Un Jour D'hiver
La lumière pâle d'un matin d'hiver baignait la maison, et Mélia sentit la fraîcheur de la chambre avant même d'ouvrir les yeux. Le silence régnait, paisible et chargé de cette gravité douce que seul l'hiver semblait porter. Dans le lit, elle resta allongée un moment, écoutant les petits bruits de Gabin et Éliot dans la maison, savourant la chaleur de la couette, la paix de ce jour.
Elle savait que cet hiver serait son dernier. C'était une certitude froide, claire comme le ciel hivernal. Alors aujourd'hui, elle voulait que ce soit un jour inoubliable,
En tournant la tête elle vit sur sa table de chevet une photo d'elle et elio de leur premier été ensemble, elle se retrouva projetée des années en arrière, à l'époque où ils avaient échangé leur premier baiser.
Ce soir-là, ils avaient marché longtemps dans les rues de la ville, leurs rires se mêlant à la douce brise d'été. La lumière des lampadaires éclairait timidement le chemin, et l'odeur du jasmin emplissait l'air. Ils parlaient de tout, comme si leurs conversations pouvaient suspendre le temps. Ils s'étaient arrêtés au coin d'une rue silencieuse, et Éliot l'avait regardée intensément, le regard empli d'une tendresse qui la faisait frissonner.
Puis, il avait doucement glissé une main sur sa joue, et elle avait senti tout son être se figer, chaque fibre de son corps tendue vers lui. Leurs lèvres s'étaient trouvées, et ce premier baiser avait été comme une promesse silencieuse, un secret échangé dans le silence de la nuit.
Mais juste après, alors que leurs fronts restaient pressés l'un contre l'autre, Mélia avait ressenti un pincement au cœur. Ce bonheur si intense s'accompagnait d'une peur profonde : celle de ne pas pouvoir lui offrir tout un avenir. Alors, elle s'était reculée légèrement, cherchant ses mots, essayant de lui dire ce qu'elle savait depuis son enfance.
"Éliot... il faut que tu saches..." murmura-t-elle d'une voix hésitante, le regard baissé.
Avant qu'elle ne puisse continuer, il avait délicatement relevé son menton et lui avait souri, un sourire empli de douceur et de compréhension.
"Je sais, Mélia," avait-il dit doucement, devinant ses pensées. "Je sais que tu as peur de ne pas vivre aussi longtemps que les autres... mais cela ne change rien pour moi."
Étonnée et touchée, elle avait levé les yeux vers lui, incapable de cacher sa surprise. Il la regardait avec une intensité qui balayait ses doutes et ses craintes, comme s'il acceptait tout d'elle, sans réserve.
"Je veux être avec toi, Mélia. Peu importe combien de temps cela durera... tant que je suis à tes côtés, chaque jour en vaudra la peine."
Ces mots, ce regard, avaient alors dissipé toutes ses hésitations. Elle avait su à cet instant qu'Éliot serait l'homme avec qui elle construirait des souvenirs, sans penser au lendemain, en vivant simplement chaque instant comme un cadeau.
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Quand elle descendit, Éliot l'attendait dans la cuisine avec un sourire tendre, un regard calme qui cachait son inquiétude. Il avait préparé un petit-déjeuner spécial, des tartines chaudes, du chocolat crémeux, et des croissants croustillants. Gabin, leurs joues roses d'excitation, était déjà assis, battant des pieds sous la table.
Mélia s'installa, remerciant Éliot d'un sourire. Elle savait qu'il devinait tout ce qu'elle voulait dire sans qu'elle ait besoin de parler. Ils échangèrent un regard chargé d'émotion, et Mélia fut soudain traversée par un souvenir vif, comme un coup de vent :
Ils étaient jeunes, elle portait une robe blanche simple, mais radieuse, en ce jour de mariage. Elle se souvenait de son regard à lui, intense et brillant d'amour, tandis qu'il lui glissait l'anneau à son doigt. Sa main tremblait, sa voix aussi, mais elle avait promis de tout son cœur.
"Je t'aime, et je te promets de faire de chaque jour un souvenir," avait-elle murmuré ce jour-là, et elle l'avait embrassé pour la première fois en tant que mari et femme, tremblante de bonheur et d'appréhension.
De retour au présent, elle serra la main d'Éliot, retrouvant ce même sentiment, comme une promesse intacte malgré les années et la maladie.
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Ils sortirent tous les trois dans le jardin où la neige fraîche avait recouvert chaque parcelle d'herbe et d'arbres. Gabin se précipita vers la neige avec des cris de joie, ramassant des poignées pour former une boule.
Éliot aida Gabin à façonner un bonhomme de neige, tandis que Mélia restait en retrait, savourant la scène, les mains enfoncées dans ses poches, son cœur rempli d'une tristesse douce mais infinie.
Alors qu'elle les regardait rire, elle fut envahie d'un autre souvenir : celui du jour où elle avait découvert qu'elle était enceinte. C'était un soir d'été, étouffant, et ils s'étaient assis sur le rebord de la fenêtre de leur petit appartement. Mélia lui avait pris la main, tremblante, et avait murmuré, presque en chuchotant, comme pour garder le moment entre eux.
"Éliot... je suis enceinte."
Elle se souvenait de son regard surpris, de l'hésitation mêlée de bonheur. Ils avaient ri, ils avaient pleuré, ils avaient eu peur. Elle se souvenait surtout de ses bras qui l'entouraient, la réconfortant, et de leurs promesses d'être forts, quoi qu'il arrive. Juste après cette déclaration, elle avait eu un frisson d'incertitude.
'' Mélia," lui avait-il dit en la regardant droit dans les yeux, devinant la pensée qui lui traversait l'esprit. "peu importe combien de temps nous avons. Chaque instant compte
De retour dans la neige, elle regarda Éliot et Gabin en pensant à cette vie qu'ils avaient décidé d'accueillir malgré tout. Elle sourit, remplie de gratitude pour chaque moment passé avec eux.
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En rentrant, Éliot avait préparé du chocolat chaud, et Mélia s'installa dans le salon avec Gabin sur ses genoux, lisant une histoire qu'il connaissait par cœur. Son petit garçon, captivé par chaque mot, regardait les illustrations, ses yeux pleins d'émerveillement. Mélia l'embrassa tendrement sur la joue, caressa ses cheveux blonds, et sentit une vague de tendresse l'envahir.
Elle se souvint de la première fois où elle avait tenu Gabin dans ses bras, à la maternité. Ses petits doigts serrés autour de son pouce, son souffle minuscule contre sa peau. Elle se rappelait d'Éliot, debout à côté d'elle, ému aux larmes, les regardant comme si le monde entier venait de basculer.
"On est une famille, maintenant," avait-il murmuré en posant une main douce sur la sienne. "Je te promets d'être là, toujours."
Elle le regarda, sentant cette même promesse, et un sourire plein de gratitude illumina son visage. C'était un sourire d'adieu, même si elle savait qu'Éliot comprendrait sans un mot.
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La nuit était tombée, le silence de la maison seulement troublé par le crépitement du feu dans la cheminée. Mélia et Éliot s'installèrent près de la cheminée, Gabin jouant encore avec ses jouets sur le tapis, et Mélia serra la main d'Éliot, son cœur débordant d'émotion. Elle lui murmura, tout bas :
"Promets-moi que tu prendras soin de Gabin, que tu lui raconteras qui j'étais, que tu lui parleras de tout ce que nous avons vécu ensemble."
Éliot hocha la tête, son regard rempli de larmes, et murmura d'une voix rauque :
"Je te le promets, Mélia. Il saura combien tu l'aimais, combien tu étais courageuse et belle."
Elle lui sourit, un sourire de paix et d'amour, et se blottit contre lui, fermant les yeux, rassurée, sentant qu'elle pouvait maintenant partir en paix.
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Le lendemain, Mélia ne se réveilla pas. Le silence était doux, empli de cette sérénité que seule la paix profonde peut apporter.
Des années plus tard, Éliot et Gabin sortiront chaque hiver pour construire un bonhomme de neige en souvenir d'elle, se rappelant ensemble chaque instant de cette journée d'hiver où elle leur avait offert le plus beau cadeau : des souvenirs remplis d'amour, gravés dans la neige et le cœur de ceux qu'elle aimait.
Ce fut son dernier jour d'hiver
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