03/12- Margaux
Le message de Sarah me glaça le sang.
« Deux uniformes gris, dans ta rue. Tiens Septimus loin des fenêtres. »
Elle venait juste de partir, on avait travailler tous ensemble ce matin. Je le cherchais des yeux dans tout l'appartement. Il était en train de faire le déjeuner.
- Septimus ! Tiens toi loin des fenêtres !
Il me regardait la poêle à la main, une spatule dans l'autre.
- Il n'y a pas de fenêtre dans la cuisine Margaux.
- Reste quand même loin des fenêtres. Sarah vient de voir deux uniformes gris passer dans la rue.
Sa réaction me prit au dépourvu.
- C'est prêt dans cinq minutes.
J'aurai juré voir sa mâchoire se contracté. Nous avons mangé en silence et ses yeux renvoyaient une certaine nostalgie. Du bruit se faisait entendre dans la rue, un groupe de collégien reprenait les cours. Il ne tenait plus, il se leva et sortit sur le balcon. À toute vitesse je le suivis dehors. Mais quand j'arrivais sur le balcon il avait disparu.
Il était parti ? Non c'était impossible. Et je ne pouvais me risquer de l'appeler. Je laissais donc la porte vitrée ouverte et me préparait à sortir, comme tous les dimanches. Déjà qu'il n'avait pas eu de visite la semaine dernière. Je me prépare mais, en essayant de prendre mon sac par terre et les clefs, je titubai et me raccrochai à la chaise.
- Je viens avec toi.
Septimus était juste derrière moi.
Je portai ma main à mon cœur.
- Bon sang tu m'as fait peur.
Il me regardait le regard fixé dans le mien. Il savait ce que j'allais dire.
- Tu ne peux...
- Je viens.
- Tu ne sais même pas où je vais !
- Si c'est trop personnel, je resterai dehors. Mais tu ne peux pas sortir seule.
- Pourquoi ?
Il me regardait et avec douceur me fit le sourire le plus timide que je connaisse. Puis il fit un signe de tête pour désigner la chaise. Je m'y accrochais comme si c'était ma bouée.
- Je vois... je fais si peine à voir.
Il ne démentis pas et continua à adresser son sourire ridiculement petit, un haussement des fossettes. Tient, il a deux fossettes d'ailleurs.
- Septimus, si quelqu'un te vois...
- Personne ne me verra. Assura-t'il.
- Comment peux-tu en être aussi sûr ? Demandai-je.
Il soupira.
- Margaux, même si quelqu'un le voyait, il ne reconnaîtrait pas le dieu de la mort comme ça. En plus, tu te doutes bien que je sais me rendre invisible. Cela n'a rien à voir avec un talent quelconque. Et pour finir, la mort n'est visible que lorsqu'elle manifeste sa présence.
Il me regardait déterminé et sûr de lui. C'est vrai que dans son sweat vert et son jean clair, il ne ressemblait plus au dieu de la mort. Les vieilles baskets grises de mon frère aussi aux pieds, les yeux verts et les cheveux clairs, il avait perdu son air de mort. Mais un detail me chiffonnait.
- Et puis, continua-t'il, si je te laisse sortir dans ton état, ton amie Sarah va me tuer.
Venait-il réellement de faire de l'humour ?
- D'accord d'accord, viens si tu veux. Mais deux choses d'abord. M'avouais-je vaincue.
- Oui ?
- De une, tu laisses ton écharpe kaki ici, elle est trop connue et tu vas mettre un bonnet et une veste, il fait froid.
- D'accord et la deuxième ?
- Tu dois savoir où on va. Je vais voir mon frère à l'hôpital. Il est plus grand que... attend tu as quel âge ?
Il fronça les sourcils et regarda en l'air.
- vingt ans bientôt il me semble. Quel jour sommes nous ?
- Comme moi, donc mon frère est notre aîné de six ans. Nous sommes le trois décembre. Mais il faut que tu sache que mon frère était à l'Élite avant. Donc voilà je préfère te prévenir.
- D'accord, allons-y. Dit-il en frissonnant.
Il enfila un autre sweat-shirt blanc par dessus l'autre et attrapa le bonnet gris que je lui tendis et nous sortons. J'étais terrifiée à l'idée que l'on puisse le reconnaître. Mais vite je me rendis compte que les passants n'avaient même pas l'air d'enregistrer sa présence. Il marchait de façon à ne jamais être vu, c'était difficile à expliquer, mais personne ne semblait remarquer jusqu'à sa présence. Même dans le bus, une dame voulue s'assoir à côté de moi, alors que Septimus était la, il s'est éclipsé sans même qu'elle ne le voit. Cela me laissait abasourdie. Comment étais-ce possible. Il s'assied sur le siège derrière et me chuchota à l'oreille.
- Je te l'avais dit, personne ne voit la mort.
Il semblait presque triste.
- C'est vrai, chuchotais-je, mais moi je vois Septimus, le garçon qui accepte de m'accompagner à l'hôpital.
Aucunes réponses. Nous arrivons à l'hôpital, je connais le chemin par cœur, ça fait bientôt neuf ans que je viens ici tout les dimanches matin. Je mis ma main sur la poignée et inspira.
- Tu veux que je reste dehors.
Je devrais sûrement répondre par l'affirmative, pourtant sa présence me rassurais.
- Non viens.
Nous pénétrons ensemble dans la chambre sombre. J'ouvris les volets pour faire entrer de la lumière.
- Bonjour grand frère.
La lumière se reflétait doucement, comme si elle faisait attention à ne pas le réveiller, sur son visage pâle.
- Lyssandre.
Je fis volte face. Septimus se tenait au pied du lit, le visage d'une pâleur qui concurrençait celle de mon frère.
- Tu le connais ? Demandais-je.
- Oui.
- Il est dans le coma depuis bientôt neuf ans. Il faisait partie de l'Élite. Mais vers ses dix-sept ans, l'Élite nous l'a rendu dans cette état, une semaine avant mon anniversaire. Nous ignorons tout des circonstances. Ils nous ont juste dit qu'ils n'en avaient plus besoin, qu'il n'était plus adapté. Mes parents se sont sentis honteux, une fille inutile et un fils expulsé de l'Élite dans le coma. Ils ne sont jamais venu le voir. Personne ne sait ce qui le plonge dans ce coma. Alors je viens le voir seule, lui parler un peu. Après tout c'est pas comme si nos parents avaient quelque chose à faire de nous. Ils payent mon loyer et tant que je reste loin d'eux ça leur va.
Septimus avait l'air horrifié.
- C'est ma faute.
J'haussais les épaules.
- Bien sur que non, tu n'y peux rien, c'est l'Élite.
- Margaux ! Tu ne comprends pas. C'est moi qui ai fait ça. C'est moi qui suis responsable dans l'état dans lequel est ton frère.
- Mais enfin Septimus, c'est impossible tu devais avoir onze ans.
- Cela fera neuf ans le 21 n'est ce pas ?
Je m'éloignais de lui. Il semblait vide, il me faisait peur.
- Comment tu sais ça ?
- C'était le jour où le dieu de la mort est né. Il avait onze ans ce jour là.
- Tu as plongé mon frère dans le coma.
- Lyssandre Laurent, première victime du dieu de la mort, le premier de la très longue liste.
- Tu as plongé mon frère dans le coma.
Je ne savais pas comment réagir. Mes jambes tremblaient et je me laissais tomber sur le fauteuil à côté du lit. Je pris la main de mon frère et m'effondrais. Les larmes coulaient le long de mes joues. Voilà enfin qui j'avais devant moi, celui que j'avais hébergé, le Dieu de la mort. Je n'arrivais pas à être en colère. Pourquoi ?
Je regardais entre mes larmes septimus et s'il ne me regardait pas, j'aperçus son bras essuyé ses propres larmes rageusement et l'entendis chuchoter : monstre.
Non, c'est faux. Il n'est plus le dieu de la mort. Il avait onze ans, ce n'est pas lui, il n'est pas méchant.
Il a plongé mon frère dans le coma. Non il s'est fait écrasé, ou enrôlé, comme pendant les anciennes dictatures. C'était un monstre, il avait plongé mon frère dans le coma, le Dieu de la mort est un monstre. Septimus ne l'est pas. Je serrais mes bras contre moi, je me sentais vide et perdue. Je repris la main de Lyssandre. Puis me levai et m'approchais de lui.
- Septimus.
Je le regardais le regard froid et il se retourna et plongea son regard vert dans le mien. Si j'avais sécher mes larmes, croiser ses yeux pleins de vie, laissa les larmes sortir à flot. Sans lui laisser le temps de réagir, je l'enlaçais. Je le serrais dans mes bras, collée contre son torse je pleurais comme une enfant.
Il mis du temps, mais doucement ses bras vinrent se poser dans mon dos aussi. Cette victoire fit redoubler le flot mes larmes. J'en étais sûre, au fond je crois que j'avais juste besoin de m'en assurer : Septimus était bien un humain. Mais il murmura la phrase qui changea tout.
- Margaux, je peux le réveiller.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top