Chapitre 4 - Un lendemain difficile
Rien n'est trop difficile pour la jeunesse. Socrate
Je me réveille avec un sérieux mal de crâne. J'ai encore dépassé les limites hier soir. L'heure affichée sur mon réveil me sors directement de mes vagues pensées : 10h32.
Et merde !
J'ai un brunch à 11h30. Et j'ai sûrement pas mal de dégâts à réparer afin de pour pouvoir me présenter. Je suis rentrée tard cette nuit. Enfin, ce matin plutôt...
Le brunch prévu se passe chez la famille De Villiers, ce sont des amis de mes parents mais aussi de mes grands-parents. Ils sont une puissante mais discrète famille parisienne. Ils s'illustrent en banque notamment mais aussi en politique, mondes intimement liés. Elisabeth et Georges De Villiers n'ont pas d'enfant et consacrent leur richesse à l'humanitaire, notamment pour Médecins sans frontières car l'un de leurs fondateurs est un ami proche.
Je me lève alors à la hâte et manque de tomber. Fait chier. Manque plus que je tombe, déjà que je ne ressemble à un rien mais alors avec un bleu sur la figure, merci bien. Je file en vitesse dans ma salle de bain - dieu merci, je n'ai pas à la partager avec quelqu'un, ça me fait déjà gagner un temps fou. - Je me regarde dans le miroir, mes cheveux sont lasses et sans aucun volume. Mes boucles châtains de hier soir ont fait place à des nœuds indissolubles, mes yeux marrons ont des cernes épouvantables et semblent extrêmement fatigués, mes lèvres sont gercées. En gros, mon allure générale fait peur.
Je file directement dans la douche, pas le temps pour un bain ce matin. Je sors et prends mon peignoir en soie. Je prends la balance, me pèse, je remarque avec un étonnement positif que j'ai perdu 200 grammes depuis hier matin. Yes ! Le rituel de la balance chaque matin s'est infiltré dans ma routine, il y a déjà plusieurs années de ça. Malgré mes 52,3 kilos - d'après ma pesée d'aujourd'hui - et mon 1 mètre 71, je suis encore loin d'être parfaite. C'est donc pour cela que je fais très attention à ce que je mange, c'est très important de toujours se garder dans la meilleure forme possible. D'après ma mère.
Passée l'épreuve de la balance, maintenant, je limite les dégâts avec mon anti-cernes - merci Yves Saint Laurent, je t'en suis mille fois reconnaissante - puis je finis ma routine maquillage qui ne change jamais réellement. Poudre, fards à paupières taupe, mascara et gloss. Les meilleurs produits importés du reste du monde pour notre propre bonheur personnel, c'est assez dérisoire mais tant pis, je réfléchirons à la condition humaine plus tard.
L'objectif principal est toujours de rester naturelle. Trop de maquillage rend très vite vulgaire et ce n'est pas de bonne famille.
J'enfile ma robe Lanvin d'un blanc pâle accompagnée par de somptueux mocassins signés Chanel.
Un peu de parfum pour la coutume. Et biensûr, je n'oublie pas mes lentilles, très importantes, les lunettes ne me vont pas très bien, ça me fait une tête de belette.
Et ma broche ! Merde, où est-elle ?
- Geneviève ! Vous n'auriez pas vu ma broche par hasard ? criais-je presque à l'entrée de ma chambre à l'intention de ma bonne et gouvernante.
Une voix résonna d'en bas.
- Si mademoiselle. Sur votre commode, dans votre coffret à bijoux, troisième tiroir.
Je me précipite vers sur mon coffret. Je relâche un soupir quand j'aperçois le bout doré de ma broche dans le troisième tiroir.
- Merci Geneviève, vous me sauvez la vie chaque jour ! Lui répondis-je.
Je l'accroche immédiatement sur ma robe, à ma droite, juste en dessous de l'épaule.
Si jamais je venais à l'oublier, ce serait le drame. Cette broche représente mon arrière-arrière grand-mère paternelle.
Elle représente la branche féminine de la famille Van Dermeulen. Elle était - et est toujours d'ailleurs - très respectée et connue. Elle tenait des salons littéraires, ce qui était une rareté durant son époque.
Une femme d'esprit si puis-je dire et j'en suis très fière.
L'heure affichée sur ma montre indique qu'il est 11h07.
Je décide d'allumer mon portable.
Ayant un peu peur des frasques que j'ai pu faire hier, je vérifie fébrilement les réseaux sociaux. Mais visiblement, il n'en est rien.
Rien à signaler, mis à part une absence totale de messages de la part de Mlle Desbats, Colombe a dû oublier le brunch chez les De Villiers à coup sur.
Cette fille n'est vraiment pas possible.
Ce qui est bien dans notre cercle social c'est que tout le monde se connaît. Chaque enfant de chaque famille fréquente les mêmes établissements scolaires et privés de surcroît. Donc nous savons qu'à chaque événement mondain, nous ne nous retrouvons pas seul.
Sauf qu'en l'occurrence, là, j'ai besoin de parler à Colombe, et après cinq appels sans réponse, j'ai confirmation qu'elle dort.
Je descends à la hâte les escaliers menant à mon entrée, je prends mon trench coat et passe dans la salle à manger dire bonjour à ma famille.
- Hello ma chérie, comment vas-tu ? La fête chez Sixtine hier soir s'est bien passée ? se renseignent mes parents.
Enfin, des formalités de bon augure, je réponds brièvement et emprunte l'ascenseur.
- Bonjour Arthur, pouvez-vous me déposer chez les Desbats s'il vous plait ?
Il me sourit de toutes ses dents et me répond qu'il en sera ravi.
Je monte à l'arrière de la voiture. Toujours aucune nouvelle durant le trajet. J'arrive devant la bâtisse grise.
Cela va faire maintenant vingt minutes que je suis assise sur le fauteuil en velours noir de Colombe, à l'attendre pendant qu'elle se prépare.
- N'empêche Karl il est trop génial !
Trop beau et tellement intelligent... sa voix provient de la salle de bain.
Pitié, non, ça recommence. Quand ma meilleure amie jette son dévolu sur un garçon, elle me parle tellement de lui que je le connais presque par cœur. Et également, gare à celles qui s'approchent de lui, elles courent le risque de ne plus pouvoir bouger si Coco les intercepte. Quand elle est vraiment accrochée, cela fait peur à voir.
Elle sort de la pièce, les cheveux en bataille et encore en sous-vêtements, on est pas sorti d'affaires...
- Il faut que je sois un minimum potable et regardable, t'imagines si il y a Karl ? C'est pas possible, merde, où est ma chemise ? se demande t-elle à voix haute, visiblement stressée.
Je me suis mise à partir dans un fou rire. Elle me fait penser à sa mère, qui est une pile électrique recherchant toujours quelque chose qu'elle a perdu. Des copier-collés.
Surtout, que ce cher Karl, on ne le connaissait pas il y a encore 16 heures. Alors qu'on est censé connaître tout le monde. J'en conclue donc qu'il ne fait pas partie de notre cercle et qu'on ne le verra pas. Ni l'inconnu de la terrasse d'ailleurs, dieu merci.
Vingt minutes plus tard, Arthur nous escorte jusqu'à la propriété de Monsieur et Madame De Villiers. Nous sommes prêtes à passer pas moins de trois heures à parler, écouter et faire semblant d'être intéressées par des sujets de discussions dont nous n'avons que faire et de surcroît par des personnes que nous avons rencontré moins de cinq fois dans notre vie.
Roulez jeunesse, mes amis, roulez jeunesse !
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