Chapitre 13
D'une part, ils venaient de se faire tirer dessus, étaient en Espagne, dans une voiture inconnue de leurs parents. D'autre part, ils étaient partis de la maison bien plus tôt que ce qu'ils seraient capables de faire en temps normal.
- Tu ne veux pas t'arrêter sur le bas côté ? S'ils entendent le bruit de la voiture, on est foutus. Ils feront immédiatement le lien.
L'adolescent avait réfléchi avant de poser cette question. Il y avait certes eu d'étranges évènements, mais il avait nettement plus peur de la réaction de leurs parents s'ils apprenaient qu'ils avaient désobéi. Si un coup de feu faisait peur, un parent en colère encore plus.
- T'as bien réfléchi ?
Si la question de sa jumelle pouvait sembler étrange, son frère savait qu'il n'en était rien. Elle était inquiète et il l'était tout autant. Etant le cerveau des deux, sa question était une manière de lui rappeler qu'il tenait les rênes de la situation. Il avait préparé à l'avance cette conversation avec leurs parents, le seul point inconnu étant leur réaction, ainsi que les personnes étranges qui les avaient suivis. En soit, deux épreuves aux noms respectifs « Maman » et « Imprévisible ».
Garés sur le bas-côté, entre buissons, arbres et pentes, le téléphone sonna une tonalité.
Maurina retint son souffle autant que son frère, tandis que les tonalités défilaient, sans que la voix familière de leur mère réponde « Allo ? ». Sa messagerie fut le seul moyen pour eux d'entendre sa voix.
- Bonjour Maman, tu as essayé de nous appeler tout à l'heure, commença Paul. Comme on vous l'a écrit sur le post-it, on a décidé de se lever tôt pour aller chercher un petit boulot. On a pris le bus, et là on passe par certains magasins qui ne laissent pas passer les ondes, c'est pour ça qu'on t'a pas répondu. Mais sinon on sera là entre midi et 13h. Et si tu nous demandes pourquoi on se lève tôt, c'est parce qu'on s'est souvenu de ce dicton qui va être le nôtre : « le jour appartient à ceux qui se lèvent tôt. » A bientôt !
Aussitôt le téléphone raccroché, il laissa échapper un gros soupir. L'adolescent était content d'avoir préparé dans les grandes lignes ce qu'il dirait à sa mère. Il avait ainsi encore pu mettre à profit ses talents d'acteur.
- On repart, décida Maurina.
Son jumeau la regarda avec des yeux ronds. Ce n'était pas elle qui prenait les décisions habituellement, elle détestait diriger. Cependant, il comprit en regardant dans le rétroviseur en voyant au loin une étrange voiture noire.
- Vas-y, mets le turbo, fais juste gaffe dans les virages, j'ai pas envie de revivre ce qu'on a eu tout à l'heure.
L'adolescente sourit de toutes ses dents. Il ne fallait pas lui dire deux fois pour que son pied trouve la pédale de l'accélérateur. Elle ne pouvait pas nier qu'elle aimait la vitesse, alors avoir l'accord de son frère... Elle ne se le faisait pas dire une fous de plus. En effet, le garçon préférait respecter les règles, rester dans la sécurité, et n'aimait pas trop la conduite souvent un peu trop sportive de sa sœur. Mais pour une fois, celui-ci était heureux que cela soit sa sœur au volant. Il sait qu'il aurait déjà paniqué.
Après que son jumeau se fut cramponné à plusieurs virages sur son siège passager, l'autre voiture disparut de sa vue, et elle relâcha un peu la pression, continuant cependant sa conduite sportive.
- Tu ne penses pas que Maman va essayer de nous rappeler ? demanda la jumelle. C'est étrange qu'elle n'ait pas décroché. Elle n'est pas au boulot ni rien...
- Si Maman nous appelle, on laisse sonner. J'ai pas confiance pour qu'on se réarrête comme on l'a fait. Maman fait peur, mais visiblement la campagne espagnole aussi. Et Maman a notre message vocal, pas la campagne espagnole.
Maurina sourit à cette remarque.
- Tu voudrais lui dire quoi, à ta campagne espagnole ? lui demanda-t-elle d'un ton espiègle. Si tu peux avoir un laisser passer pour que les chasseurs n'attaquent pas les voitures, parce que tu as pris espagnol en LV2 ? Est-ce que tu sais au moins dire ça en espagnol ?
Elle rigola en prononçant ses derniers mots. Sa revanche contre cette langue latine était prise. Sa sœur n'abandonnerait pas l'allemand de si tôt.
- Tu as gagné, abandonna son frère avec une moue désabusée.
- N'empêche que c'est étrange.
Après quelques minutes de silence, il s'était décidé à reprendre la parole.
- Même si je connais pas les lois espagnoles, il ne me semble pas qu'ils autorisent les armes. Pourquoi y a-t-il des coups de feu dans la région ? Et puis on a beau se faire des films, les gars nous visaient quand même, et il y avait il y a pas si longtemps une voiture derrière nous.
- Désolée, mais pour le coup je crois que tu te fais des films, déclara Maurina. Je pense que c'est juste une coïncidence, et la voiture noire était juste un riverain de cette montagne.
Le ton de sa jumelle aurait pu être convainquant si Paul ne l'avait pas vue se mordre la lèvre, signe d'inquiétude.
- Tu ne crois même pas à ce que tu dis, soupira-t-il. Justement, si on utilise les probabilités, je pense que ces gens étaient là pour nous. J'y pense ! Ils nous ont vu après qu'on ait ouvert le coffre, il y avait quoi dans le coffre à part la carte ?
Celle-ci, toujours pliée sur les genoux de l'adolescent, ne leur avait pas encore servi, la route continuant sans intersections.
- Dans le coffre, il y avait un très gros colis tout blanc, réfléchit Maurina. Il était bien fermé, donc je n'ai pas pu jouer à ma curieuse. Je n'ai pas envie de m'avancer plus dans les hypothèses, car on a signé un contrat, donc c'est forcément clean.
- T'as raison, je pense qu'on se fait des films. N'empêche que je sais pas si on continue demain. Il est neuf heures du matin et on a déjà risqué notre vie une fois. Si on travaillait pas on serait toujours en train de dormir ! Je veux bien pour la surprise des parents, mais je risque pas ma vie, ni la tienne, pour une surprise !
Il avait peut-être raison sur ce dernier point, mais son aînée avait du mal à se l'avouer.
- Mais je pense que ça n'a rien à voir, on a juste pas de chance, argumenta sa jumelle.
Il fitune moue dubitative, mais se tut. Son frère n'avait pas envie de se disputermaintenant, pas après ce qui venait de se passer.
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