Chapitre 26
- Qu'est-ce que tu en penses ? S'enquit Derek après avoir exposé son hypothèse.
Jordan regarda consciencieusement les photos que lui avait tendues le loup. Il les compara avec celles du dossier en cours grâce à l'ordinateur qu'il avait apporté. Ce n'était peut-être pas très professionnel mais le policier préférait partager ce genre de détail avec le lycan qu'avec son co-équipier du moment. Il accordait toute sa confiance au premier et une profonde aversion pour le second. Ses yeux se plissèrent alors qu'il faisait attention à chaque détail. Il sentit son corps se tendre progressivement parce que, merde, Derek avait vu juste.
- Je pense que tu as raison, répondit Parrish d'un air peiné. Quand on fait bien attention, c'est vrai qu'il y a une ressemblance au niveau des yeux et du nez. Des grains de beauté, aussi. Les trois victimes partagent ces caractéristiques. C'est discret, on ne le voit pas tout de suite mais... Merde.
Chacun des trois défunts avait ce nez retroussé, ces yeux noisette, ces grains de beauté. Un visage fin. De plus, les victimes étaient toutes trois dans la même tranche d'âge. C'étaient des jeunes. Des gens qui avaient toute la vie devant eux jusqu'à ce qu'on la leur arrache. Des personnes assez différentes pour dissimuler cette ressemblance légère mais présente tout de même. Celle que Derek pouvait le mieux visualiser, c'était Meadow. Parce qu'il l'avait vue et son regard l'avait marquée. Elle était de ceux qui avaient un peu trop de vécu pour leur âge... Comme Stiles.
Jordan reposa le tout sur la table basse. C'était Derek qui l'avait invité à venir parce qu'il ne se voyait pas laisser la petite Amelia seule dans ce grand loft. De plus, Peter était absent. Apparemment, il avait quelque chose à faire avec Isaac. Derek n'avait eu aucune envie d'en savoir plus. Le lycan avait donc envoyé la petite en haut le temps qu'il discute avec le policier. Hors de question qu'elle assiste à ça, surtout que sa mère était dans le lot des photos. Stiles, de son côté, était chez Lydia, qui avait voulu passer un peu de temps avec lui après les cours qui s'étaient terminés à midi, en tout bien tout honneur bien sûr. Le fait de le savoir loin de lui tordait les entrailles de Derek, mais il se contenait comme il le pouvait. En cas de souci, la banshee pourrait aider Stiles. Ce qui comptait pour lui, c'était simplement qu'il ne se retrouve pas seul et il l'avait bien spécifié à Lydia par message quand il avait appris que Stiles avait l'intention de rester un peu chez elle. Il avait même obtenu d'elle qu'elle le ramène. Stiles avait protesté, arguant qu'il pouvait se débrouiller seul pour rentrer, mais son loup avait utilisé une technique imparable : les sentiments.
« Si tu rentres seul, pas de bisous. » Voilà ce qu'il lui avait écrit. Le texto avait fait son effet puisque Stiles lui avait répondu qu'il n'était bien évidemment pas sérieux et qu'il laisserait avec grand plaisir Lydia le ramener. Derek aurait pu rire s'il n'avait pas été aussi préoccupé.
- Tu n'es pas le seul à avoir découvert quelque chose dans cette histoire, reprit Jordan d'un air sombre.
Le lycanthrope releva les yeux vers lui et fut saisi par son regard on ne peut plus sérieux. D'un seul coup, Jordan semblait épuisé mentalement, accablé par un poids trop lourd à porter. Cela se ressentait également dans son odeur : la peine régnait.
- Chaque victime a été violée juste avant sa mort. Il y avait des traces d'agressions sexuelles, mais pas de sperme. Le meurtrier a dû utiliser un préservatif pour éviter d'en laisser.
Derek tomba des nues et revit instantanément le visage fermé de la jeune femme. Il la revoyait confier sa fille à Stiles avec cette espèce de mystère dans le regard, ce truc qu'il ne savait pas comment décrire. L'horreur le gagna et il pensa automatiquement à Stiles, qui connaissait cette fille.
- Pourquoi on a pas eu cette info avant ? Demanda-t-il, la voix rendue un peu rauque par l'émotion.
- Je les ai moi-même eues tardivement... En cherchant de manière pas très légale, avoua le policier. Cette info était bien cachée.
Faire cette confidence à Derek ne le dérangeait pas du tout et lui faisait même plutôt du bien : il savait que le loup ne le dénoncerait pas. Il ressentait notamment ce besoin d'expliquer ce qui le dérangeait, cette impression désagréable qu'il ressentait de plus en plus.
- J'ai l'impression que quelqu'un agit de l'intérieur pour bousiller cette affaire, lui confia-t-il. Et je soupçonne mon « collègue » d'y être pour beaucoup.
Derek hocha la tête, pensif. Stiles partageait quelques caractéristiques physiques avec les trois victimes ainsi que la petite Amelia. Ce qui lui faisait peur, c'est ce qu'il avait entendu plus tôt. Viol. Les échos de sa plus grosse discussion avec Stiles ressurgissaient. Si auparavant, ce mot le faisait simplement frissonner d'horreur et maudire l'humain, aujourd'hui, il le prenait aux tripes et lui faisait voir la vie autrement. Il n'osait même pas imaginer ce que ces victimes avaient ressenti et il se demandait comment avait fait Stiles pendant toutes ces années pour faire semblant d'aller bien. D'un coup, il espéra de tout cœur s'être trompé et que la possible ressemblance entre les victimes et son humain n'était qu'un hasard, une coïncidence comme une autre.
- Ton collègue, c'est toujours ce type ? Demanda-t-il en reprenant peu à peu contenance.
- Malheureusement, oui, soupira Jordan. Quand je sais ce qu'il a probablement fait, je... Les heures avec lui me paraissent plus longues et j'ai l'impression qu'on m'a envoyé le diable. Travailler avec un... Type comme ça, ça me dégoûte.
Se confier à Derek, c'était facile. L'affaire de Stiles les avait rapprochés et à force de s'échanger des informations à ce sujet-là, les deux êtres surnaturels avaient fini par se rapprocher petit à petit. Jordan appréciait cette amitié qui commençait à naître entre eux. Il en était de même pour le lycanthrope : il ne le regardait plus comme une connaissance, un simple policier. Pour lui, c'était plus que ça. Un chien des enfers, un semblable, un ami. Voilà pourquoi il partageait la moindre de ses hypothèses avec lui. En temps normal, il aurait également informé Scott mais en ce moment, mieux valait éviter. Il fallait l'avouer, il lui en voulait encore un peu pour son écart de l'autre jour. Stiles n'avait pas besoin de ça et il savait que son meilleur ami lu manquait malgré la peur qu'il avait provoquée chez lui. On ne pouvait pas effacer des années d'amitié de cette manière. Elle était fragilisée pour le moment mais pas détruite et si Stiles comptait renouer avec Scott, il ne l'en empêcherait pas. Il ferait simplement attention à ce qu'il ne répète pas son erreur.
- On trouvera un moyen de le coincer. Tu crois que c'est vraiment lui ? Demanda Derek.
- J'en suis certain, répondit tout de suite Jordan.
Pour lui, la culpabilité d'Emile Chabrier ne faisait aucun doute. C'était bien lui qui s'en était pris à Stiles, il y a sept ans mais également ces derniers jours. Malheureusement, il savait bien cacher son jeu puisque le shérif ne se méfiait pas de lui le moins du monde.
- Mais je n'ai rien pour le coincer, pesta le policier en se maudissant intérieurement.
- On trouvera, le rassura Derek avant de continuer sur le ton de la menace. On trouvera et il paiera.
xxx
A peine arrivé, Stiles sauta au cou de son loup qui vidait le lave-vaisselle. Loup qui posa l'assiette qu'il tenait une seconde seulement avant que ses bras n'entourent le corps fin du plus jeune. Le petit nez retroussé de ce dernier partit se fourrer dans son cou et c'est alors que Derek entendit :
- Je t'ai écouté, Lydia m'a ramené alors... On n'arrête pas les bisous, hein ?
Cette légèreté avait manqué à Derek qui s'autorisa un petit rire discret. Il serra son humain contre lui avec joie et pour la première fois depuis longtemps, l'odeur de l'adolescent était emplie d'émotions positive. Sa fragrance était douce et délicate, légère comme si elle n'était plus alourdie par tout ce qui le minait auparavant. Derek savait pertinemment que rien de tout ça n'avait disparu. C'était toujours là, enfoui quelque part. La différence, c'était que Stiles était soulagé. Parce que le loup était au courant de son histoire et pour lui, son soutien voulait dire beaucoup. Le bêta l'encourageait à parler, ne niait pas son passé et lui apprenait même à vivre avec de manière saine. Et tout ça aidait Stiles, bien plus que Derek ne pouvait l'imaginer. Même si en ce moment, tout n'était pas rose, ça allait. Parfois, lorsqu'il se retrouvait seul avec lui, à moitié nus dans le lit de son hôte, Stiles oubliait tout. C'était comme s'il revivait, mettant au placard ses traumatismes. Parce que Derek était plus patient que n'importe qui, contrairement à ce qu'il avait pu penser de prime abord.
Et son soutien, plus que précieux, valait de l'or aux yeux de Stiles.
Alors quand il entendit le bêta rire à sa question rhétorique, l'adolescent sut qu'à ses côtés, ça irait. Lorsque son loup lui releva le menton d'une main et posa ses lèvres sur les siennes, ce fut carrément une évidence. Ses émotions et sentiments explosèrent en un intense feu d'artifice dans sa tête et il prit part au baiser avec une ardeur nouvelle. Comme si tout était plus clair pour lui. Sans cesser de l'embrasser, il passa ses bras autour du cou de Derek et se pressa contre lui, heureux comme tout. Pour une fois, ce fut même lui qui mena la danse et se laissa aller à tenter quelque chose d'inédit.
Le rythme cardiaque de Derek s'emballa soudainement en sentant la langue de Stiles demander l'accès à sa bouche. Accès qu'il lui accorda tout de suite et avec plaisir. Les sensations déferlèrent de son côté aussi et il sentit très nettement le bonheur de l'hyperactif. Alors il s'enflamma. Sa langue s'amusa plus que de raison avec son homologue, si bien qu'il reprit les rênes du baiser par instinct. Son loup était aux anges, peut-être un peu trop. A vrai dire, même si ce qu'il avait déjà lui plaisait beaucoup, il avait envie de plus. Beaucoup plus.
Et alors que les instincts primaires de Derek avaient été quasiment inexistants jusque-là depuis le début de cette histoire, le loup sentit un grand bouleversement en lui. Plus qu'une simple appréciation du baiser, c'était de l'excitation qu'il ressentait. Elle déferlait en lui tel un torrent longuement réprimé. En soi, c'était le cas. Mais Derek ne pouvait pas céder, laisser cette excitation prendre le contrôle. Son loup intérieur le voulait. A vrai dire, il désirait que Derek lâche totalement prise et fasse Stiles sien, tout de suite. L'humain, lui, savait que c'était mauvais. Putain, oui, il prenait conscience que ce baiser piquant avait libéré certaines des entraves qu'il s'était lui-même imposées. Il avait envie de Stiles, ni plus ni moins. S'il s'écoutait, il déshabillerait l'adolescent ici, dans la cuisine, sans craindre une seule seconde de voir Peter ou Amelia débarquer. Une fois qu'il serait nu, ce serait à son tour de s'alléger de ses vêtements et enfin, il poserait ses mains sur le corps du jeune homme et le prendrait sans autre forme de procès. Mais Derek ne voulait pas, il ne pouvait pas faire ça. Son loup intérieur grogna, mécontent et frappa aux portes de son esprit. Derek devait lui laisser la place et respecter ses envies, néanmoins... Le bêta était plus fort que ça et ses sentiments pour l'hyperactif, assez présents pour qu'il fasse son choix.
Avec une lenteur feinte, Derek mit fin au baiser sans relâcher son étreinte sur Stiles. L'hyperactif le regardait, les yeux miel grands ouverts. Dans son odeur, rien à part de la sérénité et du bonheur. Alors, pour dissimuler son trouble, le loup lui sourit doucement et déposa un léger baiser sur son front.
- Tu m'as manqué Sourwolf, avoua Stiles en détournant le regard.
Sa timidité qui d'ordinaire le faisait fondre tendit instantanément Derek, qui ne changea pourtant rien à son attitude. Bien qu'il ait réussi à se maîtriser et à ne pas sauter sur son humain pour le dévorer tout cru, l'excitation était toujours là, bien présente.
- Toi aussi, répondit-il sincèrement toutefois, la voix légèrement rauque.
Parce que c'était vrai, Stiles lui avait manqué. Un peu trop, semble-t-il. Bordel, pourquoi ses instincts se réveillaient-ils maintenant ? Pourquoi un simple baiser un peu plus poussé que les autres lui faisait-il cet effet ? L'étincelle dorée dans les yeux de l'hyperactif adoucissait son regard. Celui de Derek s'assombrit. Stiles ne retrouverait peut-être jamais son innocence perdue. Néanmoins, le loup l'épargnerait le plus possible. Il ferait toujours tout ce qui était en son pouvoir pour lui permettre d'oublier ses traumatismes et d'avancer. Alors il musela son loup de force, réprima violemment les pulsions qui le torturaient. Pas de sexe. Pas de caresses. Pas de pensées lubriques. Stiles était beau et diablement mignon, certes mais Derek ne pouvait pas voir plus loin, il n'en avait pas le droit. Pas maintenant.
- Tonton Stiles !
Derek se retint au dernier moment de soupirer de soulagement. Stiles déposa un petit bisou innocent sur sa joue et se détourna de lui pour rejoindre la petite Amelia. Le loup en profita pour s'éclipser rapidement à l'étage et s'enferma dans la salle de bain. Il avait un début d'érection. Putain. Les remords l'envahirent. Hors de question de se toucher pour la faire disparaître. C'était... C'était mal.
Derek ouvrit le robinet et s'aspergea le visage avec l'eau glacée. Comment un tel baiser avec Stiles avait-il pu lui faire perdre les pédales à ce point ? Était-ce parce qu'il avait pris une initiative en approfondissant le baiser ? En faisant jouer sa langue d'une manière exquise avec la sienne. En faisant émerger des envies et sensations qu'il n'avait pas eues depuis longtemps. Derek qui remarquait quelque temps plus tôt que ses pulsions étaient en hibernation en la présence de Stiles se retrouvait complètement fourvoyé. C'était même pire que ça : son propre instinct animal le prenait au dépourvu. Comment expliquer ça ? Comment avait-il pu se contrôler et ne rien ressentir durant tout ce temps ? Il dormait sans cesse avec Stiles, le jeune homme dans ses bras. Il l'avait soigné et pour ce faire, Stiles avait dû rester à moitié nu. Il l'avait d'ailleurs déjà vu en tenue d'Adam lorsqu'il l'avait douché cette fois-là où l'hyperactif était arrivé chez lui en état de choc. Jamais Stiles n'avait éveillé ses instincts de cette manière. En fait, son envie première, c'était de protéger son humain. La seconde était de l'embrasser et de le câliner à n'en plus pouvoir. Apparemment, il semblait avoir finalement découvert la troisième.
Sauf que ça, ce n'était pas acceptable et Derek eut instantanément honte de son propre loup. Il ne pouvait pas penser à Stiles de cette manière, ce n'était pas possible. Lui revint alors en mémoire cette discussion durant laquelle Stiles lui avait demandé ce qu'ils étaient. Il tomba des nues. Lui qui avait tenu à rassurer le plus jeune en lui disant qu'ils avaient le temps d'y réfléchir se voyait se reprendre les inquiétudes de Stiles dans l'autre sens. Une seconde, il s'imagina faire Stiles sien et un violent frisson traversa l'intégralité de son corps. Sa seule réaction fut de se mouiller à nouveau le visage avec l'eau glacée. Non, il ne pouvait pas y penser. Parce qu'à sa place, il voyait cet homme poser ses mains sur l'hyperactif et ça le dégoûtait. Il chassa cette image de sa tête. Non, ne pas penser à ça. Stiles avait été brisé par la faute de cet individu, il ne fallait surtout pas que Derek fasse la même chose. Stiles commençait à peine à remonter la pente. Il devait se contrôler et penser à lui de manière plus... Plus pure. Peut-être que songer à son malheur ainsi qu'à ses inquiétudes concernant les meurtres devait l'aider à garder son loup muselé.
La vie semblait l'avoir entendu d'une bien étrange manière puisque son téléphone vibra dans sa poche. Légèrement fébrile, il s'en saisit et ouvrit l'application de ses messages.
Toute envie, toute excitation, toute pensée mal placée disparut d'un seul coup.
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