Chapitre 47 - Le destin de Laurie
pdv Romain
― JE CROYAIS QUE LE PORTAIL ÉTAIT VERROUILLÉ !
Je grimace sous les jérémiades de celui qui se croit encore mon père après ses nombreuses trahisons, pourtant adressées à quelqu'un d'autre et m'éloigne le plus possible en le dévisageant avec dégoût.
Cela fait bientôt cinq minutes qu'il s'en prend au membre de son groupe qui était responsable de la fermeture du portail vers le poste Sud, comme si ça allait changer les choses. Et moi, je trépigne sur place, rongé par l'inquiétude et la colère. Je l'ai envoyé paître, mais maintenant, je n'ai plus personne sur qui passer mes nerfs : malgré mes insistances pour partir immédiatement à la recherche de Laurie, Mathilda a plaidé s'organiser efficacement au lieu de se précipiter inconsciemment. Selon elle, si Laurie a survécu à l'explosion, elle se trouve au bastion Sud, soit assez loin pour que les ogres aient disparus avant qu'on arrive. Mais ce n'est pas une raison pour les laisser prendre encore plus d'avance ! Je ne comprends pas son résonnement, je ne veux pas le comprendre.
Mes membres tremblent alors que j'essaie de garder le contrôle de mon corps et de ne pas céder à la panique alors même qu'elle a disparu. Snoderim me jette un coup d'œil furtif, comme si elle craignait que j'explose à tout moment.
― Mais je le pensais fermé... s'explique nerveusement un elfe brun aux vêtements en lambeaux. Je ne m'explique pas ce qu'il a bien pu se passer... Sans doute l'usure du temps...
Serrant les dents à l'entente de ces excuses minables, je décide d'aller une nouvelle fois à la rencontre de la souveraine, qui s'attelle à organiser le sauvetage des blessés. Après que le souffle de l'explosion nous ait tous projetés aux quatre coins de la pièce, le sort des quelques ogres restant a été rapidement réglé. Quatorze. Quatorze intrus ont succombé, sans compter ceux qui sont restés dans la chambre de Laurie et dont j'ignore le sort.
Et je n'ose compter les pertes elfes.
― Je me fiche de l'usure du temps ! Beugle Calion. Les ogres l'ont bien utilisé eux ! Vous rendez-vous compte que la fille est sans doute morte ?!
Son subordonné se recroqueville sur lui-même, honteux mais impuissant à modifier le passé.
Des larmes me montent aux yeux en imaginant cet affreux dénouement, mais je les refoule en me dirigeant vers la reine. J'ouvre la bouche pour proposer de partir seul avec Lyam, Elerinna ou Snoderim à la poursuite des kidnappeurs, mais elle me contourne sans me calculer pour s'interposer entre le conseiller et son bouc-émissaire.
― Il suffit ! Scande-t-elle à l'intention de Calion, qui s'immobilise instantanément. Si l'explosion a eu raison d'elle, nous n'y pouvons plus rien, et si les ogres l'emmènent dans leur capitale, elle sera au bon endroit.
― Que... que voulez-vous dire ? Bafouille l'homme.
― Nous aurions dû trouver le moyen de l'expédier là-bas pour éradiquer la maladie de toute façon, énonce la reine, jubilant presque à travers sa colère apparente. Or, elle s'y trouvera sous peu et aucun de nous n'aura pris le risque de perdre une vie de plus dans cette mission désespérée !
À mon tour d'être paralysé par les paroles de la Diligente.
― Mais... nous n'allons pas la chercher ?
― En aucun cas, affirme la reine. Pourquoi croyez-vous qu'on l'ait amenée jusqu'ici si ce n'est pour qu'elle réalise la prophétie en assassinant Groreg ?
Prophétie ? Assassinat ? Le monde tangue autour de moi. Qu'est-ce que c'est que tout ce cirque enfin ?
― Je...
Mon père semble vouloir ajouter quelque chose avant de se raviser et de baisser la tête, résigné.
― Vous avez raison, cède-t-il.
Je ne comprends plus rien à la situation, si ce n'est que les elfes ne comptent pas secourir Laurie. Une vague de colère monte en moi, et sans un mot, j'attrape Elerinna et Lyam par le bras pour les entraîner d'un pas vif vers la sortie.
― Eh ! Proteste celle-ci. Il y a des blessés !
Effectivement, les deux combattants étaient au chevet d'un elfe blessé.
― Ils trouveront bien un médecin dans ce foutu château, craché-je, intraitable.
Mon assurance et mon calme me surprennent moi-même, mais je mets ce manque d'émotion sur le compte d'un mystérieux instinct de survie sans prendre le temps d'y réfléchir davantage.
Mes deux amis me suivent à l'extérieur sans cesser de poser des questions, mais je ne daigne leur répondre qu'une fois la porte passée. Calion et Mathilda débattent toujours inutilement, ne semblant pas avoir remarqué ni ma saute d'humeur, ni notre départ.
― Tu vas nous dire ce qu'il se passe à la fin ?! S'énerve Lyam.
― Il y a que Calion et Mathilda ont tout manigancé depuis le début ! Éclaté-je, la fureur s'ouvrant enfin sur le monde extérieur. Et ne comptez pas sur Thalion, il cautionne.
Je lance un coup d'œil haineux dans la direction où devrait se trouver le prince, espérant le foudroyer à travers la paroi de pierre.
― Quoi ?! S'exclament de concert mes deux amis.
― Mais qu'est-ce que tu racontes ? Enchaîne Elerinna.
J'inspire un grand coup avant de leur répondre.
― Depuis le début ils nous manipulent dans l'espoir que Laurie sauve tout le monde, même s'il faut la sacrifier. C'est eux qui sont venus la chercher pour qu'elle vienne sauver leurs fesses.
La guérisseuse pousse un cri de fureur avant de donner un coup de pieds rageur dans le mur, tandis que Lyam tente de comprendre la situation.
― Donc ils n'ont jamais eu l'intention de partir à sa rescousse ? Ils nous ont menti pour qu'on coopère le plus longtemps possible c'est ça ? Me demande-t-il à toute vitesse, comme de peur que les réponses lui filent entre les doigts.
Elerinna marmonne des insultes inintelligibles destinées à la famille royale.
― Si, mon... Calion pensait y aller au début, je crois, hésité-je en me remémorant la discussion des deux adultes. Mais Mathilda l'en a dissuadé, parce « que Laurie est au bon endroit ».
J'accompagne ma phrase de guillemet mimés de mes mains, avant d'entraîner le groupe dans le couloir : le temps presse.
― Mais... pourquoi ? S'obstine le satyre, un air d'incompréhension peint sur son visage criblé de taches de rousseurs.
― J'en sais rien moi ! M'énervé-je tout en marchant à vive allure. Une histoire de prophétie ou un truc débile comme ça. A coup sûr en rapport avec votre crétin de poulet enflammé.
Mes amis ne relèvent pas l'insulte à leur mythique Créateur. Mes cordes vocales alternent entre grave et aiguë, trop crispées pour émettre un son régulier alors que je m'efforce de ne pas trembler.
― Pourquoi ne pas nous l'avoir dit dans ce cas ? Proteste Lyam. Laurie aurait sûrement accepté de remplir son destin si ça pouvait sauver des vies. Elle à un cœur en or ! Et nous aurions pu l'épauler...
― Vous voyez, intervient Elerinna avec hargne, c'est exactement pour cette raison que je me suis toujours tenue la plus éloignée possible de la famille royale. Ils ne voient partout que leurs propres intérêts, et sont prêts à sacrifier des milliers de personnes pour de stupides guerres d'égo ! Les elfes n'échappent pas à la règle, conclue-t-elle avec amertume.
― Tu dis n'importe quoi ! Contre Lyam en pilant net. Un bon roi servira toujours les intérêts de son peuple ! Nos dirigeants se battent constamment pour le bien-être de la majorité !
― C'est faux ! Éructe l'elfe. Le pouvoir est une responsabilité sournoise, le trône corrompt même ceux qui entretiennent les plus nobles intentions ! N'importe qui devient dangereux au contact d'une telle puissance.
Les deux créatures se fusillent du regard, avant que je ne décide d'intervenir, un peu remonté par les propos d'Elerinna.
― Alors pourquoi tu tenais tant à revoir Thalion, s'il est dangereux ?
Ma question résonne entre les murs sombres du couloir, et l'assurance de la jeune elfe se désagrège sur son visage pâle.
― Je... Je croyais qu'il était différent, souffle-t-elle en détournant les yeux. Mais visiblement, ce n'est pas le cas.
Le silence s'installe sous la lueur fantomatique des Feux de Fées.
« Le mal doit toujours être chassé, même en temps de paix. Les êtres cupides et avides de pouvoir sont une espèce à part entière qui ne disparaîtra jamais, et c'est une utopie de penser que le monde pourrait être parfait. En revanche, il peut toujours être amélioré et nous nous devons de croire en la possibilité d'un tel rêve, même s'il est inaccessible. »
Les avertissements du prince me reviennent à l'esprit. Lui qui avait une telle foie en sa reine... pourrait-il avoir été dupé par les intérêts de sa propre mère ?
― Je suis désolée, finit par dire Elerinna. Ce n'est pas le moment de se disputer pour une idiotie pareille.
Elle se tourne ensuite vers moi pour poser ses mains sur mes épaules et ancrer ses prunelles dans les miennes.
― Peut importe les intentions de Mathilda, je te promets qu'on sortira Laurie de ce traquenard. Vivante et prête à en découdre.
Les yeux soudain embués, je hoche la tête en signe de reconnaissance. Elle exerce une pression furtive sur mes clavicules avant de se détourner avec un sourire triste.
― Je viens avec vous ! Lance une voix alors que nous nous apprêtions à repartir en courant.
Nous nous retournons d'un bloc pour découvrir Snoderim, cavalant dans notre direction. La gnomide semble presque paniquée à l'idée d'avoir été oubliée, et s'empresse de nous rejoindre pour voler au secours de notre amie.
Mais elle n'est pas seule. Derrière elle, Arik, Neho et... Thalion.
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Helloooooo
ça va ?
Moi, trop contente d'avoir déjà fini ce chap !
Par contre, je suis pas convaincue pour tout...
Jsp, j'ai l'impression que les réactions de mes personnages sont parfois trop importantes, parfois pas assez... que j'arrive pas trop à décrire leur détresse... Mais c'est peut-être juste parce que c'est moi qui l'écrit
Vous en pensez quoi vous?
Sinon, surpris par cette histoire de prophétie et d'assassinat ? Des hypothèses ?
Vous en voulez à Mathilda, Calion et Thalion ?
Je commence le chap 48 demain dès 8h héhééé
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