Chapitre 10
Deux semaines plus tard, une grande soirée masquée avait été préparée par le palais pour fêter les fiançailles de la princesse d'Angleterre et le prince de Norvège. Ils étaient donc mis à l'honneur et pour cela, chacun avait invité plusieurs de leurs amis. Claire avait hésité longtemps à inviter la famille d'Egerton à son bal d'annonce. Au bout d'un long moment à fixer l'enveloppe, elle l'avait remise à un majordome qui lui-même l'avait confiée à un messager qui était parti sonner à la maison du baron de Cheshire. Un valet l'avait récupérée puis l'avait apportée à son maître, le baron qui l'avait prise en remerciant William. Il avait ensuite ouvert la lettre, la lut rapidement puis appela son épouse pour la transmettre. La baronne sourit en voyant le cachet royal et cria de joie en embrassant son époux avant de courir trouver ses enfants.
– Mes enfants, nous sommes invités au bal des fiançailles de la princesse ! Aliénor, ce sera peut-être ce soir que tu trouveras ton mari. James, ta fiancée n'est pas invitée, comme elle n'est pas encore ton épouse, elle ne peut venir.
– Bien entendu. Je vais la prévenir dès à présent pour lui annoncer que je ne serai pas disponible.
Et à partir de ce moment, l'effervescence fut présente dans toute la maisonnée jusqu'au soir du bal. Le baron de Cheshire était pour une fois venu avec sa famille, profiter du peu de temps libre qu'il avait. Ils étaient ainsi tous dans la calèche, prêts à se fondre parmi la foule invitée.
Quand ils descendirent du véhicule, la baronne et son mari s'avancèrent suivis de leurs enfants. Aliénor tira sur la manche de son frère aîné et lui confia sa peur quant à se mélanger parmi d'autres personnes plus nobles qu'eux. James prit le bras de sa sœur et ensemble, ils s'arrêtèrent pour discuter un peu, laissant leurs parents avancer jusqu'à l'entrée.
– Écoute Ali, c'est normal d'avoir peur de ne pas plaire, d'avoir peur de se mélanger aux autres. Mais tu es une Cheshire, tu es courageuse et tu as la volonté en toi. Si moi je l'ai fait, tu peux accomplir ce moment difficile encore mieux.
Il lui sourit et la serra contre lui en murmurant des paroles réconfortantes. Puis leur mère les appela en leur faisant des grands signes pour leur dire de rentrer. Aliénor prit la main de James et ensemble ils coururent jusqu'à l'entrée.
Claire était aux bras de Friedrich, saluant un par un les invités, les remerciant de s'être déplacés pour la soirée. Tous la félicitaient pour ses fiançailles, demandant comment était la bague. Claire baissa les yeux et la fit tourner autour de son annulaire. C'était un énorme diamant, entouré lui-même d'autres petits diamants. Rendant la bague énorme sur ses doigts fins. Elle avait remercié son fiancé quand il la lui avait mise au doigt mais au fond, Claire la trouvait très laide cette bague. Elle était trop.... Trop.
– Chérie ? murmura le prince.
– Hmmmm ?
– La comtesse voudrait savoir comment est ta bague, dit-il en souriant.
– Oh oui, pardonnez moi comtesse j'étais dans mes pensées. Tenez regardez !
Elle tendit sa main que la comtesse prit rapidement pour admirer avec un grand Oh de surprise. Elle la félicita de nouveau et la remercia avant de s'éloigner avec son mari, petit et trapu. Claire sourit en l'entendant rechigner sur sa bague à elle quand elle voyait celle de la princesse d'Angleterre. Son sourire disparut rapidement lorsqu'elle vit James et sa sœur marcher au centre de la pièce, un verre de champagne à la main. Elle retint son souffle et le suivit des yeux avant de le perdre dans la foule.
– Claire, tout va bien ? s'inquiéta Friedrich en la prenant par l'épaule.
– Je... J'ai juste besoin d'air quelques instants.
La jeune fille secoua la tête et s'avança rapidement vers les portes fenêtres qui donnaient sur le balcon. Elle poussait les personnes qui se trouvaient en face d'elle en s'excusant. Une fois arrivée dehors, elle trottina jusqu'à la balustrade et se pencha en avant en inspirant pour prendre de l'air dans ses poumons. Elle ferma les yeux et laissa couler ses larmes. Que lui avait-il pris de l'inviter ce soir ? Pourquoi avait-elle fait ça ? Elle se trouvait stupide maintenant. Elle n'osait plus affronter son regard. Claire n'avait pas revu James depuis la scène du parc où elle était tombée à l'eau. Rien n'était parut dans les journaux le lendemain, heureusement mais elle savait que beaucoup de personnes l'avaient vue.
– Claire... ?
Elle releva la tête en entendant la voix familière. Il l'avait suivie de nouveau sur le balcon. A croire que c'était leur lieu de rendez-vous préféré. La jeune fille ne se retourna pas et attendit que James s'avance jusqu'à côté d'elle. Ce qu'il fit.
– Je vous ai vue quitter la pièce comme si vous n'alliez pas bien.
– Tout va pour le mieux, je vous remercie. Excusez-moi, dit-elle en se retournant et en faisant quelques pas vers la salle de réception.
James l'attrapa brusquement par le bras pour la remettre face à lui. Ils se regardèrent quelques minutes sans rien dire avant que Claire ne se dégage.
– Je ne sais pas ce que je vous ai fait pour que vous soyez aussi distante mais j'aimerais avoir des explications, murmura James froidement en croisant ses bras.
– Ah ! Voilà où nous en arrivons. Vous les hommes vous ne vous rendez jamais compte de rien n'est-ce pas ?!
– Si vous les femmes pouvaient nous orienter sur le pourquoi du comment vous êtes sans cesse en colère contre nous, cela simplifierait les choses. Ne croyez-vous pas princesse ? répondit James en lui prenant la main et en la serrant pour éviter qu'elle ne s'enfuit.
– Vous aimez bien affirmer votre autorité n'est-ce pas ? Vous êtes tous pareils ! Toujours à dire que c'est de notre faute. Essayez d'abord de vous remettre en question Monsieur d'Egerton.
– Mais enfin, je vous demande ce qui se passe et pourquoi vous êtes aussi distante. Et vous, vous me demandez de me remettre en question. Nous sommes en plein dialogue de sourd j'ai l'impression. Est-ce à cause de l'autre jour au parc ?
– Enfin vous avez compris. Nous sommes sur la bonne voie dis donc.
D'un geste sec, James la rapprocha de lui et la bloqua entre son torse. Posant ses mains autour de sa taille, il la maintint contre lui, les yeux chargés de colère.
– Vous êtes peut-être une princesse mais vous êtes aussi humaine. Être polie ne vous est pas exclu. Il faudrait que quelqu'un vous apprenne les bonnes manières.
Claire entrouvrit les lèvres, sa respiration et les battements de son cœur s'accélérant. Elle regardait ses yeux puis sa bouche, espérant au fond d'elle qu'il l'embrasse. Elle s'humidifia ses lèvres et ferma à moitié les paupières, attendant ce qui allait se passer.
De son côté, James observait la jeune fille. Il était en train de réfléchir à toute vitesse pour savoir si oui ou non il allait l'embrasser. Il se pencha légèrement en avant, effleura ses lèvres avant de reculer contre la rambarde en la lâchant.
– Je... Je n'ai pas le droit.
Le nuage de passion qui avait entouré Claire avait soudainement disparut et elle reprit rapidement ses esprits. Elle sentit les larmes monter dans ses yeux et elle retenait à grand peine de ne pas les laisser couler.
– Vous voyez, c'est tout ceci que je vous reproche. Vous tentez quelque chose et au final vous reculez comme un lâche, vous ne terminez pas ce que vous avez commencé. Je pensais que vous alliez vous battre pour moi. Et au final, quelques semaines plus tard, j'apprends que vous allez en épouser une autre.
– Me battre pour vous ? Claire, vous rendez vous compte de ce que vus dites ? Comment pouvais-je deviner que vous souhaitez que je me batte pour vous épouser. Vous l'avez dit tellement de fois et d'une manière que j'ai compris autre chose.
– Et qu'avez-vous compris alors ?
– Que vous ne vouliez pas de moi, que vous étiez réservée à un autre avec un rang beaucoup plus élevé. Tout simplement que vous ne m'aimiez pas !
Claire s'avança jusqu'à lui et posa les mains sur son gilet en le regardant, les larmes coulant à présent le long de ses joues.
– Je ressens des choses pour vous. Le premier soir où je vous ai vu, vous étiez mon sauveur. Et j'étais si heureuse de vous revoir à la garden party et ainsi de suite. Nous passions du bon temps ensemble et je voulais que ça dure plus longtemps. Je vous en prie annulez vos fiançailles et faites moi la cour. Montrez à tous qu'un baron peut conquérir le cœur d'une princesse !
James hésita un très court instant. S'il faisait cela, il ruinerait la réputation de Mélanie. Plus personne ne voudrait l'épouser. S'il choisissait Claire, il n'était même pas sûr d'arriver jusqu'au mariage. Son caractère l'exaspérait. Plus il passait du temps avec elle, plus il se demandait s'il avait bien fait de suivre son cœur. Au fond, peut-être qu'il la désirait simplement.
– Je ne peux pas. Je suis désolé.
Claire recula de quelques pas, blessée. C'était la première fois que quelqu'un la rejetait.
– Comment... ?
– Vous l'avez si bien dit. Vous êtes une princesse, je ne suis qu'un baron. Nous venons de deux mondes différents. Et je ne peux laisser Mélanie. Je lui ai promis quelque chose, j'accomplirai mon devoir. Je suis un homme d'honneur.
– Vous ne l'aimez pas !
– Peut-être pour l'instant, mais avec le temps qui sait. Mes parents ne s'aimaient guère au début. Et maintenant, ils sont fous l'un de l'autre. Si je vous fais la cour, je ne suis même pas sûr de convaincre vos parents de vous laissez m'épouser. Car je suis un roturier à leurs yeux. Votre Altesse, je vais à présent rejoindre ma famille dans la salle de réception. Je ne vous importunerai plus et ne chercherai plus contact avec vous. J'espère que vous en ferez de même.
Il s'avança jusqu'à une porte-fenêtre. Arrivée à l'embrasure, il s'arrêta, baissa la tête et inspira pour reprendre contenance. C'était la première fois qu'il brisait le cœur d'une jeune fille de cette manière. Mais il fallait lui faire comprendre que c'était trop tard.
Claire le regarda partir, le cœur en mille morceaux. C'était donc ça se faire rejeter. Par un baron qui plus est. Elle tomba à genoux et se mit à trembler involontairement, reniflant peu gracieusement. Friedrich arriva pile à ce moment et la vit prostrée par terre. Il courut vers elle et l'aida à se relever.
– Mais enfin Claire, que s'est-il passé ? Pourquoi étiez-vous par terre ?
– Je... Je suis tombée. J'ai trébuché et je suis tombée. Je ne me sens pas très bien. Pourriez-vous me ramener jusqu'à ma chambre je vous prie ?
Le prince acquiesça et l'aida à traverser la salle sans qu'on les gêne trop. Une fois à l'intérieur de la chambre, la gouvernante arriva et prit le relais du prince. Elle le remercia et lui pria de partir. Claire le regarda, et le remercia encore une fois avant de s'allonger sur son lit.
Friedrich resta seul, sur le seuil de la porte, à regarder le panneau en bois blanc devant lui.
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