverte. Lyssandre était immobile que comme figé à quelques centimètres de Septimus qui regardait la télé à genoux au sol, la respiration trop rapide, une main sur le cou, l'autre crispée sur la télécommande.

" Je sais que quelque part, tu me regardes dieu de la mort. Profite de ton anniversaire, on se retrouve bientôt."

Le bordereau rouge du flash spécial disparue et fut suivi sans transition d'une pub pour un yaourt à boire censé renforcer les défenses immunitaires en cette saison froide. Je me précipitais vers Septimus me laissait tomber à genoux à côté de lui. Il respirait vite, beaucoup trop vite, il hyperventile. De la sueur coulait le long de ses tempes tandis qu'il réprimait d'irrépressibles tremblement. Sa main droite était serré contre son cou du côté opposé.

- Septimus, tout va bien, on est là, dis-je doucement espérant ne pas traduire ma propre panique. Respire doucement Septimus.

Il essayait de calmer sa respiration mais sans y parvenir. Je posais ma main sur son dos ce qui le fit sursauter et il chercha mon regard. Lorsque ses yeux verts pleins d'eau croisèrent les miens, je retins mes larmes. Les étincelles, il avait perdu les étincelles de son regard. Lyssandre se rapprocha de nous et essaya d'enlever la main de Septimus d'abord autour de la télécommande puis lorsqu'il la rajouta autour de son cou il lui prit les deux mains pour les retirer de son cou. Mais mon frère n'avait pas la force nécéssaire pour lutter contre lui.

Mes yeux furent attirer par une large cicatrice dans sa nuque que je n'avais pas remarquée lorsqu'il m'avait montrer son dos. Plus large que les autres, plus fines et sinueuses comme de l'électricité, elle partait du centre de sa nuque pour descendre vers le côté gauche de son cou, caché sous sa main droite. Ses mots revinrent comme un éclair dans mon esprit, il se sentait en danger.

- Lyssandre enlève tes mains, demandais-je avec plus d'aplomb que je ne l'aurai cru.

Mon frère enleva ses mains de celles de Septimus, et sans chercher à lui enlever les mains du cou, je retirai l'écharpe rouge fraichement achetée et lui enroula autour du cou, au dessus même de ses mains. Lyssandre se leva et se dirigea vers la cuisine. Il fallait juste attendre maintenant.

Sans le lâcher du regard, je lui parlais de l'ambiance des rues dans la nuit, avec les décorations de noël. La respiration de Septimus s'apaisa et il retira les mains de son cou, restées sous l'écharpe, pour les poser sur ses genoux. Il ferma les yeux en essayant de calmer complètement sa respiration. Je lui pris doucement les mains, il les serra et avant que je ne puisse réagir, me serra contre lui. Une main dans mon dos, l'autre doucement posée derrière ma tête, il me serrait comme une poupée fragile et en même temps, il me serrait comme on tient dans ses bras son dernier espoir ou son dernier rempart. Je passais doucement mes bras derrière son dos et n'ajouta pas un mot. Parfois on a juste envie que quelqu'un nous sert dans ses bras jusqu'à étouffer. Étouffer d'amour. Je n'aurai su dire lequel d'entre nous en avait le plus besoin. Nous restions dans cette position un moment, l'un contre l'autre, sa respiration s'apaisa. Je poussai un soupir, un poids en moins dans la poitrine. Depuis qu'il était arrivé, tout mes poids, un par un, petit à petit, s'atténuait, disparaissait : de la solitude quotidienne à aujourd'hui mon frère qui faisait la cuisine dans notre appartement.

Lyssandre revint dans le salon un plateau avec des sandwiches et se racla la gorge. Septimus se retira et l'écharpe avec elle pour me la rendre. Je le laissa faire, ne souhaitant pas qu'il associe une nouvelle fois quelque chose l'Elite à la place de lui même. Et puis c'était demain son anniversaire.

- Merci, dit il soutenant mon regard. Merci à tout les deux, rajouta-t-il en regardant mon frère.

Lyssandre posa les plateaux sur la table basse et vint serrer l'épaule de Septimus.

- Venez manger avant que se soit froid, dit il avec un sourire. Et puis la série va reprendre.

Nous commencions à manger avec le début de l'épisode. Lyssandre prit la parole en plein milieu du résumé de l'épisode précédent. Pour couper Barry Allen ça devait être important.

- Dis Septimus, on sentait qu'il essayait de maîtriser sa voix pour rester calme, peux tu m'expliquer quelque chose ?

Il hocha la tête.

- Pourquoi n'as tu pas soigner Margaux ?

Je me figeai au moment de croquer mon sandwich. Je n'y avais jamais pensé. Mon frère et ses de glace fixait Septimus, qui lui même contemplais ses chaussettes dépareillées.

- Je ne peux pas, avoua-t-il. Son talent me bloque.

Lyssandre eut plus de mal à se contenir, sa colère commença à givrer notre salon. Il retira ses lunettes pleines de givre et se leva pour mieux faire face à Septimus qui ne bougeait pas. Mon cœur avait raté un battement. Un court circuit s'était produit. Je n'arrivais plus à réfléchir. Que venait il de dire ?

- Menteur. Accusa Lyssandre, tremblant.

Pour lui expliquer, ne sachant pas quoi penser, j'ajoutai :

- Je n'ai aucun talent, je n'ai pas de troisième ventricule.

Là ce fut au tour de Septimus de sursauter.

- Bien sur que si ! Tu as un troisième ventricule, tu as même un troisième ventricule qui bat trop vite ! J'ai à peine le temps de me projeter qu'il me repousse.

Un silence s'abattit sur le pièce. C'est mon frère dont le givre avait arrêter de se propager qui parla le premier. Nous partagions une même expression de béatitude.

- Quoi ?

- Quoi ? répétais-je.

Septimus était tout autant surpris.

- Vous ne saviez pas ? Il ne se voit pas sur les examens que tu as passé ? me demanda-t-il.

- On a l'air d'être au courant ? répond mon frère avec colère.

- Non, j'ai toujours cru que j'en avais que deux, avouais-je.

- Alors ça doit être ça, souffla Septimus. Il doit tout repousser. Même les rayons...

- Qu'est ce que c'est ces inepties ! Margaux n'a jamais eu de de troisième ventricule. intervint Lyssandre.

Regardant la pièce autour de moi et les garçons, je réalisais enfin. Le givre de mon frère avait recouvert d'une fine couche les meubles de la maison et même Septimus dont les cheveux étaient gelés. Il faisait froid, j'avais froid, mais sur mes mains aucunes couches de givre ne s'étaient étalés. Mes cheveux n'étaient pas givrés non plus.

- Alors j'ai un talent... soufflais-je.

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