58°
L.A-03/16
▪️
"Emma, il n'a pas seulement joué à touche pipi avec toi"
Emma
Aujourd'hui, je dois me rendre au chevet de ma mère. Après avoir contacté Dylan, nous avons passé une journée complète ensembles à discuter, à rire et à pleurer. Nous avons parlé longuement d'Isaac, je lui ai raconté les détails en lien avec son décès et j'avoue que ça m'a fait un bien fou. C'est la première fois que je me confie à ce sujet de façon aussi intense. Dylan m'a parlé en détail de l'état de santé de ma mère, son combat contre le cancer, sa rémission et sa rechute. Il m'a aussi expliqué que c'est jours était comptés, mais ce matin, on ne parle plus de jours, mais bien d'heure.
Normalement, je devrais être anéanti, mais rien. Je ne sais pas si ça s'explique par le fait qu'elle m'a fait vivre un enfer durant toute m'a foutu vie ou encore, peut-être que le chagrin que j'ai ressenti quand j'ai perdu Isaac est tellement intense, que le reste passe comme une banalité, à mes yeux.
Trouver le courage d'entrer dans la chambre où repose ma mère malade, c'est trop pour moi. Je suis incapable d'accompagner dans la mort une personne, pour qui, j'éprouve tant de rancœur. Mon frère m'a raconté ce qu'elle lui a dit la journée avant qu'elle ne sombre dans un profond sommeil. Ma mère ne souhaitait qu'une seule chose, elle désirait plus que tout que mon frère réussisse à reprendre contact avec moi, elle l'a supplié, m'a-t-il raconté.
Le dernier souvenir que j'ai de nous trois ensembles, est celui d'un soir de décembre, un peu avant le jour de Noël. Nous étions chez ma mère et une chicane a éclaté entre elle et moi. Frank, avait traité ma mère de chienne avant de se tourner vers moi et de me lancer un truc comme quoi j'étais son portrait tout craché. Ce qui na rien d'étonnant, j'ai refusé qu'il me tripote quelques heures avant et je suppose que sa frustration sexuelle a pris le dessus sur ça raison.
Il s'était ensuite tourné vers mon frère et sans aucun scrupule, il lui avait dit, avec son éternel sourire d'hypocrite, qu'il n'était sûrement pas de la même portée que moi puisqu'il était le seul sur qui il ne s'était pas frotté. Mon frère lui a foutu un de ses coups en plein visage et ma mère nous a ensuite foutus à la porte. Vous voyez le genre de mère.
Dylan a toujours eu des doutes au sujet de Franck, il se doutait qu'il avait les mains baladeuses, mais il n'a aucune idée de ce que cet homme m'a fait endurer, et c'est bien comme ça.
Par contre, elle, elle savait. Je crois que c'est ce qui me fait le plus mal, encore plus que les gestes. Ma mère a d'abord fermé les yeux pour finalement me servir comme on offre un dîner.
- Ce serait bien de rester auprès d'elle, mademoiselle, me lance un homme en fixant la petite fenêtre de la porte de la chambre, sa respiration a changé au courant des dernières heures, je ne peux pas vous dire combien de temps, mais ce n'est plus qu'une question d'heure, vous devriez rentrer la voir, me suggère gentiment le jeune infirmier, elle a ouvert les yeux un bref instant hier et j'ai vu dans son regard que la fin était proche.
- Je ne... je ne préfère pas, dis-je gêner, gêné d'avouer que j'hésite à rendre visite à ma mère mourante.
- J'ai discuté avec votre mère avant qu'elle ne sombre dans un profond sommeil, elle m'a dit qu'elle éprouve d'énorme regret, particulièrement face à vous, m'explique-t-il, elle en souffre beaucoup.
- Vous n'avez pas la moindre idée du nombre de fois où j'ai failli y laisser ma peau, alors sa souffrance à deux balles, j'en ai plutôt rien à foutre, oui, encore l'évitement, mais cette fois, je l'assume, ma mère n'a jamais éprouvé le moindre regret dans sa vie, dis-je froidement, et comment savez-vous que je suis sa fille.
- Vous lui ressembler énormément, lâche-t-il, votre mère est sobre maintenant ce qui lui a permis de réaliser bien des choses, il faut savoir pardonner, je vous jure ça libère, conclu-t-il avant de rebrousser chemin.
Incertaine, j'avance jusqu'à la porte. Au travers de la petite fenêtre de la grosseur d'un hublot, j'aperçois ma mère, dans un lit, un lit qui ressemble plus à un cercueil, un cercueil qui se referme lentement sur elle. Une mère vieillie, avec un souffle court et un cœur qui semble battre rapidement. Une vieillesse prématurée par l'abus d'alcool, de drogue et de plusieurs autres plaisirs malsain.
Je l'observe et j'ai l'impression de me voir. Je n'ai pas la peau ridée ou les cheveux blancs, mais son visage, fatigué, il est similaire au mien, sa souffrance est un copier/collé à la mienne. La souffrance d'essayer d'oublier plutôt que d'affronter. La souffrance dans certains cas, c'est le résultat de la lâcheté, parce qu'oublier, c'est beaucoup moins dur que d'affronter.
J'ai passé quatre heures dans ce corridor endormi, à attendre, à penser et à faire le point sur ma vie. Quatre heures de remises en question, jusqu'à ce que mon frère s'approche et s'accroupissent à mes côtés.
- Elle est partie Emma, c'est fini, il prononce ses paroles en fixant le mur devant nous.
La tête baissée, il pleure...
Les bras de mon frère m'entourent, et sa tête est plaquée sur mon cœur et il me tient de toutes ses forces, nous restons un long moment blotti l'un contre l'autre.
[...]
- Comment t'es arrivé à être aussi détruite, marmonne-t-il.
J'ai l'impression qu'il n'attend pas de réponse de ma part, on dirait qu'il se parle à lui-même, peut-être qu'il se remet en question en cherchant à quel moment tout a dérapé, mais une chose est sûre, il n'a rien à se reprocher.
Il prend mon visage dans ses mains et essuie mes larmes à l'aide de ses pouces.
Je me cache à nouveau dans ses bras, à l'abri de tout. Les bras de mon frère ont toujours été pour moi l'endroit le plus sécurisant, tant qu'il est là, rien ne peut m'arriver. C'était comme ça, et ce, le sera toujours.
- C'est fini, ma chérie, je suis là, tu n'as plus rien à craindre, me rassure mon frère, plus personne n'aura la chance de te faire du mal.
Enrayer notre propre douleur sert aussi à cesser de blesser les autres. Oui, parce qu'un âme meurtrie ne fait que des ravages autour de lui. C'est ce que je me suis dit ce jour-là, dans ce corridor. Et je le pense. Tout comme ma mère l'avait fait vingt ans plus tôt, je me suis perdu, la seule différence, c'est que moi, je viens de prendre la décision de me retrouver, avant qu'il ne soit trop tard.
- T'es prête, je te ramène ?
- Oui, je suis prête, lui répondis-je, en suivant son regard pour repérer je la voiture stationnée au bout de la rue.
- Tu as l'air épuisé Dylan, dis-je inquiète.
- Un peu fatigué, mais ça va, tente-t-il pour me rassurer.
- Comment tu te sens, je veux avec le départ de maman.
- C'est correct, ça fait un moment qu'elle est malade, je me suis préparé, soupire-t-il.
Je me laisse aller contre le dossier, bercé par le roulement. L'odeur de la voiture est la même qu'à l'époque où mon frère me conduisait continuellement chez mes amis, en échange d'un mcdo. Je souris niaisement en me remémorant ces vieux souvenirs.
- Pourquoi tu ne m'as jamais rien dit à propos de Frank, me lance-t-il et bizarrement, je m'y attendais.
- Quoi Frank, demandais-je nerveusement.
- Emma, il n'a pas seulement joué à touche pipi avec toi...
- Pourquoi tu dis ça... ce n'est pas..., le coupé-je.
- Elle me la dit, Emma..., me coupe-t-il à son tour, elle a tenté de se libérer la conscience, ajoute-t-il en essuyant une larmes, je l'ai juste écouté, je n'avais pas le courage de dire, quoique ce soit, m'avoue-t-il, de toute façon on dit quoi à une personne condamné à la mort, on s'entend, qu'elle attendait la pire des sentences.
- Il est ou Frank, demandé-je encore étonné de ne pas l'avoir vue dans les parages.
- Il a foutu le camp après qu'elle ait reçu son diagnostique de cancer, me répond mon frère, j'aurais dû le démolir et j'aurais dû te surveiller d'avantage, putain, Dylan mord ses lèvres sous la colère.
Je baisse les yeux face à la honte.
- Emma... Il doit payer et il payera, conclut mon frère.
- Non Dylan, je veux me reconstruire et passer à autre chose, je dois passer à autre chose, dis-je en espérant que ce sera la dernière fois qu'on aborde le sujet.
- Je veux t'aider à faire de ta vie un quelque chose, mais pour ça, il doit payer, finit-il avant de lever le volume de la radio suffisamment fort pour enterrer une éventuelle réplique de ma part.
▪️
Hello,
première partie d'un chapitre que je trouve plutôt ordinaire,
il fera partie des chapitres à reprendre lors de ma réécriture 🙈.
J'ai une suite déjà écrite et celui-là me bloquait,
je n'avais pas d'autre choix de le publier comme ça
pour être capable de continuer.
Sinon, j'espère que vous allez bien
et que pour celle qui sont en vacances
que vous profitez au max 😉.
Je vous souhaite une belle semaine.
Beaucoup d'amour, de câlins et de bisouxxx
❤️
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top