Leis

J'ai encore la voix de cette jeune femme qui ne cesse de tourner en boucle dans ma tête. Ce qui me marque le plus c'est son tempérament de feu. Pourtant aux premiers abords,  on la prendrait pour une fille sage, fragile.

Malgré ça je ne dois pas perdre de vue mon objectif. À coups sûr je ne la reverrai plus peut-être que si?
Je pourrai néanmoins garder d'elle le souvenir de celle qui a réussi à me faire rire sincèrement depuis tant d'années.

Assis dans ma chambre, j'essaie de me rappeler si j'ai eu à déplacer ce carnet mais non je ne m'en rappelle pas.

Je m'allonge de tout mon long dans mon lit et ferme les yeux. Je n'ai même pas dormi depuis ma sortie de prison. J'ai tellement de choses à rattraper,  d'autres à faire.
Le principal reste de retrouver qui a tué Da Silva et essayé de me faire porter le chapeau.
Je me souviens encore de notre rencontre. À cette époque je n'étais qu'un chauffeur Uber et ce soir là je l'ai récupéré à la sortie d'une boîte de nuit. Cette nuit là ma vie a changé. Il m'a parlé des déboires de sa vie, de combien il était fatigué de la vie qu'il menait et il m'a fait cette proposition,  qui est en train de me peser à présent.
Si j'avais su, je ne l'aurais pas acceptée mais qu'aurais-je pû faire d'autre? J'étais jeune, pauvre et sans compter qu'à cette époque papa avait tellement besoin de soutien financier.

Flashback

- Vous avez mis long j'ai failli en appeler un autre dit- l'homme que j'étais censé récupérer et déposer à l'hôtel
- Excusez moi monsieur je ne connais pas encore très bien la ville alors je me suis trompé à un croisement de rues
- Blablabla ... Qu'est ce que tu as comme musique parce que le Dj lui n'a pas cessé de mettre des musiques électro et comment dire elles sont juste bonnes à casser les tympans

Je souris légèrement en me disant que tout compte fait il pourrait m'attribuer les étoiles que je veux. Je mis en marche ma playlist latino et ensuite je le vois soupirer en calant sa tête sur le dossier de la banquette arrière.

On roula silencieusement un bon moment avant qu'il ne balance:

- Le rêve américain hein..

Je crispai mes mains sur le volant avant de le regarder par le biais du rétroviseur. Il n'avait pas l'air de s'en moquer mais faisait juste une simple constatation. Je choisis de ne pas répondre.

- Tu es en Amérique depuis combien
de temps pequeño
- près de deux ans signor
- Et tu fais quoi dans la vie, puisque j'imagine que tu ne dois pas avoir que ça à faire dit il en indiquant la voiture du doigt, par conséquent l'activité d'Uber

- Non je suis boursier dans une université
- Et tu as de la famille ?
- Oui mon père ..
- Il doit pas gagner beaucoup pour que tu en sois là à être non seulement boursier mais aussi chauffeur Uber
- Difficile de brasser des millions dans un hôpital psychiatrique répondis-je en resserrant ma poigne sur le volant rien qu'en pensant à mon père. Tout ce que j'ai toujours fait à toujours été pour lui

Il ne parla plus pendant un moment puis ouvrit sa bouche en même temps que je me penchais vers la boîte à gants pour prendre ...

Fin du Flashback

Mais oui c'est ça ! Gracias Da Silva! Je l'avais caché dans la boîte à gants de mon ancienne voiture. Il ne reste plus qu'à la retrouver. Aux dernières nouvelles elle est toujours dans mon garage aux États-Unis.

Un sourire se dessine sur mon visage en même temps que j'aperçois le bout du tunnel. Je vais enfin pouvoir me libérer de ces fichus tombos. Je jette un coup d'œil à ma montre et me dis qu'il est l'heure de faire une petite balade. Je vais me faire un brin de toilette puis m'habille d'une veste deux pièces blanches et d'une chemise noire dont je laisse délibérément les deux premiers boutons ouverts.

Je sors de ce qui se trouve être mon terroir depuis mon retour il y a trois jours. À peine un pied dehors qu'une tornade blonde s'abat sur moi, laissant sur le chemin des traces de rouge à lèvres rose bonbon. Je déteste cette couleur. Sans ménagement je la repousse de sorte à créer un bon espace entre nous.

- José je ne veux plus que tu fasses des choses comme ça lui dis-je d'une voix se voulant douce mais comme on le dit vous aurez beau chasser le naturel il reviendra au galop. Et mon naturel m'exige de la congédier sur le champ

- Désolée bébé, c'est juste que ça fait tellement longtemps en plus
depuis que tu es rentré tu t'enfermes dans ta chambre. Tu aurais pu au moins m'y inviter dit-elle en m'adressant un clin d'œil

Balivernes !

- Vraiment? Lui dis-je en pensant à ma première année d'incarcération lorsque je comptais la voir mais jamais elle n'a pointé le bout de son nez
- Oui et si tu veux on peut y retourner là maintenant dit elle en se collant complètement à moi
- Non merci j'ai d'autres projets pour aujourd'hui  lui dis-je en me décollant pour sortir et faire un tour
- Non mais qu'est ce qui ne va pas avec toi Halcón !! Depuis que tu es de retour tu te comportes bizarrement avec moi! Je n'ai pas la force de supporter tes sautes d'humeur cri-t-elle de sa voix devenue encore plus aiguë
- Personne ne te le demande lui répondis-je en me retournant partiellement

Elle affiche un air choqué puis se confond en balbutiements. Je me tourne de nouveau.

- Mais non quoi ? Comment veux-tu que je vive sans toi? Te quiero amor dit-elle en aggripant mon bras
- Eh bien où était cet amour pendant les 4 années précédentes?
- Tu sais bien qu'ils avaient interdit que tu reçoives des visites
- Hormis les visites conjugales lâchai-je hors de moi

Elle manqua cette fois d'arguments et je l'abandonnai là. Je pris directement la direction de la sortie. Sur mon chemin je croisai Jamès.

- Holà Halcón lança-t-il gaiement

J'hochais la tête.

- Comment tu vas lui demandai-je par simple formalité
- Bien mais toi j'ai pas besoin de te le demander puisque je vois les traces du passage de José fit il remarquer en m'indiquant mon cou

Je soufflai en levant les yeux au ciel et lui dis à plus tard.

Je sors enfin et rejoins ma voiture. À l'intérieur j'abaisse le petit miroir puis tire une petite lingette et entreprend d'essuyer les dites traces. Je démarre le moteur et conduis sans destination fixe. Je repense à ce que je compte faire de ma vie maintenant que je suis libre. La prison a été une véritable douche froide pour moi et elle aura eu le mérite de me ramener à la réalité. Certainement je quitterai la Havane, définitivement ça je ne le sais pas encore, mais pour le moment j'ai besoin d'être ailleurs.
Je regarde les personnes marcher librement dehors et me dit que plus jamais je ne voudrais me voir privé de ce privilège. Je répère une place de parking et vais m'y garer. Je me trouve au centre commercial. Qu'est ce que je peux bien y faire? Je me laisse tenter et pénètre la grande bâtisse. Des gens vont et viennent à un rythme incroyable. Juste pour le plaisir j'enfouis mes mains dans les poches et marche nonchalamment vers une boutique qui vend des articles de sport. Face à la vitrine je répère deux-trois choses qui pourraient me plaire. Mais quelque chose attire mon attention. Sur le reflet de la vitrine j'aperçois des jeunes qui doivent faire une battle de danse. Ah ça, ça me rappelle l'époque de mes 18 ans lorsque j'étais sorti en douce pour aller à une fête. Je me retourne et vais vers eux. Il y a un tapis épais noir au sol et c'est sur celui-ci que chacun à son tour preste.

Je ne sais pas de quel artiste il s'agit mais le son est très entraînant. Étonnamment il me fait penser à ma belle inconnue.
Enfin arrivé quelques têtes m'empêchent de discerner qui est en train de danser. Puis l'un d'entre ceux face à moi se décale pour murmurer à son voisin : Sheila est trop bonne
Le peu d'espace qu'il a libéré me permets d'apercevoir .. non je rêve. Mes sourcils se fronçent automatiquement. Malgré que je n'étais pas sûr de la revoir je me souviens parfaitement lui avoir interdit de danser ainsi devant d'autres personnes. Dio ce qu'elle peut être envoûtante. Elle a le rythme dans la peau, c'est incontestable et comme si ça ne suffisait pas son déhanché pourrait détourner le plus grand des saints.

Elle croise mon regard et alors elle me sourit avec un air de défi avant de se retourner dans ma direction et de twerker sous mon regard. Je grogne sourdement. C'est clairement une invitation tacite là. La musique s'arrête et elle disparait de mon champ de vision sur les ovations des gens tout autour. Je la cherche partout puis me dit qu'il serait plus judicieux de l'attendre à la sortie du centre commercial puisqu'il n'y en a qu'une seule. Je prends deux shorts de sports et une paire de tennis ainsi que trois brassières vite fait.

Peu de temps après, assis sur le capot de ma voiture, je la vois sortir accompagnée d'une autre jeune fille. Elle porte un bas de jogging noir un t-shirt gris, des tennis blanches et un chapeau noir. Son t-shirt est noué à l'arrière il me semble. Quoi qu'il en soit elle est très sexy ainsi et c'est tout ce que je remarque. Malheureusement pour moi son épaisse crinière aujourd'hui est camouflée dans sa casquette.

Elles passent près de moi et je ne peux me résoudre à me taire.

- Je croyais avoir été clair dis-je à son adresse