Séparation
Quand la lune fut levée et que les étoiles commencèrent à briller dans le ciel, je me glissai dans sa chambre comme à mon accoutumée. J'éteignis la flamme de la bougie. J'imaginais sans mal un sourire se dessinant sur son visage, car il savait que c'était le signe que j'étais entré dans la pièce.
Je me collais contre son corps, avide de ce contact qui m'avait tant manqué ces quinze derniers jours. Ses mains se glissèrent sous mes vêtements pour me parcourir, impatientes. Ma peau frémissait sous les caresses de ses doigts. Il commença à dénouer ma robe.
Je l'interrompis et le fis basculer sur la couche qui se trouvait derrière lui. Puis, je me mis à l'embrasser longuement et voluptueusement pendant que je dissimulais sans qu'il ne le voie, une pilule de "la brume des désirs" entre le matelas et la tête de lit. Je me relevai et enlevai mes vêtements en même temps que les siens. Profitant que j'étais à califourchon sur lui, il se redressa à demi pour poser sa bouche sur ma poitrine et commença à mordiller les deux taches sombres qui l'ornaient. Le pincement de ses dents déclencha des ondes de chaleur jusqu'à mon bas-ventre. Quand le plaisir me fit gémir, ses lèvres débutèrent une danse lente et sensuelle sur le reste de mon corps. Il me renversa sur le dos et finit son errance entre mes cuisses que j'écartai pour lui laisser tout le loisir de les parcourir. Je sentais l'humidité de sa langue sur ma peau. Les sillons qu'elle traçait m'embrasaient de désir, à tel point que je ne pus le contenir. Quand sa bouche s'empara de ma virilité en pleine ascension, un soupir de contentement s'échappa de mes lèvres et je me cambrai pour m'offrir à son brûlant supplice. J'attrapais sa chevelure et appuyais sa tête pour qu'il m'ensevelisse complètement au creux de sa passion.
" Il semblerait que moi aussi, je t'ai manqué. " Susurra-t-il entre deux va et viens. Je sentais mon extrémité palpiter et se durcir. La douleur de me retenir me rendait de plus en plus fébrile. Je ne savais pas combien de temps je pourrais encore tenir. Il souleva mes jambes pour les poser sur ses épaules.
L'un de ses doigts se glissa en moi. Sa bouche marqua une hésitation.
" Tu t'es préparé ? Je ne sens aucune résistance ! "Son rire résonna à mes oreilles.
"Tu ne voulais pas perdre de temps à ce que je vois ... Alors, autant ne pas te décevoir..."
" Je te préviens que ce soir, j'ai envie d'un amant entreprenant, extrêmement vigoureux et surtout endurant, car nous avons plusieurs semaines à rattraper et j'exige que tu m'honores jusqu'à l'aube ! " Lâchais-je en même temps qu'un cri de jouissance lorsqu'il me fit sien. Mes jambes avaient glissé de chaque côté de sa taille.
" Jusqu'à l'aube ? Le crépuscule vient à peine de tomber ! Ne présumes-tu pas de ta propre résistance ?"
Ses coups de bassin me pénétraient de plus en plus profondément. Je m'emparais des barreaux du lit. Je me sentais prisonnier du rythme qu'il m'imposait et le feu qu'il déchaînait en moi était en train de me consumer de l'intérieur. Des gouttes de transpiration avaient commencé à recouvrir mon corps, pendant que des vagues de plaisir me rendaient à moitié fou de désir. Entre deux halètements d'extase, je réussis à lui répondre.
" Au lieu d'user ta salive en paroles inutiles, emploie ta bouche d'une meilleure façon. Je suis certain que tu peux être imaginatif !"
Un rire franc, direct et joyeux, éclata dans l'obscurité.
" Tes désirs sont des ordres. "
Ses lèvres se scellèrent aux miennes, pendant que ses mains audacieuses avaient repris une errance jusqu'à mon membre dressé. Mon sang bouillonnait. Mes sens et ma passion étaient tellement exacerbés que j'atteignis l'orgasme très rapidement. Ma jouissance était si grande que je me cambrais de bonheur en réclamant encore plus.
J'espérais de tout mon cœur que le reste de la nuit serait aussi intense, car la chute finale n'allait laisser aucun d'entre nous indemne.
Je ne fus pas déçu. Feng Wu se montra à la hauteur de mes attentes.
Les heures que je passais dans ses bras me procurait un plaisir indescriptible, mais le moment était venu d'appliquer mon plan. Mes doigts parcouraient son corps. Je voulais m'imprégner une dernière fois de lui. Mes jambes encerclaient sa taille, ses mains étaient posées sur l'arrondi de mes fesses et leur donnaient une impulsion qui accentuait le mouvement de mon bassin au-dessus de son entre-jambes. Quand je sentis qu'il allait libérer son désir en moi, je m'emparai de ses lèvres et au point culminant de sa jouissance, je fis tomber au fond de sa gorge la pilule de "la brume des désirs" que j'avais dissimulée avant que je ne me déshabille. Il se mit à tousser.
"Chen Han, qu'est-ce que tu m'as fait avaler ?" s'exclama-t-il en tentant de me repousser.
D'un mouvement du poignet, j'allumais la bougie sur la table près du lit. J'étais toujours à califourchon sur lui et je le sentais en moi. Nous étions les yeux dans les yeux, à visage découvert. Des larmes coulaient le long de mes joues. Ses sourcils se plissaient pendant qu'il détaillait mon visage. Le sien reflétait l'incompréhension. Allait-il me reconnaître ? Cela n'avait pas d'importance puisque dans quelques heures, il aurait oublié tout ce que j'allais lui révéler.
"Chen Han ? Ne me dis pas que tu ... es l'un des leurs..." Il avait l'air désespéré.
Je sentais ses muscles se détendre. Il allait sombrer dans l'inconscience d'un instant à l'autre. C'était le moment ou jamais de libérer mon cœur. Je me mis à lui caresser les tempes et à le regarder avec tendresse.
" A-Qiu, je n'ai pas le choix. Je dois te protéger. Malgré ce qu'a dit l'espion, le Prince sait que vous êtes à sa recherche. Peut-être soupçonne-t-il que vous êtes au courant pour lui. Aussi nous devons mettre un terme à notre relation et au cas où il y aurait d'autres traîtres que nous n'aurions pas identifiés, tout le monde doit penser que nous n'avons plus rien à faire ensemble et puis ... Tu es ma faiblesse. Je suis obligé de partir pour retrouver les enfants et les perles et je n'ai qu'un moyen pour me rapprocher de mon objectif. Cette solution risque de te blesser, alors je préfère que tu me détestes maintenant, tu souffriras moins plus tard. Mais avant cela, je veux que tu saches que, quoi que je fasse, je t'aime et que je n'ai toujours aimé que toi depuis notre adolescence..."
" A-Song ? C'est toi ?" Ses paupières avaient du mal à rester ouvertes.
J'acquiesçais et l'embrassais passionnément. Il n'était plus qu'une marionnette entre mes bras.
Je caressais sa joue. Des larmes perlaient au coin de ses yeux.
" Ne t'inquiète pas, lorsque tu te réveilleras, tu ne te souviendras pas de ce que je viens de te faire et de te dire..."
"A-Song... ne ...fais pas ça", chuchota-t-il dans un souffle.
" Je le fais pour toi, pour que tu vives et parce que je t'aime."
Ses yeux se fermèrent. Sa respiration était calme. Il était prêt pour ma suggestion. Je m'écartais légèrement de lui et roulais sur le côté pour me libérer de sa possession. Mon cœur se déchirait. Pourquoi fallait-il que je choisisse entre mon amour et mon devoir ? Pourquoi n'avais-je pas le droit au bonheur, moi aussi ?
Mon maître avait raison, les sentiments que j'avais pour lui risquaient de mettre en péril ma mission, sa vie et celles d'innocents enfants. Je ne pouvais plus me permettre de rester à ses côtés, c'était trop dangereux pour nous deux. J'approchais ma bouche de son oreille.
" Écoute-moi. Un peu avant l'aube, tu te réveilleras et tu seras pris d'une irrésistible envie de voir mon visage. Tu te lèveras et allumeras la bougie pour le contempler. Au moment où tu ouvriras les yeux, tu ne te souviendras d'aucune des paroles que je viens d'avoir. Tu oublieras que je suis Song Wei et que je t'ai dit que je t'aimais."
Je posais une dernière fois mes lèvres sur les siennes. Pourrais-je un jour l'embrasser de nouveau ? Rien n'était moins sûr.
Je finis par m'allonger contre lui, la tête au creux de son épaule. J'éteignis la bougie d'un revers de la main. Il me restait à attendre que l'aube approche.
Je somnolais à moitié quand j'eus la sensation d'un danger. Je ne sentais plus Feng Wu contre moi ni dans le lit d'ailleurs ! J'ouvris complètement les yeux et me retournai. Il avait quitté notre couche et était debout. Il s'apprêtait à allumer la bougie. Ma suggestion fonctionnait...
Je me redressais et sortis rapidement de dessous les draps. Une fois près de lui, ma main partit toute seule et frappa la sienne au moment où il allait enflammer la chandelle.
Je devais jouer le jeu !
Le briquet tomba au sol, mettant le feu à la mèche au passage avec un peu d'aide de ma part. Il se retourna lentement et me fixa droit dans les yeux. Je le vis pâlir. Je pense qu'il avait compris à la froideur de mon regard, qu'il avait commis l'irréparable en rompant sa promesse.
" A-Chen..."
Je pris mes vêtements et passais ma robe en lui tournant le dos. Je l'avais prévenu.
" A-Chen, ne sois pas en colère, je... "
Je sortis de la pièce sans l'écouter, sans même me retourner. La douleur qui étreignait mon cœur était quasiment insupportable, mais il devait croire que je lui en voulais de ne pas avoir tenu parole.
Je traversais le jardin de pierres et passais le pont enjambant le bassin des carpes Koïs. De l'autre côté, je suivis la galerie de droite et la longeais jusqu'à ma chambre. Réunir mes affaires ne me prit que quelques secondes. J'avais appris à voyager léger. Je regardais une dernière fois cette chambre qui avait été pour moi comme un espoir de retrouver une vie normale et une famille... J'entendis des pas dans la galerie. Ce devait être lui. J'ouvris la fenêtre et sautais sur le toit.
" A-Chen ? "
Il cria mon nom dans l'obscurité.
Je l'avais prévenu... Je m'accroupis dans la pénombre d'une statue ornant la toiture. Il était ressorti de ma chambre et longeait la coursive, scrutant les ténèbres du jardin, puis celles du toit. Je l'entendis murmurer une fois de plus mon nom.
Mon cœur se serra et des larmes se mirent à couler sur mes joues. Je n'avais pas le choix. Je commençais à comprendre ce que le Prince Wan Yi était en train de manigancer avec les enfants, six au total... Cela ne pouvait pas être une coïncidence ! Je tournais la tête vers celui que je venais de blesser intentionnellement ... Même si c'était pour de bonnes raisons, je m'en voulais. Il ne me pardonnerait jamais et probablement encore moins ce que j'allais faire. J'allais profiter du fait que Xue Xiang et moi, nous nous étions déjà rencontrés, il y a deux mois de cela. À cette époque, il m'avait nettement fait comprendre qu'il me trouvait à son goût... Il fallait que je mette à profit ce penchant. J'avais assez d'expérience maintenant pour réussir à le manipuler au lit, enfin, je l'espérais...
Feng Wu avait quitté la galerie. Du coin de l'œil, je l'avais vu frapper un pilier de son poing avec son pouvoir spirituel, celui-ci n'avait pas résisté et c'était brisé en deux. Je me levais et le regardais entrer dans sa chambre. Par la fenêtre entrouverte, je l'aperçus qui ramassait la tunique que j'avais oubliée. Il la porta à son visage et respira longuement l'odeur qui s'en dégageait... mon odeur. Puis il tomba sur le lit et se recroquevilla sur lui-même en enfouissant mon vêtement contre sa poitrine et sa figure. J'eus envie de le rejoindre et de le prendre dans mes bras, de lui dire que je ne le trahirais pas, mais je n'en fis rien. Je me retournais. Je devais de nouveau fermer mon cœur pour être aussi impitoyable et sournois que mes adversaires. Je sautais du toit. En quelques bonds, j'avais déjà parcouru plusieurs li (*). Une fois de plus, j'abandonnais un chemin qui aurait pu m'apporter un peu de bonheur dans ma vie de souffrance.
(*) li : mesure chinoise correspondant à environ 500 m
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