Sharone conduisit jusqu'à l'orée de la forêt où elle intima aux deux jeunes de descendre. Elle aida Mika a soutenir Nathan jusqu'à la cabane et les fit entrer.

La cabane était dans un piteux état. Les boîtes de conserves vides traînaient au sol, dehors gisait les carcasses de plusieurs animaux dépecés, la poussière et la vermine s'accumulait, Mika aurait juré avoir vu un rat descendre le porche comme s'il était chez lui.

-Retire ton pantalon et assis toi là où il y a de la place, ordonna Sharone en lui tenant la porte.

Et aussitôt, elle sortit ses trousses de soin. Le garçon le fit, légèrement gêné, mais la jeune femme n'y fit guère attention. Entre la pudeur et la survie, elle avait fait son choix.
Elle prit soin de bien désinfecter la plaie, retirer toutes les fibres de vêtements qui s'étaient insérées et lui banda la jambe. Elle laissa les jeunes seuls un instant en attendant de ranger son matériel et revint avec un pantalon propre.

-Tu risquera moins d'infection avec des fringues propres. Quand tu iras te laver, tu retirera ton bandage, tu désinfectera après la douche et tu refera un bandage. Ça ira, pas besoin de te materner plus ?

Il hocha la tête en enfilant le pantalon.

-Merci, sans vous j'aurai sans doute chopé une infection.

Elle haussa les épaules et se tourna vers Mika qui observait la cabane.

-Vous vivez seuls ?
-Oui.

La jeune fille tomba sur une photo posée face sur la table du salon. En la soulevant, elle eut le temps de voir qu'il s'agissait d'une photo de famille avec trois personnes dont un enfant avant que Sharone ne lui retire la photo des mains et la repose sur la table.

-Pourrais-tu arrêter de fouiller dans les affaires des autres ? Tu n'es pas chez toi ici.

Malgré la curiosité, elle ne posa aucune question sur cette photo, ne voulant pas mettre Sharone en colère.

-Je peux faire quelque chose pour vous aider ?
-Vous savez chasser ?
-J'ai déjà tiré une ou deux fois au fusil... Nathan sait beaucoup mieux tirer que moi.

Sharone fit mine de réfléchir.

-Pour l'heure, commence par te laver. On ira chasser demain.

La nuit finit pas tomber sur cette forêt déjà trop sombre aux goûts des adolescents. Sharone, qui s'était depuis longtemps habituée à cette obscurité, ne fit guère attention au chant des hiboux. Lorsque Nathan et Mika servirent le dîner, Sharone fronça les sourcils.

-Depuis combien de temps n'avais-je pas mangé de pâtes ?
-Vous avez une sacré réserve de nourriture, des conserves, de la viande stérilisée, des pâtes, du riz... lâcha Nathan, admiratif.
-Insuffisant.
-Seule, vous pourriez survivre plusieurs mois avec tout ce que vous avez.
-Sauf que pour le moment, je ne suis plus seule.
-Effectivement...

Le repas était calme, la discussion entretenue par la fraternité qui cherchaient à en savoir plus sur la jeune femme qui ignorait sciemment leurs questions. Tout à coup, Sharone releva la tête de son assiette et observa la fenêtre. Des ombres sortaient des arbres, la démarche hasardeuse. Trop d'ombre pour laisser passer.

-Montez, a-t-elle ordonné en se levant de sa chaise.

Elle attrapa sa fidèle hache et se dirigea vers la porte arrière tandis que les jeunes obéirent sans poser de question.
En ouvrant la porte, la première chose qu'elle fit fut de compter les créatures qui s'approchaient.
Treize.

Elle serra la mâchoire.

-Regarde moi, a-t-elle marmonné en s'approchant du premier infecté qui n'eut pas le temps de la voir avant de se retrouver avec la hache dans le crâne.

Les infectés la remarquèrent à ce même moment et se précipitèrent sur elle. Ses doigts serrés autour de son arme, elle se débattit comme une lionne.

Depuis la chambre, la fraternité était collée à la fenêtre à observer leur sauveuse descendre les infectés les uns après les autres, sans une once d'hésitation et de pitié. Soudain, Nathan blêmit.

-Il y en a d'autres qui arrivent... lâcha-t-il en montrant l'orée de la clairière.

Mika ouvrit la fenêtre, se préparant à hurler à Sharone de faire attention, mais elle se figea en la voyant fléchir. Elle était surmenée.

-Elle n'y arrivera pas...

Un claquement la fit sursauter. En tournant son regard vers son frère, elle ouvrit de grands yeux. Il avait attrapé le fusil que Sharone gardait à côté de son lit et visa les infectés qui s'approchaient.

-Vas l'aider, a-t-il soufflé avant de tirer.

Le coup de feu fit sursauter Sharone qui vit enfin les infectés qui se ramenaient. Nathan en avait touché un dans la poitrine, le faisant repartir en arrière et le tuant sur le coup. Un sourire s'étira sur son visage creusé de fatigue tandis qu'elle redoubla d'ardeur. Derrière elle, des grognements douloureux résonnèrent tout à coup. En jetant un rapide regard derrière elle, elle aperçue Mika, armée du pied de biche de son frère.

C'est avec encore plus d'ardeur qu'elle se battit. Se protégeant mutuellement, Mika et Sharone, couvert par Nathan, finirent par venir à bout de cette vague d'infectés.
Essoufflées mais bien vivantes, Sharone ne pu retenir un rire clair s'échapper de ses lèvres, tapotant l'épaule de sa camarade d'un geste de sororité qu'elle n'aurait plus imaginé faire un jour.

-T'as géré.

Mika observa attentivement le visage de la jeune femme, ces fossettes qui se creusaient dans ses joues, ses yeux brillants de soulagement, elle semblait avoir rajeunie d'une décennie.

En rentrant, elles furent rejoint par Nathan qui eu lui aussi le droit à des félicitation.

-Vous souriez, inattendu.

Ignorant cette remarque, elle ferma la porte à double tour avant de se remettre à table.
L'imitant, Mika et Nathan ne perdirent pas de temps pour poser leurs questions.

-Ça arrive souvent, ce genre d'attaque ? Demanda Nathan.
-Il y a souvent des créatures isolées, en général je m'en préoccupe pas, seuls, ils ne sont pas très dangereux. Mais ça arrive qu'ils soient en horde. C'est arrivé deux fois avant ce soir, mais... J'ai toujours su gérer.
-Vous étiez seule ?
-Non.

Et ils ne purent rien apprendre de plus.
Lorsqu'il fut l'heure d'aller dormir, ce fut Mika qui prit le premier tour de veille. Appuyée sur l'appuie de fenêtre, observant les cadavres des infectés qui jonchaient la clairière, elle soupira avant de descendre. Allumant la petite lumière de salon, elle sortit son carnet. Ses yeux s'attardèrent sur la petite photo restée sur la table mais n'y toucha pas. Elle se contenta d'attraper un stylo et d'y écrire tous les événements de la journée.

« ...Je suis curieuse, peut-être trop. Sharone semble avoir subit un traumatisme par le passé, mais rien dans ses gestes et sa façon de vivre ne laisse paraître ce qu'elle a vécu. Rien, à part une photo et un camarade qu'elle refuse de nommer. J'ai envie de croire qu'ils se sont séparés pour je ne sais quelle raison, mais je sais bien qu'il n'en est rien. Dans ce monde, les gens ne partent pas sans raison. »

Alors qu'elle fermait son carnet, se préparant pour un tour du domicile, le parquet craqua derrière elle. Dans un sursaut, elle tourna sa tête et aperçue celle qui les avait accueillit.

- Sharone... a-t-elle soufflé.
- C'est mon tour de garde, a-t-elle annoncé. Vas dormir.
- Je peux rester avec vous ? Je n'ai pas sommeil.

Elle sembla hésiter, mais finit par hausser les épaules.

- Comme tu veux.

Alors, un sourire apparut sur les lèvres de Mika. Elle fut surprise de voir son aînée sortir un téléphone cabossé de sa poche et le déverrouiller.

- C'est vrai, ils n'ont pas encore coupé l'électricité... a-t-elle soufflé.
- Dans tous les cas, j'aurai de la réserve, avoua-t-elle dans un demi-sourire en indiquant une armoire du menton.

En ouvrant la-dite armoire, Mika lâcha un ricanement envoyant toutes les batteries externes accumulées là.

- Et j'ai aussi le groupe électrogène dehors.
- Si j'avais su que je finirais ici, j'aurai pas jeté le miens.
- Ouais, c'est bête.
- En même temps, je n'en avais plus aucun intérêt. Je n'avais personne à qui parler.
- Tes parents ? a demandé Sharone en fronçant les sourcils.
- Morts.
- Tu n'as pas d'amis ?
- Disparus, ils ont jamais répondu quand je les appelais. Le seul à qui je pourrais envoyer un message c'est mon frère, mais il est constamment avec moi.

Sharone fit mine de réfléchir.

- Si vous venez à être séparés, c'est dangereux. Il faut profiter des ressources qui nous sont offerte.
- Comment ça ?
- On a la chance d'avoir un groupe de survivants, protégés et ravitaillés par des militaires qui sont allés dans les différentes... Usines, on va dire, pour les entretenir.
- Comment vous savez ça ?
- Ma sœur est en contacte avec les militaires en ce moment même, qui les garde informés de tout ce qu'il se passe.

Mika hocha la tête.

- Dès qu'on en a l'occasion, on ira en trouver un.

Sharone esquissa un sourire et rangea son téléphone.

- C'est avec votre sœur que vous discutez ? Pourquoi ne pas la rejoindre ?
- J'ai... J'ai déjà essayé. Ça s'est très mal terminé, je préfère rester ici le temps d'avoir un plan sûr pour la rejoindre.

Puis, Sharone quitta le salon. Suivie par Mika, elle observa ce qu'il se passait dehors.

- Toujours morts, a-t-elle lâché.
- Qu'allez-vous en faire ?
- On ira les enterrer demain. S'ils restent ici, ça risque d'en attirer d'avantage.

À deux, elles remontèrent et finalement, Mika prit place dans le lit que Sharone avait gracieusement accepté de cédé à la fraternité, et ne mit pas longtemps à s'endormir.

C'est dans le silence le plus complet que Sharone demeura le temps de son tour de garde, assise sur l'appuie de fenêtre.
Son regard allait et venait de l'extérieur aux ados qui dormaient paisiblement.

Ses sourcils se froncèrent tandis qu'elle grogna en se concentrant sur la forêt.

N'y penses même pas, s'est-elle ordonnée mentalement.
Elle ne voulait plus prendre le risque de se faire des compagnons. Non, ils ne resteraient que quelques jours, le temps que Nathan guérisse, puis ils repartiront.

Cette même nuit, dans le silence de la nuit, le téléphone de la jeune femme s'illumina.
Sa sœur venait de lui envoyer le lien du site officiel de l'État Français. Un article venait d'être publié :

Compte rendue de l'infection.

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J'ai un jour de retard, désolée. 😅
Le mois prochain risque d'être un mois sans chapitre, j'ai eu un manque d'imagination pour la suite et le 7 était le dernier chapitre que j'avais d'avance.

[2 mai 2020]