Chapitre 5 - Sous haute tension
Même pour jouer son propre rôle, il faut se maquiller. Stanislaw Jerzy Lec
L'immense propriété des De Villiers se trouve à l'extérieur de Paris, nous faisons donc plus d'une demi-heure de voiture pour y parvenir.
Et cela fait également plus d'une demi-heure que ma meilleure amie me vante les qualités de Karl Montgradeau. Ce garçon est beau, incroyablement sexy, intelligent, cultivé, sympathique et attentionné, le summum de la perfection en gros.
Permettez moi d'en douter.
- Colombe Montgradeau, ça sonne bien non ? me demande t-elle en regardant le plafond.
Ok, donc c'est officiel. Je l'ai complètement perdue !
- Au fait, toi, tu as rencontré quelqu'un ? Je t'ai vu parler avec un des amis de Karl sur la terrasse, qui est donc ce bel inconnu ? me questionne t-elle avec un sourire en coin, prête à sauter sur la moindre révélation.
Oh non, elle a remarqué.
- J'en ai aucune idée, je ne connais pas son prénom et de toute manière je me suis ridiculisée alors s'il te plait, Colombe ne me rappelle pas ça.
Nous rigolons. C'est tout le temps moi qui me retrouve dans ce genre de situations embarrassantes, mais bon on s'y habitue.
À travers la vitre teintée, je vois au loin l'entrée du château, c'est gigantesque.
- Allons y ! Je suis sûre qu'on va bien s'amuser, comme à chaque fois. M'annonce t-elle avec un clin d'œil.
Car oui à chaque fois, on s'amuse à échafauder des tonnes de plans pour faire des blagues aux autres. Pas de très bons goûts selon eux. De toute manière, ils ne savent pas que c'est nous, donc aucun risque.
Nous sommes accueillies par Madame De Villers, Élisabeth - de son prénom - est une femme d'un certain âge mais toujours aussi gracieuse. Elle est un modèle de gentillesse et de bonté - ce qui est quand même, à noter, très rare - et elle est d'une élégance certaine. Mon acolyte blonde et moi nous dirigeons vers la salle principale où se trouve multitude de députés, ministres, commerciales, notaires, banquiers, anciens mannequins devenus fondateurs ou ambassadeurs d'une association de prestige et j'en passe.
Nous saluons quelques personnes, allons rejoindre Victoire, Garance et Sixtine. Cette dernière n'a pas l'air dans son assiette. Nous parlons de choses et d'autres, le principal sujet étant la fête de la veille, jusqu'à ce que je sente une main sur mon épaule.
- Oh bonjour Monsieur de Villiers, comment allez-vous en ce beau jour ? Dis-je surprise en voyant le patriarche de la famille
- Je vous en prie Margot, appelez-moi Georges depuis tout ce temps, enfin. Et bien, je me porte à merveille. Au fait, j'ai quelqu'un à te présenter Margot et à vous aussi, les filles. Je vous présente mon neveu, Gauthier De Villiers. annonça Georges d'une voix enjouée et enthousiaste.
Puis un jeune homme se plaça à côté de son oncle.
Et merde, pas lui.
C'est le garçon d'hier soir, à qui j'ai posé cette question débile, pourquoi faut-il que ce soit lui ? Il y avait au moins cinq ou six garçons dans leur groupe, ça aurait bien pu être un autre ou même un étranger ou encore Karl, je n'en sais rien.
Je fais bonne figure, avec un peu de chance il a sûrement dû oublier l'événement de la veille.
- Bonjour mesdemoiselles. Prononça ce fameux Gauthier dont je ne connaissais pas encore le nom il y a à peine cinq minutes.
- Je vous le présente car il sera dans votre établissement scolaire à la rentrée prochaine, en terminale par contre. Une année de plus que vous, non ? Qu'importe, Saint-Charles De Quintrec est grand mais vous vous verrez sûrement. Il revient d'Angleterre et retrouvé sa bande de bons copains d'enfance mais vous pourriez lui faire visiter les lieux. Le baron sourit de toutes ses dents et s'en alla, ravi d'avoir accompli sa mission du jour.
- Avec plaisir, Monsieur De Villeneuve ! répondit Colombe, apparemment très heureuse à l'idée de cette requête.
Je me tourne vers la direction où se rend le baron et puis un chuchotement atteint mon oreille.
- Je vois que tu n'es pas plus habillée qu'hier soir mademoiselle, c'est donc qu'elle n'écoute rien. Dit le jeune homme habillé d'un costume trois pièces bleu marine - et mettant en valeur ses yeux de la même couleur soit dit en passant - et avec un sourire en coin non dissimulé.
Je ne prends pas la peine de répondre et pars en direction du buffet. Je n'ai toujours pas mangé depuis hier soir et il est treize heures trente. Je prends du caviar accompagné de quelques crevettes et une coupe de champagne.
Et je repense à l'événement qui vient de se passer, pourquoi je ne lui ai pas répondu une réplique cinglante ? Je suis restée bouche bée comme hier soir, il va me prendre pour une mauviette sans caractère. Ou alors c'est lui qui m'impressionne, mais non il n'a rien de plus d'exceptionnel que tout ceux que je côtoie habituellement.
Victoire vient me rejoindre.
- Je viens de voir Nathanaël avec sa nouvelle copine... Elle s'appelle Louise je crois, elle est gentille et plutôt jolie. M'avoue t-elle sur un ton qui se veut désolé.
- C'est pas grave tu sais, Vic. Je m'en suis remise, c'est pas comme si nous étions restés ensemble 3 ans pas vrai ? répondis-je avec un sourire franc.
Elle me sourit légèrement, elle a l'air gênée.
- Et mais c'est pas grave, ne t'inquiète pas ! Je suis même heureuse pour lui à vrai dire, c'est un garçon bien, il le mérite. concluais-je en souriant simplement.
- Oui tu as raison, bon je reviens je vais chercher des minis-crevettes, elles ont l'air trop bonnes ! rigole t-elle.
J'adore Victoire, elle est pleine de vie, elle est assez souvent joyeuse, elle ne surjoue pas contrairement aux autres, elle ne tient pas un rôle. Elle est assez naturelle et est dotée d'une beauté tout aussi naturelle. Brune aux yeux verts foncés, le teint légèrement plus bronzé que le mien. Elle a un sourire d'une blancheur à faire fondre le monde, même si elle ne s'en rend pas compte.
J'aperçois Nathanaël seul, parlant avec des hommes d'affaires...
Je sais qu'il va devenir un grand homme, très cultivé et très altruiste.
Nous nous connaissons depuis le jardin d'enfance, nos parents sont de très bon amis. Il a toujours été mon meilleur ami, mais en septembre de seconde, à l'entrée au lycée, nous sommes sortis ensemble car on pensait s'aimer. Nous nous étions beaucoup rapprochés l'été précédent. Sa famille et la mienne étant partie dans sa maison secondaire de l'île de Ré. Mais ce fut un mauvais choix, on ne s'aimait pas réellement et ce semblant d'histoire a effacé voire détruit toute notre amitié d'auparavant. Nous sommes restés ensemble jusqu'à la fin de l'année scolaire, accablés de la vérité, nous étions de simples amis. Nous nous sommes séparés plein de belles promesses et sans rancune mais l'été suivant a rasé ces belles idées. Depuis, nous n'avons fait que nous croiser et nous échanger des formules de politesse. Au grand dam de nos parents qui prévoyaient déjà notre mariage.
Il me manque, pas en tant qu'amoureux ou autre, mais en tant qu'ami, en tant que réel ami, c'est très rare un vrai ami.
Aller Margot, assez de nostalgie. Il est temps de donner une bonne réponse au De Villiers Junior. Je le cherche du regard, je le trouve. Merde, il a rejoins Nathanaël. Tant pis, je me lève d'un bond, prends une coupe de champagne en passant, la bois d'une traite et arrive finalement devant le petit groupe.
Ce dernier est composé de Nath, un autre jeune homme de petite taille mais assez robuste, d'un jeune conte ou d'un duc je ne me rappelle plus et bien évidemment de Gauthier.
J'ai voulu réfléchir à ce que j'allais lui dire, mais je me suis dit que ça viendrait tout seul, arrivée en face de lui.
- Gauthier, c'est ça ? Figure toi que non je ne suis pas plus couverte qu'hier soir car je n'en ressens pas principalement le besoin. Il fait peut être froid en Angleterre mais ici, beaucoup moins. Donc la prochaine fois où tu voudras jouer les gentlemans en me prêtant ta veste, retiens toi, je ne fais pas partie de ton fan club - oui je précise qu'hier, il matait toutes les filles aguicheuses et qu'elles lui tournaient bien autour aussi - qui a besoin de chaleur, si tu vois ce que je veux dire. Sur ce, on se voit à la rentrée. lâchais-je d'emblée.
Fière de ma tirade, je souris et de mon plus beau sourire qui plus est. Il ne répondit pas mais me fit une espèce de révérence et en souriant, lui aussi. Les autres m'ont dévisagée comme si j'étais une espèce de folle, à part Nath, qui lui ne semblait pas le moins du monde choqué. Enfin je crois qu'il me connait bien aussi, cela joue. Pour ce qui est de mon soi-disant "rival", nos regards se sont croisés, et mes yeux n'ont pas pu se décrocher directement de ses iris, il y a eu comme un courant entre nos deux regards. Revenue à la raison, et surtout sortie de ce bleu magnétique, je tourne les talons, assez fière de ma prestation et un peu embarrassée par ce qui s'est passé après la récitation de ma tirade.
Mission numéro une accomplie, maintenant mission numéro deux, retrouver Colombe Desbats et s'en aller d'ici.
Ah et mission supplémentaire, prendre une flûte de champagne rosé en passant.
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