Gaaldorei - partie 2

La femme qu'elle y vit n'était pas son reflet. Non, celle-ci était pleine de grâce et d'élégance, portant à la perfection cette robe blanche qui faisait ressortir ses hanches et sa poitrine et marquait sa taille fine. Ses longs cheveux blancs tombaient en cascade sur les manches bouffantes et dans son dos, caressant ses reins. Une femme de chambre apporta un léger carré de tissu qu'elle présenta à la jeune femme.

–Non, fit-elle, je ne cacherais pas mes cornes.

La servante rangea alors le tissu et s'empara avec précaution d'une tiare en or blanc qu'elle déposa délicatement sur le haut de la tête de sa maîtresse et l'ajusta sur son front. Elle jeta un dernier coup d'œil à son reflet et semblait se contenter de ce qu'elle voyait. La porte s'ouvrit alors sur deux jeunes hommes, élégamment habillés de blancs et portaient tous deux une tiare semblable à celle de la jeune femme, décorant leurs longs cheveux blancs. Lorsan et Belanor.

–Vôtre Altesse, fit ce dernier en effectuant une révérence grotesque. Madame est d'une beauté ravageuse ce soir, vos frères auront tout intérêt à rester près de vous.

–C'est vrai, ajouta Lorsan, le sourire aux lèvres. De plus, il est évident qu'une si frêle créature ne saurait se défendre seule si le moindre mal arrivait.

–Vous n'êtes que des idiots ! S'exclama la jeune femme. Je sais parfaitement bien me défendre toute seule !

Elle se rapprocha d'eux tout en gardant un œil sur sa dame de chambre qui écoutait la conversation de loin.

–J'ai pensé à prendre mon poignard, susurra-t-elle en soulevant légèrement ses jupes, je l'ai attaché à mon mollet.

Lorsan explosa de rire.

–Chère sœur, combien de fois devrons-nous te dire de ne pas le mettre lors de banquets, les gardes de Père sauront te protéger.

–Je m'en contrefiche, c'est pour au cas où un seigneur viendrait avec son fils pour prétendant demander ma main à Père.

–Et qu'est-ce que tu comptes faire avec ce petit couteau ? S'amusa Belanor.

–Leur faire comprendre que je ne suis pas à vendre.

Elle leur accorda un sourire malicieux qui, certainement, a dû en faire tomber plus d'un, et lissa les pans de sa robe.

–Y allons-nous ? Demanda-t-elle.

–Nous n'attendions plus que vous Madame.

Elle s'empara des bras de ses deux frères et tous les trois sortirent des appartements de la jeune femme, descendant un nombre incalculable de marches. Plus ils avançaient et plus les festivités du banquet leur parvenaient. Après une révérence, les gardes ouvrirent les portes et le héraut les présenta.

–Son Altesse impériale le prince héritier Lorsan ! Son Altesse impériale le prince Belanor ! Son Altesse impériale la princesse Nylathria, Guerrière du dragon !

Tous les regards convergèrent vers eux et ils semblaient ne pas s'en affliger.

–Regarde le nombre d'hommes venus tout spécialement pout toi, glissa Lorsan à l'oreille de sa sœur.

–J'aurais beau regarder, je n'en vois aucun digne de ma personne, plaisanta la princesse.

–Ta personne devra bien s'accommoder, rétorqua Belanor d'un ton las.

–Père ne me ferait jamais cela.

Elle lâcha les bras de ses frères alors que le couple impérial avançait vers eux, le sourire aux lèvres. Leurs trois enfants leur accordèrent une rapide courbette et Nylathria tentait au mieux d'ignorer les regards que lui lançaient les hommes aux alentours. L'impératrice, en posant les yeux sur sa fille, eu l'air découragé.

–Tes cornes sont découvertes, remarqua-t-elle.

–Tant mieux, rétorqua la princesse, les cacher n'aurait servit qu'à les rendre bien plus visibles. Et au moins, ainsi, cela donne un avertissement à quiconque m'approcherait de trop près.

–Nylathria ! Gronda Dame Alyndra.

–Je vous souhaite une agréable soirée Mère, lança-t-elle en ignorant la soufflante de l'impératrice. À vous aussi Père.

Elle s'éloigna de sa famille et prit un verre de vin au passage, qu'elle but d'une traite. Elle allait en avoir besoin, elle sentait que cette soirée allait s'éterniser et qu'elle finirait en défilé des prétendants, qu'elle allait bien entendu tous refuser. Un seul avait pris son cœur et elle l'attendait avec impatience. Tout au long du banquet, elle évitait au mieux les hommes qui lui semblaient un peu trop intéressés et ne faisait que guetter la porte d'entrer, sans jamais voir personne la franchir. Et pourtant, alors qu'elle s'apprêtait à prendre un énième verre, quelqu'un vint lui caresser tendrement la main. Le sourire aux lèvres, elle se tourna vers celui à qui elle avait donné son cœur.

–J'ai cru que tu n'arriverais jamais, murmura-t-elle en regardant tout autour d'eux.

–J'aime bien te faire languir, répondit-il en élargissant son sourire.

–Si nous n'avions pas été autant entourés, je t'aurais frappé.

–Je n'en doute pas. Mais dîtes-mois, Vôtre Altesse accepterait-elle de danser avec l'idiot de chevalier que je suis ?

La jeune femme ne put cacher sa joie.

–La princesse que je suis ne saurait vous le refuser, chevalier Ardreth.

Elle glissa sa main dans la sienne et il l'emmena jusque sur la piste de danse. Lentement, il posa une main sur sa hanche et l'attira à elle. Les yeux plongés dans les siens, elle déposa sa main libre sur son épaule. Et alors ils entamèrent cette valse qui n'était que le début d'une longue nuit.

La porte s'illumina de nouveau, effaçant cette scène dont Nylathria ne savait quoi penser. S'il n'y avait jamais eu le Fléau, elle serait tombée amoureuse d'Ardreth. Son cœur se serra lorsqu'elle repensa à sa mort, à cette flèche qui s'était logée dans la poitrine du garçon qu'il était. Mais elle n'eut pas le temps de s'apitoyer sur son sort, la porte montrait une nouvelle scène.

La jeune femme courait à travers le château, visiblement à la recherche de quelqu'un. Elle semblait totalement paniquée et sur le point de craquer. Elle remonta un peu plus ses jupes pour ne pas se prendre les pieds dedans et monta les dernières marches menant aux appartements impériaux. Elle ouvrit en grand la porte de la chambre et y trouva son père, l'empereur.

–Vous le saviez ? S'exclama-t-elle la voix tremblante. Vous le saviez et vous ne m'avez rien dit ?

Cette fois-ci, elle éclata en sanglot, ne pouvant plus retenir ses larmes. L'empereur posa un regard aimant sur sa fille et se dirigea vers elle, le visage profondément triste.

–Ma douce Nyla, je suis tellement désolé, murmura-t-il. J'aurais aimé que les choses se passent autrement.

Il ouvrit ses bras pour la serrer contre lui mais elle le repoussa violemment.

–Il est mort, MORT ! Vous m'entendez ! Pleurait-elle. Il est mort dans une guerre qu'il n'a pas voulu. Il s'est battu pour l'empire, pour moi et il a perdu la vie.

–Moi non plus je n'ai jamais voulu de cette guerre ma douce, mais nous devons défendre l'empire. Les humains ne s'arrêteront que si nous arrivons à les repousser. Ardreth s'est vaillamment battu pour défendre sa terre, il est mort en héros et nous n'oublierons jamais ce qu'il a fait pour l'empire. Mais il n'est pas leur seul à avoir perdu la vie sur ce champ de bataille.

–C'est le seul qui m'importait Père, le seul.

–Je le sais bien ma douce, je le sais bien.

Du revers de la main, elle essuya ses larmes.

–Je veux me battre, lança-t-elle d'un ton déterminé, je veux monter sur Olvaar et brûler vifs ces humains qui m'ont pris Ardreth.

–Nyla, Olvaar et toi manquez d'entraînement, tu te ferais tuer si tu te rendais sur le champ de bataille. C'est encore trop tôt.

–Mais j'ai mes cornes, nous ne sommes qu'un ! Nous saurons nous en sortir. Père, je vous en supplie, j'ai besoin de savoir qu'il n'est pas mort inutilement et que ses assassins ne coulent pas des jours heureux.

–La vengeance ne ferait qu'animer cette guerre. Pour Ardreth, nous devons faire en sorte qu'elle se termine, tu sais qu'il détestait se battre. La paix serait-ce pas un meilleur cadeau à lui offrir ?

De nouveau, elle ne réussit à contenir ses larmes et cette fois, elle s'effondra. Son père la rattrapa de justesse et la serra fort contre lui, lui apportant toute sa chaleur.

–Je l'aimais Père, sanglotait-elle en langue elfique, de tout mon cœur. J'ai si mal de le savoir parti, mon cœur me fait mal. Vous m'aviez toujours dit que l'amour était un cadeau de Mère Nature. Je déteste ce cadeau empoissonné qu'elle m'a fait, et je la déteste pour me faire autant souffrir. Pourquoi me prendre l'homme que j'aime ?

Eroan prit la tête de sa fille entre se mains et lui sourit tendrement, lui répondant en langue elfique.

–Ne m'aimes-tu pas moi, ma douce ?

Elle laissa échapper un rire nerveux.

–Bien sûr que je vous aime, Papa.

Elle posa la tête sur son épaule et se cala un peu mieux dans ses bras rassurants. Il se mit à lui caresser doucement les cheveux, comme il avait l'habitude de le faire depuis qu'elle était enfant.

–L'amour, mon enfant, est une chose bien étrange. C'est en effet un cadeau que nous ne sommes pas en mesure de refuser à la Mère, mais elle peut nous le reprendre si tel est son plaisir. L'amour n'a pas qu'un seul visage, Ardreth n'en est qu'un parmi tant d'autres. L'amour n'a pas qu'une seule forme. L'amour que tu lui portais est-il le même que tu me portes à moi, à ta mère ou à tes frères ? À Olvaar ? Tu connaîtras de nouveau l'amour, ma douce. Il sera différent de celui qui t'unissait à Ardreth, mais ce sera bien de l'amour. Et je t'en prie, laisse-le venir à toi, ne lutte pas tu ne souffrirais que davantage. Et n'oublie pas que l'amour ne connait pas la mort. Ardreth est mort par l'épée, l'homme à qui tu décideras d'ouvrir une nouvelle fois ton cœur partira peut-être parce que son temps sur cette terre s'est écoulé. Et toi, ma fille, tu goûteras une nouvelle fois à la douleur de l'amour car ainsi est faite la vie. La nuit te semblera éternelle et pourtant le soleil se lèvera de nouveau sur tes jours et alors, tu sauras que tu pourras t'ouvrir de nouveau à l'amour, aussi différent soit-il du dernier. Ne te perds pas dans la nuit ma douce, ne la laisse pas t'entourer de ses bras et t'emmener avec elle, ne cesse jamais de courir vers le soleil.

Le décor s'effaça petit à petit, puis les deux personnes disparurent elles aussi. Une épaisse fumée voila le miroir avant que l'image ne devienne nette.

–N'oublie pas que tu fais cela pour l'empire, cette union va nous faire gagner cette horrible guerre qui a trop longtemps durée.

–Je sais Mère.

Autour de Nylathria s'affairaient de nombreuses femmes de chambres et devant elle, l'impératrice remettait en place une fleur dans ses cheveux relevés. La princesse portait une simple robe blanche, au large décolleté rond et aux manches évasées. Le tissu était si léger qu'il s'envolait lorsqu'une servante passait à côté d'elle. Ses bijoux en or blanc étaient sertis de quartz rose et ses cheveux étaient décorées d'azalées et ses cornes de bijoux. On déposa délicatement sa tare sur son front et on accrocha dans ses cheveux un voile d'une longueur improbable.

–Tu es parfaite, souffla Dame Alyndra en admirant sa fille.

Elle lui tendit un bouquet élégant et raffiné, les larmes aux yeux et le sourire aux lèvres. Nylathria se contempla dans le miroir. Le sourire ne lui vint pas parce que ce n'était pas son reflet qu'elle voyait, mais celui d'une autre femme. Elle ne voulait pas le faire mais tel était son devoir.

–Est-elle prête ? Demanda une voix masculine.

L'empereur entra dans la pièce et regarda un instant sa fille, un sourire triste collé sur le visage. Il s'était promis de ne jamais la forcer à épouser qui que ce soit, mais il avait failli à sa promesse. La princesse s'avança vers son père et s'agrippa au bras qu'il lui tendait. Et alors ils entamèrent cette marche de l'horreur. Ses suivantes étaient bien plus excitées qu'elle à propos de ce mariage et se voyaient déjà lors de la réception à papillonner devant le moindre chevalier ou noble de la Cour. Nylathria, elle, ne cessait de penser à Ardreth. Il détestait cette guerre contre les humains et si elle épousait cet homme qu'elle connaissait à peine, c'était pour voir son rêve se réaliser. Le rêve de voir de nouveau l'empire en paix.

Dans la salle du trône, les invités, qui se languissaient de voir la future mariée, se levèrent d'un seul coup lorsqu'elle fit son entrée, l'admirant sous toutes les coutures. Elle détestait être le centre de l'attention mais elle ne pouvait rien dire. Son regard s'accrocha à celui de l'homme qui l'attendait devant l'autel, un elfe comme il y en avait des centaines dans cette salle. Ardreth avait ce sourire chaleureux, cette expression spéciale et qui lui était propre lorsqu'il était heureux. Lui, il lui semblait fade. Durant le peu de temps qu'elle avait passé en sa compagnie, elle n'avait cessé de comparer les deux hommes et elle ne leur avait trouvé aucun point commun.

Elle resserra sa prise autour du bras de son père, lui faisant comprendre qu'elle ne voulait pas qu'il la laisse. Et pourtant, c'est à contre-cœur que l'empereur donna la main de sa fille à son fiancé. Celui-ci tenta de la rassurer en lui accordant un sourire qui se voulait chaleureux, mais cela ne fit que l'attrister davantage. C'est Ardreth qui aurait dû être à sa place, qui aurait dû lui sourire et lui dire qu'il l'aimait. Mais Ardreth était mort, et c'était pour que sa mort ne soit pas vaine qu'elle allait se donner à cet homme.

–La grande Mère nous a fait cadeau de l'amour, Commença le sage Lamruil, et c'est parce que ces deux jeunes gens ont reçu ce merveilleux cadeau que nous sommes tous réunis ici aujourd'hui. Mais vous vous mariez non pas parce que vous vous aimez mais pour vous aimer car c'est devant Mère Nature que vous allez pouvoir pleinement vous aimer et de manière irrévocable. Votre amour aujourd'hui n'est pas de ceux qui ne durent qu'une seule nuit. Votre amour dans le mariage est un édifice que vous construisez. Construire un édifice se fait dans la joie : la joie procurée par l'avancée des travaux, la satisfaction de voir la construction progresser ; mais également dans la peine : les tempêtes qui peuvent détruire ce que vous avez bâti, le manque de matériaux, la fatigue. Si vous surmontez ensemble ces peines, sous la lumière de la Mère, vous en viendrez à bout. Et par l'exemple que vous allez donner, vos enfants reprendront le flambeau et continueront l'édification. Chaque jour, Nylathria et Erendriel, redites votre oui entre vous, dans l'intimité de la Mère afin de renouveler le don de l'un à l'autre, comme une source inépuisable. Vos âmes vont grandit et renaître devant Mère Nature à la fin de votre vie, si vous avez laissé Mère Nature au centre de votre couple. L'amour simple dans les périples de la vie est quasiment impossible. Et c'est bien là la beauté du mariage : grâce à la grande Mère, à sa participation active, vous pourrez surpasser les obstacles à l'amour et grandir dans la foi, l'espérance et la joie.

« Aimez-vous, non pas pour le meilleur jusqu'au pire mais pour le meilleur et pour le pire. Il ne faut pas se laisser abattre par des disputes et des désaccords. Il faut se pardonner, oublier, car la source d'amour, alimentée par la Mère, est insatiable. Le rocher qui la bloque doit être retiré au plus vite. Il faut pardonner mais aussi dialoguer, dire ce que l'on a sur le cœur, que ce soit en amour mais aussi dans les difficultés. Il faut, chaque jour, se redire son amour, même si Erendriel vous savez que Nylathria le sait, n'hésitez pas à lui renouveler chaque jour votre amour. Si quelque chose ne va pas, Nylathria, ne gardez pas cela pour vous, dites-le-lui, car la rancœur est la mort de l'amour. Il faut ouvrir son cœur au pardon car le pardon est une grande force, une grâce de la Mère. Il faut pardonner comme Elle nous pardonnera. Il faut être fort pour pardonner à sa femme, à son mari, mais chaque effort donné pour celui ou celle que l'on aime fait fructifier le bonheur dans le couple, l'amour s'en trouve raffermi, la vie facilitée. La fidélité et la durée se construisent dans le dialogue et le pardon.

« Vous voulez vous aimer comme au premier jour tout le long de votre mariage ? Beaucoup en ont le désir mais peu s'en donnent les moyens. Comme la croissance d'une plante, l'amour dépend des soins qu'on lui donne. Nylathria, Erendriel, cherchez le bonheur l'un de l'autre dans Mère Nature et votre mariage sera un avant-goût du bonheur éternel au ciel.

« Mes frères, avec Nylathria et Erendriel nous avons écouté la Parole de la Mère, qui a révélé tout le sens de l'amour. Le mariage suppose que les époux s'engagent l'un envers l'autre sans y être forcé par personne, se promettent fidélité pour toute leur vie et acceptent la responsabilité d'époux et de parents. Nylathria et Erendriel, est-ce bien ainsi que vous avez l'intention de vivre dans le mariage ?

–Oui, répondirent les deux futurs mariés d'une seule voix.

La princesse n'avait d'autre choix que d'accepter si elle voulait sauver l'empire. Son futur époux apporterait une aide conséquente qu'ils ne peuvent négliger. Pour Ardreth.

–Devant tous ceux qui sont ici et en présence de Mère Nature, échangez vos consentements.

Les deux jeunes gens se firent face, les mains jointes, les yeux dans les yeux.

–Moi, Erendriel, je te reçois, Nylathria, comme épouse et je te promets de te rester fidèle dans le bonheur et dans les épreuves, dans la santé et la maladie, pour t'aimer jusqu'à la fin de mes jours.

–Moi, Nylathria, je te reçois, Erendriel, comme époux et je te promets de te rester fidèle dans le bonheur et dans les épreuves, dans la santé et la maladie, pour t'aimer jusqu'à la fin de mes jours.

Alors qu'ils récitaient ces paroles qu'ils avaient apprises par cœur, le sage Lamruil enroulait de ses mains frêles un ruban autour de leurs mains.

–Par ce ruban sacré je scelle cette union.

Sur un coussin en velours on apporta les deux alliances en or blanc que les deux époux échangèrent.

–Par ces anneaux vous scellez cette union.

La salle retenait son souffle, n'attendant plus que la dernière chose.

–Et par ce baiser, vous scellerez votre amour.

Alors que les deux jeunes mariés approchaient leurs visages, cette vision se dissipa pour laisser place à une bien différente.

Sur leurs montures, Nylathria et Erendriel, à la tête de tout un cortège, approchaient de plus en plus de leur but. La jeune femme était tout sauf ravie de voyager sur les Terres de l'Aube. La guerre avait beau être finie, ses traces n'avaient pas été effacées.

–Je n'en reviens toujours pas que ce soit à moi que Père ait demandé de se rendre à Irindor, pestait-elle.

Elle ne faisait que ruminer depuis que l'empereur l'avait chargée d'être émissaire sur les Terres de l'Aube. Il savait pertinemment qu'elle haïssait les humains, pourquoi l'envoyer elle ?

–Tu sais parfaitement bien que s'il avait pu, il aurait fait autrement, répondit Erendriel. Belanor est chez les demi-elfes et Lorsan doit rester à Gaaldorei. Et puis c'est un honneur que de pouvoir signer le traité de paix.

–Parles pour toi, tu es bien plus diplomate que moi.

–Mais tu es la fille de l'empereur et une Guerrière du dragon.

Elle regarda un instant celui qui, quelques années plus tôt, était devenu son époux. Cette guerre s'était terminée grâce au sacrifice qu'elle avait fait, Ardreth pouvait reposer en paix.

–On dit que le nouveau roi de l'Aube est un enfoiré finit, lança-t-elle, certaines rumeurs disent même qu'il a empoisonné son père pour accéder au trône.

–Ne dis pas de stupidités pareilles, fit Erendriel en tournant la tête vers elle, tu vas nous attirer des problèmes.

–Qu'il m'en cherche et je le fais rôtir sur place, menaçait-elle. Tu dois bien avouer que c'est étrange, peu de temps après la fin de la guerre, le roi Hunter meurt. Il y a de quoi se poser des questions.

–Je te conseille de ne pas te les poser à voix haute si tu ne veux pas déclencher une nouvelle guerre, surtout que nous arrivons à Irindor.

La capitale se dressait devant eux, semblable à toutes les grandes villes qu'ils avaient visités sur les Terres de l'Aube, à la différence que celle-ci devait être plus conséquente. Au loin, le palais se dressait devant eux, comme menaçant. Nylathria poussa son cheval vers l'avant, pressée de descendre de selle et d'en finir avec toute cette histoire.

Les portes de la ville étaient grandes ouvertes et ils furent accueillis par tous les habitants de la ville qui s'étaient amassés dans les rues dès qu'ils ont vu les étendards. On les ovationnait, les complimentait, on leur jetait des fleurs. Erendriel en saisit une, une rose, et l'offrit à Nylathria qui l'accepta en souriant. Tout n'était que spectacle et il était évident que son époux s'en sortait bien mieux qu'elle. En voyant toutes ces têtes d'humains, le visage d'Ardreth lui revenait à l'esprit. Assassins.

L'accueil dans la cour du château fut beaucoup moins bruyant mais tout aussi chaleureux. On aida Nylathria à descendre de sa monture, engourdie par les heures de voyage.

–Son Altesse impériale la princesse Nylathria Balsandoral et le Grand-Duc Erendriel Fenwynn, annonça le héraut lorsque le couple s'avança vers l'homme qu'ils pensaient être le roi.

–Vôtre Altesse, salua-t-il en lui baisant la main, Grand-Duc. Je suis le prince Durlan Vecralon.

–Nous sommes ravis de faire votre connaissance, répondit Erendriel en effectuant une rapide courbette.

–Je ne vois aucune trace du roi, prince Durlan, lança Nylathria sans cacher sa colère, votre cousin aurait-il oublié les règles de l'étiquette ?

Son époux resserra sa prise sur son bras pour lui faire comprendre de ne pas aller trop loin. Le prince ne releva pas et se contenta de sourire.

–Sa Majesté vous attend dans la salle du trône, déclara-t-il sans perdre son sang-froid, si vous voulez bien me suivre.

Il les invita à monter les marches, ce qu'ils firent sans se faire prier. Les portes du palais s'ouvrirent et ils entrèrent dans le bâtiment qui avait été décoré spécialement pour leur arrivée.

–Le voyage n'a pas été trop éprouvant ? Leur demanda le prince. Surtout avec votre condition madame. Je n'ai pas vu de voiture à l'extérieur, faire tout ce chemin à cheval à dû être une torture.

–Je n'ai eu de cesse de le lui répéter mais elle est butée, plaisanta Erendriel.

–Je suis enceinte, pas infirme, répliqua-t-elle froidement.

Erendriel avait l'habitude de ses sautes d'humeurs mais Durlan ne l'était pas. Du coin de l'œil, elle le vit jeter un coup d'œil à son époux, complètement démuni.

Ils arrivèrent finalement dans la salle du trône où, comme l'avait dit Durlan, le roi les attendait, entouré de toute sa Cour. On les annonça par tous les titres qu'ils possédaient et le souverain se leva de son trône pour venir à la rencontre du couple. Ils eurent l'honneur d'une courbette et d'un baise main pour la princesse.

–C'est un réel honneur que de vous recevoir ici à ma Cour, Vôtre Altesse, fit le roi. Et je suis heureux de voir que les rumeurs s'avèrent être vraies, votre beauté n'a pas son pareil. Et je me dois, bien évidemment, vous féliciter et vous souhaiter tout le bonheur du monde pour cet heureux évènement.

Elle posa les mains sur son ventre encore très peu arrondi.

–L'honneur est mien, Majesté, répondit-elle en lui accordant le sourire le plus chaleureux qu'elle avait en réserve. Et nous vous remercions, l'intérêt que vous nous portez nous touche.

–Cette guerre aura au moins eu quelques avantages.

Son sourire s'effaça immédiatement. Si elle ne se retenait pas, elle lui aurait collé une droite. Mais elle rassembla toutes ses forces et garda son calme. Erendriel, qui avait parfaitement vu le trouble de sa femme, intervint.

–Vôtre Majesté, le voyage a été épuisant et la condition de la princesse l'oblige à se reposer. Serait-il malvenu de vous demander si nous pourrions signer le traité immédiatement ?

–Bien entendu, je comprends parfaitement, fit le roi avant de se tourner vers des gardes. Allez chercher maître Pesara, dîtes-lui de venir avec le traité. Et faîtes installer une table et deux chaises.

Les gardes, après une rapide révérence, s'en allèrent du plus vite qu'ils le pouvaient.

–Venez donc, reprit le roi, je vais vous présenter ma famille. Voici ma mère, la reine douairière lady Eartha, mon frère et héritier le prince Marden, ma chère tante la princesse Eleine, sa fille lady Grayce et vous avez déjà fait connaissance avec mon cousin, Durlan.

–Nous avions hâte de faire votre connaissance Vôtre Altesse, roucoulait lady Eartha. N'est-ce pas Berengar ?

Le roi acquiesça.

–La hâte était partagée, répondit poliment Erendriel tout en étant conscient de la fausseté de ses propos.

–J'aurais une question, si vous me le permettez Majesté, intervint Nylathria.

–Bien entendu.

–Excusez-moi si je vais vous paraître grossière, là n'est pas mon intention puisqu'après tout je ne connait que très peu de chose concernant vos traditions, mais pourquoi Durlan porte un titre princier alors que lady Grayce n'en possède pas ?

Berengar eu du mal à avaler sa salive mais tenta de rester digne.

–Dame sa mère s'est arrangée pour qu'il en ait un, pour lui assurer une certaine sécurité.

La jeune femme s'apprêtait à renchérir lorsqu'un homme ventripotent fit son entrée avec leur accordant une courbette. Le fameux maître Pesara. La table fut dressée, le traité délicatement posé dessus et deux chaises furent installées devant. Nylathria et Berengar s'assirent et tous deux, plume à la main, signèrent ce foutu traité de paix qui assurait la fin de la guerre entre les humains et les elfes. Pour Ardreth.

De nouveau, la scène s'effaça devant ses yeux mais cette fois, aucune autre ne vint la remplacer. Nylathria avait le cœur au bord des yeux et le ventre serré. Revoir toute sa famille lui avait fait bien plus de mal qu'elle ne l'aurait pensé. Et elle ne savait pas quoi penser de ce qu'elle venait de voir. Elle ne voulait pas de cette vie, pas d'un mariage ou d'un enfant, pas de règles et d'étiquette. Son cœur se serra davantage lorsqu'elle réalisa que dans tous les cas, Ardreth ne survivait pas.

La lumière émanant de la porte se dissipa et dans un long grincement, elle s'ouvrit. Il fallait croire qu'elle avait réussit ce test. Face à elle, la pièce qui gardait les œufs de dragon se révélait être exactement comme dans ses souvenirs. Tous sur un socle, les œufs étaient tous différents, tant par la taille que par la couleur. Elle entendit ses compagnons avancer vers elle dans un silence de mort. Elle ne voulait pas les entendre parler de ce qu'ils venaient de voir, elle ne voulait pas en parler.

–Dépêchons-nous, lança-t-elle, il faut partir d'ici avant la tombée de la nuit. Apportez les sacs !

Elle s'avança et s'empara du premier œuf qu'elle vit, un œuf bleu bien plus gros que les autres. Deux des gardes elfes s'approchèrent, ouvrant le sac en épais tissu et elle le glissa à l'intérieur. Elle avança vers le suivant, un tout petit rouge, et le posa délicatement sur l'autre. Elle recommença avec un vert, un autre bleu et un doré jusqu'à ce que le sac soit rempli. Les autres regardaient attentivement les œufs, complètement fascinés. Puis elle vit Durlan approcher sa main de l'un d'eux.

–Ne touche pas ! S'exclama-t-elle en accourant vers lui et en lui prenant le poignet. Cela te brûlerait la main.

Ses yeux croisèrent ceux du jeune homme et son cœur se serra.

–Si seulement les marqués peuvent toucher les œufs, comment faîtes-vous pour le baptême ? Demanda Torestrin. Je n'ai vu aucun elfe avec la main brûlée, pourtant vous devez bien savoir quel enfant est amené à devenir un Guerrier du dragon.

Elle détourna rapidement le regard et s'empara de l'œuf argenté que Durlan était sur le point de toucher pour le mettre dans le second sac.

–On prélève une goutte de sang sur tous les bébés lors du baptême et on la verse sur un œuf au hasard, répondit-elle en prenant un œuf violet. Si le sang brûle, l'enfant ne peut pas devenir un dragonnier mais si la goutte de sang roule le long de l'œuf, alors on lui fait toucher tous les œufs pour savoir lequel va éclore et devenir son dragon.

–Vous ne choisissez pas votre dragon ? Demanda Azlore.

–C'est le dragon qui nous choisit, l'œuf ne s'ouvrira qu'au contact de son dragonnier. La plupart des œufs présents ici ont des centaines voire des milliers d'années, leur dragonnier n'est tout simplement pas né.

Elle remplit le sac avec un œuf vert, un autre jaune et un dernier orange. C'était là le maximum qu'ils pouvaient prendre avec eux, Castien devrait s'en contenter.

–Je ne vois pas d'œufs blancs, est-ce normal ? L'interrogea Avedelis.

–Les dragons blancs sont assez rares, surtout depuis le Deuxième Âge à cause de la Danse de feu. Les humains ont découvert que les os de dragons pouvaient faire d'excellente armes et se sont mis à les chasser. Un magicien avait même mis dans la tête du roi des Terres d'Ambre que ceux des dragons blancs avaient en plus des propriétés magiques. Le frère de l'empereur Ruvaen, le prince Airdan, qui avait perdu son dragon à cause d'une maladie qui touchaient les bêtes à l'époque, pensait que les dragons blancs avaient ramené cette maladie puisqu'ils semblaient immunisés. Aveuglé par la douleur d'avoir perdu son dragon, il a rallié de nombreux Guerriers et ils se sont mis à chasser les dragons blancs, ce qui a déclenché une guerre civile qu'on a appelé par la suite, la Danse de feu. Maintenant que vous avez eu votre instant Histoire, on dégage d'ici.

Elle laissa les sacs à deux des gardes et se dirigea de toute hâte vers la sortie, sans se soucier de savoir si les autres suivaient ou nom. Elle voulait mettre le plus de distance entre elle et Gaaldorei, et au plus vite. 

La porte de la salle des œufs se referma d'elle-même derrière le petit groupe qui remonta vivement à la surface. Ils traversèrent la cour intérieure, les couloirs, passèrent une dernière fois dans la salle du trône avant de sortir de l'enceinte du château. Mais Nylathria s'arrêta soudainement sur le pont-levis. Comme le palais avait été construit sur une colline, ils avaient une vue imprenable sur les plaines qui encerclaient la ville et la forêt au loin. Or, au lieu de ne voir que de l'herbe et des arbres, elle remarqua des silhouettes noires se déplaçant rapidement dans les bois.

–Est-ce que vous voyez ça ? Demanda-t-elle.

Torestrin mit sa main en visière pour ne pas être éblouit et plissa les yeux comme pour affiner sa vue.

–Si je ne me trompe pas, ce sont des personnes, fit-il.

Avedelis traça une rune dans l'air et ses yeux prirent une teinte violacée étrange.

–Ce sont des orques ! S'exclama-t-elle.

–Quoi ?! S'écria Murzol. Mais les Terres des orques sont à l'autre bout du continent !

–C'est impossible, ajouta Durlan, ils n'auraient jamais pu traverser les Terres de l'Aube, Berengar ne l'aurait pas permis.

Alors que ses compagnons dégainaient, elle observait attentivement le paysage. C'est alors qu'elle le vit, un homme aux longs cheveux blancs et aux yeux noirs. Son cœur se mit à battre la chamade et elle se tourna vivement vers les deux gardes en possession des œufs.

–Les elfes noirs ! Cria-t-elle. Ces orques sont à leur service. Vous deux, prenez les galeries souterraines et sortez le plus vit possible de l'empire. Ne vous arrêtez jamais de courir, ils ne doivent pas récupérer les œufs. Ne vous arrêtez pas avant d'avoir atteint Enkawa et d'avoir remis les sacs à l'empereur, est-ce que je suis claire ?

–Oui Vôtre Altesse.

–Bien alors courez. Maintenant !!

Ils firent demi-tour et prirent leurs jambes à leur cou et rejoignirent le palais. Nylathria dégaina son épée en or blanc et se précipita dans la ville, suivie de ses compagnons. Ils n'eurent pas à courir longtemps, les orques avaient déjà pénétré la ville. L'un d'eux se jeta sur elle, soulevant avec aisance sa masse qu'il abattit sur elle. Son épée rencontra l'arme de son ennemi qui fut surprit de ne pas voir sa lame se briser. Profitant de son moment d'inattention, elle lui donna un coup de pied dans les parties sensibles et abattit son glaive sur l'orque, entaillant profondément son visage de l'oreille jusqu'à la bouche.

Le second lui donna un peu plus de fil à retorde et elle dut effectuer plusieurs pirouettes avant d'arriver à atteindre son ennemi et le blesser à l'arrière du genou. L'orque tomba au sol et elle planta sa lame dans son crâne avant de se retourner vivement et faire face à un autre assaillant, bien plus rapide et agile que les deux précédents. Elle contra chacune de ses attaques mais n'arrivait pas à en placer une. Il tenta se la déstabiliser en essayant de la frapper au visage mais elle évita le coup de justesse. Elle fit quelques pas de côté, retrouvant son équilibre et réussit enfin à l'attaquer, enchaînant les coups aussi rapides qu'efficaces jusqu'à ce qu'elle réussisse à planter son épée dans l'abdomen de l'orque.

Un éclair orangé zébra le ciel et lorsque la jeune femme leva les yeux, remplis de sang, elle vit Olvaar déverser des torrents de flammes sur les ennemis. Elle jeta un coup d'œil vers la falaise au loin, l'elfe noir était toujours là et observait attentivement le dragon qui continuait de brûler tout ce qui se trouvait sur son passage. Elle vit Durlan abattre un orque et elle réalisa qu'il était en plein dans la trajectoire d'Olvaar. Elle se précipita alors vers le jeune homme et se jeta sur lui, tombant tous les deux quelques mètres plus loin. Une seconde plus tard, elle sentit derrière elle la chaleur des flammes.

–Merci, souffla Durlan.

Elle l'aida à se relever tout en levant les yeux vers l'elfe noir.

–C'est lui qui doit être tué, lança-t-elle.

Le jeune homme se retourna et posa les yeux sur l'elfe noir qui semblait les observer de loin. Du coin de l'œil, elle vit un orque accourir vers eux. Elle s'empara de son poignard, le prit par la lame et le lança vers l'ennemi, qui l'accueillit entre les deux yeux.

–Tu es folle, s'exclama Durlan en regardant l'orque s'effondrer. Tu ne peux pas affronter un elfe noir toute seule !

–Non seulement je peux mais je vais le faire.

Elle tourna les talons et courra vers la sortie de la ville, récupérant son poignard au passage.

–Nyla ! Hurlait Durlan dans son dos.

Elle savait qu'il allait la suivre alors elle posa la main sur un buisson sauvage qui avait poussé contre une maison, en absorba la force et le fit grandir pour former un mur assez épais pour le retenir quelques minutes. Sur son passage, elle abattit quelques orques qui tentaient de la retenir. Une fois à l'extérieur, elle courut vers la falaise et elle se rendit compte qu'elle était protégée par une sorte de bulle. Elle se retourna à temps pour voir sur les remparts Azlore les mains tendues vers elle et Avedelis qui le protégeait en repoussant les orques avec la magie.

Encore plus déterminée, et à présent hors d'atteinte de la horde d'orques qui déferlait vers la cité, elle se rua vers la falaise, les yeux rivés sur l'elfe noir qui la regardait arriver. En bas, elle fit pousser un arbre pour la faire monter, s'accrochant avec rage aux branches. Mais arrivée sur la falaise, elle ne trouva personne. Au loin, elle vit Durlan et l'un des gardes accourir vers elle mais il n'y avait plus aucun signe de l'elfe noir. Elle regarda partout, tourna autour d'elle, le cherchant entre les arbres.

C'es alors qu'une main s'empara de son bras et la força à se retourner. Elle fit alors face à l'elfe corrompu. Elle fut absorbée par ses grands yeux noirs cerclés de veines de la même couleur. Les longs cheveux blancs de l'homme s'animèrent et il se mit à murmurer des paroles en langue elfique, mais elle ne comprenait pas certains mots, comme s'il les inventait. Il s'approcha un peu plus d'elle et s'empara de sa main marquée, continuant à psalmodier des paroles incompréhensibles. Elle ressentit alors une douleur aigüe dans sa main, qui se propagea dans tout son bras et au loin, elle entendit Olvaar crier de douleur à sa place. Elle n'arrivait plus à ouvrir la bouche, à faire le moindre geste, comme hypnotisée. Ce n'est qu'à ce moment-là que l'homme se mit à parler d'une façon compréhensible, toujours en elfique.

–Tu es ma descendante, tu es moi et je suis toi. Ensemble, nous pourrions faire régner la paix de la grande Mère et rétablir la vérité.

Il lâcha sa main et disparut, ne laissant rien de son passage, si ce n'est une pierre de jade gravée d'une rune qu'elle ne connaissait pas. Le cœur battant et la respiration saccadée elle regarda longuement la pierre sans comprendre pourquoi il le lui avait donné.

–Nyla !

Elle leva la tête et vit Durlan et le soldat accourir vers elle. Discrètement, elle cacha la pierre avec les colliers de sa mère. Le jeune homme la prit dans ses bras et la serra fort contre lui.

–Tu me fais mal idiot, murmura-t-elle à bout de souffle.

Elle s'écarta pour la laisser respirer et prit son visage entre ses mains, vérifiant si elle allait bien.

–Tu m'as fait une de ses peurs ! J'ai cru qu'il était en train de te tuer quand j'ai entendu Olvaar hurler comme ça. C'est toi qui es stupide ma parole ! Qu'est-ce que tu cherchais à faire ?

Elle ne savait quoi répondre. À dire vrai, elle n'avait réagi qu'à une pulsion et n'arrivait même pas à comprendre ce qu'il s'était passé.

–Nyla, où est-il ? S'inquiétait de plus en plus Durlan.

–Il est parti, souffla-t-elle, et je n'ai rien pu faire.

Il semblait soulagé et l'enlaça de nouveau, plus tendrement cette fois-ci. Elle lui rendit son étreinte, le regard fixé sur l'endroit où se tenait l'elfe noir.

–Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Demanda Murzol en débarquant comme une furie. Pourquoi est-ce qu'ils se sont tous écroulé d'un seul coup ?

Nylathria mit fin à leur étreinte et se dirigea vers le bord de la falaise. Tous les orques étaient au sol, sans vie. De cette hauteur, ils avaient l'air de petites poupées en tissu. Elle entendit Olvaar atterrir près d'elle.

Tout va bien ? Tu as été touchée à la main.

–Oui je vais bien. Il va simplement falloir que je fasse des recherches en arrivant à Irindor.

Elle sorti la pierre et la regarda de nouveau, les paroles de l'elfe noir tournant en boucle dans sa tête. Tu es moi et je suis toi. Ensemble, nous pourrions faire régner la paix de la grande Mère et rétablir la vérité. Quelle vérité ? 

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