Une petite libellule bleue volait au-dessus de la rivière.

Perle de Rosée la regardait, se rappelant avec amusement à quel point ses chatons avaient aimé pourchasser les libellules qui avaient le courage -ou la stupidité- de s'aventurer dans le camp de la Rivière.

Ses chatons...

Elle sourit doucement en entendant dans le camp, à quelques queues de renard, Écaille de Nacre et Feuille de Fougère donner des instructions à leurs nouveaux apprentis, Nuage de Roseau et Nuage d'Écume.

Dire que, la veille encore, ces deux futurs guerriers n'étaient que des chatons...

Perle de Rosée se sentait fière, tellement fière, que sa dernière portée soit devenue des apprentis.

Et en même temps, elle sentait son cœur se serrer.

Car oui. C'était sa dernière portée.

Toute sa vie, Perle de Rosée avait élevé ses chatons, et même ceux de Fleur de Nénuphar qui avait préféré rester une guerrière.

Perle de Rosée, elle, n'avait jamais été guerrière.

Enfin si. Elle l'avait été. Il y a longtemps.

Mais... une fois qu'elle avait découvert ce que ça faisait de donner la vie, elle n'avait plus jamais voulu donner la mort.

Elle avait adoré s'occuper de chatons, mais... elle ne pouvait plus, désormais.

Étoile Cendrée lui avait gentiment proposé de rejoindre les anciens.

C'est vrai que Perle de Rosée s'approchait de la fin de sa vie, elle le savait.

Mais elle ne voulait pas rejoindre les anciens sans son cher et tendre, le père de ses quatres portées.

Cœur de Sable.

Elle savait que lui non plus ne voulait pas rejoindre les anciens, et qu'il resterait un guerrier le plus longtemps possible.

Perle de Rosée comprenait ce choix.

Mais... en attendant, elle se sentait inutile. Tellement inutile.

À la rigueur, il y aurait eu des chatons dans le Clan, elle aurait pu aider à s'en occuper, même juste un peu, ça lui aurait permis de se sentir encore un peu utile.

Mais il n'y avait aucun chaton.

Perle de Rosée ne voulait pas devenir guerrière.

Elle ne voulait plus tuer, plus faire de mal à ses chats, qui avaient tous étés des petits chatons un jour.

Elle ne savait pas quoi faire.

Au dessus d'elle, la petite libellule continuait de voler, indifférente à la tristesse de la femelle.

Celle-ci leva les yeux vers le ciel bleu pâle d'été, sans le moindre nuage.

- Je vous en supplie, Clan des Étoiles... faites qu'il n'arrive rien de grave à mes en...

Elle ne put pas finir sa prière, car elle fût brusquement bousculée.

Elle gonfla son pelage, prête à se défendre, avant de voir que celui qui l'avait bousculé n'était qu'un minuscule chaton blanc aux yeux verts, avec un petit collier vert, où était attaché une petite clochette, qui faisait un bruit insupportable à chaque mouvement.

Ce jeune chaton empestait le chat domestique.

- Je... je suis désolé ! Je pourchassait cette libellule ! Je ne vous avait pas vu ! Je... je ne vous ai pas fait mal ?

La femelle dût se retenir de ronronner en entendant ça.

Le jeune chaton semblait réellement inquiet et penaud.

- Ne t'inquiète pas, petit, murmura-t-elle de la voix qu'elle utilisait pour réconforter ses chatons quand ils étaient petits. Comment tu t'appelles ?

- Je... je m'appelle Olive. Et vous ?

- Je m'appelle Perle de Rosée. Tu sais, Olive, tu devrais éviter de suivre les libellules jusqu'ici. Il y a des gorges très dangereuses, pas très loin, et je connais certains chats qui n'hésiteraient pas à te faire du mal pour que tu partes.

Olive frémit légèrement, et Perle de Rosée culpabilisa en comprenant à quel point elle lui avait fait peur.

- Ne t'inquiète pas. Je ne vais pas te faire de mal. Dis-moi... quel âge as-tu, Olive ?

- J'ai quatre lunes.

Perle de Rosée se figea.

Quatre lunes ? Il n'avait même pas l'âge d'être un apprenti ! Au Clan, les chatons de quatre lunes n'avaient pas le droit de s'aventurer en dehors du camp !

- Tu devrais rentrer chez toi, Olive.

Le chaton la regarda, les yeux un peu tristes, semblant hésiter à ajouter quelque chose. Il finit par murmurer d'une petite voix :

- Est-ce que... vous voulez venir habiter avec mes maisonniers et moi ?

Un silence immobile fit écho à ces paroles.

Même le vent dans les roseaux, le clapotis de la rivière et la petite libellule avaient arrêté d'exister, comme si la vie avait été mise en pause.

Perle de Rosée finit par briser ce silence étouffant en répondant d'un miaulement doux :

- Olive... je ne peux pas. Et je ne veux pas. Tu sais... j'ai une vie, ici. J'ai des amis. J'ai un compagnon. J'ai des enfants.

- Oui... je... je m'en doutais..., murmra Olive en détournant la tête, faisant tinter la clochette de son collier. Je suis désolé... Je voulais pas...

Il s'interrompit quand Perle de Rosée lui lécha affectueusement le sommet de la tête, comme une mère le ferait à son enfant.

Olive la regarda, les yeux écarquillés, avant de ronronner doucement.

Perle de Rosée demanda d'une voix douce :

- Dis-moi... pourquoi veux-tu que je vive avec toi ? Tu ne préfères pas mener une vie tranquille avec tes maisonniers et tes parents ?

Olive détourna le regard. Perle de Rosée comprit qu'il ne vivait pas avec ses parents, et peut-être même qu'il ne les avait quasiment jamais connu.

- Je... j'aime pas être seul... je... je voudrais vivre avec un autre chat... avoir une sorte de... 

Il regarda le sol, embarassé.

- ...Une sorte de maman...

Perle de Rosée sentit son cœur fondre comme la neige au soleil devant cette petite boule de poil à peine plus agée qu'un chaton.

- Rejoins le Clan de la Rivière.

L'effet fût immédiat.

Olive se figea sous l'effet de la surprise. Perle de Rosée se figea sous l'effet de la surprise. Même la petite libellule bleue se figea, même si c'était sans doute pour une autre raison, inconnue de tous ceux qui ne sont pas libellules.

A vrai dire, Perle de Rosée était la première surprise par ses paroles. Ce qui la surprenait, c'était surtout la spontanéité avec laquelle elle avait proposé ça.

Ce n'était pas une proposition anodine, au contraire.

Olive releva les yeux vers elle. Ils brillaient de joie et de détermination.

- C'est vrai ? Je... Je peux ?

- Normalement non. Mais je te promets, je te promets de tout faire pour que ça soit possible. 

Elle lui lécha tendrement l'oreille. Olive roronna, et, à ce moment là, Perle de Rosée en fût convaincue.

Tant qu'il existerait des chatons dont le plus grand plaisir était de pourchasser les libellules, elle ne serait pas inutile.

Elle rentra vers le camp en emmenant Olive avec elle,  laissant derrière elle le vent dans les roseaux, le clapotis de la rivière et la petite libellule.

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Voilà ^^

Qu'est-ce que vous en pensez ?

Le cours de design a été rendu sur le livre de rendus de FeuilleNoircie, ma coéquipière de cette semaine !

Bonne journée tout le monde !