Le café des Lilas


one shot


Sur quelques bouts de papier,
De simples mots désespérés,
Ceux d'un condamné.
















Aux premiers abords, la petite rue qui juxtapose l'entrée du café est plutôt bruyante et mouvementée. Il y a un surpeuplement impressionnant de passages sur les trottoirs gris. Nombreux sont ceux de sortie.

En cette douce première soirée d'automne, le temps est agréable. La brise fraîche remplace la chaleur étouffante de la précédente saison estivale. Les badauds respirent à plein poumons le souffle de mère Nature et prennent le temps d'admirer la beauté des couleurs automnales, très vite époustouflés par tous ces reflets crépusculaires.

Un passant s'arrête dans sa marche.

Il lève la tête et sa vision se noie parmi le monde qui tourne et la foule qui se presse. Il prend une inspiration, remplit d'air sa poitrine et s'empresse de franchir les derniers pas qui le séparent de la devanture colorée du commerce, attiré par la présence magnétique du lieu.

Le carillon retentit.

Son entrée ne passe pas inaperçue parmi les clients déjà présents. Ses fossettes s'étirent. Il leur offre des sourires timides et part s'installer à une table libre, proche de la fenêtre.

Au Café des Lilas, il y a tout un tas de gens.

Des gens grands, des gens petits, certains sont minces, d'autres plus arrondis. Des gens jeunes qui traînent avec des plus âgés. Des gens qui arborent une mine plutôt triste et d'autres qui ont des traits très atypiques. Des gens blancs et des gens colorés. Un repaire entier de gens qui vont des plus sages aux enfantillages. De tous âges et de tous horizons.

Ici, la plupart sont des lycéens venus traîner après les cours avec la bande de potes habituelle. D'ailleurs, sur les chaises du café trônent fièrement les vestons aux couleurs de l'équipe de football du lycée. Il y a aussi de petits groupes simplement là pour les potins ou s'entraider sur les devoirs. Des rires fusent dans tous les coins, des paroles sont échangées sur divers sujets autour de boissons fruitées et de pancakes sucrés.

Cela faisait beaucoup de gens.

Des tonnes et des tonnes de gens qui franchissent chaque année la porte d'entrée du café.

Ils sont tous différents et tellement uniques à leur façon. Cependant, toutes ces personnes ont quelque chose en commun ; celle d'être condamné à mourir un jour, et ce, peu importe la raison, la manière, le lieu, l'heure ou bien la date. Ils sont tous condamnés à ce destin funeste ancré depuis leurs premiers souffles de vie sur Terre. Qu'il soit emporté de vieillesse ou de maladie, d'un simple accident de la route jusqu'au plus tragique des suicides, personne n'y échappe. C'est ainsi et ça restera ainsi.

Nous vivons pour mourir.



« On ne refait pas sa vie
On continue seulement
On dort moins bien la nuit
On écoute patiemment
De la maison les bruits
Du dehors l'effondrement »



― C'est beau...

L'homme assis relève la tête face à la voix inconnue au ton légèrement aigu. Il interroge de manière silencieuse son vis-à-vis n'ayant pas très bien compris.

― Je disais que c'était beau ce que vous avez écrit, répète-t-il en pointant la page blanche chargée d'encre noire.

― Oh ! Hé bien, merci, enfin je suppose ?

L'inconnu s'amuse quelques instants du rougissement croissant sur les joues du client avant de reprendre :

― Vous êtes écrivain ou quelque chose dans le genre ?

― Quelque chose dans le genre, à mes heures perdues, sourit-il.

― Je vois. En tout cas, sachez que vous avez du talent, j'aime beaucoup !

Un autre rougissement.

― Vous venez souvent ici ? Il me semble vous avoir déjà vu plusieurs fois, interroge-t-il.

L'homme hoche la tête en guise de réponse.

― Je suis Jungkook, se présente le serveur. Mais on me surnomme Lilas !

― Lilas ? s'étonne l'écrivain. En raison de votre couleur de cheveux ?

Un sourire éclatant lui fait face, ainsi qu'un petit rire caché derrière une main.

― C'est exact ! Et vous êtes ?

― Kim Namjoon.

― Enchanté Namjoon ! Souhaitez-vous une autre tasse de thé ?

― Je veux bien, merci.

Jungkook apporte la théière jusqu'à la tasse en céramique et verse l'eau chaude citronnée directement dans le contenant.

― Avec plaisir ! Faites-moi signe si vous souhaitez autre chose, à plus tard, Monsieur Namjoon.

Sourire charmeur, un brin malicieux. Namjoon trouve joli ce serveur aux cheveux violine et aux pommettes légèrement rosées.

Vraiment très séduisant, pense le grisé qui recommence à griffonner quelques mots sur son carnet, submergé par une inspiration soudaine.

En guise de fond sonore, la chanson Wonderwall du groupe « Oasis » semble s'être perdue dans une boucle infinie qui se répète sempiternellement jusqu'à ce que quelqu'un daigne enfin activer la musique suivante.

Mais personne ne le fait.

Et Namjoon replonge dans ses pensées les plus intimes tandis que le monde autour de lui continue sa course folle du temps. Le soleil continue de sourire sous le zéphyr. Les arbres s'agitent, les feuilles bruissent, puis elles finissent par se détacher avant de rendre l'âme sur le bitume de brai.

Peut-être que dans une autre réalité, Namjoon aurait demandé le numéro de Jungkook.

Mais dans celle-ci, il ne peut pas le faire en raison du compte à rebours au-dessus de sa tête qui a déjà commencé.









L'automne est à présent bien ancré dans les rues de la ville. Les ondulations rougeoyantes sont en constante dualité avec celles qui tirent plus sur l'orangé. Les souvenirs d'un bleu céruléen chatoyant le ciel ne sont plus que des vestiges appartenant au passé.

Namjoon est de retour dans le petit café, celui juste à côté du lycée.

Au sein de ce point de rencontre entre tous les genres de gens, lui se retrouve assis au même endroit que d'habitude.

Cela fait plusieurs jours maintenant qu'il vient ici pour retrouver et discuter avec son serveur favori, malgré le fait que le tic-tac du temps n'est pas de son côté.

Autour de lui, les gens parlent, mais il ne les écoute pas. À la place, il préfère favoriser la méditation sur ce que le monde lui fait don présentement, observer l'engouement des silhouettes mouvantes.

Cette fois-ci, il n'y a pas de musique en arrière-fond, seul le tintement bruyant des cuillères résonne, accompagné de temps à autre par la mise en activité de la machine à café et le brouhaha incessant des clients.

Namjoon se laisse lénifier par ces sons, comme le ferait un musicien se berçant de sa musique classique. Comme un pianiste composant une nouvelle mélodie qui ne porte pas encore de nom. Comme un danseur emporté par les mouvements rythmés des battements de son cœur.

Son regard ambré se perd dans la structure en bois du café avant de voguer dans la foule à la recherche de son inspiration du jour.

Et c'est là, au milieu de tout cet imbroglio de bruits, qu'il la trouve.

Sa muse.

Puis tout redevient silence dans son esprit.

Il griffonne une nouvelle fois dans son carnet en cuir et donne sens à ses pensées désorganisées. Il écrit tout ce qui lui passe par la tête et pose sur le papier les mots sauvés d'une noyade démesurée.



« Le silence est l'âme des choses
Qui veulent garder leur secret.
Il s'en va quand le jour paraît,
Et revient dans les couchants roses.

Il guérit des longues névroses,
De la rancune et du regret.
Le silence est l'âme des choses
Qui veulent garder leur secret.

À tous les parterres de roses
Il préfère un coin de forêt
Où la lune au rayon discret
Frémit dans les arbres moroses :
Le silence est l'âme des choses. »



― Pourquoi vous écrivez toujours des choses qui sont tristes, Monsieur Namjoon ?

Les commissures du grisé s'étirent à l'instar de ses fossettes qui se relèvent lorsque la voix du serveur lui parvient.

― Vous trouvez que c'est triste, Lilas ?

Jungkook hoche la tête.

― Ouais, carrément, glousse-t-il.

Son amusement ne passe pas inaperçu aux prunelles perçantes de Namjoon qui ne perd pas une miette du spectacle. Il imprime dans sa mémoire les expressions du plus jeune et se délecte de la scène qui se joue devant lui, appréciant chaque courbure qui lui est dévoilée par le visage enjoué du serveur.

― Tant mieux, répond-il en laissant un Jungkook maintenant perplexe face à sa réponse.

Ce qui le fait discrètement pouffer.

Ils passent encore quelques minutes à s'échanger des mots. Une conversation privée à base de compliments dissimulés, de pommettes rosées et de sourires en biais. De temps en temps, le rire mélodieux de Jungkook se diffuse dans la douce ambiance du café, réchauffant le cœur attendrissant de notre poète condamné.

Quelqu'un près des cuisines appelle le serveur lorsqu'une nouvelle commande est prête à être servie. Il salue vivement l'écrivain, lui offre un dernier sourire et reprend son rôle, grimaçant un peu devant la table suivante quand son regard rencontre le chaos généré par des lycéens agités.

Peut-être que dans une autre réalité, Namjoon aurait pris son courage à deux mains et aurait proposé à Jungkook de boire une boisson en sa compagnie.

Tic-tac, le temps passe au fur et à mesure que la vie trépasse.









Ce jour-là, il fait plutôt beau.

L'astre solaire rayonne timidement entre les cumulonimbus qui traversent docilement la voûte céleste.

Le temps est doux, tout comme la légère brise amenée par la poussée féroce des ailes des oiseaux migrateurs qui se dirigent vers des pays plus chauds.

C'est encore l'automne qui gouverne la ville et sa population.

Il souffle des brumes invisibles et fraîches qui se répercutent directement sur les joues rougies des passants et s'insinuent sous les vêtements. Il brûle de vie dans les branches qui craquent et octroient à nos iris ébahis un spectacle enrichi par sa palette de couleur. Les fleurs continuent de mourir, les feuilles de tomber et, un jour, lorsque les habitants s'y attendront le moins, l'hiver sera là. À son tour, il sortira son titre de remplaçant et viendra prendre la place de sa sœur, la saison précédente.

Mais pour le moment, tous peuvent encore profiter des températures relativement conciliantes pour un mois de novembre déjà bien entamé.

Une nouvelle fois, au sein du Café des Lilas, les gens vont et viennent ― tout comme les oiseaux finalement ― pour profiter de cet endroit chaleureux et se réunir après une rude journée.

Cela fait deux mois maintenant, que Namjoon se rend tous les jours au café pour y boire son thé préféré et écrire de nouveaux poèmes.

Il est devenu proche du personnel, surtout de Jungkook avec lequel il a enfin trouvé le courage de l'inviter à partager une collation il y a déjà quelques semaines de cela.

Namjoon a adoré ce rendez-vous et se hâte déjà du prochain.




« Je rêve et je me réveille dans une odeur de lilas
De quel côté du sommeil t'ai-je ici laissé ou là ?
Je dormais dans ta mémoire
et tu m'oubliais tout bas
Ou c'était l'inverse histoire,
étais-je où tu n'étais pas ?

Je me rendors pour t'atteindre
au pays que tu songeas
Rien n'y fait que fuir et feindre, toi tu l'as quitté déjà

Dans la vie ou dans le songe,
tout a cet étrange éclat
Du parfum qui se prolonge
et d'un chant qui s'envola.

Ô claire nuit jour obscur,
mon absente entre mes bras
Et rien d'autre en moi ne dure que ce que tu murmuras. »





― J'espère que vous pensez à moi en écrivant cela, Monsieur Namjoon, s'exclame Jungkook en tirant une chaise et prenant place juste à côté de lui.

Le grisé rougit légèrement et dévoile une rangée de dents aussi blanches que l'Éden lorsqu'il lui sourit.

― Bien sûr, comme toujours mon cher Lilas.

Jungkook glousse à sa réponse.

― Oh, Nam, vous savez comment charmer les hommes !

― Hé bien, si les hommes portent ton nom et les traits de ton magnifique visage, alors cela ne me dérange pas.

Namjoon a succombé.

Depuis le premier jour, pour Jungkook, il est tombé.

Encore une fois, il se noie dans l'inspiration du moment. Il sort d'un étui le beau stylo-plume offert par le serveur lors de leur rendez-vous. Les idées s'enchaînent, se présentent à lui et se transforment en des mots qu'ils gravent à tout jamais sur le papier.

Il est pris dans ce genre de jeu de séduction entre lui et l'inspiration. C'est puissant et mordant. Également addictif. Il se perd dans cette impression de pouvoir vivre pleinement, même si tout cela est faux.

Et sur les enceintes du café, Wonderwall est revenu. Il n'est pas totalement certain d'apprécier cette musique qui n'est pas son genre habituel, mais il écoute quand même, car il sait que c'est le morceau favori de Jungkook. Alors, il prend le temps de tout enregistrer, que ce soit les paroles, la signification ou bien le tempo.

Peut-être que dans une autre réalité, Namjoon aurait pris la main du violine pour le faire tournoyer nuit et jour au son de sa musique préférée.

Le temps continue de filer tout comme sa vie qui défile.









À travers le flou de la fenêtre condensée et des fines gouttelettes causées par la bruine, la buée lui renvoie un portrait de son visage plutôt morne. Un sinistre reflet aux allures cadavériques vide de toutes envies et de toutes idées.

L'automne arrive en fin de vie. Namjoon aussi.

La monotonie de la pluie le rend mélancolique.

Un flot de larmes se bloque sous ses paupières pleines de sel quand, dans son esprit, tournent les images d'un futur rempli de bonheur et de joie qu'il ne connaîtra jamais.




« Les sanglots longs
Des violons
De l'automne
Blessent mon cœur
D'une langueur
Monotone.

Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l'heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure

Et je m'en vais
Au vent mauvais
Qui m'emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte. »




Namjoon souffle lorsque sa plume dépose le dernier vers. Il lance un regard désintéressé et le reporte sur le temps naufragé. Il jure qu'il a essayé d'écrire quelque chose de joyeux pour changer, mais il n'y est pas arrivé.

Finalement, peut-être que le bonheur ne s'écrit pas.

Peut-être que pour lui, c'est quelque chose de trop abstrait pour réussir à lui donner une forme. Que ce soit en prose, en nouvelle ou en texte littéraire, il n'est pas facile à exprimer, encore moins à imaginer.
Le bonheur est éphémère.

L'acquérir est laborieux, compliqué.

― Souhaitez-vous que je vous serve une autre tasse, Monsieur ?

Un sursaut. Une reconnexion au présent.

Et le monde autour de lui tourne toujours autant.

― Jungkook n'est pas là ?

― Non, Monsieur, il n'est pas de service aujourd'hui, lui répond la serveuse avec un sourire compatissant figé sur ses traits européens.

― Oh, d'accord. Merci.

La moue sur son visage s'affaisse aussitôt et une pointe douloureuse apparaît dans sa poitrine lourde d'un cœur triste.

L'expression accablée par le chagrin et le désespoir doit émouvoir la serveuse qui lui propose instantanément un cookie aux trois chocolats, offert par la maison.

― Souhaitez-vous que je lui transmette un message de votre part lorsqu'il reviendra de ses jours de repos ?

Trois secondes s'écoulent, peut-être quatre avant que Namjoon soupire, vaincu par le fait qu'il ne pourra pas donner lui-même le papier coloré entre ses mains.

― À vrai dire, j'ai une faveur à vous demander. Pourriez-vous, s'il vous plaît, lui donner cette lettre de ma part ? supplie-t-il, les yeux humides.

La serveuse acquiesce et le grisé s'empresse de lui tendre ladite lettre, celle qui, actuellement, renferme tous ses secrets.

Namjoon n'a pas vu Jungkook ce jour-là.

Et il ne le verra pas le lendemain ni le jour suivant.

Il ne le verra plus jamais.

Peut-être que dans une autre réalité, il aurait eu le temps de faire convenablement ses adieux à la personne qui avait emprisonné son cœur et son âme durant ses derniers jours de vie. À cette chevelure lilas qu'il regrette d'avoir rencontrée trop tard.

Dehors, la nuit tombe, le monde se teint de noir et lui, il prend le temps de l'observer une dernière fois.

L'horloge dans son être sonne la fin de la course.











L'hiver est là.

Il s'est posé comme un voile sur la ville.

Les rues sont habillées de son grand et majestueux manteau blanc. C'est magique, presque irréel et c'est beau à voir au contraire du ciel qui, ce soir-là, se retrouve dépourvu de couleurs comme s'il est éteint, complètement vide de vie.

Jungkook rentre par la porte arrière du café, se secoue pour enlever l'excédent de neige et file se changer dans les vestiaires. Il se hâte pour se préparer, déjà excité de retrouver son poète préféré qui lui a tant manqué.

Il exhibe un sourire professionnel et entre enfin dans la basse-cour, accompagné de son fidèle plateau. Il se retrouve instantanément assiégé de tous les côtés par des clients trop pressés. Il fait de son mieux pour écouter, prendre les commandes, servir les consommateurs, nettoyer les tables et c'est seulement après trois heures entières de course folle, qu'il peut enfin prendre le temps de souffler.

Sans perdre une seconde, il se faufile jusqu'au fond du café avec un espoir grandissant dans la poitrine.
Il s'approche, slalome entre les tables, tourne la tête de droite à gauche, mais ne trouve pas l'homme pour qui son cœur a succombé.

Peut-être ne viendra-t-il pas aujourd'hui ?

Un peu déçu, il repart en direction du comptoir pour prendre sa pause et croise sur son chemin une de ses collègues qui lui tend la fameuse lettre. Le papier sent bon et la calligraphie de son nom est élégante, presque aérienne.

Jungkook est charmé, entièrement comblé. Namjoon ne l'a pas oublié pendant ses jours de congé.

Il sourit, remercie sa collègue avec qui il échange quelques mots et part s'asseoir dans un coin légèrement en retrait.

Il ouvre l'enveloppe, le papier se froisse et glisse sous la pulpe de ses doigts. Un morceau de « Sleeping at last » passe et le temps se fige. Le monde entier est mis sur pause pendant sa lecture.

Son agonie commence. Les premiers sanglots s'échappent et un cri de détresse les poursuit. La tristesse l'attrape. Sa poitrine se comprime et son cœur s'effrite.

Jungkook s'enfuit.

Il attrape ses affaires à la va-vite et sort d'ici.

Il claque la porte derrière lui si fort que les murs du café tremblent en rythme avec les battements contre sa cage thoracique.

Le silence tombe.

Il est si puissant qu'il couvre le parking rempli de voitures et d'étudiants.

Son corps s'agite et ses poumons s'affolent sous la respiration erratique. Les larmes coulent par centaines sur ses joues de porcelaine. C'en est trop, il ne peut les contenir. Il ne peut plus rien contenir.

Un hurlement déchirant éclate soudainement.

Il fait repartir le temps.

La cacophonie de bruits reprend.

Depuis son corps immobile au milieu du parking, il entend une anarchie de paroles désorganisées. Le carillon du café retentit plusieurs fois sous l'assaut des nouveaux clients qui arrivent et comblent une à une les tables. Sauf une.

La place du fond, quant à elle, restera éternellement vide.



« Ici-bas tous les lilas meurent,
Tous les chants des oiseaux sont courts ;
Je rêve aux étés qui demeurent
Toujours...

Ici-bas les lèvres effleurent
Sans rien laisser de leurs velours ;
Je rêve aux baisers qui demeurent
Toujours...

Ici-bas tous les hommes pleurent
Leurs amitiés ou leurs amours ;
Je rêve aux couples qui demeurent
Toujours...

Adieu, Lilas.
Merci d'avoir rendu ma fin de vie un peu moins douloureuse à supporter. »



Jungkook a été la lumière qui a réussi à guider Namjoon à travers les reliques de celles qui se sont éteintes au fur et à mesure des années.

Il y en a un qui aimait déjà trop et l'autre qui a aimé trop tard. Dès le début, ils étaient condamnés.

Peut-être que dans une autre réalité, ils auraient pu entamer une belle histoire d'amour, mais dans celle-ci, la maladie a fini par remporter sa victoire sur la vie.

Namjoon s'est finalement envolé vers un nouveau lieu synonyme d'éternité.

Là où le temps s'est enfin arrêté...



... et où les lilas fleurissent à jamais.









Sources :

1) Tu ne me dois rien - Stephan eicher
2) Le silence - Maurice Rollina / Recueil : Les névroses (1883)
3) Les Lilas - Jean Ferrat
4) Chanson d'automne - Paul Verlaine / Poèmes saturniens
5) Ici-bas - René-François Sully Prudhomme / Recueil : Stances et poèmes


One shot originellement publié dans le recueil collaboratif « sentimentalement vôtre » sur le compte de tinysunshinee  !

Je vous invite à lire tous les os de ce recueil qui sont vraiment magnifiques !

Merci de m'avoir lu
À bientôt ♡

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