Chapitre 27
Lars se leva avec difficulté. Cette nuit, Astrid s'était agrippée à lui si fort qu'elle lui avait griffé le dos. Sur le moment, il ne s'en était pas rendu compte. Lars lui jeta un coup d'œil : elle dormait encore. Il était à peine six heures du matin.
Il descendit dans la cuisine et y trouva Salvatore, portant un tee-shirt gris auréolé de sueur et avalant une aspirine. Il avait mauvaise mine.
Même Lars ressentait l'absence de Xiu. Il la revoyait préparant le repas dans la cuisine, sur la pointe des pieds pour pouvoir atteindre l'évier ou le plan de travail. Elle avait l'air éternel, sage, paisible.
Des hommes avaient pénétré dans le « Lotus rouge » et rossé toutes les personnes présentes. Xiu avait tenté de protéger le travesti chinois, Tao, et une balle l'avait atteinte en pleine poitrine. Elle avait été la seule à mourir, parce qu'elle était la seule visée. L'attaque du cabaret n'avait été qu'une mise en scène.
- Comment va-t-elle ? chuchota Salvatore.
- Elle dort.
- Je voudrais tellement souffrir à sa place...
- Vous avez déjà du mal avec votre propre douleur, remarqua Lars en observant la pellicule de sueur sur son front et ses mains tremblantes.
- Xiu était mon amie. Et Georgios aussi.
- Je croyais que vous ne l'aimiez pas.
- Nous avons affronté pas mal de choses ensemble en Pologne. J'ai appris à le connaître et...c'était un type bien. Il aurait mérité de passer plus de temps avec Astrid.
Lars savait que pour Salvatore, c'était le plus formidable compliment du monde. Il en fut presque ému.
- Ce Simon Solovine...vous le connaissez ?
- Non. Son nom de famille me dit vaguement quelque chose. Je l'ai peut-être entendu une fois...mais ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi il s'en prend à nous en général, et à Astrid en particulier.
- Il ne la touchera pas, assura Lars.
Salvatore reposa son verre d'aspirine et soupira. À ce moment-là, ils entendirent des pas légers dans l'escalier, et Astrid apparut, en pyjama, et pourtant très digne.
- Je voudrais que tout le monde soit ici à dix heures. C'est possible ?
- Bien sûr, mon amour, s'empressa d'acquiescer Salvatore.
Le visage de la jeune femme était beaucoup trop impassible. Même dans son pyjama bleu, elle avait une allure de statue grecque, belle mais vide. Elle remonta les marches comme un fantôme regagne le ciel.
Morts. Morts. Morts. La petite voix macabre était revenue dans sa tête. Quel est le pire, dans tout ça ? Que je n'ai connu mon grand-père biologique que quelques mois ? Que Xiu soit morte en protégeant Tao ? Que je sois l'araignée rouge de Simon Solovine ?
Une chose était sûre, elle n'allait pas rester là à se lamenter. Elle voulait se venger. L'esquisse d'un plan s'était formée dans son crâne quand elle avait ouvert les yeux. Astrid retourna dans son lit et enroula la couverture autour d'elle. Elle ne se rendormit pas. Salvatore ressemble à un zombie, et j'ai entendu Mama pleurer.
Lars remonta à son tour et s'allongea à côté d'elle.
- Salvatore est dans un état lamentable. J'ai cru qu'il allait s'évanouir, tout à l'heure. Vous devriez passer plus de temps ensemble. Vous en avez besoin tous les deux.
Tu n'as pas de conseil à me donner, Lars Wolfgang. Elle ne répondit pas.
- Chérie...bon sang, dis ou fais quelque chose. Pleure, crie, casse un objet. Mais ne reste pas prostrée comme ça. Ce n'est pas bon.
- Chut. Je t'en prie.
Elle resta trois heures ainsi, silencieuse, entre la conscience et le sommeil. Puis elle alla se préparer pour son conseil de guerre.
À dix heures, elle s'installa autour de la grande table. À sa droite se trouvaient Lars, Salvatore, Mama, Ernesto et Kate. À sa gauche, Urano, Gonzalo, Abu et Élie. Juan jouait dans le jardin. Mikhaïl était rentré en Russie quelques jours plus tôt, et Astrid ne pouvait s'empêcher de penser qu'il était revenu auprès de Solovine. Il n'avait pas donné de nouvelles.
- Nous ne devons plus permettre à Solovine de s'en prendre à l'un d'entre nous. J'ai besoin qu'on trouve un otage, quelqu'un à qui il tient, pour servir de bouclier, annonça-t-elle. S'il veut de nouveau s'attaquer à nous, il devra s'attendre à ce que son otage subisse des représailles.
- Il n'a pas de femme ni d'enfant, remarqua Gonzalo.
- Mais je crois qu'il a un frère, fit Abu.
- Je vous fais confiance.
- Et ensuite ? Quand nous aurons l'otage ? demanda Élie.
- Chaque chose en son temps. Trouvez-le-moi d'abord, répondit Astrid.
Sa voix était emplie d'une autorité qu'elle n'aurait jamais soupçonnée avoir. Je dois leur montrer que je suis déterminée. Et solide. Même si ce n'est pas vrai.
***
Gonzalo revint quelques jours plus tard, accompagné d'un petit garçon de onze ans, blond et pâle, nommé Piotr. C'était le petit neveu de Simon Solovine.
Astrid fut à la fois déçue et choquée. Un petit neveu, ce n'était pas grand-chose. Et on ne pouvait pas menacer un petit garçon sans passer pour un monstre. Je suis déjà un petit monstre, je ne peux pas en devenir un grand.
Gonzalo, lui, n'était pas du genre à s'encombrer de scrupules, et proposa même :
- On pourrait lui couper un doigt, et l'envoyer à Solovine. Comme avertissement !
- C'est un enfant qui a déjà été arraché à sa famille, on ne va pas en plus le mutiler ! protesta Mama en faisant claquer son torchon sur le torse de taureau du sud-américain.
- Solovine a fait pire que mutiler la mamie chinoise et le papi grec, que je sache.
- C'est à Astrid de décider, trancha Abu.
La jeune femme se racla la gorge.
- Enfermons-le dans l'ancienne chambre des jumeaux pour l'instant. Sans lui faire peur ou lui enlever un doigt.
- Même l'auriculaire ? Ça ne sert à rien, l'auriculaire.
- Gonzalo !
- D'accord, d'accord.
Une fois le sud-américain, Abu et Piotr disparus, Mama se tourna vers Astrid.
- Tu ne peux pas garder cet enfant innocent loin de sa famille.
- Apparemment, sa seule famille est un père absent qui travaille du matin au soir.
- C'est Gonzalo qui te l'a dit ?
- Oui. Et je lui fais confiance.
- Cet homme a brûlé des maisons avec leurs habitants à l'intérieur !
- Et toi, tu as dévalisé des banques où devaient se trouver les maigres économies de retraités malades ou de mères célibataires. Ce n'est pas pire, mais ce n'est pas mieux.
Mama l'avait longuement regardé par-dessus ses lunettes rouges.
- Ma fille, ne laisse pas la souffrance geler ton cœur. Tu dois rester notre petit soleil.
- Un soleil qui vient de perdre deux de ses rayons.
Astrid retourna se réfugier dans sa chambre. Son lit n'était pas fait, et la couette blanche à points multicolores était toute chiffonnée. Elle repéra la petite statuette d'Aphrodite posée sur une étagère, et la feuille avec son nom en idéogrammes chinois que Xiu lui avait rapporté de son dernier voyage à Shanghai. Vous êtes toujours là.
Salvatore frappa à la porte. Elle savait que c'était lui, elle aurait reconnu le bruit de ses pas entre mille. Mais Astrid ne voulait pas le voir. Elle se tut, et au bout d'un moment, elle l'entendit s'éloigner. Je suis désolée, Salva.
Quand la Villa lui parut suffisamment silencieuse, elle se glissa dans le couloir, puis dans le bureau d'Antonio. Elle eut la surprise d'y trouver Abu, en jean et tee-shirt fluo, tenant un carnet brun à la main.
- Oh, Astrid, salut ! Je cherchais...euh...
- C'est un carnet d'Antonio ? Que cherchais-tu ?
- Du papier et un stylo, pour...écrire une nouvelle lettre à Irina.
Son excuse était nulle, mais Astrid n'avait pas le courage de se lancer dans un interrogatoire complet. Elle n'avait plus la force d'imaginer que quelque chose d'autre ne tournait pas rond.
- Il y en a dans le salon. Dans le tiroir du buffet.
- D'accord ! Merci !
Quand il fut sorti, Astrid se laissa tomber dans le fauteuil en cuir noir qu'Antonio avait longtemps occupé. Elle ne savait pas vraiment pourquoi elle était venue ici. Et Abu ?
***
L'enterrement de Xiu eut lieu dans le petit cimetière de San Gennaro. Sa tombe blanche était voisine de celle d'Antonio. Un vent piquant soufflait, rougissant les joues déjà humides. Tao et tous les autres habitués du « Lotus Rouge » étaient présents, ainsi que de nombreux élèves de ses cours de tai-chi-chuan. Astrid se sentait pourtant très seule. Imaginer le petit corps de Xiu sous cette terre morne, qu'elle ne sourirait plus jamais, qu'elle ne lui apporterait plus son soutien silencieux mais indéfectible, lui dessécha le cœur. Xiu était comme toutes les grands-mères. Irremplaçables.
Ce fut encore pire pour l'enterrement de Georgios. À part cinq ou six employés de son hôtel, il n'y avait que Salvatore, Mama, Lars, Ernesto et Astrid. Kate devait rester en Italie pour garder Juan, et de toute façon, elle ne connaissait que très peu Georgios. Il fut enterré dans le cimetière de l'île de Zafeíri, au pied d'une petite église blanche au toit bleu et rond. Pour Astrid, sa mort avait le goût de quelque chose d'inachevé, de saccagé, comme une magnifique fleur qu'on aurait coupée sans attendre qu'elle pousse.
La jeune femme avait l'impression d'avoir reçu successivement deux gros coups sur la tête. Elle n'arrivait même pas à pleurer, et plus les jours passaient, plus elle avait le cœur glacé, comme Mama l'avait dit.
La vue de Piotr lui devint insupportable. Elle le vit renvoyé à son oncle sous forme de sushis, de beignets ou de steak tartare, en imaginant la surprise, la peur, et la tristesse se lire sur le visage de son ennemi. Œil pour œil, dent pour dent. Une vie pour deux autres : c'était même encore inéquitable. Astrid, pour la première fois, avait envie de tuer quelqu'un. Et quand Gonzalo proposa une nouvelle fois, peu subtilement, de le renvoyer par petits bouts à son grand-oncle, elle lâcha :
- D'accord pour l'auriculaire.
Mama faillit s'étouffer avec son café, Salvatore écarquilla les yeux et même Lars lança un regard consterné à Astrid.
- Tu ne peux pas faire ça ! C'est un gamin !
- Je m'en fiche.
- Mon bébé, je t'en prie, ne fais pas ça, supplia Salvatore.
- Arrêtez votre cinéma ! Vous avez fait des choses bien pires, alors ne me regardez pas comme ça ! Bon sang, Solovine a tué mes grands-parents, et je ne dois rien faire ?
- Pas ça, en tout cas, affirma Mama.
- Vous m'énervez ! Gonzalo, fais-le ce soir.
Avant d'entendre de nouvelles protestations, elle alla s'enfermer dans sa chambre en claquant la porte. Elle enfonça sa tête dans son oreiller et cria. J'en ai assez, assez, assez ! Salvatore et Mama, même Lars, aimaient Georgios, et surtout Xiu. Alors pourquoi ne voulaient-ils pas les venger ? Des gamins, ils en mourraient tous les jours. Et encore, Piotr était grand : il avait onze ans !
À dix-huit heures, Gonzalo frappa à la porte en beuglant :
- On a un problème ! Le gamin n'est plus là !
Astrid bondit sur ses pieds et alla lui ouvrir.
- Quoi ?
- Je suis sorti cet après-midi pour acheter du tissu en ville, et quand je suis revenu, il avait disparu ! On l'a fait évader.
- Qui ça, « on » ?
Le sud-américain eut une grimace.
- Pas Abu, ni Élie, ni moi. Ni nos hommes, en tout cas.
- Ça signifie que...oh, non.
Son volcan intérieur entra en éruption, répandant de la lave de colère un peu partout. Ils ont osé ! Ils ont préféré protéger Piotr !
- Que tout le monde soit réuni dans deux heures ! Je veux savoir qui est le traître.
- Si je peux me permettre...je crois que nous le savons déjà.
- Non. Ça pourrait être Salvatore, Mama ou Lars.
- Ou les trois...je m'en occupe.
Astrid attrapa son oreiller et le jeta de toutes ses forces contre le mur. Puis elle l'éventra avec ses ongles et le piétina soigneusement.
- Merde ! hurla-t-elle, mais cela ne la soulagea pas.
Pour elle, trois des personnes qu'elle aimait le plus au monde, Salvatore, Mama et Lars, venaient littéralement de cracher sur la tombe de ses grands-parents. Une vision insupportable, qui broyait chaque fibre de son cœur.
Deux heures plus tard, elle descendit dans le salon. Ernesto et Kate étaient aussi présents.
- Notre otage s'est évadé, avec la complicité de l'un d'entre vous...
Elle ne reconnut même pas sa propre voix, déformée par la rage et la douleur.
- Il est chez nous, annonça Kate. Il passe la nuit dans notre maison et demain, il prend l'avion pour rentrer chez lui.
- C'est nous, ma fille. Salvatore, Lars et moi, continua Mama. Nous avons sorti Piotr de la Villa. Tu avais perdu la tête. Nous ne pouvions pas te laisser mutiler un enfant.
« Perdu la tête » ! Et ils ne cherchent même pas à nier ! Oh, mon dieu !
- C'est inacceptable, souffla-t-elle, et sa propre voix lui parût cette fois effrayante. Vous êtes des traîtres.
- Nous voulions te protéger, affirma Salvatore.
- De toi-même, précisa Lars.
- Vous les avez salis ! explosa-t-elle. Ils étaient mes grands-parents, et vous m'avez ôté la seule possibilité de les venger, de me dire que leur mort ne sera pas impunie !
- Nous n'honorons pas les morts en massacrant ceux qui n'y sont pour rien, souffla Mama.
- Il n'y est pas pour rien ! Il est de son sang !
- Entends-tu ce que tu dis ? s'énerva subitement Lars. Depuis quand le sang compte-t-il vraiment, dans l'amour et dans la haine ?
Il regarda un moment Salvatore.
- C'est ton père, et pourtant, il n'est pas de ton sang !
- Ce n'est pas mon père ! Mon père est mort dans une voiture ! hurla-t-elle si fort qu'elle perçut un sifflement dans ses tympans.
Il y eut un silence, comme celui qui précède les grandes catastrophes. Salvatore se tordait les mains en tentant de contrôler le sanglot qui lui déformait la bouche.
- Les traîtres n'ont pas de place dans cette maison. Vous avez une demi-heure pour quitter la Villa. Ernesto et Kate, vous ne mettrez plus un pied ici non plus.
- Regarde-toi, bon sang, Astrid ! s'exclama l'irlandaise. Regarde ce que tu es devenue ! Tu ne peux pas nous exiler maintenant ! Tu es folle !
- Taisez-vous. Gonzalo, Abu, je compte sur vous pour que ces cinq traîtres partent sans faire d'histoire.
Lars fit un pas vers elle. Astrid l'arrêta d'une main.
- Ne t'avise pas de me toucher. C'est fini, tu as trahi ma confiance. Vous avez tous trahi Xiu et Georgios, et ça, je ne vous le pardonnerai jamais.
- Ne sois pas ridicule. Je t'en prie.
Salvatore chercha à la toucher à son tour.
- Je t'en supplie, mon amour. Nous avons besoin de toi, et tu as besoin de nous.
- Non.
Ce petit mot explosa comme un coup de tonnerre, et Salvatore et Lars reculèrent, comme si elle était brusquement devenue quelqu'un d'autre.
- Partez. Maintenant.
Astrid ne pouvait plus les voir. Elle n'avait plus qu'une envie : qu'ils disparaissent. Une demi-heure plus tard, comme elle l'avait demandé, c'était fait.
Elle passa la nuit dans un état second, enroulé dans sa couette, à fixer le plafond. Quand elle songeait qu'elle avait peut-être fait une erreur, l'image des deux tombes de ses grands-parents s'imposait dans son esprit. J'avais un otage, un moyen de pression, même petit, sur Solovine. Ils me l'ont enlevé, en affirmant que c'était pour me protéger. Ils me protègent mal, ils ne savent pas ce dont j'ai vraiment besoin.
Au petit matin, elle fut tirée du lit par Urano. Il semblait étrangement agité. Dans le salon, elle entendit des rires gras et moqueurs.
- Bon, nous n'allons pas passer par quatre chemins, maugréa Gonzalo, avec un petit sourire de taureau qui vient d'embrocher un toréador. Nous en avons fini avec toi, nous n'allons plus obéir à tes ordres de gamines capricieuses. Piotr, il était ici parce que Solovine a bien voulu nous le donner, et si nous nous sommes enfuis de Russie, c'est parce qu'il nous a laissés faire.
- Notre mission, c'était de faire en sorte que tu sois isolée. Et tu l'es, maintenant, puisque tu as viré les seules personnes qui tenaient à toi, ricana Élie. Tout ça pour papi et mamie !
Il explosa de rire. Astrid voulut le gifler, mais sa main fut retenue par celle, immense, d'Urano, qui la remit le long de son corps comme on pose un petit oiseau sur une branche.
- Vous étiez avec Solovine depuis le début, soupira la jeune femme, calmée, comme si cela ne l'étonnait pas. C'est pour ça que tu étais dans le bureau d'Antonio, Abu. Pourquoi fouillais-tu dans les carnets ?
- Ça ne te concerne pas.
- Que vous a-t-il promis ? Je croyais que...
Elle se mordit les lèvres de toutes ses forces pour ne pas pleurer. Encore une fois, Solovine avait triomphé. Tout semblait tellement facile pour lui. Tuer, manipuler, recruter. Abu, Gonzalo, Élie, le tueur à gages islandais et les autres quittèrent un à un la Villa, pour rejoindre leur véritable chef. Seul resta Urano.
- Que fais-tu encore ici, toi ? lui lança Astrid en le voyant immobile. Va avec eux !
Il secoua la tête. Mais Astrid ne voulait plus de lui non plus. Elle ne voulait plus de personne. Après tout, dès le début, il était dans le château de Solovine. Cela faisait de lui un traître comme les autres.
- Va-t'en ! Tu n'es qu'un gros débile qui ne connaît même pas son prénom ! Je n'ai pas besoin de toi ! Fiche le camp !
Il la regarda longtemps, impassible. Puis, à pas lourds, il sortit de la maison.
Cette fois, Astrid était vraiment seule. Elle se roula en boule sur le canapé et attendit. Il y avait peut-être encore quelqu'un sur cette planète qui s'intéressait à elle. Quelqu'un qu'elle n'avait pas rejeté ou qui n'allait pas la trahir. Quelqu'un qui n'était pas mort.
Deux jours plus tard, elle eut une visite. C'était le docteur P, vêtu d'un costume moutarde et d'un nœud papillon rouge. Il cligna plusieurs fois ses yeux myopes.
- Vous allez bien ? J'étais venu pour vous montrer ma dernière invention, mais si vous voulez, on peut regarder un film. J'ai une clé USB qui contient tous les dessins-animés de Walt Disney.
Elle était tellement contente de le voir qu'elle le prit dans ses bras. Il lui tapota le dos.
- Mon préféré, c'est Lilo et Stitch, parce qu'il y a des extraterrestres.
Voir ce savant fou de près de soixante-dix ans lui parler d'un dessin-animé lui donna presque envie de rire. Elle hocha la tête et ils s'installèrent ensemble sur le canapé.
Au milieu du film, il y eut un deuxième visiteur.
- Mon dieu, quelle horrible odeur ! Tu sais qu'il faut aérer sa maison, de temps en temps ?
Madeleine Clarence, en jean et pull bleu en laine, fit mine de s'éventer avec sa main. Elle alla ouvrir toutes les fenêtres et jeta un regard atterré à la jeune femme et au vieux scientifique qui regardaient la télévision.
- Mais où sont les autres ?
- Partis, articula à voix basse le docteur P. Mais ne le dîtes pas à Astrid, ça la rend triste.
- Je suis à côté de vous, Claudiu.
- Ah, mince !
- On dirait deux fous dans un asile psychiatrique ! Astrid, viens donc m'expliquer ce qui s'est passé, soupira Madeleine.
Astrid n'avait pas pris de douche et n'avait pas mangé depuis deux jours, mais elle s'efforça de tout raconter à Madeleine, de Simon Solovine à la trahison de Gonzalo et des autres, en passant par la mort de Xiu et de Georgios et le renvoi de Salvatore, Lars et Mama.
- Quelle idiote tu es ! Rappelle Salvatore immédiatement. Il s'empressera d'accourir.
- J'ai essayé, sanglota Astrid. Il ne répond pas. Il ne m'aime plus.
- Entre ce ton geignard et ce dessin-animé stupide, tu es vraiment retombée en enfance...
- Ce n'est pas un dessin-animé stupide ! protesta le docteur P.
- Secoue-toi, Astrid. Va prendre une douche. Je vais te préparer quelque chose à manger.
Astrid hocha la tête, puis se jeta à son cou.
- Oh, souffla Madeleine. Un câlin.
- Merci d'être venue me voir.
- Je deviens spécialiste pour te sortir la tête de l'eau, n'est-ce pas ?
- Vous êtes maître-nageuse ? s'exclama le docteur P.
- Qui c'est, lui, exactement ?
- C'est mon ami. Vous êtes tous les deux mes meilleurs amis, sourit Astrid à travers ses larmes.
Madeleine leva les yeux au ciel et alla préparer des pâtes. Astrid se dit que finalement, sa bonne étoile ne l'avait pas complétement abandonnée.
Alors oui, ce chapitre est super long (et complet du coup) mais je n'ai pas réussi à trouver le bon endroit où le couper sans qu'il soit déséquilibré. Et en plus, ce chapitre est important donc bon, je pense qu'il vaut mieux le lire d'un bloc.
Je te le dédie, oui, à toi là-bas, car je l'ai rénové exprès pour toi. Vois comme mon amour est infini.
Mais je vous aime tous, rassurez-vous. Love kissou.
Je vous ai mis le gif triste, parce que ce chapitre est triste.
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