Chapitre 2
Chapitre 2.
Comme de fait, plusieurs jours plus tard, Legolas, sur un grand cheval blanc, passa les portes du château, Gimli assis derrière lui. Aragorn descendit sur les marches du palais pour les accueillir. L'elfe descendit de sa monture avec élégance, un grand sourire plaqué sur les lèvres. Il marcha jusqu'à l'Humain.
— Aragorn ! s'exclama-t-il.
Le roi lui tendit la main et il la serra vigoureusement.
— Après tout ce que nous avons traversé tous les deux, est-ce tout ce à quoi j'ai droit, une poignée de main, mon compagnon ? demanda Legolas en plantant ses prunelles grises dans celles de son vis-à-vis.
Paraissant se ressaisir, Aragorn tira son ami contre son torse et lui donna quelques tapes viriles dans le dos.
— Hey, est-ce que vous n'oublierez pas quelqu'un ? les interrompit une voix au fort accent et au ton bourru.
Les deux amis se détournèrent pour faire face à Gimli qui les regardait en tapant du pied. Aragorn délaissa Legolas pour étreindre le nain.
— Je suis si content de vous voir. Qu'avez-vous fait de bon durant tout ce temps ? Entrez, je vous invite et la bière coulera à flots !
Une grande fête fut organisée pour la venue des deux guerriers. C'est autour de bières que Legolas et Gimli racontèrent le fruit de leurs derniers voyages, l'état de leur royaume, les reconstructions qui avançaient et le peuple qui se remettait doucement des méfaits de la guerre. Mais ce n'était pas ce que voulait savoir Aragorn.
— Non, dit-il en les interrompant, vous, qu'avez-vous fait ?
— Oh, murmura Legolas en détournant un peu le regard, mon père souhaite que je me marie.
Le visage d'Aragorn s'obscurcit.
— Avec qui ?
— Une elfe, bien sûr, mais aucune décision n'a encore été prise. Je n'ai pas encore accepté.
— Pourquoi maintenant ?
— La guerre est terminée, c'est le moment idéal, je présume.
Aragorn termina sa bière cul sec et tendit la main pour en obtenir une autre.
— Quand les hommes commencent à s'intéresser aux femmes, ils en oublient leurs amis.
— C'est bien vrai, ça ! approuva Gimli en hochant vivement la tête.
— Si c'est cela qui t'inquiète, rassure-toi, il y aura toujours une place pour mes vieux amis.
Le roi Humain resta silencieux face aux paroles de Legolas. Ils avaient été séparés pendant de longs mois et, maintenant, il voulait se marier ? C'était sans doute le cours normal des choses... Mais cela lui faisait tout de même un pincement au cœur, sachant qu'il avait lui-même renoncé à Arwen quand il était monté sur le trône, ne souhaitant pas lui imposer sa condition de mortel. Or, il ne pouvait pas refuser le bonheur à son ami si tel était son désir.
— J'espère que ce mariage te comblera.
— Merci, mon ami.
Legolas lui donna une tape amicale dans le dos et souleva son boc en l'air pour faire un toast.
Plus tard dans la soirée, ils perdirent Gimli aux mains de l'alcool. Le nain devait être quelque part parmi les invités, dansant sur les tables ou en train de vomir dans un coin de la pièce. Aragorn lui-même commençait à être épuisé et il avait un peu trop bu. Il s'apprêta donc à tirer sa révérence pour se retirer dans ses appartements.
— Tu pars déjà ? lui demanda Legolas.
— Je suis fatigué. Nous aurons l'occasion de poursuivre la fête demain.
— Donc, tu vas dormir ?
— Oui.
— Seul ?
— Avec qui voudrais-tu que je sois ?
— Je ne sais pas, mon ami, tu ne m'as pas beaucoup parlé de toi ce soir. Je me suis demandé si tu avais revu Arwen ou Éowyn.
— Éowyn a épousé Faramir, dit-il.
— Oh, je l'ignorais, je suis content pour eux.
— Oui, je t'aurais bien invité au mariage, mais tu as été occupé durant ces derniers mois, non ? Je n'ai pas reçu une seule lettre de ta part.
Legolas baissa la tête, prenant de plein fouet le reproche à peine voilé.
— Je suis désolé, Aragorn, je n'ai pas voulu te laisser sans nouvelle aussi longtemps...
— Alors, pourquoi ?
— J'ai été occupé, j'ai eu la tête ailleurs. Je n'ai pas d'excuse.
— J'ai crains le pire. Ne me laisse pas aussi longtemps dans l'obscurité sans me donner de nouvelles.
— Je suis désolé, répéta-t-il.
— Ne refais plus ça.
Aragorn se recula et perdit brièvement l'équilibre, se retenant contre une des tables en bois.
— Attention ! s'exclama l'elfe en esquissant un mouvement pour le rattraper avant que l'Humain ne retrouve pied de lui-même. Tu as beaucoup bu, Aragorn.
— J'ai bu autant que toi.
— Mais je suis un elfe et toi un Humain.
Il se souvenait de la fois où il avait fait une compétition du nombre de bières bues avec Gimli. Il lui avait fallu des dizaines et des dizaines de chopes pour ressentir ne serait-ce qu'un petit picotement.
— C'est bien ça le problème..., grogna le roi dans sa barbe.
— Laisse-moi t'aider à regagner ta chambre.
Malgré les protestations du souverain, Legolas passa un bras sous ses aisselles et le guida hors de la grande salle. Il valait mieux que le moins de personnes possible puissent voir le roi dans cet état alcoolisé. Aragorn l'aida un peu à s'orienter dans les dédales du château jusqu'aux portes de ses appartements. L'elfe l'amena à l'intérieur et referma les portes derrière eux.
— Tu devrais t'allonger, lui indiqua-t-il en désignant le somptueux lit à baldaquin.
— Pour me réveiller seul au matin ?
Legolas fronça les sourcils.
— Qu'est-ce que tu veux dire ?
— M'endormir seul et me réveiller sans personne à qui souhaiter bon matin...
L'elfe écarquilla les yeux. Se pourrait-il qu'Aragorn ressente la même chose que lui ?
— Tu ressens cela, toi aussi ?
— Chaque jour depuis la fin de notre quête. C'était tellement plus facile quand nous pouvions être tout le jour et toute la nuit ensembles, avoir de la compagnie. Dormir à la belle étoile, la caresse de l'herbe et la chaleur du feu me manquent, enfermé entre les murs de ce château. Je suis un rôdeur, je ne suis pas un roi.
— Tu as l'étoffe d'un grand souverain, le contredit immédiatement Legolas. J'ai toujours su que tu serais un roi extraordinaire, depuis que Elrond t'a amené à Fendeval avec lui, alors que tu n'avais que deux ans. Les Humains sont le salut des Terres du Milieu. Je t'ai juré allégeance, ninya aran*.
— C'est facile de dire ça pour toi. Tu vas bientôt te marier et tu ne dormiras plus jamais seul même si nos aventures sont arrivées à terme. Et ton père te laisse voyager, parcourir les Terres du Milieu, tu n'es pas enchaîné à un trône.
— C'est ton devoir, Aragorn, et tu ne peux t'y soustraire. Par ailleurs, rien ne t'empêche de faire des voyages diplomatiques, tu sais tout aussi bien que moi que Faramir dirigera d'une main de fer en ton absence. N'est-il pas ton intendant ?
— Je le sais bien. Faramir à toute ma confiance. Pardonne-moi, Legolas, je ne sais plus ce que je dis ; l'alcool m'embrume l'esprit. Je ferais mieux de me coucher avant de déblatérer plus d'âneries... Je vais m'allonger.
— Tu veux que je reste pour te tenir compagnie ? Comme au bon vieux temps. Cela me manque à moi aussi, tu sais.
Comme Aragorn ne lui répondait – sa fierté étant sûrement plus forte que sa volonté –, mais alors qu'il s'allongeait dans son lit, Legolas le rejoignit. Les elfes ne dormaient que quelques fois durant leur longue vie d'immortels, alors il ne ferma pas les yeux, mais il veilla sur son roi. C'était ce qui lui avait manqué, un peu de quiétude nocturne avec un vieux compagnon. Il laissa l'Humain s'appuyer contre son torse pour dormir, sa main au creux de son dos. C'était comme avant.
Legolas songea brièvement, qu'après le mariage, il ne pourrait plus faire ce genre de choses. Sa future fiancée pourrait en être jalouse et ne pas comprendre la relation fusionnelle de vieux compagnonnage qu'ils entretenaient. C'était plus qu'une amitié ordinaire. Ils avaient partagé tellement de choses ensembles... et Aragorn n'était pas n'importe quel Humain, il avait été élevé chez les elfes, comprenait leur culture, leurs traditions, parlait leur langue, mais ce n'était pas tout. Il était aussi l'homme le plus brave et le plus déterminé que le prince elfe n'ait jamais eu l'occasion de rencontrer. Plus encore, il était un grand roi.
Aragorn se mit à ronfler dans son sommeil, ce qui fit sourire son compagnon. Legolas le déplaça néanmoins un peu pour le faire taire.
LEXIQUE
*Mon roi
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top