17
"Stanley, trésor ?"
Amélia s'approche et passe ses mains dans mes cheveux avant d'aller ouvrir les rideaux.
"Ton réveil n'a pas sonné ?"
Je fronce les sourcils, engourdi par le sommeil et finit par tendre la main pour attraper mon téléphone. J'essaye de comprendre les chiffres que je vois, difficilement, et finis par demander en comprenant que ma concentration était toujours au lit:
"J'ai du retard ?
-Je pense que tu vas rater ton bus...mais tu auras peut-être le prochain si tu te dépêche."
Ma première pensée est de lui dire que je suis malade et que je voudrais rester à la maison. Ce qui, en soit, est plutôt plausible sachant que je ne leur mens pas vraiment là-dessus. Et puis, ma mémoire complètement collée et fondue avec la fatigue commence à laisser des bribes de souvenirs sortir pour chatouiller ma motivation : Alice. Je prends mon téléphone mais aucun message, sauf un nombre incalculable de notifications provenant du groupe de classe Insta que je décide d'ignorer et d'effacer. D'un côté ça me rassure, ça prouve qu'il n'est pas si tard que ça. -Ou en tout cas, qu'Alice ne vient pas si tôt.
Je me lève et embrasse Amélia sur le front, avant d'aller me préparer pour prendre le bus, passant par la douche.
Lorsque je suis sur le point de partir, elle m'attrape par la capuche avec une moue mécontente.
« Tiens, tu allais l'oublier. »
Elle me tend un petit sachet en papier kraft, le genre qui contient quelque chose d'appétissant. Je commence à sourire en levant les yeux vers elle.
« C'est deux croissants, pour toi et ton copain. Dis-lui qu'il est le bienvenue s'il a besoin. »
Attendri, je la prends dans mes bras pour embrasser le haut de son crâne, puis m'en vais après l'avoir remerciée environs quinze fois, pour être sûr qu'elle n'oublie pas durant la journée. Ensuite seulement, je me mets en route vers l'arrêt de bus.
Amélia est plutôt petite. En tout cas, plus que moi et Gale. Elle est donc marquée d'une brûlure, mais au-delà de ça, elle a des cheveux d'un joli blond, plutôt long, et d'un nez en trompette. Son visage est fin et creusé mais avec une peau lisse, sans ride. Si elle atteint ses quarante-cinq ans, elle n'en paraît que trente et quelques. Elle est aussi douce et délicate qu'elle en a l'air, que ce soit par ses mouvements et ses mains fines que par sa voix. C'est donc amusant de la voir à côté de son mari qui est l'exact opposé.
Je glisse le sachet avec les croissants dans mon sac à dos alors que je rentre dans le bus, constatant qu'absolument rien n'a changé. Jackson est comme d'habitude à la même place, ce qui me rassure. Les bleus que je lui avais déjà offert suite à notre ancien échange se mélangent bien avec les nouveaux, et il faut admettre qu'esthétiquement il ferait presque peur. Ce qui est paradoxalement un peu bête, puisque s'il en a autant c'est qu'il a perdu, donc qu'il est moins fort que moi. Ça ne fait pas de lui quelqu'un d'inoffensif, mais en tout cas avec la même capacité à se battre qu'un bigorneau malade. Ceci dit, si ses coups sont prévisibles, ils n'en restent pas moins violents : Les droites qu'il m'a données sont plutôt mémorables par les marques qu'elles laissent. Le problème c'est qu'il les distribue sans réfléchir, comme des bonbons le soir d'Halloween. Enfin bon. Je fais sûrement le malin parce qu'il m'attaque quand je m'y attends, mais Amélia a raison : Le jour où je baisserai la garde, je passerai un sale quart d'heure.
Je glisse mes écouteurs dans mes oreilles, me berçant sur une playlist en aléatoire. Personne ne vient me déranger, et j'en conclus que c'est donc un trajet relativement tranquille -relativement car le conducteur continue de rouler comme s'il était en cavale.
Les minutes passent avant qu'il se gare, et que Jackson se jette dehors en tigre sauvage. Plus je le regarde, plus je le trouve pathétique, que ce soit ses cheveux blonds plaqués contre son crâne, ses yeux prêts à jeter des éclairs et sa langue de serpent, rien chez ce garçon me retient de le gifler. Il n'est pas très grand mais sa musculature plutôt développée compense, ce qui semble impressionner pas mal de gens. Mais pas moi. Je me rappelle qu'en début d'année on m'avait incité à rejoindre un club de sport, même si je ne me souviens pas bien lequel, et un de leur argument était qu'il en faisait partie. Je suppose que j'aurais dû accepter, être accompagné par un terminal dans ma scolarité avec une popularité comme la sienne aurait sûrement été un honneur pour bien des gens...Mais étant donné que je passe mes soirées à me battre avec lui, je ne préfère pas devoir le supporter des heures supplémentaires en me retrouvant dans des vestiaires avec lui.
Quelle horreur.
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