La rencontre - 2

Écrit d'une écriture un peu brouillonne, quelques ratures sont présentes. Le carnet a été retrouvé dans les affaires de Nicolas, il a été récupéré on ne sait comment.

Je marchais dans le froid de l'hiver, la neige crissait sous mes pas tandis que je suivais le cortège funèbre, en sortant de l'église. Je n'étais pas spécialement croyant, non, il se trouvait même qu'à présent, je la détestais. Je continuais ma route en réfléchissant, pourquoi étais-je venu ? Après tout, je ne connaissais pas la fille qui se faisait enterrer, j'avais choisi de me rendre à l'enterrement de Nicolas, pas d'Emma. Pourtant c'était à celui-là que j'étais. Entouré de croyants fous.

Je sais que je ne devrais pas haïr la religion, seulement haïr ceux qui la propagent avec des idées malsaines. Mais, les parents de Nicolas étaient croyants, et c'est pour cela qu'il est mort. S'ils avaient eu une once de bon sens, ils auraient compris que le virer de la maison n'était pas à faire. Il était fragile, et cet évènement à dû le briser encore plus qu'il ne l'était quand je l'ai rencontré.

Ce jour, je m'en souviendrais toujours : Je venais d'arriver à mon rendez-vous hebdomadaire, chaque mardi, à dix-huit heures et demie, j'y allais, à cette association dont le simple slogan était « Rappelez-vous, nous ne sommes pas seuls ». C'était une association qui soutenait les droits LGBTQ+, et qui, par ailleurs, bénéficiait aussi de sensibilisation et prévention du suicide. Car, c'est un fait indéniable, le taux de suicide était d'autant plus élevé dans la communauté que l'on protégeait.

J'y allais en tant que bénévole, je n'avais pas besoin de m'y rendre pour des raisons de rejet familial. Mes parents avaient parfaitement accepté ma bisexualité, mais je savais pertinemment que ça ne se passait généralement pas aussi bien.

Et, un jour, alors que j'étais à l'accueil, surveillant l'arrivée où non de nouveaux venus, Nicolas est arrivé. Il est entré silencieusement, l'air mal à l'aise, et regardait tout autour de lui, comme pour vérifier s'il était au bon endroit. Je l'ai interpellé.

– Je peux faire quelque chose pour vous ?

Il s'est arrêté de bouger et m'a regardé, il s'est approché doucement et, arrivé assez proche, a demandé en murmurant,

– J-Je suis bien à l'association Arc-en-ciel ?

Je hochais la tête en souriant. En y réfléchissant, le nom n'était pas du tout original, mais je le trouvais bien.

– Je... Voudrais me renseigner à propos de certaines choses.

Je lui ai indiqué le bureau de renseignement et l'ai regardé y aller, toujours assez gêné. Je me demandais comment il s'appelait, mais, règle d'or, on ne demande jamais les prénoms, c'est anonyme. Enfin, c'est surtout pour éviter de mettre mal à l'aise les personnes transgenres, après tout, tous n'avaient pas fait leur transition au niveau du prénom et se trouvaient bien embêtés pour savoir comment répondre.

Alors c'est ainsi qu'il venait toutes les semaines, j'avais compris la raison de sa venue ici la deuxième fois, quand il avait ses cheveux cachés dans son bonnet, et que, après être sorti de l'association, probablement après avoir acheté un binder, sa poitrine était entièrement cachée.

À la troisième séance, je n'étais plus à l'accueil, c'est comme ça que j'ai connu son prénom. Pendant la quatrième, on avait discuté, à la cinquième aussi, sans s'arrêter. Au bout de la dixième, alors que nous étions devenus proches, il m'a avoué quelque chose.

– Je vais faire mon coming-out à mes parents...

Je l'ai regardé et j'ai légèrement souri,

– N'oublie pas que tu peux venir ici si jamais ça se passe mal.

Il a acquiescé et est sorti.

– Rappelle-toi, nous ne sommes pas seuls.

Voilà la dernière phrase que je lui ai dite avant qu'il sorte. Et avant qu'il meure.

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