Chapitre 1

Chapitre 1

Il existe, au bord de la Méditerranée, à côté de Naples, en Italie, un tout petit village nommé San Gennaro. Et, un peu à l'écart de ce village, il y a une grande maison jaune, avec un jardin surplombant la mer. Dans cette maison, la Villa Gialla, vit une famille un peu spéciale.

Antonio Cavaleri est un mafieux surdoué. Il est même l'un des plus puissants du monde, parce qu'il a des relations un peu partout sur la planète. Ses amis disent qu'il a le cœur sur la main. Et Antonio habite avec ses quatre meilleurs amis dans la Villa Gialla.

Il y a Salvatore, son ami d'enfance, un gamin à l'abandon que la famille Cavaleri a recueilli. Il n'avait nulle part où aller ; il est resté avec Antonio et, ensemble, ils ont construit un empire.

Il y a Grace, qui est devenu successivement la plus grande cambrioleuse de la Nouvelle-Orléans, puis de la Louisiane, puis des Etats-Unis. Elle cachait son butin dans les méandres abandonnés du Mississipi, ce qui lui a valu le surnom de « Mama Bayou ». Cette Afro-américaine croit dur comme fer aux étranges esprits de la religion vaudou.

Il y a Xiu qui, malgré sa taille (un mètre quarante) et son sexe, a régné sur le trafic d'opium d'une grande partie de la Chine. Elle avait un don pour recruter de nouveaux associés avec de simples mots ; alors des rivaux lui ont tranché la langue. Elle a donc inventé sa propre façon de s'exprimer, que les habitants de la Villa Gialla comprennent tous.

Et il y a Ernesto, qui a dirigé toutes les maisons closes de La Havane pendant près de dix ans. Sa mère l'a évidemment prénommé ainsi en hommage au Che. Il n'aime pas trop qu'on le taquine à ce sujet ; il préfère les blagues salaces.

Depuis vingt-deux ans aujourd'hui, il y a une sixième habitante à la Villa Gialla. Elle s'appelle Astrid, et c'est la fille d'Alvaro et d'Esperanza Villanueva, des espagnols, qui étaient eux aussi des amis très chers d'Antonio et de Salvatore. Ils sont morts dans l'explosion de leur voiture quand Astrid avait deux mois. Ils allaient la chercher chez sa nourrice. Antonio était le parrain du bébé.

Aucun des cinq criminels qui vivent à la Villa Gialla ne pourrait imaginer sa vie sans Astrid, et surtout pas Salvatore, qui préférerait mourir plutôt que de vivre sans elle, qui la surprotège au point qu'adolescente, la jeune femme a traversé une phase de rébellion très difficile à vivre pour tout le monde. Cela n'a pas empêché Astrid et Salvatore de rester fusionnels et inséparables, à jamais.

Astrid n'est pas très grande, n'est pas très mince, mais elle a un visage en cœur, de grands yeux et de magnifiques cheveux noirs. Elle est jolie. Mais elle n'a jamais eu d'amoureux, parce qu'elle n'a pas trouvé le bon, parce que Salvatore la surveille comme le lait sur le feu, parce que les garçons, de toute façon, ne sont que des idiots.

Mais depuis quelques temps déjà, Astrid en est sûre, elle a trouvé le bon, elle déjouera la surveillance de Salvatore, elle ne le trouve pas idiot mais beau, adorable, merveilleux. Il s'appelle Daniel, c'est un faussaire très doué, et il vient aujourd'hui à la Villa Gialla.

Elle s'est levée tôt, a essayé une bonne dizaine de tenues différentes, s'est inspectée de la tête aux pieds dans le miroir, et maintenant, elle attend devant sa fenêtre, en frétillant comme une enfant le soir de Noël. Tout le monde sait qu'elle est amoureuse de Daniel, à part Salvatore, mais peut-être fait-il simplement semblant de ne pas le savoir. En tout cas, hier soir, elle a parlé avec Ernesto et Mama, posant des questions sur l'amour et le désir sans ressentir aucune gêne. Elle est amoureuse, et s'il le fallait, elle le crierait sur tous les toits de Naples.

***

Dès qu'elle entendit un bruit de moteur, elle se précipita au rez-de-chaussée, mais ralentit brusquement en apercevant Salvatore. Inutile d'attiser ses soupçons. Ce dernier serra sèchement la main de Daniel en affichant une moue arrogante. Il fait toujours ça à Daniel, songea Astrid en s'approchant. Il ne l'aime pas, et s'il ne l'aime pas, c'est qu'il sait. Bah ! Tant pis.

Daniel lui parut encore plus beau que la dernière fois qu'elle l'avait vu. Très grand, il avait les épaules larges, une mâchoire virile, d'épais cheveux de jais et des yeux bleu foncé magnifiques, soulignés de petites rides qui lui donnaient constamment l'air de sourire, même sans la bouche. Hum, sa bouche, soupira intérieurement Astrid.

Daniel était originaire du Canada, mais, orphelin, il avait été adopté par une famille française. Il avait été un des poulains d'Antonio, et maintenant, il produisait les meilleurs faux passeports et autres faux papiers d'identité du monde.

- Bonjour, Astrid, dit-il de sa belle voix grave, dans un italien parfait.

Il avait toujours l'air sincèrement content de la voir.

- Bonjour, Daniel. Comment vas-tu ?

La voix de la jeune femme tremblait trop pour être honnête, et Salvatore ne manqua pas de le remarquer. Il la fusilla du regard et intervint :

- Nous allons discuter de choses compliquées, bébé. Retourne dans ta chambre, veux-tu ?

Il me parle comme si j'avais trois ans ! Il fait exprès de m'appeler « bébé » devant Daniel. Astrid plaqua un faux sourire sur son visage.

- J'ai pensé que je ne vous dérangerais pas. Je ne dirai rien.

Elle regarda Daniel avec des yeux suppliants. Toi, dis-lui que je peux rester.

- Tu n'as pas de travail à faire pour l'université ? contre-attaqua Salvatore.

- C'est fait ! mentit Astrid avec aplomb. Et puis je fais ce que je veux.

Salvatore se raidit et fit un pas vers elle. Il y avait de la fureur dans ses yeux. Astrid ne put s'empêcher de reculer.

- Tu vis encore sous le même toit que moi, jeune fille. Donc je décide si tu montes ou si tu restes.

Daniel se frottait les mains, gêné. Astrid décida de céder pour le moment.

- Très bien, Salva. Je monte comme l'obéissante jeune femme de vingt-deux ans que je suis.

Elle resta à bouillir dans sa chambre en ruminant des plans pour redescendre plus farfelus les uns que les autres. Elle finit par opter pour la simplicité ; Daniel, Antonio et Salvatore discutaient dans le jardin, et il faisait très chaud. Elle décida de leur apporter à boire. Dans la cuisine, elle prit un plateau, trois verres et une bouteille d'eau pétillante au réfrigérateur.

Deuxième round. Cette fois, je ne me laisserais pas mettre KO par Salvatore.

Elle traversa la pelouse du jardin d'un pas assuré jusqu'à la table installée sous les trois oliviers. Salvatore lui jeta un regard « je-te-déconseille-de-faire-ça », mais elle continua.

- Je vous ai apporté à boire ! annonça-t-elle joyeusement. Il fait tellement chaud !

- C'est bien vrai ! s'exclama Antonio. C'est très gentil, ma grande. Serre-moi donc un verre.

Avec un sourire triomphal, Astrid déboucha la bouteille. Tu vois, Salva, mon parrain est moins ingrat que toi. Elle servit ensuite Daniel, en se penchant peut-être un peu trop vers lui, si bien que sa poitrine frôla la joue du canadien. Salvatore se leva si brusquement qu'il renversa sa chaise.

- Merci, Astrid. Pose ce plateau.

Elle obéit à contrecœur. Il la saisit par le bras et la traîna jusqu'à la Villa. Une fois dans le salon, à l'abri des regards d'Antonio et de Daniel, il l'attrapa par la racine des cheveux et la secoua :

- Tu me fais mal ! gémit Astrid, consciente de sa défaite imminente.

- Tu crois que je ne t'ai pas vu minauder devant Tremblay ? Tu crois que je suis aveugle, bon sang ?

Tremblay était le nom de famille de Daniel.

- Je n'ai rien fait de mal ! protesta-t-elle.

- Tu te comportes comme une...

Il ne finit pas sa phrase. Astrid ricana :

- Comme une salope, c'est ça ?

Elle ressentit la gifle avant même de l'avoir vue partir.

- Pas de mot comme ça devant moi !

Astrid s'arracha à sa poigne et monta les escaliers, furieuse. Du haut des marches, elle lui lança :

- Je te déteste, Salvatore Umberto !

Elle alla se jeter sur son lit, et éclata en sanglots. Elle voulait simplement voir Daniel, lui parler, le toucher. De toute façon, je ne l'intéresse pas. Salvatore me fait passer pour une gamine sans cervelle. Daniel doit juste me trouver mignonne, comme on trouve mignon une fillette qui fait des bêtises.

Elle redescendit dans le salon une heure plus tard, où elle alluma la télévision. Astrid comptait bien bouder toute la soirée. Elle entendit Salvatore et Antonio dire au-revoir à Daniel. Il s'en va ? Mais il devait rester deux jours ! Elle bondit du canapé et se glissa discrètement à l'extérieur. Elle réussit à échapper à Salvatore et à foncer jusqu'au portail où Daniel ouvrait la portière de sa voiture.

- Daniel ! Tu pars ? couina-t-elle, essoufflée.

- Oui...Salvatore ne souhaite pas que je reste plus longtemps.

Il eut un sourire résigné et haussa les épaules.

- Non. Ne pars pas. S'il te plait.

- Oh, Astrid.

Le cœur de la jeune femme se serra. Ah, ce moment, elle l'avait imaginé mille fois. Depuis le temps qu'elle était amoureuse de lui ! Brusquement, Astrid eut l'impression qu'elle tenait là sa dernière occasion d'avouer ses sentiments, car avec ce qui venait de se passer, Salvatore l'enfermerait dorénavant dans sa chambre dès que Daniel serait à la Villa. Elle ne pourrait plus jamais le voir, lui parler...Oui, il fallait que ce soit maintenant...ou jamais. Alors, elle ouvrit la bouche pour parler, et les mots s'échappèrent comme des prisonniers en pleine évasion :

- Je t'aime Daniel.

Il lui jeta un regard consterné. Imbécile ! Regarde ce que tu as fait !

- Non, tu ne peux pas. Je ne suis pas bien pour toi, je suis trop vieux, je...

Ses yeux s'assombrirent. Il sembla hésiter pendant une fraction de seconde. Puis, en deux longues enjambées, il vint à elle et l'embrassa.

Il y eut comme un feu d'artifice dans la tête d'Astrid. Un moment, elle ne vit que des couleurs vives et ses oreilles bourdonnèrent. Puis, ses mains s'accrochèrent désespérément à Daniel, elle lui rendit son baiser passionnément. Oui, mon dieu ! Enfin !

- Je vais prendre une chambre d'hôtel. Je vais rester...Rejoins moi cette nuit. Je t'enverrais le numéro de la chambre par message. Je t'en prie.

Il y avait tellement de promesses dans sa voix qu'Astrid se sentit fondre comme un esquimau. Le rejoindre, cela signifiait sortir en pleine nuit, probablement par la fenêtre, en secret, éviter Salvatore...

Mais elle aurait préféré être foudroyée à l'instant plutôt que de refuser.

- Oui. Je vais essayer.

- Promis ?

- Promis.

Il lui donna un léger baiser du bout des lèvres, la regarda, les yeux toujours sombres, puis monta dans sa voiture et disparut. J'ai rêvé, là ? Ou alors, je suis morte et le paradis existe ?

Elle resta un moment figée sur place, puis réalisa qu'elle était à découvert et qu'il suffisait que Salvatore jette un coup par la fenêtre pour qu'elle soit repérée. Elle se faufila jusqu'à la porte, la poussa doucement pour vérifier que personne ne se tenait dans le salon. Il y avait seulement Mama devant le plan de travail de la cuisine. Elle ne se retourna pas quand Astrid entra.

Mama Bayou était une excellente cuisinière : la pièce embaumait les épices savamment assorties.

- Où étais-tu ? aboya Salvatore, qui descendit les escaliers au pas de course. Tu n'étais pas dans ta chambre !

- Elle était avec moi, intervint doucement Mama.

Petite et mince, avec une peau d'ébène à peine ridée, des cheveux crépus neigeux et des lunettes rouges, elle agita une cuillère en bois vers Salvatore.

- Viens donc mettre la table, toi. Et toi aussi, Ernesto !

Le cubain tentait de se faufiler discrètement vers la salle de bain. Xiu apparut aussi, avec son

visage fripé comme une vieille pomme mais perpétuellement souriant. Puis Antonio.

Astrid mangea de bon appétit sans adresser un mot à Salvatore assis pourtant comme d'habitude à sa gauche. Elle était tellement excitée qu'il lui était plus facile de l'ignorer et de penser à autre chose. Ensuite, elle prit une longue douche et alla se coucher. Elle était décidée à passer par la fenêtre quand tout le monde dormirait. Et quelle tenue je vais mettre ? La robe rouge ? Mon dieu, comment vais-je passer par la fenêtre avec ? Elle se retourna plusieurs fois sans trouver de solution.

La porte de sa chambre s'ouvrit timidement et Salvatore entra. Il alla s'asseoir sur le lit et soupira.

- Bon, je n'aurais pas dû te frapper tout à l'heure. Excuse-moi, mon amour.

- Je ne suis pas ton amour, je ne suis pas non plus ton bébé, ronchonna Astrid. Je suis une adulte de vingt-deux ans.

- Je le sais.

- Tu m'infantilises trop. J'en ai assez.

- Ça aussi, je le sais. Mais Daniel Tremblay n'est pas bien pour toi.

- Et pourquoi ? Parce qu'il est hors-la-loi ? Dans ce cas, laisse-moi te dire que tu es très mal placé pour le lui reprocher.

- Tu mérites tellement, tellement mieux.

Astrid le fixa un moment. Malgré ses cinquante-sept ans, il était encore très beau, avec ses traits racés et ses épais cheveux argentés. Mon Salva. Si tu savais la nuit que je compte passer.

- Allez. Tu m'aimes, bébé ?

C'était sa façon de clore les disputes. Astrid sauta sur l'occasion.

- Oui, je t'aime.

Il se pencha pour l'embrasser sur le front et se leva.

- Bonne nuit.

- Bonne nuit, répondit Astrid.

L'heure qui suivit fut la plus longue de toute sa vie. Elle s'était décidée pour la robe rouge qu'elle enfila avec des ballerines blanche. Elle arrangea ses cheveux du mieux qu'elle put, vérifia qu'elle était au maximum de son sex-appeal, puis ouvrit la fenêtre. Ah ! C'est plus haut que je ne pensais.

Elle enjamba le rebord avec une jambe, puis avec l'autre. Un vent tiède s'engouffra sous sa robe. Elle inspira profondément. Si je meurs, ce sera en allant rejoindre mon amoureux. Quoi de plus romantique ? Elle serra les dents et sauta.

Elle atterrit rudement sur les fesses. Elle aurait probablement un bleu au coccyx. Astrid se redressa, d'abord à quatre pattes, puis à genoux et enfin sur ses deux jambes. Comment je vais faire pour remonter ? Evidemment, je n'y ai pas pensé. Et puis zut. Au moins, j'aurais vu Daniel.

Elle avait reçu par message l'adresse de l'hôtel où ce dernier avait pris une chambre. C'était à deux kilomètres : elle irait à vélo.

Astrid se sentait encore plus exaltée qu'un Croisé sur la route de la Terre Sainte. Dire qu'elle avait attendu des années pour avouer son amour, quel temps perdu ! Mais comment imaginer que ses sentiments étaient réciproques ? En d'autres termes, comment imaginer qu'un rêve puisse devenir réalité ? Car c'est bien connu, les rêves ne se réalisent que dans les dessins animés de Disney. Et il n'y a aucune histoire qui se déroule à Naples dans les dessins animés.

Elle traversa San Gennaro en regardant à peine devant elle : elle connaissait le chemin par cœur. La jeune femme, dans sa précipitation, faillit écraser un chat qui s'enfuit avec un feulement de protestation. Ensuite, elle freina si brusquement qu'elle manqua de passer par-dessus le guidon. Elle lissa ses cheveux, rajusta sa robe et pénétra dans le petit hall de l'hôtel. Daniel l'attendait.

- Bonsoir. Alors, tu as réussi à venir !

- J'aurais tué le premier à s'interposer.

- Même Salvatore ?

- Surtout lui.

Daniel éclata de rire. Qu'il est beau, mamma mia !

- Viens, dit-il en lui prenant la main.

Une fois dans la chambre, il l'embrassa presque violemment, en la serrant très fort contre lui, comme si elle allait lui échapper. Astrid, de son côté, enfouit ses mains dans ses cheveux si doux. Il commença à la relâcher, ses doigts s'agrippèrent au bord de sa robe. Trop vite, trop vite, trop vite !

- Daniel, attends ! On va faire l'amour.

- Seulement si tu en as envie ! murmura-t-il. Je ne veux pas que tu penses que je suis...enfin, tu vois.

Astrid sourit, un peu gênée. On ne peut pas se jeter l'un sur l'autre comme des animaux !

- Je ne sais pas si tu m'aimes. Je ne sais même pas si tu me connais. Oh mon dieu, on est complétement fous.

Les yeux de Daniel se remplirent de tendresse.

- Je ne te connais pas, c'est vrai, Astrid. Mais je sais plus de choses sur toi que tu ne le crois.

- Ah, vraiment ?

- J'ai passé quelques jours et quelques nuits à la Villa.

- Oui, je me souviens.

Inutile de préciser qu'Astrid n'avait pas beaucoup dormi ces nuits-là.

- Dès que je pouvais, je t'observais. Je sais que ta couleur préférée est le rouge, que tu ne mets jamais de vernis à ongle et que tu es protégée par Erzulie Freda.

Erzulie Freda était l'esprit de l'amour, une très belle métisse un peu provocante, dans la religion vaudou. Mama Bayou assurait qu'elle protégeait Astrid depuis le jour de sa naissance.

- C'est Mama qui t'a dit ça, pouffa la jeune femme.

- Je sais que tu te tires l'oreille droite quand tu ne trouves pas la solution à un problème. Je sais que tu parles trois langues couramment. Je sais que tu trempes toujours le bout de ton petit doigt dans le café de Salvatore avant de lui servir, pour vérifier s'il n'est pas trop chaud. Je sais aussi que tu lui nettoies ses lunettes tous les matins pour qu'il puisse lire son journal.

- Hum...arrête de parler de lui. Il me tape sur les nerfs, si tu savais. Mon oreille droite, tu dis ?

- Oui. Comme ça.

Il prit délicatement l'oreille d'Astrid et tira doucement dessus. Elle se sentit rougir.

- Je sais que je t'aime depuis le jour où je t'ai vu, et où tu portais une salopette rouge sur un tee-shirt blanc. Il faisait un peu frais. Tu avais dix-neuf ans et trois mois. Tu as plaisanté avec Antonio à propos d'un présentateur de télévision. Tu buvais dans le verre de chianti de Salvatore dès qu'il avait le dos tourné, et ça faisait beaucoup rire Ernesto.

La jeune femme elle-même ne se souvenait pas d'autant de détails. Elle sentit son cœur se noyer dans un océan de soulagement, d'admiration et d'amour.

- Moi aussi, je t'aime depuis ce jour-là. Tu avais un pull, pardonne-moi, épouvantable.

- Le vert bouteille ?

- Oui. Pas terrible.

- Je peux comprendre. Je ne pensais pas avoir un rendez-vous avec Antonio Cavaleri ce jour-là.

Ils rirent tous les deux, puis s'embrassèrent à nouveau. Finalement, Astrid retira sa robe rouge qu'elle laissa choir sur la couverture du lit. Elle avait complétement oublié de remettre un soutien-gorge. Daniel se débarrassa de sa chemise à la hâte.

- Oh, Astrid. Ils sont superbes.

- Mes seins ? lâcha-t-elle. Oh, mon dieu.

Elle les cacha précipitamment. La prochaine fois, pars sans culotte, ce sera encore plus classe !

Daniel eut un sourire délicieux et se pencha doucement pour lui embrasser la gorge. Ensuite, tout se passa comme dans un rêve. Elle l'entendit murmurer à son oreille :

- C'est ta première fois ?

- Oui. Je t'attendais.

- Hum. Dis-moi, surtout, si je te fais mal. Dis-moi.

- Tu ne me feras pas mal, Dan.

Et quand bien même !

Il la prit très délicatement, comme s'il manipulait un objet précieux ou fragile. Si le plaisir de la jeune femme fut encore un peu trop subtil, celui de Daniel fut beaucoup plus intense, ce qui la rendit très heureuse. Elle se sentait épanouie, comblée, et surtout, libre, enfin.

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