Chapitre 15.1

Chapitre 15

Pour la première fois de sa vie, Astrid feuilleta le magazine people Chi debout dans l'aéroport de Naples. Salvatore était aux toilettes et Daniel inspectait la machine à café.

Sur la couverture, un titre disait : « Domenico Sorabella : San Remo et sa rupture avec Francesca » C'est à cause de moi s'il va divorcer. L'appartement de Naples où tout avait commencé et fini avait été vendu à la hâte, avant de partir.

Mais cette mauvaise nouvelle n'entama que très peu son enthousiasme : c'était décidemment la journée des premières fois, car aujourd'hui, elle quittait l'Europe pour aller aux États-Unis.

Georgios, son grand-père s'était révélé très consciencieux. À peine une semaine après le départ de Lars Wolfgang, il avait terminé d'inspecter tous les dossiers. Et il avait pointé du doigt des partenariats qu'Antonio avait noués il y a longtemps et qui ne semblaient plus rapporter suffisamment d'argent. Donc, pour savoir si ces partenaires méritaient encore que la Villa Gialla leur accorde des subventions, Astrid, Daniel et Salvatore allaient en visiter certains directement sur leurs lieux d'activité.

Astrid avait dû batailler ferme pour participer à cette expédition. Salvatore avait déployé son éventail de raisons habituelles : c'est dangereux, tu vas encore rater l'université, tu ferais mieux de te reposer tranquillement, blablabla. Mais Astrid lui avait rappelé qu'elle avait absolument besoin de changer d'air et que c'était en partie sa faute. Il avait fini par céder.

- Tiens, trésor, je t'ai pris un chocolat.

Daniel lui tendit un gobelet en carton avec son fabuleux sourire.

- Qu'est-ce que tu lis ?

- Euh, rien du tout.

- Chi ? Tu lis ce genre de choses ? Oh !

Il venait de remarquer le nom de Domenico et les petites rides autour de ses yeux bleus se creusèrent. Astrid baissa le nez sur son gobelet et tenta un changement de sujet.

- Je suis content d'aller aux États-Unis avec toi.

- Ce n'est pas New York ou la Californie, intervint Salvatore qui venait de revenir. C'est le Wyoming, l'État le moins peuplé d'Amérique. Ne nous emballons pas.

- Et alors ? Si ça se trouve, on verra de vrais cow-boys et des...

Elle ne finit pas sa phrase car Salvatore venait à son tour de regarder la couverture du magazine. Il eut une petite grimace et le reposa doucement parmi les autres.

- Astrid...

- Bon ! L'embarquement n'a pas encore commencé ?

Je ne dois pas culpabiliser aujourd'hui.

- Si, allons-y.

Alors que l'avion fendait les airs en direction de l'ouest, Astrid ne put s'empêcher de repenser à son chanteur qu'elle avait trahi et aux yeux glacés de Lars Wolfgang. Elle secoua la tête et décida d'embêter Salvatore pour se changer les idées.

- Tu as toujours ces lunettes de papi ?

- Hé ! Comment ça, de papi ?

- Je ne pensais pas que le grand Salvatore Umberto serait aussi atteint de presbytie, comme un banal humain.

- Ravi de savoir que tu me considères comme un être supérieur, bébé.

Astrid rit de bon cœur et Daniel se joignit à elle. Salvatore fit mine de se replonger dans son livre. Elle frétilla un moment en voyant la péninsule ibérique céder la place à l'Atlantique.

- Nous allons dans une tribu amérindienne... Tu crois qu'ils vont avoir des coiffes en plumes ?

- Et des tipis, et des bisons ? Astrid, tu fais dans le cliché.

- J'aimerais goûter un vrai hamburger américain, aussi.

- Je t'en paierais un avec plaisir, trésor.

Daniel l'embrassa et frotta son nez contre le sien.

- S'il vous plaît, un peu de tenue ! Il y a un vieil homme à votre gauche ! siffla Salvatore.

Le voyage commençait bien. Après un changement à l'aéroport Kennedy de New York, puis à celui de Denver, ils arrivèrent enfin à Cheyenne, la capitale de l'État du Wyoming.

Astrid s'attendait à une de ces stupéfiantes villes américaines hérissées de buildings, mais elle fut un peu déçue. Cheyenne était plutôt plate, avec de nombreuses rues pavillonnaires, des routes rectilignes et de belles pelouses bien vertes. Ils prirent un taxi pour la petite ville de Barney Hills, où ils avaient pris des chambres d'hôtels, à presque cinquante kilomètres de Cheyenne. C'était là que vivait la communauté amérindienne qu'ils devaient rencontrer.

Barney Hills était en fait constituée d'une seule et unique rue, au bord de laquelle il y avait l'hôtel, un restaurant et un garagiste. Pas très glorieux.

Astrid était celle qui parlait le mieux anglais, grâce à Mama, et ce fut donc elle qui dut réclamer au réceptionniste, un adolescent boutonneux, les clés de leurs chambres.

La décoration était rustique, avec un portrait d'un chef indien et des cornes de bisons au mur, des meubles en bois brut et une épaisse couverture brune. Par la fenêtre, on apercevait une immense étendue herbeuse où paissaient quelques chevaux et, au loin, les premières montagnes des Rocheuses.

- C'est joli ! s'exclama Astrid en se penchant à la fenêtre.

- L'Amérique profonde, commenta Salvatore.

- Ne fais pas ton snob. On va au restaurant ce soir, hein ?

- D'abord, on va rencontrer nos associés.

- Oui, je prends une douche et j'arrive.

Salvatore retourna dans sa chambre et Daniel en profita pour venir se faufiler dans sa douche.

- Hum...mon cow-boy.

- Et toi, tu es ma squaw.

- Une squaw est une femme mariée.

- Nous le sommes presque, non ? Je te promets qu'un jour, tu auras la plus merveilleuse cérémonie de mariage du monde.

- J'espère bien.

- C'est tout ce que tu mérites ! rit Daniel en l'embrassant...

- Vous en avez mis du temps, remarqua Salvatore alors qu'ils se rejoignaient dans le minuscule hall de l'hôtel. Non ! Je ne veux pas entendre vos explications scabreuses.

Un amérindien en jean et en tee-shirt vint leur serrer la main. Il était accompagné d'une très belle femme aux longs cheveux noirs, en robe traditionnelle. Pocahontas ! songea Astrid.

- Je suis Jason, et voici Ozalee, c'est elle qui va vous faire visiter la mine.

Jason et son groupe étaient censés exploiter une mine d'or dont eux seuls connaissaient l'existence. Mais selon Georgios, cela faisait un petit moment qu'ils n'en extrayaient plus et se contentaient de dépenser l'argent qu'Antonio leur envoyait chaque mois. « Leur mine est épuisée, si vous voulez mon avis », avait dit Georgios.

Salvatore, Astrid et Daniel devaient donc vérifier qu'il restait encore de l'or dans cette mine.

- Venez, fit Ozalee d'une belle voix musicale. Je vous emmène.

Astrid remarqua que Daniel et Salvatore semblaient particulièrement captivés par le mouvement langoureux de ses hanches.

- Arrêtez de regarder ses fesses, tous les deux, siffla-t-elle en italien.

- Mais enfin, Astrid ! riposta Salvatore.

- N'importe quoi ! renchérit Daniel.

- C'est ça, oui. Je vous ai à l'œil.

L'entrée de la mine semblait être un simple trou creusé dans la pierre. Ozalee prit deux lampes de poche, des casques et les mit en garde :

- Le sol est inégal, faîtes attention où vous mettez les pieds. Surtout vous, mademoiselle.

Comment ça, surtout moi ? J'ai l'air moins dégourdi que ces deux idiots, c'est ça ?Et que toi avec ta robe de Pocahontas ?

Les deux idiots en question ne quittaient pas la belle amérindienne des yeux. Astrid sentit la colère monter mais ne dit rien.

Pour le moment, les parois n'étaient que de simples murs de pierre brutes. Pas une miette d'or en vue. Astrid commença à douter sérieusement. Ils croisèrent un antique chariot rempli de poussière. Le sol plongeait vers l'obscurité.

- Il faut descendre une pente vraiment dangereuse pour retrouver le filon. Vous feriez mieux de rester ici, mademoiselle.

- Je ne suis pas en sucre ! réplique Astrid.

- Tu restes ici, bébé, fit Salvatore d'un ton sévère. Je ne veux pas que tu te casses une jambe.

- Mais...

- Il a raison, trésor. Tu risques de te blesser, murmura Daniel.

- Très bien.

Elle les fusilla soigneusement du regard et alla s'adosser au chariot. Si c'est pour contempler ses fesses à loisir, vous le paierez, tous les deux. Astrid attendit dix longues minutes en inspectant un peu les alentours et le fond du chariot.

- Il n'y a pas d'or, grommela-t-elle à haute voix. Elle essaie de nous avoir.

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