Chapitre 46
_ J'ai manqué à ma parole de ne jamais lever la main sur vous. Sachez que si vous voulez partir, je comprendrai. Mais je sais que vous avez décider de rester à mes cotés, ce que je refuse. Cette menace ne vous concerne pas et c'est la mort qui se trouve au bout du chemin.
La jeune femme ouvre grand ses yeux. Il est hors de question qu'elle parte.
_ Non, Oda, je ne démissionnerai pas...
_ Si vous ne démissionnez pas, je serais alors obligé de vous renvoyer. Je n'ai rien à vous reprocher, sachez-le.
_ Non Oda, c'est hors de question ! Après tout ce que vous avez fait pour moi, je ne vous laisserai pas tomber !
_ Théodora je vous prie..., dit la grand-mère visiblement lassée.
_ Oda, je vous dit...
_ C'est pour votre sécurité !, crie Oda en se levant de son fauteuil alors que ses mains s'emparent des épaules de la jeune femme, je ne supporterais pas d'avoir votre mort sur la conscience !
_ C'est non, répond fermement la jeune femme.
_ Théodora ne soyez pas sotte, pensez à vos filles ! Que deviendrait-elles si vous n'êtes plus, sa voix est devenue presque stridente et noyée dans les larmes qui lui sont en train de lui venir.
_ C'est justement pour elles que je suis là ! Jamais personne ne nous avait donné autant d'intention depuis la mort de Ronald ! De plus, j'adore travailler ici, c'est la première fois que je me rends à mon travail avec le sourire, sans la boule dans le ventre. Alors, s'il vous plaît, ne me renvoyez et... laissez-moi vous aider.
A son tour, Théodora sent ses larmes arriver. Celles d'Oda coulent pour s'écraser sous son menton. Le silence s'installe entre elles, pourtant rempli d'hésitation et de tristesse. La grand-mère soupire longuement en baissant la tête avant de regarder à nouveau la jeune femme dans les yeux.
_ Très bien, vous pouvez rester mais promettez-moi de ne pas vous impliquer dans cette affaire, cela concerne que cette sorcière et moi.
La jeune mère est gênée qu'Oda ne l'autorise pas à l'aider mais au moins, elle conserve son travail et donc, elle va pouvoir continuer à nourrir ses filles. Et puis, que ferait-elle face à une sorcière assoiffée de vengeance ? Elle, une simple domestique ?
_ Très bien, je vous le promets.
Leurs larmes coulent plus et elles retrouvent un semblant de sourire, même si la tension est toujours présente. Pas de colère, mais d'appréhension. Après tout, elles posent toutes les deux un pied dans une situation qu'elles n'ont jamais connu, surtout Théodora. Il y a une sorcière dangereuse dans les parages et elle veut néanmoins rester ici ? Il faut être un peu décollée de la réalité pour souhaiter cela. Mais pour la jeune femme, cela fait un petit moment qu'elle remet en question ce qui est fou ou pas.
Oda sourit à nouveau et se penche en lui prenant les mains. Avec la lumière du feu, elle a l'air de ne pas avoir plus de quarante ans, sa chevelure argentée se teinte de lueurs rousses et ses rides s'effacent légèrement.
_ Merci d'accepter de vouloir rester avec moi, malgré que je vous ai fait du mal...
_ Je vous l'ait dit, je ne vous en veux absolument pas..., l'interromps Théodora.
_ Mais en réfléchissant je crois que je me suis surestimée face à cette menace. Je serais capable de me défendre mais j'ignore si je serais capable d'en faire autant pour ma Danielle.
La jeune mère sent l'émotion quand elle entends Oda parler de sa petite fille. Le lien entre une grand-mère et sa petite-fille n'est pas si éloigné de celui qui lie une mère et sa fille. Et s'inquiéter à s'en ronger les ongles pour ses enfants, c'est un sentiment qu'elle connaît bien. Elle resserre l'étreinte de leurs mains enlacées et la regarde dans les yeux, comme elle lui a fait quelques instants plus tôt.
_ Je vous comprends et je suis là.
Oda sourit en hochant la tête et le tension se dissipe enfin. Leurs mains se séparent mais Théodora sent que le lien qui vient de se tisser entre elles est toujours là et elle espère qu'il en sera toujours ainsi.
Soudain, des petits pas se font entendre derrière elles. La jeune femme et la grand-mère se retournent sans pour autant quitter leurs fauteuils pour apercevoir une petite boule rousse et une autre de couleur noire en train de les observer. Irish vient monter sur les genoux d'Oda comme il a l'habitude de faire tandis qu'Ash essaye de monter sur ceux de Théodora qui devant tant de tendresse, prends le bébé lapin dans ses mains pour le poser sur ses genoux. La petite lapine s'empresse de se rouler en boule, sans oublier de donner des coups de tête pour lui demander des caresses. La jeune mère entends et voit Oda glousser quand Irish tente de s'agripper à sa poitrine, heureusement protégée par le corset de sa robe, pour probablement lui demander des caresses. Ou quelque chose à boire. Et quand elle voit Oda chercher quelque chose dans le placard juste à coté de son fauteuil, elle opte pour la deuxième option. Dans un tiroir supérieur, Oda s'empare aussi de sa fameuse pipe qu'elle ne tarde à porter à sa bouche après que la flamme soit apparue de nulle part, ce qui fait sourire la jeune femme.
_ Qu'allez-vous faire à présent ?
_ Je dois en référer au Coven de Londres sans plus tarder. Je ne peux pas m'y rendre en personne, je leur enverrai une lettre. Avec un peu de chance, ils pourront commencer à rechercher la coupable mais j'en doute.
_ Avez-vous une idée de qui ça pourrait être ?
La grand-mère reprends alors soudain un air sombre et reporte son regard vers le feu de cheminée. La pipe toujours dans sa main droite, l'autre a reposé le biberon vide et Irish s'est endormi.
_ Malheureusement oui, mais cela n'aurai aucun sens.
_ Pourquoi cela ?
Oda la regarde à nouveau, les yeux brillants d'anxiété.
_ Parce qu'elle est morte.
Des frissons s'emparent du corps de Théodora, qui se redresse du dossier de son fauteuil en déglutissant mais elle parvient à articuler quelques mots. Elle regarde aussi les bûches se consumer en crépitant quelques braises.
_ Qui est-ce ?
Sa patronne continue de fumer sa pipe en caressant le petit écureuil qui commence à ronfler.
_ Bianca Horstenbrudge. Une Traîtresse qui a commis un meurtre il y a plusieurs années. Elle fut bannie de notre Coven malgré qu'elle soit issue d'une des plus nobles familles de sorcières de Londres. Mais une fois partie, on n'entendit plus jamais parlé d'elle. Certains disaient qu'elle a émigré aux États-Unis et qu'elle s'est marié à un riche propriétaire terrien mais nous avons découverts ce qui lui ai arrivé. On l'a retrouvé deux semaines plus tard, la nuque brisée et couverte de bleus. Le Conseil des Sorcières en ont conclu à un accident malheureux mais ne vous méprenez pas, personne ne la regrette, pas même sa propre famille. Cette sorcière méritait bien pire.
La haine avec laquelle elle parlait de cette « Bianca » stupéfie la jeune femme. C'est la première fois qu'elle voit sa patronne au bord de la colère.
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