Chapitre 4




Il est 17h45, je suis enfin rentrée. Je passe le pas de la porte et Silver bondit sur moi.

– Silver, moi aussi je suis contente de te revoir !

    La journée a été longue et étrange, surtout après l'épisode du dessin de Johan, mais je n'ai pas osé lui parler de ça pendant les cours. J'en ai parlé à personne, pour l'instant, je veux juste m'asseoir dans le canapé avant de m'attaquer aux devoirs.

– Kheira tu es rentrée ? Appelle maman. Tu as jeté la poubelle ?

– Pas encore maman, je vais le faire plus tard !

    Je commence à en avoir ma claque des consignes de ma mère, j'ai même pas envie de la jeté sa foutue poubelle. Maman sort de la cuisine un torchon à la main, elle doit avoir fini de faire la vaisselle.

– Tommy n'est pas avec toi ? Demande-t-elle. Vous finissez à la même heure pourtant.

– Il a préféré rester devant le lycée à discuter de je ne sais quoi avec ses amis.

    Tout ça pour ne pas faire le chemin avec moi, quel cas social ce Tommy, je commence vraiment à ne plus le supporter. Bref, il va être 18 heures, je regarde un peu la télé, puis je fais mes devoirs. Oh non, Layla a monopolisé la télécommande.

– Layla, je veux regarder la télé, pousses-toi.

– Non ! Crie-t-elle, j'étais là avant, laisse-moi.

– Justement,tu étais là avant, c'est à mon tour maintenant.

    Je m'assois sur le canapé et lui prend la télécommande des mains. Mais franchement, pour regarder une fleur qui parle à une pomme, même à son âge elle est trop grande. Et voilà, je change de chaîne et elle se met à hurler.

– Mais qu'est-ce qui se passe ? Demande maman depuis la cuisine. Layla pourquoi tu pleures ?

    Déjà, elle ne pleure pas, elle hurle.

– Kheira veut pas me rendre la télécommande, je vais raté mon dessin-animé.

– Oh, Kheira rend-lui la télécommande, tu regarderas la télé plus tard. Tu pourrais aller jeter la poubelle en attendant.

    Là, c'est de la provocation. Tant pis, je ne jetterais pas la poubelle maintenant, je monte dans ma chambre. Au même moment Tommy rentre à la maison, on échange juste un regard, la prochaine fois que je le verrais ce sera pour le dîner. Dans ma chambre, je m'affale sur le lit et traîne mon sac à dos vers moi. Je sors mon cahier de maths et de géographie, je n'ai que ça à faire, un exercice de calculs et une leçon à mémoriser. Mais je ne compte pas sortir de la chambre avant de passer à table.

    Il est 19h30, j'entends David rentrée du travail, il doit être épuisé comme d'habitude.

– Kheira,ça va être près viens manger ! Dit maman depuis le salon. Toi aussi Tommy !

    Tommys'est enfermé dans sa chambre, sans doute pour jouer aux jeux vidéo.Je me souviens, une fois j'ai voulu l'espionner en regardant par le trou de la serrure, mais il m'a vue et a balancé un objet dans la porte en me disant : « dégage ! ». Parfois je me demande ce qu'il fait vraiment dans sa chambre. Allez, il est temps de descendre pour manger. Je me lève...

– Oulà... Dis-je en tenant ma tête entre mes mains, je me suis levé trop vite.

    Je vois plein de points noir et blanc, il faut que je m'allonge deux secondes. Je pose ma main sur mes yeux, et souffle un bon coup. J'ai la tête qui tourne, mais c'est rien, je me suis levé trop vite. Mais j'ai quand même une sensation étrange... Non, je vais mieux, cette fois je me lève doucement. En bas, presque tout le monde est à table, il manque juste Tommy.

– Tommy descend ! Ordonne David. Eh bien, en voilà une. Kheira assieds-toi.

Je commence à me servir à manger, c'est une salade que maman a préparée avec du maïs et des carottes. Je suis à côté de Layla, elle mange comme un cochon et n'arrête pas de me donner des coups de pied.

– Arrête Layla !

– Ça suffit les filles ! Crie maman, puis elle se tourne vers David. Alors dit moi comment s'est passé ta journée chéri...

    Ils vont encore discuter du boulot merveilleux de David, super... Tommy a dénié sortir de sa chambre, il se met en face de moi sans dire un mot, il se contente de manger.

– Alors les jeunes, dit David enjoué, comment était votre journée ?

– Comme d'habitude, répond Tommy, j'ai retrouvé Alex et les autres. Rien à dire de plus.

– Pourtant tu es arrivé en retard ce matin, ajoute-je avec un sourire narquois.

– Vraiment ? S'étonne David, tu compte toujours arriver en retard les lundis matins Tommy?

    David hausse le ton, et Tommy me jette un regard noir, c'est bien fait pour lui. Mais je peux allez plus loin.

– Tues censé arriver à l'heure en cours...

    Là il me lance un sourire, puis regarde ma mère furtivement.

– Et toi, tu es censé jeté la poubelle quand c'est à ton tour.

    Je reste la bouche ouverte, maman s'arrête de manger et me regarde, David aussi a changé de proie.

– Oui c'est vrai, intervient Layla, Kheira n'a toujours pas été jeté la poubelle.

    Quelle traîtresse, elle est du côté de Tommy.

– Kheira,me dit David, ça fait deux jours que le sac-poubelle est devant la porte, tu n'as jamais été le jeté ?

    David est en colère, il s'énerve rarement contre moi, mais il ne me fait pas peur.

– J'ai oublié, je le ferais demain promis.

– Non, rétorque maman, je n'ai pas arrêté de te le rappeler aujourd'hui, tu le fais après manger.

– Quoi ? M'exclame-je, mais il fait nuit...

    Elle ne me laisse pas le temps de parler.

– Je m'en fiche, tu jettes cette poubelle après manger, un point c'est tout.

– Tient, ajoute David, et pour te punir, puisque tu sors, passe à la boutique des Silvains me prendre des écrous et des vis de cinq millimètres.

– Sérieusement !?

– Oui, et puis ce n'est très loin, tu connais le chemin.

– Tu fais ce qu'on te dit, reprend maman.

    Cette fois-ci c'est moi qui lance un regard noir à Tommy, mais il fait mine de m'ignorer et esquisse un sourire moqueur. Il va me le payer.


Le dîner est fini, je ne prends pas de dessert, je suis trop énervé. Je mets mes baskets et mon manteau. J'emmène aussi Silver avec moi, il me tiendra compagnie. Il faut juste que je retrouve sa laisse... Ah, la voilà, dans le troisième tiroir de la commode.

– Allez, vient Silver !

    Il se précipite et remue la queue. C'est encore un chiot, comment ne pas fondre devant lui ? Bon, je vais partir, Tommy s'est avachi dans le canapé, il me regarde puis ricane. J'entends David me parler, mais je claque la porte avant de comprendre ce qu'il devait me dire. Il fait très noir, mais ça va j'ai Silver avec moi. Lui il n'a pas peur en tout cas, il est tout joyeux.

Comment peut-on obliger une jeune fille de seize ans à sortir le soir ? Ce devrait être l'inverse,mais enfin... Je balance le sac-poubelle dans le container, et continus mon chemin. Je sens une goutte de pluie couler le long de ma tempe.

– Oh non, il pleut Silver, dépêchons-nous.

    J'aime bien la pluie, mais pas quand je suis en dessous. Le magasin des Silvains est à environ 5 minutes d'ici. Ce magasin me fait un peu peur je dois dire, il est tout près de la forêt. Le soir la forêt est un vrai coupe-gorge. Je suis presque arrivé, mais il pleut de plus en plus, j'aurais dû prendre un parapluie... J'aperçois le magasin, il ressemble à une petite maison de pêcheurs. Les lumières ne sont pas allumées, qu'est-ce que ça veut dire ? Je m'approche de l'entrée et lis : « Fermé exceptionnellement lundi à partir de 15 heures ».

– Eh merde ! Tu te fous de moi David. Cris-je tout haut.

    La pluie tombe de plus en plus fort, je suis trempé. Je prends Silver et le protège sous mon manteau. Je vais rentrer, il fait très froid en plus, Silver se blottit contre moi. Mais un craquement se fait entendre du côté de la forêt, ça nous effraye. Mon chiot se met à bondir et s'enfuit sur la route... Il va se faire écraser !

– Reviens Silver ! M'exclame-je.

    Je cours derrière lui sans regarder où je vais, la pluie est très forte, je ne vois presque plus rien... J'entends un bruit sourd qui vient de ma gauche, comme un klaxon. Je me tourne et je vois une grande lumière blanche qui m'éblouis, je m'arrête net, effrayée.

Oh non, un camion !


    C'est trop tard, il me percute.

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